Droit de réponse : décision du 26 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/12893

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Droit de réponse : décision du 26 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/12893
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 26 MAI 2023

N°2023/.

Rôle N° RG 21/12893 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIBIN

URSSAF

C/

S.C.I. [3]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– URSSAF PACA

– Me Stéphanie JOURQUIN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de NICE en date du 26 Février 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/2021.

APPELANTE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 2]

représenté par Mme [H] [P] en vertu d’un pouvoir spécial

INTIMEE

S.C.I. [3], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Stéphanie JOURQUIN, avocat au barreau de NICE substitué par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Isabelle PERRIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

A l’issue d’un contrôle portant sur l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de la garantie des salaires au sein de la société civile immobilière de la [Localité 4], et sur les années 2014, 2015 et 2016, l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur lui a notifié une lettre d’observations en date du 18 octobre 2017, comportant un seul chef de redressement d’un montant total de 26 992 euros.

Après échanges d’observations, l’Urssaf lui a notifié une mise en demeure en date du 18 décembre 2017, d’un montant total de 30 829 euros dont 26 993 euros au titre des cotisations et 3 836 euros au titre des majorations de retard.

Après rejet par la commission de recours amiable le 30 mai 2018, la société civile [3] a saisi le 25 octobre 2018 le tribunal des affaires de sécurité sociale.

Par jugement en date du 26 février 2021, le tribunal judiciaire de Nice, pôle social, a:

* déclaré le recours recevable,

* débouté la Sci [3] de sa demande d’annulation de la procédure de redressement,

* annulé le redressement et la mise en demeure en date du 30 mai 2018,

* débouté l’Urssaf de sa demande en paiement,

* débouté la Sci [3] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* dit que les dépens seront supportés par moitié par les parties.

L’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Après radiation par ordonnance du magistrat chargé d’instruire en date du 26 juillet 2021, l’affaire a été remise au rôle le 02 septembre 2021, sur demande de l’appelante à laquelle étaient jointes ses conclusions.

En l’état de ses conclusions récapitulatives réceptionnées par le greffe le 16 mars 2023, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a annulé le redressement et la mise en demeure en date du 30 mai 2018 et l’a déboutée de sa demande en paiement, et sa confirmation en ce qu’il a débouté la Sci [3] de sa demande d’annulation de la procédure de redressement.

Elle demande à la cour de:

* confirmer le bien fondé de la décision de la commission de recours amiable du 30 mai 2018,

* condamner la Sci [3] au paiement de la somme de 30 829 euros soit 26 993 euros de cotisations et 3 836 euros de majorations de retard,

* condamner la Sci [3] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En l’état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 20 octobre 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société civile [3], formant appel incident, sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande d’annulation de la procédure de redressement et de sa demande au titre des frais irrépétibles et sollicite la confirmation du dit jugement pour le surplus.

Elle demande à la cour de débouter l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’ensemble de ses demandes.

Si la cour ne procédait pas à l’annulation du redressement, elle lui demande d’ordonner la révision du montant de l’assiette des cotisations et contributions de sécurité sociale fixé forfaitairement pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 ainsi qu’une expertise.

En état de cause, elle sollicite la condamnation de l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

MOTIFS

1- Sur la régularité de la procédure de contrôle et de la lettre d’observations:

L’article R.243-59 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2016-1567 du 21 novembre 2016, dispose que:

I- Tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l’agent chargé du contrôle, de l’envoi par l’organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d’un avis de contrôle (…)

Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l’avis de contrôle est adressé à l’attention de son représentant légal et envoyé à l’adresse du siège social de l’entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.

Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l’ensemble des établissements de la personne contrôlée.

Cet avis fait état de l’existence d’un document intitulé ‘Charte du cotisant contrôlé’ présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l’adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu’il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle (…)

II.-La personne contrôlée a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l’avis prévu aux précédents alinéas (…).

III.-A l’issue du contrôle, les agents chargés du contrôle communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant contrôlé une lettre d’observations datée et signée par eux mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s’il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle. Ces dernières sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l’indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l’indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés (…).

La lettre d’observations indique également à la personne contrôlée qu’elle dispose d’un délai de trente jours pour répondre à ces observations et qu’elle a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix (…)

Pour dire infondée la société en sa contestation de la validité de la procédure de contrôle, les premiers juges ont relevé que l’Urssaf lui a envoyé un premier avis de contrôle, le 02 août 2017, quartier la [Adresse 5], par pli recommandé qui lui a été retourné avec la mention ‘avisé non réclamé’, puis un second avis en date du 22 septembre 2017 dans les mêmes conditions, que la lettre d’observations du 18 novembre 2017, présentée le 21 octobre 2017 par la Poste a été retournée dans les mêmes conditions, et que l’historique des modifications du siège social de la société au registre du commerce et des sociétés et les extraits de publication du Bodacc démontrent que depuis 2002, la société avait son siège social à l’adresse [Adresse 7] et qu’il a été transféré [Adresse 1], le 4 novembre 2019. Ils ont considéré qu’à la date de l’envoi de l’avis de contrôle le 02 août 2017 l’adresse du siège était toujours celle du quartier de la [Localité 4] à [Localité 8] et que la circonstance que la décision de la commission de recours amiable ait été ensuite envoyée à l’adresse indiquée en entête de son recours préalable est inopérante quant à la validité de l’envoi de l’avis de contrôle puis de la lettre d’observations au siège social, comme l’est également la circonstance que les avis de taxes foncières de la société lui soient adressées à celle de [Localité 6].

La société, formant appel incident de ce chef du jugement, soutient qu’il appartient à l’Urssaf de faire la preuve que l’employeur a bien été informé du contrôle envisagé. Elle souligne que l’avis de contrôle doit mentionner la charte du cotisant contrôlé et la possibilité de se faire assister pendant le contrôle du conseil de son choix, ce qui constitue des formalités substantielles dont dépend la validité du contrôle.

Elle souligne en outre que la lettre d’observations ne peut être valable que si elle comporte obligatoirement les mentions prescrites par l’article R.243-59, qu’elle n’a jamais reçu les avis de contrôle, la lettre d’observations et la mise en demeure, qui n’ont pas été envoyés à son adresse usuelle à la différence de la décision de la commission de recours amiable et qu’elle n’a pas pu bénéficier du caractère contradictoire de la procédure de contrôle et exercer son droit de réponse.

L’Urssaf lui oppose que les avis de contrôle ont été adressés au siège de la société et qu’il a été vérifié Après le retour du premier pli non réclamé qu’il n’y avait pas eu de modification du siège.

Elle soutient que les dispositions de l’article R.243-59 ont été respectées, et se prévaut de la copie des extraits du registre du commerce et des sociétés.

Les dispositions de l’article R.243-59 du code de la sécurité sociale, dont la cour vient de rappeler la teneur, stipulent sans ambiguïté que l’avis de contrôle doit être adressé au siège de la société.

Ainsi que retenu avec pertinence par les premiers juges, il résulte des deux avis de contrôles en date des 02 août 2017 et 1er septembre 2017 qu’ils ont tous deux été envoyés à l’adresse du siège social de la société et ont été retournés avec la mention de la Poste que le pli a été présenté (respectivement les 04 août 2017 et 05 septembre 2017) sans qu’ils aient été réclamés par la destinataire qui en avait été avisée.

La cour constate que l’adresse ainsi mentionnée est celle figurant sur l’extrait du registre du commerce et des sociétés versé aux débats par l’appelante, jusqu’au 04 novembre 2019, date d’effet de la mention du 09 avril 2020, relative au transfert du siège, ce que ne conteste pas la société.

S’il est exact que la société, qui ne s’explique pas sur les raisons de l’absence de retrait de ces plis recommandés au bureau postal, n’a pas été informée des avis de contrôle, et par suite de ses droits, pour autant cette situation, qui lui est exclusivement imputable, ne peut être de nature à vicier la procédure de contrôle.

De même, l’envoi de la lettre d’observations en date du 18 octobre 2017, comme de la mise en demeure en date du 18 décembre 2017 à l’adresse du siège de la société antérieur au transfert du 04 novembre 2019 (dont les tiers n’ont été informés que par la mention du registre du commerce et des sociétés en date du 09 avril 2020) sont réguliers pour respecter les prescriptions de l’article R.243-59 précité.

La circonstance que la société n’a pas été en mesure d’exercer son droit à observations est exclusivement imputable à ses absences de retraits des plis recommandés y afférents, dont elle ne s’explique pas davantage, alors qu’il résulte des mentions apposées par la Poste que le pli recommandé notifiant la mise en demeure a été présenté le 19/12/2017 et que les premiers juges ont retenu, sans que ce soit contesté, que le pli notifiant la lettre d’observations a été présenté par la Poste le 21 octobre 2017.

