Your cart is currently empty!
OM/FF
S.A. BASTIDE LE CONFORT MEDICAL, agissant par représentants légaux en exercice domiciliés de droit au siège social
C/
[N] [Z] épouse [Z]
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 07 JUILLET 2022
MINUTE N°
N° RG 22/00101 – N° Portalis DBVF-V-B7G-F4A4
Décision déférée à la Cour : Ordonnance Référé, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de DIJON, section RE, décision attaquée en date du 28 Janvier 2022, enregistrée sous le n° 21/00110
APPELANTE :
S.A. BASTIDE LE CONFORT MEDICAL, agissant par représentants légaux en exercice domiciliés de droit au siège social
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Hervé-georges BASCOU de la SELARL BASCOU-CAYEZ ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES substituée par Maître Aurore PORTEFAIX, avocat au barreau de NIMES, Maître Sophia BEKHEDDA, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
[N] [Z] épouse [Z]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Morgane AUDARD de la SCP AUDARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Juin 2022 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Olivier MANSION, Président de chambre chargé d’instruire l’affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
Marie-Françoise ROUX, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [Z] (la salariée) a été engagée le 18 février 2020 par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée à compter du 7 mars 2020, en qualité de vendeuse conseil secrétaire par la société Bastide le confort médical (l’employeur).
Le contrat de travail de la salariée a été suspendue à compter du 23 septembre 2021, à la suite du refus de la salariée de justifier d’un schéma vaccinal complet.
La salariée a saisi le conseil de prud’hommes, en sa formation des référés, qui, par ordonnance du 28 janvier 2022, a annulé la suspension du contrat de travail, a ordonné la réintégration, sous astreinte, de la salariée et a condamné l’employeur, par provision, à rétablir la salariée dans ses droits depuis le 23 septembre 2021.
L’employeur a interjeté appel le 4 février 2022.
Il conclut à l’infirmation de l’ordonnance et sollicite le paiement de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La salariée demande la confirmation de la décision et le paiement de la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 8 et 21 mars 2022.
MOTIFS :
Sur le référé :
L’article R. 1455-5 du code du travail dispose que dans tous les cas d’urgence, la formation des référés peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
L’article R. 1455-6 du même code, prévoit que cette formation peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, préscrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent afin de prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
En l’espèce, l’employeur rappelle qu’il a informé la salariée, le 3 septembre 2021, de l’obligation vaccinale prévue à l’article 12 de la loi du 5 août 2021, et lui a demandé de justifier d’un schéma vaccinal complet au 15 octobre 2021.
Cette information a été formalisée par lettre du 6 septembre 2021 (pièce n°5).
La salariée a refusé, puis a bénéficié de congés du 15 au 22 septembre 2021.
Il a été proposé à la salariée de la rencontrer le 23 septembre et, lors de cette entrevue, la salariée a confirmé qu’elle n’était pas vaccinée.
Le 23 septembre 2021, l’employeur a informé la salariée de la suspension de son contrat de travail.
A la demande du conseil de la salariée le 11 octobre 2021, l’employeur a justifié cette suspension par lettre du 13 octobre suivant.
1°) Il sera relevé que si la suspension du contrat de travail a été signée au nom de la société Bastide groupe, cette lettre émane de Mme [C], salariée responsable de l’agence de [Localité 5] et que l’employeur est intervenu volontairement à l’instance pour régulariser la procédure et reprendre, à son compte, la notification de la suspension.
2°) L’employeur soutient que la formation des référés est ‘incompétente’ dès lors qu’il existe une contestation sérieuse à la demande de la salariée en annulation de la suspension de son contrat de travail et de sa réintégration.
Il soutient que la salariée exerce à la fois des tâches administratives et des fonctions de vendeuses dans le magasin où elle est susceptible de recevoir des clients.
L’employeur indique que la salariée est soumise à l’obligation vaccinale prévue au 8° du I de l’article 12 précité puisqu’elle vend des dispositifs médicaux destinés à favoriser le retour au domicile et l’autonomie des personnes malades ou présentant une incapacité ou un handicap au sens de l’article L. 5232-3 du code de la santé publique.
La salariée répond qu’elle justifiait de l’existence d’un différend, et de la condition d’urgence au moment de son action en référé.
La loi du 5 août 2021 précitée dispose dans son article 12, que : ‘I. – Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 :
1° Les personnes exerçant leur activité dans :
a) Les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1 du code de la santé publique ainsi que les hôpitaux des armées mentionnés à l’article L. 6147-7 du même code ;
b) Les centres de santé mentionnés à l’article L. 6323-1 dudit code ;
c) Les maisons de santé mentionnées à l’article L. 6323-3 du même code ;
d) Les centres et équipes mobiles de soins mentionnés à l’article L. 6325-1 du même code ;
e) Les centres médicaux et équipes de soins mobiles du service de santé des armées mentionnés à l’article L. 6326-1 du même code ;
f) Les dispositifs d’appui à la coordination des parcours de santé complexes mentionnés aux II et III de l’article 23 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé ;
g) Les centres de lutte contre la tuberculose mentionnés à l’article L. 3112-2 du code de la santé publique ;
h) Les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic mentionnés à l’article L. 3121-2 du même code ;
i) Les services de médecine préventive et de promotion de la santé mentionnés à l’article L. 831-1 du code de l’éducation ;
j) Les services de prévention et de santé au travail mentionnés à l’article L. 4622-1 du code du travail et les services de prévention et de santé au travail interentreprises définis à l’article L. 4622-7 du même code ;
k) Les établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 2°, 3°, 5°, 6°, 7°, 9° et 12° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, à l’exception des travailleurs handicapés accompagnés dans le cadre d’un contrat de soutien et d’aide par le travail mentionné au dernier alinéa de l’article L. 311-4 du même code ;
l) Les établissements mentionnés à l’article L. 633-1 du code de la construction et de l’habitation, qui ne relèvent pas des établissements sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, destinés à l’accueil des personnes âgées ou handicapées ;
m) Les résidences-services destinées à l’accueil des personnes âgées ou handicapées mentionnées à l’article L. 631-13 du code de la construction et de l’habitation ;
n) Les habitats inclusifs mentionnés à l’article L. 281-1 du code de l’action sociale et des familles ;
2° Les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique, lorsqu’ils ne relèvent pas du 1° du présent I ;
3° Les personnes, lorsqu’elles ne relèvent pas des 1° ou 2° du présent I, faisant usage :
a) Du titre de psychologue mentionné à l’article 44 de la loi n° 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre social ;
b) Du titre d’ostéopathe ou de chiropracteur mentionné à l’article 75 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
c) Du titre de psychothérapeute mentionné à l’article 52 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique ;
4° Les étudiants ou élèves des établissements préparant à l’exercice des professions mentionnées aux 2° et 3° du présent I ainsi que les personnes travaillant dans les mêmes locaux que les professionnels mentionnés au 2° ou que les personnes mentionnées au 3° ;
5° Les professionnels employés par un particulier employeur mentionné à l’article L. 7221-1 du code du travail, effectuant des interventions au domicile des personnes attributaires des allocations définies aux articles L. 232-1 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles ;
6° Les sapeurs-pompiers et les marins-pompiers des services d’incendie et de secours, les pilotes et personnels navigants de la sécurité civile assurant la prise en charge de victimes, les militaires des unités investies à titre permanent de missions de sécurité civile mentionnés au premier alinéa de l’article L. 721-2 du code de la sécurité intérieure ainsi que les membres des associations agréées de sécurité civile mentionnées à l’article L. 725-3 du même code participant, à la demande de l’autorité de police compétente ou lors du déclenchement du plan Orsec, aux opérations de secours et à l’encadrement des bénévoles dans le cadre des actions de soutien aux populations ou qui contribuent à la mise en place des dispositifs de sécurité civile dans le cadre de rassemblements de personnes ;
7° Les personnes exerçant l’activité de transport sanitaire mentionnée à l’article L. 6312-1 du code de la santé publique ainsi que celles assurant les transports pris en charge sur prescription médicale mentionnés à l’article L. 322-5 du code de la sécurité sociale ;
8° Les prestataires de services et les distributeurs de matériels mentionnés à l’article L. 5232-3 du code de la santé publique.
I bis. – Pour l’application des 2° et 3° du I et, en tant qu’il se réfère à ces dispositions, du 4° du même I, l’obligation vaccinale prévue au premier alinéa dudit I n’est applicable, dans les établissements d’accueil du jeune enfant, les établissements et services de soutien à la parentalité et les établissements et services de protection de l’enfance situés hors des structures mentionnées au 1° du même I, qu’aux professionnels et aux personnes dont l’activité comprend l’exercice effectif d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins attachés à leur statut ou à leur titre.
II. – Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé, détermine les conditions de vaccination contre la covid-19 des personnes mentionnées au I du présent article. Il précise les différents schémas vaccinaux et, pour chacun d’entre eux, le nombre de doses requises.
Ce décret fixe les éléments permettant d’établir un certificat de statut vaccinal pour les personnes mentionnées au même I et les modalités de présentation de ce certificat sous une forme ne permettant d’identifier que la nature de celui-ci et la satisfaction aux critères requis. Il détermine également les éléments permettant d’établir le résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 et le certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la covid-19.
III. – Le I ne s’applique pas aux personnes chargées de l’exécution d’une tâche ponctuelle au sein des locaux dans lesquels les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° du même I exercent ou travaillent.
IV. – Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé, peut, compte tenu de l’évolution de la situation épidémiologique et des connaissances médicales et scientifiques, suspendre, pour tout ou partie des catégories de personnes mentionnées au I, l’obligation prévue au même I’.
L’article 14 dispose que : ‘. I- A. – A compter du lendemain de la publication de la présente loi et jusqu’au 14 septembre 2021 inclus, les personnes mentionnées au I de l’article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n’ont pas présenté les documents mentionnés au I de l’article 13 ou, à défaut, le justificatif de l’administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l’article 12 ou le résultat, pour sa durée de validité, de l’examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 prévu par le même décret.
B. – A compter du 15 septembre 2021, les personnes mentionnées au I de l’article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n’ont pas présenté les documents mentionnés au I de l’article 13 ou, à défaut, le justificatif de l’administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l’article 12.
Par dérogation au premier alinéa du présent B, à compter du 15 septembre 2021 et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus, sont autorisées à exercer leur activité les personnes mentionnées au I de l’article 12 qui, dans le cadre d’un schéma vaccinal comprenant plusieurs doses, justifient de l’administration d’au moins une des doses requises par le décret mentionné au II du même article 12, sous réserve de présenter le résultat, pour sa durée de validité, de l’examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 prévu par le même décret.
II. – Lorsque l’employeur constate qu’un salarié ne peut plus exercer son activité en application du I du présent article, il l’informe sans délai des conséquences qu’emporte cette interdiction d’exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. Le salarié qui fait l’objet d’une interdiction d’exercer peut utiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés. A défaut, son contrat de travail est suspendu.
La suspension mentionnée au premier alinéa du présent II, qui s’accompagne de l’interruption du versement de la rémunération, prend fin dès que le salarié remplit les conditions nécessaires à l’exercice de son activité prévues au I. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits légaux ou conventionnels acquis par le salarié au titre de son ancienneté. Pendant cette suspension, le salarié conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit.
La dernière phrase du deuxième alinéa du présent II est d’ordre public…’.
Le 8° de l’article 12 vise les prestataires de services et les distributeurs de matériels mentionnés à l’article L. 5232-3 du code de la santé publique.
Cet article dispose que : ‘Les prestataires de service et les distributeurs de matériels, y compris les dispositifs médicaux, destinés à favoriser le retour à domicile et l’autonomie des personnes malades ou présentant une incapacité ou un handicap au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles, doivent disposer de personnels titulaires d’un diplôme, d’une validation d’acquis d’expérience professionnelle ou d’une équivalence attestant d’une formation à la délivrance de ces matériels ou de ces services et respecter des conditions d’exercice et règles de bonne pratique’.
Le fait de savoir si la salariée relève ou non des dispositions précitées, en raison de l’activité réellement exercée, constitue une contestation sérieuse.
De plus, l’existence d’un différend au sens de l’article susvisé, ne signifie par que cette existence est une condition de validité d’une action en référé, mais que le juge des référés peut pendre les mesures que ce différend justifie.
Par ailleurs, nonobstant l’urgence, la salariée invoque l’existence d’un trouble manifestement illicite.
Cependant, la suspension de l’exécution du contrat de travail en conformité avec la loi ci-avant rappelée, ne constitue pas un trouble manifestement illicite.
Il est, au surplus, jugé que le juge des référés peut, même en l’absence de disposition l’y autorisant, ordonner la poursuite des relations contractuelles en cas de violation d’une liberté fondamentale.
Ici, la suspension du contrat de travail à la suite du refus de justifier d’un schéma vaccinal complet, ne caractérise pas la violation d’une liberté fondamentale ou à tout le moins, se heurte au droit à la santé et à la vie d’autrui.
En conséquence, il n’y a pas lieu à référé.
Sur les autres demandes :
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la salariée et la condamne à payer à l’employeur la somme de 2 000 €.
La salariée supportera les dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :
– Infirme l’ordonnance du 28 janvier 2022 ;
Statuant à nouveau :
– Dit n’y avoir lieu à référé ;
Y ajoutant :
– Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme [Z] et la condamne à payer à la société Bastide le confort médical la somme de 2 000 euros ;
– Condamne Mme [Z] aux dépens de première instance et d’appel ;
Le greffierLe président
Frédérique FLORENTINOlivier MANSION