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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 1- A
ARRET DU 18 OCTOBRE 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/10040 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZTR
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Décembre 2022 -Conseiller de la mise en état de PARIS – RG n° 22/04218
APPELANTE
Mutuelle AVENIR MUTUELLE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 3] / FRANCE
Représentée par Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136
INTIMEE
Madame [J] [V]
[Adresse 2]
[Localité 4]/ FRANCE
née le 30 Décembre 1970 à [Localité 5]
Représentée par Me Cathy FARRAN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1553
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 08 Septembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Christine DA LUZ, Présidente de chambre
Madame Catherine VALANTIN, Conseillère
M. Fabrice MORILLO, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Christine DA LUZ dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Rebecca DURAND
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Maiia SPIRIDONOVA, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSE DU LITIGE
Le 19 avril 2019, Mme [J] [V] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris afin de contester la régularité de son licenciement et de voir condamner la société Avenir Mutuelle au paiement de diverses sommes et indemnités.
Par jugement 8 mars 2022, le conseil de prud’hommes de Paris a fait droit à l’essentiel des demandes de Mme [V].
Par déclaration du 30 mars 2022, la société Avenir Mutuelle a interjeté appel de ce jugement.
Par avis du 9 mai 2022, le greffe de la cour a demandé à l’appelante de procéder à la signification de sa déclaration d’appel en raison du défaut de constitution de l’intimée.
Par conclusions notifiées par RPVA du 18 octobre 2022, la société Avenir Mutuelle a notamment demandé au conseiller de la mise en état de :
– constater le défaut de dénonciation de constitution de l’intimée ;
– déclarer nulles et irrecevables les conclusions d’intimée notifiées le 19 septembre 2022 faute de dénonciation de constitution d’intimée à l’avocat de l’appelante.
Par conclusions notifiées par RPVA du 30 novembre 2022, Mme [V] a demandé au conseiller de la mise en état de :
– déclarer l’incident irrecevable car tardif ;
– débouter la société Avenir Mutuelle de ses demandes.
Par ordonnance du 8 décembre 2022, le magistrat de la mise en état a rejeté la demande de nullité et d’irrecevabilité des conclusions d’intimée.
Par requête du 15 décembre 2022, la société Avenir Mutuelle a déféré cette ordonnance à la cour.
En l’état de ses ultimes conclusions notifiées le 7 septembre 2023, elle demande de :
-la déclarer recevable en son déféré.
– infirmer l’ordonnance du 8 décembre 2022 ;
– constater le défaut de dénonciation de constitution d’avocat par l’intimée à l’avocat de l’appelante préalablement à la notification des conclusions d’intimée du 19 septembre 2022
– déclarer irrecevables les conclusions d’intimée notifiées le 19 septembre 2022 ;
– déclarer nulles pour vice de fond et irrecevables les conclusions d’intimée notifiées le 19 septembre 2022 ;
– déclarer nulles pour vice de fond et irrecevables les conclusions sur déféré notifiées par
Mme [V] le 7 septembre 2023.
– condamner Mme [V] à verser 2 000 euros à la société Avenir Mutuelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [V] aux entiers dépens ;
– débouter Mme [V] de ses demandes.
Par conclusions notifiées par RPVA le 7 septembre 2023, Mme [V] demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance du 8 décembre 2022;
– juger irrecevable le déféré d’Avenir mutuelle;
– juger irrecevable comme tardif l’incident soulevé par Avenir mutuelle;
– juger infondé l’incident soulevé par Avenir mutuelle;
– juger recevables les conclusions d’intimée de Mme [V];
– débouter Avenir mutuelle de son incident et de son déféré;
– condamner la société Avenir mutuelle à payer à Mme [V] la somme de 3600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de fixation a été rendue le 2 juin 2023 pour une audience devant se tenir le 8 septembre 2023 à 9 heures.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.
À l’issue des débats, les parties ont été informées de la date de délibéré fixée au 18 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité de la requête en déféré.
En application de l’article 916 du code de procédure civile, les ordonnances du conseiller de la mise en état peuvent être déférées par requête à la cour dans les quinze jours de leur date lorsqu’elles ont pour effet de mettre fin à l’instance, lorsqu’elles constatent son extinction ou lorsqu’elles ont trait à des mesures provisoires en matière de divorce ou de séparation de corps.
Elles peuvent être déférées dans les mêmes conditions lorsqu’elles statuent sur une exception de procédure, sur un incident mettant fin à l’instance, sur une fin de non-recevoir ou sur la caducité de l’appel.
Mme [V] fait notamment valoir que :
– l’ordonnance du 8 décembre 2022 ne peut faire l’objet d’un déféré dans la mesure où elle ne correspond à aucune des décisions limitativement énumérées à l’article 916, al 2, 3 et 5 du code de procédure civile :
– l’article 916 n’ouvre pas la possibilité du recours en déféré pour l’exception de nullité d’un acte n’émanant pas de l’appelant lui-même mais de l’intimé;
– cette ordonnance ne statuait pas non plus sur une fin de non recevoir ou sur un incident mettant fin à l’instance.