La cour constate que la saisine de la commission de recours amiable par courrier de la société en date du 16 février 2018, mentionnant comme adresse de l’expéditrice, celle antérieure au changement du siège social, fait référence à la ‘réception du 22 janvier dernier’ d’une ‘relance au titre du recouvrement de cotisations relatives à la taxation d’office suite à impossibilité de réaliser un contrôle’ et que le document qu’elle produit (sa pièce 1) intitulé ‘dernier avis avant poursuites’ lui a été envoyé par l’Urssaf à l’adresse de son siège avant transfert, c’est à dire c’est à dire la même que celle mentionnée sur les deux avis de contrôle précités, sur la lettre d’observations et sur la mise en demeure.

L’argument tiré de l’adresse à laquelle la décision de la commission de recours amiable en date du 30 mai 2018 a été envoyée est effectivement inopérant.

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté la société de sa demande d’annulation de la procédure de contrôle étant précisé que l’annulation du redressement et de la mise en demeure ont été prononcés non point pour les motifs de forme jugés inopérants mais pour un motif de fond.

2- sur le fond et la taxation forfaitaire:

Par application des dispositions de l’article L.242-1 alinéa 1 du code de la sécurité sociale sont assujetties à cotisations l’ensemble des sommes versées en contrepartie ou à l’occasion du travail, y compris les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l’entremise d’un tiers à titre de pourboire.

L’article R.243-59-4 I du code de la sécurité sociale, dispose que dans le cadre d’un contrôle effectué en application de l’article L. 243-7, l’agent chargé du contrôle fixe forfaitairement le montant de l’assiette dans les cas suivants:

1°- la comptabilité de la personne contrôlée ne permet pas d’établir le chiffre exact des rémunérations, ou le cas échéant des revenus, servant de base au calcul des cotisations dues,

2°- la personne contrôlée ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou leur présentation n’en permet pas l’exploitation.

Cette fixation forfaitaire est effectuée par tout moyen d’estimation probant permettant le chiffrage des cotisations et contributions sociales. Lorsque la personne contrôlée est un employeur, cette taxation tient compte, dans les cas mentionnés au 1°, notamment des conventions collectives en vigueur ou, à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l’emploi est déterminée d’après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve (…)

Pour annuler le redressement et la mise en demeure subséquente, les premiers juges ont retenu que

la personne contrôlée n’a pas mis à disposition de l’agent de contrôle les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle en raison de sa carence à répondre à l’avis de contrôle régulièrement adressé, ce qui justifie le recours à une évaluation forfaitaire, que ce recours n’est pas de nature à priver le cotisant de tout moyen de défense et de la possibilité d’établir le caractère injustifié ou excessif de l’assiette retenue, fût-ce par la communication tardive d’éléments probants dans le cadre du recours contentieux alors qu’aucun élément comptable n’a été antérieurement communiqué. Ils ont considéré que refuser au cotisant la possibilité de produire des éléments probants, non produits à l’occasion du contrôle ou du recours amiable obligatoire, conduirait à le priver du droit au recours effectif.

Ils ont retenu que les éléments comptables complets et probants produits par la société, qui font ressortir les montants des salaires versés en 2014, 2015 et 2016 ayant donné lieu à des déclarations régulières pour des cotisations évaluées en 2014 à 8 77 (en réalité 8 377 euros), en 2015 à 7 979 euros et en 2016 à 2 418 euros et une baisse importante de l’assiette pour l’année 2016, justifiée par l’absence pour maladie du salarié à compter du mois de mars 2016, ne sont pas critiqués par l’Urssaf, que la société a déclaré des salaires sur une base supérieure à celle retenue par la caisse et qu’ainsi l’assiette retenue par l’Urssaf n’est pas justifiée.

L’Urssaf soutient que la taxation forfaitaire a été appliquée à bon droit par l’inspecteur du recouvrement et que le tribunal a statué ultra petita en analysant la comptabilité versée aux débats, alléguant que la société ne l’a jamais sollicité puisqu’elle demandait dans son subsidiaire une expertise.

Elle se prévaut d’un arrêt de la Cour de cassation (2civ. 14 mars 2019 n°17/28099) pour soutenir que les documents relatifs à la comptabilité doivent être fournis par l’employeur au moment du contrôle à défaut de quoi la taxation forfaitaire est parfaitement justifiée. Elle relève par ailleurs une erreur dans la date de la mise en demeure mentionnée au dispositif du jugement.

La société réplique d’une part que la taxation forfaitaire n’a pas lieu d’être appliquée quand l’Urssaf n’a pas pu procéder au contrôle du fait de problème d’adressage des avis de passage, et d’autre part que l’Urssaf doit apporter la preuve que la comptabilité de l’employeur est insuffisante ou irrégulière pour justifier le recours à la taxation forfaitaire et qu’à défaut l’annulation du redressement est encourue.

Elle soutient que l’employeur peut alors établir le caractère excessif ou inexact des bases de la taxation forfaitaire et apporter cette preuve à tout moment, la production tardive de pièces justificatives à l’occasion du recours formé devant les tribunaux ne pouvant le priver du droit d’établir le caractère erroné de la taxation forfaitaire.

Elle ajoute que selon la valeur probante des éléments apportés par l’employeur, les juges du fond peuvent, selon leur appréciation souveraine, recourir à une expertise en vue de déterminer les bases de calcul exactes des cotisations ou estimer au vu des documents fournis, que l’évaluation forfaitaire doit être réduite ou renvoyer à l’Urssaf le soin de procéder à un nouveau calcul sur la base des éléments soumis.

Elle souligne avoir tenté vainement d’obtenir devant la commission de recours amiable un nouveau contrôle et s’en être remis à l’appréciation souveraine des juges du fond afin de voir réviser le montant de l’assiette retenue des cotisations manifestement disproportionné d’autant que le précédent contrôle de novembre 2013 avait abouti à un redressement de 2 224 euros.

Elle conteste qu’il ait été statué ultra petita par le tribunal, saisi de sa demande de révision du montant de l’assiette, et reprend les éléments chiffrés examinés par les premiers juges pour soutenir qu’ils font ressortir une différence de montants entre les cotisations et contributions appelées suite à déclaration et celles appelées suite à la taxation forfaitaire de l’assiette de calcul.

Elle souligne en outre qu’à aucun moment il n’est fait déduction des sommes qu’elle a acquittées suite aux déclarations effectuées pour les années 2014 à 2016 inclus.

La cour vient de juger que les notifications au siège de la société des deux avis de contrôle, de la lettre d’observations et de la mise en demeure sont régulières, qu’il n’y a pas eu d’erreur dans l’adressage et que leurs absences de réception par la société, avisée de leurs présentations, qui n’a pas retiré les plis recommandés auprès de la Poste, lui est imputable et ne peut être de nature à vicier la procédure de contrôle, comme ces notifications.

Il s’ensuit, ainsi que retenu avec pertinence par les premiers juges, que par suite du défaut de réception de ces avis de contrôle par la cotisante, l’inspecteur du recouvrement n’a pas été en mesure de procéder au contrôle de l’assiette des cotisations, ce qui justifiait le recours à la taxation forfaitaire sur le fondement des dispositions de l’article R.243-59-4 I du code de la sécurité sociale.

L’inspecteur du recouvrement a constaté lors de ce contrôle être dans l’impossibilité de l’effectuer et précisé avoir procédé à la fixation forfaitaire du montant de l’assiette des cotisations sur la base d’un salarié au salaire minimum de croissance équivalent temps plein, soit pour:

* 2014: 17 344.6 euros,

* 2015: 17 490.2 euros,

* 2016: 17 599.4 euros.

Il a ainsi chiffré à 9 090 euros le redressement au titre des cotisations et contributions afférentes à l’année 2014, à 8 889 euros celles de l’année 2015 et à 9 013 euros celles de l’année 2016, sans retenir les réductions sur les bas salaires.

Le recours à la taxation forfaitaire est uniquement justifié au regard de l’article R.243-59-4 I 2° du code de la sécurité sociale par l’impossibilité pour l’inspecteur du recouvrement de procéder à son contrôle, par suite de l’absence de réception des avis de contrôle, et non point par le caractère insincère et non probant des éléments qui lui ont été soumis lors du contrôle, comme dans le cas d’espèce invoqué par l’Urssaf ayant donné lieu à l’arrêt dont elle se prévaut.

La cotisante a la possibilité de contester devant le juge du contentieux de la sécurité sociale le montant du redressement, étant observé qu’il incombe en tout état de cause à l’organisme de recouvrement de déduire du redressement les montants des cotisations payées, ce qui n’a pas été présentement le cas, et l’Urssaf ne s’explique nullement à cet égard.

Il résulte tant du jugement entrepris que des conclusions n°2 la société, visées par le greffier lors de l’audience du 19 janvier 2021 au cours de laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 26 février 202, que la société a argué du montant disproportionné de l’assiette des cotisations retenu et a soutenu le caractère excessif ou inexact du redressement en versant aux débats les éléments de sa comptabilité, tout en faisant état de cotisations appelées et réglées suite à ses déclarations pour un montant de 9 377 euros en 2014, de 7 979 en 2015 et de 2 418 euros en 2016 soit au total de 18 774 euros non prises en compte par le redressement, et a expliqué la diminution de près du tiers des cotisations versées en 2016 par l’arrêt maladie, dont a été victime son unique salarié.

Contrairement aux allégations de l’Urssaf, les premiers juges n’ont pas statué ultra petita en examinant le caractère probant des pièces versées aux débats par la société.

La cour constate que, comme en première instance, l’Urssaf ne critique pas les éléments versés aux débats par la société, résultant de la déclaration unifiée de cotisations sociales pour les années 2014, 2015 et 2016, portant mention à la fois de la validation de la déclaration et du télépaiement, qui font ressortir les montants de cotisations suivants:

* 2014: 8 377 euros (calculés sur une base de 19 636 euros avec une réduction Fillon-basse déplafonnée de 2 100 euros),

* 2015: 7 979 euros (calculés sur une base de 19 636 euros avec une réduction Fillon-basse déplafonnée de 2 165 euros),

* 2016: 2 418 euros (calculés sur une base de 7 548 euros avec une réduction Fillon-basse déplafonnée de 1 452 euros).

La cour constate que les bulletins de salaire du seul salarié, joints aux documents comptables de la société, mettent en évidence, à partir du mois de mars 2016 et jusqu’au mois de décembre 2016, que des retenues pour absence maladie ont été décomptées à partir du 08 mars 2016, et une absence totale de tout salaire ou au titre de la garantie de salaire (conventionnelle) à partir du mois de septembre 2016.

Il est ainsi établi par l’ensemble de ces éléments:

* l’omission de prise en considération des cotisations payées par les inspecteurs du recouvrement dans la lettre d’observations et par l’Urssaf dans la mise en demeure,

* le caractère justifié par l’employeur de la prise en considération pour les années 2014, 2015 et 2016 de la réduction sur les bas salaires.

La cour constate que seule l’absence de prise en considération ces éléments est à l’origine du redressement retenu pour les années 2014 et 2015.

Concernant l’année 2016, la société justifie par les éléments issus de sa comptabilité, corroborés par ses déclarations et par les bulletins de paye de son unique salarié, une absence de versement de salaire sur la majeure partie de l’année en raison d’un arrêt maladie.

Elle justifie également de la validation de sa déclaration et du télépaiement le 14 janvier 2017, et rapporte la preuve pour 2016 que le montant retenu dans le cadre du contrôle de 17 599 euros comme base de calcul du redressement est totalement erroné.

L’Urssaf ne conteste pas le caractère probant de ces éléments et ne s’explique pas davantage sur l’absence de prise en compte des cotisations et contributions payées, alors même que pour retenir un redressement pour un salarié à temps plein payé au salaire minimum de croissance, l’inspecteur du recouvrement a dû se référer aux déclarations de la cotisante.

Ainsi que retenu avec pertinence par les premiers juges, l’assiette retenue par l’Urssaf n’est pas justifiée.

Les éléments versés aux débats en cause d’appel ne permettent pas davantage de considérer que le redressement est partiellement justifié.

L’annulation du redressement ainsi que la mise en demeure subséquente prononcée par les premiers juges est justifiée.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ses dispositions soumises à la cour.

Succombant en ses prétentions, l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société civile [3] les frais qu’elle a été amenée à exposer pour sa défense, ce qui justifie de lui allouer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

– Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

y ajoutant,

– Déboute l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’intégralité de ses demandes,

– Condamne l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur à payer à la société civile [3] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne l’Urssaf Provence-Alpes-Côte d’Azur aux dépens.

Le Greffier Le Président

 


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