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N° 112
CG
————–
Copies exécutoires
délivrées à :
– Me Lamourette,
– Me Eftimie-Spitz,
– Me Dumas,
le 23.03.2023.
Copie authentique
délivrée à :
– Me Des Arcis,
le 23.03.2023.
REPUBLIQUE FRANCAISE
COUR D’APPEL DE PAPEETE
Chambre Civile
Audience du 23 mars 2023
RG 20/00375 ;
Décision déférée à la Cour : jugement n° 20/373, rg n° 17/00514 du Tribunal Civil de Première Instance de Papeete du 14 août 2020 ;
Sur appel formé par requête déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 6 décembre 32020 ;
Appelante :
Mme [K] [S] épouse [H], née le 21 décembre 1959 à [Localité 7], de nationalité française, demeurant à [Adresse 4] ;
Représentée par Me Jean-dominique DES ARCIS, avocat au barreau de Papeete ;
Intimés :
Mme [Y] [X], [Adresse 3], nantie de l’aide juriditionnelle suivant décision n° Baj 2021/000195 du 22 janvier 2021 ;
Représentée par Me Mathieu LAMOURETTE, avocat au barreau de Papeete ;
Mme [C] [G], née le 23 novembre 1954 à Papeete, de nationalité française, demeurant à [Adresse 8] ;
Représentée par Me Marie EFTIMIE-SPITZ, avocat au barreau de Papeete ;
Mme [L] [D], [Adresse 2] ;
Représentée par Me Brice DUMAS, avocat au barreau de Papeete ;
Ordonnance de clôture du 21 novembre 2022 ;
Composition de la Cour :
La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 23 février 2023, devant Mme GUENGARD, président de chambre, Mme SZKLARZ, conseiller, Mme TEHEIURA, magistrat honoraire de l’ordre judiciaire aux fins d’exercer à la cour d’appel de Papeete en qualité d’assesseur dans une formation collégiale, qui ont délibéré conformément à la loi ;
Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;
Arrêt contradictoire ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Signé par Mme GUENGARD, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A R R E T,
EXPOSE DU LITIGE :
Selon acte sous seing privé en date du 1er décembre 2008, Mme [C] [G] a donné à bail commercial à Mme [Y][X] une maison sise à [Localité 5], [Adresse 1], pour une durée de deux ans reconductible sauf dénonciation à compter du 1er décembre 2008, aux fins d’exploitation d’une activité de garderie, à l’exclusion de toute autre utilisation, moyennant un loyer mensuel de 100.000 FCFP.
Le contrat de bail en date du 1er décembre 2008 stipule en son article 21 l’incessibilité dudit bail.
Mme PatriciaTetuanui a réglé un dépôt de garantie de 100 000 FCFP correspondant à un mois de loyer le 25 novembre 2008.
Mme PatriciaTetuanui ayant manifesté le souhait auprès de la bailleresse de céder son activité professionnelle de crèche-garderie, les deux parties ont signé le 20 août 2013 un avenant modifiant l’article 21 aux fins d’autoriser la cession ‘à titre gratuit, notamment dans le cadre d’une cession de fonds de commerce ou d’une mise en location gérance’, étant expressément mentionné que “le reste du bail est inchangé”.
Cet avenant comportait au verso la reproduction des clauses 16 à 23 d’un bail signé par Mme [C] [G], précédée de la date du 20 août 2013, dont la clause 23 intitulée ‘loyer’ indique que : ‘le présent bail est consenti et accepté moyennant un loyer mensuel est de 100 000 FCFP’.
Par avenant sous seing privé en date du 27 août 2013 signé par Mme [C] [G] et Mme [Y][X] il est indiqué que le loyer dû est de 300 000 FCP et non de 100 000 FCFP comme annexé le 20 août 2013.
Par acte sous seing privé en date du 27 septembre 2013, Mme [Y][X] a cédé à l’EURL Ilot Calin exerçant sous l’enseigne «Te Motu Here” représentée par Mme [K] [S] épouse [H], les éléments corporels et incorporels de son ‘fonds civil’ de crèche-garderie, dont le droit au bail du 1er décembre 2013 portant ‘sur des locaux professionnels’ sis à [Adresse 6], avec cette précision qu’il est indiqué en page 3 dudit acte que ‘Mme [C] [G], bailleur, a donné son consentement à la présente cession de droit au bail le 20 août 2013 par avenant au bail commercial précédemment établi entre les soussignés le 1er décembre 2008″.
Etait annexé à cet acte de cession un bail commercial en date du 1er décembre 2008, enregistré en août 2013 (le 20 ou le 21) sur lequel figure un loyer de 100 000 FCPF.
Saisi par requête de Mme [C] [G], le tribunal de première instance de Papeete a, par jugement en date du 30 juin 2014 :
– dit inopposable à Mme [C] [G] la cession du droit au bail intervenue le 27 septembre 2013 entre Mme [Y][X] et l’EURL Ilot Calin portant sur des locaux professionnels appartenant à Mme [C] [G] sis [Adresse 6], à [Localité 9],
– en conséquence dit que l’EURL Ilot Calin est occupante sans droit ni titre des locaux professionnels appartenant à Mme [C] [G] sis [Adresse 6], à [Localité 9],
– Ordonné l’expulsion de l’EURL Ilot Calin et celle de tout occupant de son chef des locaux professionnels appartenant à Mme [C] [G] sis [Adresse 10], à [Localité 9], sous astreinte provisoire de 10.000 FCPF par jour retard à compter de l’expiration d’un delai de un mois suivant la signification du présent jugement et au besoin avec l’assistance de la force publique,
– condamné l’EURL Ilot Calin à payer à Mme [C] [G], en deniers ou quittances, une indemnité mensuelle d’occupation de 300.000 FCPF à compter du 1er octobre 2013 jusqu’à son départ effectif des lieux,
– ordonné l’exécution provisoire ;
– débouté Mme [C] [G] de sa demande en paiement de loyers formés à l’encontre de Mme [K] [S] épouse [H] et/ou de l’EURL Ilot Calin,
– déclaré irrecevables les demandes indemnitaires formées par Mme [K] [S] épouse [H] en son nom personnel,
– débouté l’EURL Ilot Calin de ses demandes indemnitaires,
– condamné in solidum l’EURL Ilot Calin et Mme [Y][X] à payer à Mme [C] [G] la somme globale le 150 000 FCPF sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
– condamné in solidum l’EURL Ilot Calin et Mme [Y][X] aux dépens qui pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 409 du code de procédure civile de la Polynésie française.
Par actes d’huissier en date des 13 et 14 octobre 2017 Mme [K] [S] épouse [H] a assigné Mme [Y][X], Mme [C] [G] et Mme [L] [D] devant le tribunal civil de première instance de Papeete sollicitant, en l’état de ses dernières conclusions, de les voir condamnées à lui régler la somme de 14 284 790 FCPF en réparation forfaitaire et globale de l’ensemble de ses préjudices, toutes causes confondues, que leurs fautes lui ont occasionnées.
Par jugement en date du 14 août 2020 le tribunal civil de première instance de Papeete a :
– Rejeté la fin de non recevoir soulevée par Mme [C] [G],
– Débouté Mme [K] [S] épouse [H] de sa demande de dommages et intérêts,
– Débouté Mme [L] [D] de sa demande de domamges et intérêts pour procédure abusive,
– Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
– Condamné Mme [K] [S] épouse [H] aux dépens de l’instance dont distraction au profit de Me Eftimie- Spitz.
Par requête d’appel en date du 6 décembre 2020 Mme [K] [S] épouse [H] a relevé appel de cette décision en sollicitant de voir :
Recevoir Mme [K] [S] épouse [H] en son appel du jugement sus-entrepris et daté et l’y déclarer bien fondée,
Mettant à néant les dispositions lui faisant grief et statuant à nouveau,
Constater que Mme [K] [S] épouse [H] ne réclame plus aux intimées le remboursement du prix d’achat de la clientèle de Mme [Y] [X], mais maintient ses demandes pour ses autres chefs de préjudice,
Dire et juger que Mme [Y][X], Mme [L] [D] et Mme [C] [G] ont commis à l’encontre de Mme [K] [S] épouse [H] diverses fautes qui lui ont occasionné un préjudice direct et personnel qu’elles doivent, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, être condamnées à réparer intégralement,
En conséquence condamner conjointement et solidairement Mme [Y][X], Mme [L] [D] et Mme [C] [G] à payer à Mme [K] [S] épouse [H] :
– 5 164 872 F CFP (430 406 F CFP X 12), à titre de la perte de sa rémunération du fait de sa mise en disponibilité à l’Université de Polynésie française,
– 2 000 000 F CFP en réparation forfaitaire du préjudice moral que cette tromperie lui a occasionné,
– 1 000 000 F CFP en réparation forfaitaire de son préjudice financier résultant du fait d’avoir dû prendre un avocat pour se défendre dans les instances qui ont abouti au jugement du 30 juin 2014 et au jugement de liquidation judiciaire du 8 septembre 2014,
Soit 8 164 872 F CFP au total, en réparation des préjudices que leurs fautes lui ont occasionnées,
– Condamner conjointement et solidairement Mme [Y][X], Mme [L] [D] et Mme [C] [G] à payer à Mme [K] [S] épouse [H] la somme de 500 000 F CFP par application de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
– Condamner enfin les mêmes conjointement et solidairement aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me des Arcis, avocat aux offres de droits.
Par ses dernières conclusions en date du 28 juillet 2021 Mme [C] [G] demande à la cour de :
Confirmer le jugement du 14 août 2020 en toutes ses dispositions, sauf à déclarer Mme [K] [S] épouse [H] irrecevable en ses demandes, et au besoin par substitution de motifs,
Condamner Mme [K] [S] épouse [H] à payer à Mme [C] [G] la somme de 200 000 XPF au titre des frais irrépétibles d’appel sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
Condamner Mme [K] [S] épouse [H] aux dépens dont distraction d’usage au profit de Me Marie Eftimie-Spitz.
Par ses dernières conclusions en date du 18 octobre 2021 Mme [L] [D] demande à la cour de :
A titre principal,
Juger l’appel irrecevable faute pour l’action d’avoir été engagée dans le délai de deux mois suivant la signification,
Ou, à titre subsidiaire,
Par arrêt avant dire droit, si nécessaire,
Enjoindre à Mme [K] [S] épouse [H] de produire l’enquète pénale en sa possession déposée pour les mêmes prétendus faits et qui a abouti à un classement sans suite, l’enjoindre également de s’expliquer sur le classement sans suite de la plainte pénale qu’elle avait cru bon de former à l’encontre de Mme PatriciaTetuanui, de Mme [C] [G] et de Mme [D] pour les prétendus faits objets de la présente action,
Et, en tout état de cause,
Confirmer la décision de première instance en toutes ses dispositions,
Et, y ajouter,
Vu l’absence de tout fondement légal ou factuel, l’appelante se contentant d’user d’une rhétorique diffamatoire et calomnieuse comme seule argutie,
Juger le présent appel constitutif d’un abus de droit,
Et,
Condamner en conséquence Mme [K] [S] épouse [H] à payer à Mme [L] [D] la somme de 500.000 F CFP à ce titre,
Et,
La condamner également à lui verser la somme de 339.000 F CFP au titre des frais irrépétibles d’appel ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
Par arrêt en date du 22 septembre 2022 la cour a déclaré l’appel recevable et renvoyé l’affaire à la mise en état pour conclusions des parties.
Par ses dernières conclusions en date du 15 novembre 2022 Mme [Y] [X] demande à la cour de :
Confirmer le jugement entrepris,
Débouter Mme [K] [S] épouse [H] de l’ensemble de ses de-mandes en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de Mme [Y] [X],
La condamner également au paiement à celle-ci d’une somme de 150.000 F Cfp sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
La condamner aux entiers dépens dont distraction d’usage au profit de Maître [T], avocat au barreau de Papeete, sur ses offres de droit,
Les autres parties n’ont pas conclu postérieurement à cet arrêt.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 21 novembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions et moyens dont la cour est saisie, il est renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions d’appel des parties. L’exposé des moyens des parties, tel que requis par les dispositions de l’article 268 du code de procédure civile de la Polynésie française, sera renvoyé à la motivation ci-après à l’effet d’y répondre.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l’irrecevabilité de l’appel :
S’il appartient à la cour de répondre aux demandes des parties telles que formulées dans le dispositif de leurs conclusions, il a déjà été répondu à cette demande, formulée par Mme [D] dans ses conclusions, par l’arrêt en date du 22 septembre 2022, Mme [D] n’ayant pas conclu de nouveau à la suite de cette décision.
Sur l’autorité de la chose jugée :
Aux termes des dispositions de l’article 1351 du code civil tel qu’applicable à la Polynésie française, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Aux termes des dispositions de l’article 284 du code de la Polynésie française le jugement qui tranche dans son dispositif, tout ou partie du principal ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’il tranche.
Le principal s’entend par référence aux dispositions de l’article 3 du code de procédure civile de la Polynésie française à savoir les prétentions des parties telles que fixées par leurs conclusions.
Lors de l’audience ayant donné lieu au jugement en date du 30 juin 2014 Mme [S] avait sollicité la condamnation de Mme [C] [G] et Mme [Y] [X] à lui payer :
– 5 164 872 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice professionnel correspondant à la perte de ses revenus,
– 5 000 000 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice personnel correspondant au prix d’acquisition,
– 2 000 000 FCFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
– 1 000 000 F CFP à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier.
Les demandes qu’elle forme désormais à l’encontre des mêmes parties visant à les voir condamnées à lui payer :
5 164 872 F CFP (430 406 FCFP X 12), à titre de la perte de sa rémunération du fait de sa mise en disponibilité à l’Université de Polynésie Française,
– 2 000 000 F CFP en réparation forfaitaire du préjudice moral que cette tromperie lui a occasionné,
– 1 000 000 F CFP en réparation forfaitaire de son préjudice financier résultant du fait d’avoir dû prendre un avocat pour se défendre dans les instances qui ont abouti au jugement du 30 juin 2014 et au jugement de liquidation judiciaire du 8 septembre 2014
sont donc strictement identiques à celles qu’elle formait lors de l’audience ayant donné lieu au jugement en date du 30 juin 2014 . Elle explique que lors de l’audience ayant donné lieu au jugement en date du 30 juin 2014 ,sa demande avait été examinée sur le fondement de la responsabilité contractuelle alors qu’elle la forme désormais sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du code civil et de la responsabilité délictuelle.
Il ne résulte cependant de rien qu’elle avait formé sa demande sur le fondement de la responsabilité contractuelle si ce n’est l’interprétation que le juge en a fait et qu’elle n’a pas contestée alors que ses demandes étaient formées à titre subsidiaire dans l’hypothèse où ses demandes principales d’opposabilité de la cession du bail commercial à Mme [G] seraient rejetées. Il lui était loisible de contester cette décision qui l’avait déclarée irrecevable à titre personnel en sa demande subsidiaire pour défaut de qualité et d’intérêt à agir , après que le juge ait souligné le caractère ambigu de l’intitulé de ses conclusions déposées le 28 avril 2014 et ait rejeté ses demandes principales qu’il avait appréciées comme ayant été formées en sa qualité de gérante de L’EURL Ilot Calin.
Force est de constater que ses demandes ont été examinées comme ayant été formées en son nom personnel et en sa qualité de gérante, que si elle ne se présente plus en qualité de gérante, les demandes formées en son nom personnel, identiques en leurs montants et dirigées à l’encontre des mêmes personnes, ont déjà fait l’objet d’une décision définitive, qu’en tout état de cause la seule différence de fondement juridique entre deux deman-des ayant le même objet est insuffisante à écarter la fin de non- recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée alors qu’il lui appartenait de développer initialement tous les aurguments nécessaire au soutien de sa prétention.
Mme [S] sera donc déclarée irrecevable en ses demandes dirigées à l’encontre de Mme [Y][X] et Mme [C] [G] et le jugement attaqué sera infirmé en ce qu’il a statué autrement.
Sur la demande dirigée à l’encontre de Mme [N] [D] :
Mme [S] reproche à Mme [D] d’avoir rédigé l’acte intitulé ‘cession de clientèle’ visant l’avenant du bail du 20 août 2013 comprenant un loyer de 100 000 FCFP et le bail du 1er décembre 2008 enregistré le 21 août 2013 pour un loyer du même montant sans aucune mention de l’avenant ‘correctif’ signé le 27 août 2013. Elle considère que celle-ci a dès lors failli à son devoir de conseil, l’accusant en outre d’avoir tenu une fausse comptabilité pour Mme [X] et d’avoir refusé de la lui communiquer.
Elle estime enfin qu’il appartenait à Mme [D] de procéder à la signification de cette cession à Mme [G], propriétaire des murs loués.
S’il ressort des courriels versés aux débats par Mme [S] que Mme [D] était au courant du loyer ‘occulte’ versé par Mme [Y][X] à Mme [C] [G], aucun élément ne permet d’établir qu’elle a été la rédactrice de l’acte de cession entre Mme [S] et Mme [X] et qu’elle ait pu avoir dès lors l’obligation d’attirer l’attention de Mme [S] sur la double comptabilité qu’elle tenait pour Mme [X].
Rien ne justifie de prétendre qu’il lui aurait incombé l’obligation de procéder à la signification de cette cession à Mme [G], propriétaire des murs loués étant observé que le jugement en date du 30 juin 2014 avait mis en exergue qu’il incombait au premier chef à L’EURL l’îlot calin de procéder à cette signification puisqu’elle était la cessionnaire, donc à ce titre bénéficiaire du droit au bail et en relation contractuelle avec la bailleresse.
D’autre part il ressort du courrier adressé le 15 octobre 2013 par Mme [S] à Mme [G] qu’elle était informée de ce loyer occulte puisqu’elle écrivait alors ‘Mme [Y] [X] a bien évoqué un versement mensuel illicite auquel nous ne souhaitons pas prendre part.’
Rien ne permet d’établir que Mme [D] ait eu connaissance de l’avenant ‘correctif ‘ du 27 août 2013 puisque tout au contraire elle ajoute le 7 octobre 2013 dans un courriel adressé à Mme [Y] [X] : ‘ [C] [G] a de nouveau signé le paragraphe du loyer à 100 000 FCFP, c’est bien le montant légal sinon elle aurait fait un bond en voyant un écart de 200 000 FCFP mensuels non” ‘ Que les nouveaux acquéreurs décident de ne pas verser de dessous de table, ça les regarde, ils veulent être dans la légalité et ils ont raison.’
De même dans un courriel adressé le 22 octobre 2013 à M. [O] [H] Mme [D] fait part de son étonnement sur la mention d’un loyer à 300 000 FCFP alors que le bail du mois d’août et l’avenant avaient été enregistrées à la DAF, écrivant ‘donc je ne vois pas comment elle a pu contresigner le paragraphe loyer à 300 000 FCFP et en plus, sans votre présence!’
Aucune faute ne peut donc être reprochée à Mme [D] qui aurait occasionné un préjudice à Mme [S] et le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par Mme [D] :
L’exercice d’une voie de recours telle que l’appel est un droit pour une partie et ne dégénère en abus qu’en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.
En l’espèce la contestation opérée par Mme [S] de la décision de première instance ne peut, à défaut d’autre éléments, être qualifiée d’abusive et la demande à ce titre sera rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Mme [K] [S] épouse [H] sera condamnée aux dépens d’appel, la décision attaquée étant confirmée quant à la charge des dépens de première instance, sans que la distraction soit ordonnée au profit de Mme [T] au vu de la décision d’aide juridictionnelle totale accordée à Mme [X] [Y].
Il n’est pas inéquitable d’allouer à Mme [C] [G] la somme de 150 000 FCPF sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française, et à Mme [L] [D] la somme de 150 000 FCPF sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française. L’équité ne commande cependant pas le versement d’une somme à ce titre à Mme [X] [Y], bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Infirme le jugement attaqué en ce qu’il a :
Rejeté la fin de non recevoir soulevée par Mme [C] [G],
Statuant à nouveau sur le chef infirmé :
Déclare Mme [K] [S] épouse [H] irrecevable en ses demandes dirigées à l’encontre de Mme [C] [G] et de Mme [Y][X],
Le confirme pour le surplus,
Rejette toute demande plus ample ou contraire,
Condamne Mme [K] [S] épouse [H] à payer à Mme [C] [G] la somme de 150 000 FCPF sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
Condamne Mme [K] [S] épouse [H] à payer à Mme [L] [D] la somme de 150 000 FCPF sur le fondement de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française,
Condamne Mme [K] [S] épouse [H] aux dépens d’appel dont distraction d’usage au profit de Me Marie Eftimie-Spitz.
Prononcé à Papeete, le 23 mars 2023.
Le Greffier, Le Président,
signé : M. SUHAS-TEVERO signé : C. GUENGARD