Il reste néanmoins que la société Avenir Mutuelle a soulevé un incident aux fins notamment de faire déclarer les conclusions de Mme [V] irrecevables, de sorte que l’ordonnance rendue a statué sur une fin-recevoir.
L’article 122 du code de procédure civile dispose en effet que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande.
Tel est bien le cas en l’espèce et dès lors la requête en déféré doit être déclarée recevable.
Sur le fond
Mme [V] soutient que le moyen adverse tendant à soulever une exception de nullité de la constitution et des conclusions d’intimé est irrecevable en tant que tardif dès lors que la société Avenir Mutuelle avait conclu au fond le 17 juin 2022 sans s’en prévaloir. Il reste néanmoins qu’à cette date, l’appelante ne pouvait soulever ce moyen puisqu’elle n’avait pas connaissance de la constitution de son contradicteur qui l’avait notifiée par RPVA à une adresse erronée.
En toute occurrence, la demande tendant à la nullité des conclusions pour vice de fond demeure une exception de nullité de fond pouvant également être soulevée en tout état de cause conformément à l’article 118 du code de procédure civile.
Le moyen tiré de la tardiveté de cette exception doit donc être rejeté.
La société Avenir Mutuelle soulève en premier lieu l’irrecevabilité des conclusions adverses en se prévalant d’une jurisprudence selon laquelle, en l’absence de dénonciation de la constitution d’intimé à l’avocat de l’appelant, l’irrecevabilité des conclusions serait encourue.
Il reste néanmoins que la jurisprudence précitée émane uniquement de quelques arrêts anciens de cours d’appel, au demeurant contredits par un arrêt plus récent de la cour d’appel de Bordeaux produit par l’intimée, aux termes duquel la régularité de la dénonciation de la constitution préalable d’un avocat à son adversaire n’est pas directement une condition de recevabilité de ses conclusions ultérieures; ces dernières n’encourant en effet l’irrecevabilité qu’en cas d’annulation de la constitution en application de l’article 694 du code de procédure civile.
Les arrêts de la Cour de cassation dont se prévaut la société ne sont pas transposables à l’espèce puisqu’ils sont tous relatifs à la caducité de la déclaration d’appel et non pas à l’irrecevabilité des conclusions d’intimé. Du reste, ils ne contredisent pas la jurisprudence ci-dessus développée.
En outre, force est de relever que les prescriptions tirées des articles 903, 960 et 673 du code de procédure civile, prévoyant notamment la dénonciation de la constitution d’avocat par l’intimé ou par toute personne qui devient partie en cours d’instance, sont dépourvues de toute sanction.
La société Avenir Mutuelle soutient vainement que l’absence de dénonciation de constitution équivaudrait à une absence de constitution alors même que cet acte a été fait et notifié par RPVA au greffe de la cour le 20 mai 2022 à 19h40. Ce moyen doit donc être rejeté.
La société Avenir Mutuelle se prévaut en deuxième lieu d’une nullité de fond entachant la constitution de l’intimé.
Elle fait valoir notamment que dans les matières où la représentation est obligatoire, l’absence de constitution d’un avocat postulant constituerait une irrégularité de fond.
Elle soutient que les conclusions de Me [V] sont nulles sur le fondement de l’article 117 du code de procédure civile en l’absence d’une dénonciation de la constitution de Me Faran; cette dernière ne disposant pas du pouvoir de représentation à l’égard de l’appelante.
Il reste néanmoins que « le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice » ne peut viser l’avocat qui a nécessairement par sa désignation par le client un mandat ad litem, et dispose donc d’un mandat général de représentation.
Dans le présent dossier, et ainsi que dit précédemment, il y a bien eu une constitution mais l’irrégularité a porté sur la dénonciation de celle-ci.
Dès lors, la dite irrégularité ne peut être sanctionnée qu’en application des dispositions du code de procédure civile sur la nullité des notifications qui sont des nullités de forme.
L’article 694 du code de procédure civile dispose que « La nullité des notifications est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure. »
L’article 114 du code de procédure civile énonce que: « Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public. »
En l’espèce, la nullité de la constitution de l’intimée n’est pas expressément prévue par la loi en cas d’erreur dans sa dénonciation à l’avocat de l’appelant; et en toute hypothèse la société Avenir Mutuelle ne soutient ni ne démontre l’existence d’un quelconque grief qui en aurait résulté.
Il résulte abondamment de tout ce qui précède que ni la constitution ni les conclusions de Mme [V] n’encourent une quelconque nullité.
L’ordonnance entreprise sera donc confirmée.
La société Avenir Mutuelle sera condamnée aux dépens du déféré.
Elle sera également condamnée au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [V].
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare recevable la requête en déféré.
La déclare néanmoins infondée et confirme l’ordonnance entreprise.
Condamne la société Avenir Mutuelle aux dépens du déféré.
Condamne la société Avenir Mutuelle au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [V].
Renvoie la présente affaire à la mise en état sous le RG n° 22/4218 et ordonne son déchambrement au profit de la 6-8 pour sa fixation.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE