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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 01 FEVRIER 2024
N° 2024/33
Rôle N° RG 23/03617 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BK5X6
[X] [U] [W]
C/
[G] [I]
[E] [K]
Société LAOT ET SALSEDO
PROCUREUR GENERAL
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Radost VELEVA-REINAUD
Me Joseph MAGNAN
PG
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de Fréjus en date du 27 Février 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2022003840.
APPELANTE
Madame [X] [U] [W]
née le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 9],
demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Radost VELEVA-REINAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Maître Yann LEFORT,
mandataire judiciaire demeurant [Adresse 5]
es qualité de mandataire ad hoc de la SAS VERDI & CIE, enregistrée au RCS Fréjus 885 345 207, ayant son siège social sis [Adresse 3]
défaillant
Maître Didier CARDON
mandataire judiciaire,demeurant [Adresse 2], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS VERDI & CIE,
défaillant
INTERVENANTE VOLONTAIRE
SNC LAOT ET SALSEDO,
immatriculée au RCS de FREJUS sous le n° 418 333 555, dont le siège social est sis [Adresse 6], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège
représentée par Me Joseph MA
GNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur le PROCUREUR GENERAL,
demeurant [Adresse 8]
Defaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 06 Décembre 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Madame Agnès VADROT, Conseillère rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Février 2024.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Février 2024,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par jugement en date du 14 novembre 2022, le tribunal de commerce de Fréjus a prononcé une mesure de redressement judiciaire à l’égard de la SAS VERDI & CIE, société gérée par Madame [X] [W], exerçant une activité d’exploitation d’un débit de boisson, restaurant et bar à ambiance avec licence IV.
Par jugement en date du 27 février 2023, le tribunal de commerce de Fréjus, sur requête du mandataire judiciaire, a converti la procédure de redressement en liquidation judiciaire.
Les premiers juges ont retenu, au regard des éléments communiqués et du rapport du juge-commissaire, que le redressement de la SAS VERDI & CIE était manifestement impossible en relevant, notamment, que Madame [W] était sous le coup d’une mesure de faillite personnelle prononcée par le tribunal de commerce de Nanterre le 8 septembre 2021 et qu’il n’était fourni aucune attestation d’absence de dettes nouvelles.
Par déclaration en date du 08 mars 2023, Madame [X] [W] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées et notifiées par le RPVA en date du 21 avril 2023, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, Madame [X] [W] demande à la cour de :
– infirmer le jugement querellé,
– replacer la société VERDI & CIE en phase de redressement judiciaire,
– maintenir Maître [E] [K] ès qualités de mandataire judiciaire,
– maintenir la SCP AUBERT VALENTIN JOLY ès qualités d’huissiers de justice et commissaire,
– maintenir le juge commissaire désigné en la personne de Monsieur Jean-François BOUTEILLE,
– maintenir Maître [G] [I] ès qualités de mandataire ad hoc de la SAS VERDI & CIE,
– octroyer une nouvelle période d’observation de 6 mois avec obligation pour la société VERDI & CIE de présenter un plan de redressement.
L’appelante explique, à titre liminaire que dans le cadre de la procédure collective d’une autre société dont elle était la gérante, elle a été condamnée par le tribunal correctionnel de Nanterre à une faillite personnelle d’une durée de sept ans ; qu’elle était cependant dans l’ignorance de cet élément lorsqu’elle a interjeté appel de la décision rendue par le tribunal de commerce de Fréjus le 27 février 2023 ; que d’ailleurs Maître [E] [K], es qualité, a indiqué dans son rapport qu’il n’était pas encore destinataire du jugement ni des conditions de sa qualification de sorte que pour l’heure son appel demeurait valable.
Elle expose qu’elle a conclu le 14 février 2020 avec la société SNC LAOT ET SALSEDO un contrat de location-gérance ainsi qu’une promesse de vente pour un fonds de commerce de « débit de boissons et restaurant » sis à [Localité 10] ; que cependant le bailleur a manqué à son obligation de délivrance, ce qui l’a contrainte à engager une action en responsabilité contre ce dernier, dans le cadre de laquelle elle a réclamé l’octroi de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts, somme correspondant à 90 % du passif déclaré et non vérifié.
Elle précise à cet égard que le passif déclaré à hauteur de 459 963,81 euros a vocation à être revu à la baisse, bon nombre de créances étant contestées.
Elle soutient par ailleurs qu’il ressort des éléments comptables que le dossier prévisionnel établi démontre que l’entreprise peut exercer et qu’elle est en mesure de procéder à l’exploitation du fonds.
Elle précise enfin qu’elle a investi des sommes importantes pour pouvoir assurer la reprise de l’exploitation.
Par conclusions d’intervention volontaire déposées et notifiées par le RPVA en date du 11 avril 2023, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SNC LAOT ET SALSEDO demande à la cour au visa des articles 63, 66 à 69, 325, 326, 329 et 554 du code de procédure civile, de :
– la juger recevable en la forme en son intervention volontaire,
– la recevoir en ses demandes et l’y déclarer bien fondée,
– confirmer le jugement du tribunal de commerce de Fréjus en date du 27 février 2023 en toutes ses dispositions
Y ajoutant,
– Condamner Madame [W] à lui payer la somme de 10 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
La SNC LAOT ET SALSEDO explique que par acte sous seing privé en date du 14 février 2020, elle a donné en location-gérance à la société VERDI & CIE un fonds de commerce de « débit de boissons et restaurant » connu sous l’enseigne « [7] » à [Localité 10] et ce, pour une durée ferme de 5 ans ; que cependant depuis la prise d’effet du contrat, la société VERDI & CIE n’a réglé aucune des sommes dues et ce, malgré un commandement de payer délivré le 18 octobre 2021.
Elle ajoute que parallèlement à ce contrat de location gérance, une promesse de cession de ses parts sociales a été consentie à Madame [W] avec un terme fixé au 31 décembre 2020 pour la réalisation de la vente avec règlement intégral du prix de vente fixé à 2 090 000 euros ; que cette promesse est aujourd’hui caduque, Madame [W] n’ayant ni réalisé la vente ni procédé au règlement du prix dans le délai convenu.
Elle indique que c’est dans ces conditions qu’elle a été contrainte de faire délivrer à la société VERDI & CIE une assignation devant le tribunal de commerce de Fréjus aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire du contrat de location gérance, procédure actuellement pendante devant ladite juridiction.
La SNC LAOT ET SALSEDO expose avoir, en sa qualité de créancière de la société VERDI & CIE, intérêt à intervenir volontairement à la procédure dans le but de voir confirmer le jugement de première instance et récupérer au plus vite son local.
Elle soutient que la situation de la société VERDI & CIE n’a pas la moindre chance de s’améliorer, la société étant criblée de dettes et sollicite la confirmation du jugement entrepris.
Par avis en date du 07 novembre 2023, le ministère public indique s’en rapporter à justice, n’étant pas intimé dans cette affaire et les mandataires intimés n’ayant pas produit d’écritures.
Assigné par exploit remis à domicile en date du 5 mai 2023, Maître Didier CARDON n’a pas constitué avocat.
Assigné par exploit remis à personne habilitée en date du 5 mai 2023, Maître [G] [I] ès qualités de mandataire de la SAS VERDI & CIE est également défaillant.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sa qualité et son intérêt à agir n’étant pas contestés il y a lieu de recevoir la SNC LAOT ET SALSEDO en son intervention volontaire.
Son état de cessation des paiements résultant de l’ouverture de la procédure collective, il se déduit des dispositions combinées des articles L631-1 et L640-1 du code de commerce que le redressement judiciaire d’une société ne peut être converti en liquidation judiciaire que dans le cas où son redressement est manifestement impossible.
L’impossibilité manifeste du débiteur à se redresser s’apprécie in concreto, au cas par cas, au regard de sa situation matérielle et financière globale de son activité.
Par ailleurs pour mener à bien cette appréciation, la cour doit examiner la situation matérielle réelle de l’appelante au jour où elle statue.
Il résulte des éléments de la procédure de première instance, et notamment du rapport du mandataire judiciaire, que le montant des créances déclarées au passif de la société VERDI & CIE s’élevait au 30 janvier 2023 à la somme de 459 963,81 euros.
Le mandataire judiciaire relève que la déclaration de créance de l’URSSAF démontre que les cotisations sociales sont impayées depuis le mois de septembre 2020.
Il appert par ailleurs que la société SNC LAOT ET SALSEDO a déclaré, par courrier en date du 17 janvier 2023, une créance d’un montant de 235 222 euros au titre des sommes en principal dues antérieurement au jugement d’ouverture du 14 novembre 2022, une créance d’un montant de 57 999,32 euros au titre des intérêts de retard et frais de procédure, une créance de 900 000 euros correspondant à l’évaluation des travaux de remise en état des locaux dégradés par la société VERDI & CIE, une créance de 40 000 euros au titre de la procédure judiciaire initiée à son encontre par la société M. PATRICK MULLER AZUT DRINKS, créancière de la société VERDI & CIE, une créance de 96 000 euros, somme à échoir correspondant à une année de redevances/indemnités d’occupation dues en application du contrat de location gérance.
Il est constant que durant la période d’observation aucun document comptable n’a été remis au mandataire judiciaire, en dépit de ses sollicitations.
A hauteur d’appel, ne sont produites que les liasses fiscales des exercices 2020 et 2021. Le document intitulé « prévisionnel de création d’activité de juillet 2020 à décembre 2022 » ne comporte aucune indication concernant son auteur et ne résulte en tout état de cause d’aucune expertise comptable pouvant attester de la réalité des chiffres annoncés.
Il n’est produit aucun bilan ni aucune situation de trésorerie actualisée.
Il n’est pas justifié de l’absence de création de dettes nouvelles par la production notamment d’une attestation de l’expert-comptable, alors même que le rapport du mandataire judiciaire établi le 2 février 2023, indique que l’établissement est fermé et que les charges courantes continuent néanmoins de courir.
Il n’est pas davantage justifié de la souscription d’une assurance professionnelle.
Une procédure est actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Fréjus aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire du contrat de location gérance.
Enfin il sera relevé, nonobstant l’absence de production de la décision correspondante et de précision quant à l’exercice d’un éventuel recours, qu’il n’est pas contesté que Madame [W] a été condamnée à une mesure de faillite personnelle d’une durée de 7 ans selon jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 8 septembre 2021.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que c’est par une juste appréciation des éléments de l’espèce, que les premiers juges ont conclu à l’impossibilité pour la SAS VERDI & CIE de se redresser, l’appelante reconnaissant par ailleurs dans ses écritures, que la faisabilité du plan qu’elle entendait proposer à l’issue d’une nouvelle période d’observation de 6 mois, était conditionnée au résultat de l’action en responsabilité intentée contre le bailleur à hauteur de 400 000 euros.
Le jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 27 février 2023 ayant converti la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’égard de la SAS VERDI & CIE en procédure de liquidation judiciaire sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Madame [W] qui succombe sera condamnée aux dépens.
Au vu des circonstances de l’espèce, il serait inéquitable de laisser supporter à la SNC LAOT ET SALSEDO l’intégralité des frais qu’elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
Madame [W] sera condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile .
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et mis à disposition au greffe,
REÇOIT la SNC LAOT ET SALSEDO en son intervention volontaire ;
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Fréjus en date du 27 février 2023 ;
CONDAMNE Madame [X] [W] à verser à la SNC LAOT ET SALSEDO la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame [X] [W] aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE