Agent commercial : décision du 6 avril 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17423

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Agent commercial : décision du 6 avril 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/17423
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6 avril 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/17423

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023

N° 2023/45

Rôle N° RG 19/17423 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFE47

SAS [F] GROUP

C/

[V] [E] [M]

SAS ARDISSON-ESSENZE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Fabien COLLADO

Me Danièle PRIEUR

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 21 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2016J00054.

APPELANTE

SAS [F] GROUP anciennement dénommée SAS ETABLISSEMENTS [F], dont le siège social est sis [Adresse 3].[Adresse 1]

représentée par Me Fabien COLLADO de la SELARL COLLADO FABIEN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMES

Monsieur [V] [E] [M], demeurant [Adresse 2])

représenté par Me Danièle PRIEUR, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Noëllie VEDEL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

SAS ARDISSON-ESSENZE, dont le siège social est sis [Adresse 2])

représentée par Me Danièle PRIEUR, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Noëllie VEDEL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 26 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

Mme Marie-Amélie VINCENT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Madame Marie PARANQUE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 06 Avril 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023,

Signé par Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre et Madame Laure METGE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [V] [M], de nationalité italienne, a exercé l’activité d’agent commercial à titre indépendant jusqu’au 1er janvier 2014 dans le cadre d’un contrat de commercialisation des produits de la SAS Établissements [F], devenue [F] Group, conclu le 1er janvier 2006. Il avait l’exclusivité de la commercialisation des huiles essentielles, synthétiques, concrètes et absolus en Italie, sauf Calabre.

Un second contrat a été conclu le 1er janvier 2014 avec la société Ardisson-Essenze, que M. [V] [M] a créée en décembre 2013 et dont il est le dirigeant, pour une commercialisation des huiles essentielles et synthétiques sur le même secteur d’exclusivité, à savoir l’Italie sauf la Calabre.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 février 2015, reçue le 23 février 2015, M. [V] [M] a mis en demeure la SAS [F] Group de régulariser sa situation au regard de son inscription à la Fondation Enasarco, qui garantit le régime de sécurité sociale et de prévoyance aux agents commerciaux basés sur le territoire italien.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 juin 2015, la société Ardisson-Essenze a notifié à la SAS [F] Group la rupture du contrat conclu le 1er janvier 2014, avec effet au 31 décembre 2015 lui reprochant le non-versement de la contribution obligatoire à la Fondation Enasarco, le non-respect des conditions de rémunération prévues au contrat et de la clause d’exclusivité et la mettant en demeure de régler les commissions non versées et l’indemnité de fin de contrat.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juillet 2015, la SAS [F] Group a contesté point par point les griefs formulés à l’appui de la rupture contractuelle et pris acte de la rupture aux torts exclusifs de l’agent commercial, s’opposant au paiement de toute indemnité de fin de contrat.

La société Ardisson-Essenze et M. [V] [M] ont fait assigner la SAS [F] Group devant le tribunal de commerce de Grasse pour avoir paiement des commissions restées impayées et de l’indemnité de fin de contrat.

Par jugement du 21 octobre 2019, ce tribunal a :

– dit et jugé qu’en l’absence de choix des parties, et en application des dispositions des articles 6 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978, 4 1-b du Règlement communautaire « Rome I » en date du 17 juin 2008 et des articles 4-1 et 4-2 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, la loi italienne est applicable aux contrats signés par les parties,

– dit et jugé que la société Établissements [F] était tenue d’affilier M. [M] puis la société Ardisson Essenze au régime de la Fondation Enasarco,

– dit et jugé que la société Établissements [F] a commis une faute en s’abstenant d’affilier M. [M] puis la société Ardisson Essenze au régime de la Fondation Enasarco,

– débouté M. [V] [M] et la société Ardisson Essenze de leurs demandes au titre du préjudice subi insuffisamment motivées,

– débouté M. [V] [M] de sa demande pour la somme de 13.984,37 euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2012 et 2013 insuffisamment motivée,

– débouté la société Ardisson Essenze de sa demande pour la somme de 16.174,94euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2014 et 2015 insuffisamment motivée,

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze la somme de 819,92 euros au titre du montant des commissions dues,

– dit que la cessation du contrat en date du 1er janvier 2014 est donc justifiée par les fautes commises par la société Établissements [F],

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze la somme de 21 384.04 euros à titre d’indemnité de fin de contrat,

– débouté la société Établissements [F] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

– dit que la société Établissements [F] a procédé à une vente sur le territoire italien à une société de droit hollandais et en infraction de l’article 3 du contrat du 1er janvier 2014,

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts et débouté la société Ardisson Essenze pour le surplus,

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze et à M. [V] [M] la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Établissements [F] aux dépens.

La SAS [F] Group a interjeté appel par déclaration du 14 novembre 2019.

Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 13 janvier 2023, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la SAS [F] Group demande à la cour de :

– confirmer le jugement du tribunal de commerce de Grasse en ce qu’il a débouté M. [V] [M] et la société Ardisson-Essenze de leurs demandes au titre des commissions impayées, respectivement pour 2012-2013 et pour 2014-2015, comme insuffisamment motivées,

– réformer le jugement du tribunal de commerce de Grasse du 21 octobre 2019,

et statuant à nouveau :

– dire que la loi applicable est la loi française.

– constater au besoin dire et juger que la loi Française ne prévoit aucune obligation d’inscription des agents commerciaux auprès d’un organisme social à la charge du mandant ;

– constater qu’il ne saurait être reproché à la SAS [F] Group de ne pas avoir enregistré la société Ardisson-Essenze et M. [M] auprès de l’Enasarco puisqu’à aucun moment cette société, ni M. [M] pendant son contrat, n’ont sollicité leur inscription auprès de cet organisme, ni même mentionné cette inscription dans le contrat ;

– constater qu’en tout état de cause, les demandeurs pouvaient (en vigueur depuis 2012) s’inscrire eux-mêmes à l’Enarsarco pour le compte du mandant dans le cadre du régime de substitution ;

– constater au besoin dire et juger que la société Ardisson-Essenze et M. [M] ne justifient d’aucune faute et encore moins d’un préjudice,

en conséquence,

– débouter la société Ardisson-Essenze et M. [M] de leurs demandes,

– constater l’absence de violation de la clause d’exclusivité territoriale ;

– constater que la société Ardisson-Essenze ne justifie d’aucun préjudice,

en conséquence,

– débouter la société Ardisson-Essenze de sa demande de dommages et intérêts

– constater au besoin dire et juger que les demandeurs adressaient leur facture après validation des relevés de commissions adressés par la mandante ;

– constater l’absence de griefs sur les taux de commissions modifiés préalablement à la rupture du contrat d’agent commercial ;

– constater que les modifications ont été acceptées par les demandeurs ;

– constater que même un taux modifié unilatéralement (ce qui est contesté) ne peut donner lieu à une rupture pour juste motif compte tenu d’un long délai écoulé entre la réduction et les premières contestations de l’agent commercial ;

en conséquence,

– débouter les demandeurs de leurs demandes.

statuant sur les commissions provenant de commandes postérieures à la rupture du contrat et une commande antérieure :

– débouter les demandeurs de leurs demandes.

– condamner la société Ardisson-Essenze à payer à la SAS [F] Group une indemnité de 400.000 € en réparation des préjudices subis, ce montant augmenté des intérêts au taux légal à dater du prononcé de la décision à intervenir,

en tout état de cause :

– condamner la société Ardisson-Essenze et M. [M] à verser chacun à la SAS [F] Group la somme de 50.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et d’appel.

Par conclusions notifiées et déposées le 2 décembre 2022, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la société de droit italien Ardisson Essenze et M. [V] [M] demandent à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Grasse en ce qu’il a jugé que :

– en l’absence de choix des parties et en application des dispositions des articles 6 la convention de La Haye du 14 mars 1978, 4 1-b du Règlement communautaire « Rome I » du 17 juin 2008 et des articles 4-1 et 4-2 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, la loi italienne est applicable aux contrats signés par les parties,

– la société [F] était tenue d’affilier M. [M] puis la société Ardisson Essenze au régime de la Fondation Enasarco,

– la société [F] a commis une faute en s’abstenant d’affilier M. [M] puis la société Ardisson Essenze au régime de la Fondation Enasarco,

– la société [F] doit être condamnée à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 819,92 euros au titre du montant des commissions dues pour des commandes passées avant rupture du contrat ou dans un délai raisonnable après rupture,

– la cessation du contrat en date du 1er janvier 2014 est justifiée par les fautes commises par la société [F],

– la société [F] doit être condamnée à verser à la société Ardisson Essenze une indemnité de rupture du contrat,

– la société [F] doit être déboutée de toutes ses demandes, fins et prétentions, et notamment de ses demandes indemnitaires dirigées contre la société Ardisson Essenze,

-la société [F] a vendu des produits à une société hollandaise sur le territoire italien en violation des dispositions du contrat liant les parties et instaurant une exclusivité territoriale au bénéfice de la société Ardisson Essenze,

– la société [F] doit être condamnée à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Grasse en ce qu’il a :

– débouté M. [M] et la société Ardisson Essenze de leurs demandes au titre du préjudice subi en raison de l’absence d’affiliation au régime Enasarco car insuffisamment motivées,

– débouté M. [M] de sa demande en paiement de la somme de 13.984, 37 euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2012 et 2013, insuffisamment motivées,

– débouté la société Ardisson Essenze de sa demande en paiement de la somme de 16.174,94 euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2014 et 2015, insuffisamment motivées,

– condamné la société [F] à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts par suite de la violation de l’exclusivité territoriale qui lui était contractuellement consentie et débouté la société Ardisson Essenze pour le surplus,

– condamné la société [F] à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 21.384,04 euros à titre d’indemnité de rupture du contrat,

en conséquence, et statuant à nouveau,

– condamner la société [F] :

– à verser à M. [M] et à la société Ardisson Essenze la somme de 5.000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en raison de leur absence d’affiliation au régime de la Fondation ENASARCO,

– à verser à M. [M] la somme de 14.450,08 euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2012 et 2013,

– à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 16.354, 75 euros au titre du montant des commissions impayées pour les années 2014 et 2015,

– à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 26.068,10 euros au titre de l’indemnité de fin de contrat, à titre d’indemnité de rupture du contrat d’agent commercial aux torts de la société [F],

– si la cour devait estimer que le montant de cette indemnité de fin de contrat doit être calculé sur le montant des commissions perçues au titre des années 2014 et 2015 uniquement, alors la société [F] devra être condamnée à verser la somme de 27.576,75 euros à la société Ardisson Essenze à titre d’indemnité de rupture du contrat d’agent commercial,

– à verser à la société Ardisson Essenze la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts au titre de la violation de l’exclusivité territoriale contractuellement accordée,

en tout état de cause,

– débouter la société [F] de sa demande en condamnation de la société Ardisson Essenze et de M. [M] au paiement de la somme de 50.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– condamner la société [F] à payer à la société Ardisson Essenze et à M. [M] la somme de 5.000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner enfin aux entiers dépens.

MOTIFS

1. La loi applicable aux contrats conclus entre les parties :

Comme l’a exactement relevé le tribunal de commerce de Grasse, aucun des contrats respectivement conclus les 1er janvier 2006 et 1er janvier 2014, ne contient de clause déterminant la loi applicable.

Ces contrats relèvent des dispositions de l’article 6 de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrats d’intermédiaires et à la représentation, aux termes duquel :

Dans la mesure où elle (la loi applicable au contrat) n’a pas été choisie conformément aux dispositions de l’article 5, la loi applicable est la loi interne de l’État dans lequel, au moment de la formation du rapport de représentation, l’intermédiaire a son établissement professionnel ou, à défaut, sa résidence habituelle.

Il ne peut être dénié qu’en l’espèce, tant M. [V] [M], que la SAS Ardisson Essenze par la suite, ont, au moment de la souscription du contrat d’agence commerciale, leur domicile et établissement professionnel en Italie et qu’ainsi la loi italienne doit être appliquée.

La Convention de Rome du 19 juin 1980 relative à la loi applicable aux obligations contractuelles, qui n’a pas remis en cause les dispositions spécifiques de la Convention de La Haye, édicte en tout état de cause :

1. Dans la mesure où la loi applicable au contrat n’a pas été choisie conformément aux dispositions de l’article 3, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Toutefois, si une partie du contrat est séparable du reste du contrat et présente un lien plus étroit avec un autre pays, il pourra être fait application, à titre exceptionnel, à cette partie du contrat de la loi de cet autre pays.

2. Sous réserve du paragraphe 5, il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s’il s’agit d’une société, association ou personne morale, son administration centrale. Toutefois, si le contrat est conclu dans l’exercice de l’activité professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est situé son principal établissement ou, si, selon le contrat, la prestation doit être fournie par un établissement autre que l’établissement principal, celui où est situé cet autre établissement.

En l’espèce, la présomption de l’alinéa 2 s’appliquet puisque M. [V] [M] avait sa résidence habituelle en Italie, devait exercer son activité d’agent commercial exclusivement en Italie, ces éléments désignant également la loi italienne comme seule applicable.

Le fait que le contrat soit rédigé en français, ait été signé en France et contienne une clause aux termes de laquelle l’agent commercial bénéficiait d’une mise à disposition du laboratoire d’analyse de son mandant et de sa structure logistique, ne suffit pas à renverser cette présomption et établir l’existence de liens plus étroits avec la France qui conduirait à appliquer la loi française.

Le règlement n°593/2008 du 17 juin 2008, qui n’a pas non plus remis en cause les dispositions de la Convention de la Haye (article 25), désigne également la loi italienne comme loi applicable aux contrats litigieux :

1. À défaut de choix exercé conformément à l’article 3 et sans préjudice des articles 5 à 8, la loi applicable au contrat suivant est déterminée comme suit : (‘) b) le contrat de prestation de services est régi par la loi du pays dans lequel le prestataire de services a sa résidence habituelle.

C’est donc exactement que le tribunal de commerce de Grasse a dit que la loi italienne était applicable aux contrats d’agence commerciale conclus entre les parties et le jugement déféré est confirmé sur ce point.

2. Sur la rupture du contrat d’agence commerciale :

Pour justifier de la rupture du contrat d’agence commerciale imputable à la SAS [F], la SAS Ardisson-Essenze a invoqué le défaut d’affiliation de l’agent commercial à la Fondation Enasarco chargé du régime de vieillesse des agents commerciaux italiens, la modification unilatérale du taux de commission applicable selon le contrat d’agence commerciale conclu entre les parties et la violation de l’exclusivité accordée à l’agent commercial. La SAS [F] Group soutient quant à elle que son agent a violé ses obligations d’exclusivité et de loyauté à son égard.

L’article 1750 du code civil italien permet à chaque partie de résilier le contrat dès lors qu’un préavis est respecté, ce qui est le cas en l’espèce, un préavis de six mois ayant été respecté par la SAS Ardisson-Essenze. Lorsque l’agent met fin au contrat, il n’a pas droit à l’indemnité prévue à l’article 1751 du code civil italien, sauf si la cessation du contrat est justifiée par des circonstances imputables au mandant.

2.1. L’obligation d’affiliation de l’agent commercial à la Fondation Enasarco :

La SAS [F] Group fait valoir qu’aucune faute justifiant la résiliation du contrat d’agent commercial ne peut lui être reprochée à ce titre puisque la SAS Ardisson Essenze n’a jamais formulé une telle demande et a fortiori ne l’a jamais mise en mis en demeure de procéder à son inscription. Elle précise qu’il ne lui appartenait pas d’utiliser le mécanisme de substitution prévu par la règlementation italienne lorsque le mandant est situé à l’étranger et est dépourvu d’un établissement en Italie.

Les intimés soutiennent au contraire que l’inscription des agents commerciaux italiens à l’ENASARCO est obligatoire, même si leur mandant est une société étrangère n’ayant aucun siège ou établissement situé en Italie.

Chacune des parties a produit une consultation émanant d’un avocat italien pour établir la teneur du droit italien sur le statut des agents commerciaux en Italie et des pièces en provenance du site internet de la fondation Enasarco.

Il en résulte que l’ENASARCO a, aux termes de la loi du 2 février 1973, pour objet de fournir aux agents et représentants de commerce visés aux articles 1742 et 1752 du code civil italien la pension d’invalidité, de vieillesse et de survivant instituée par la loi du 22 juillet 1966, n° 613. L’ENASARCO assure en outre, par des gestions séparées, des actions de formation et de qualification professionnelle et la gestion de l’indemnité de résiliation du contrat d’agence.

Cette loi dispose en son article 5 que sont obligatoirement inscrits à l’ENASARCO : les représentants commerciaux opérant sur le territoire national au nom et pour le compte des mandants italiens ou des mandants étrangers qui ont leur siège social ou un établissement en Italie ; les agents et représentants commerciaux italiens opérant à l’étranger au nom et pour le compte de mandants italiens ou de mandants étrangers ayant leur siège ou un établissement en Italie.

L’article 40 de la loi prévoit que des règlements d’application sont pris par décrets du ministre du travail. Le règlement d’application du 20 février 1974 prévoit, s’agissant des entreprises étrangères n’ayant pas de siège ou d’établissement en Italie : I preponenti stranieri che non abbiano alcuna sede o dipendenza in Italia possono iscrivere all’ENASARCO i propri agenti e rappresentanti di commercio cittadini italiani solo ove si impegnino, mediante atto d’obbligo, al rispetto delle norme contenute nella legge 2 febbraio 1973, n. 12.

Traduction libre : Les mandants étrangers qui n’ont pas de siège ou de succursale en Italie peuvent enregistrer à l’ENASARCO leurs agents et représentants commerciaux qui sont des citoyens italiens seulement s’ils s’engagent, par un acte d’obligation, à respecter les règles contenues dans la loi n° 12 du 2 février 1973 n. 12.

Le Règlement CE 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale a affirmé le principe de la lex loci laboris (loi du lieu de travail) et celui de l’égalité de traitement des salariés et non-salariés opérant notamment dans un même pays.

L’article 2.2 du règlement de 2004 dispose : 2. I preponenti stranieri che non abbiano alcuna sede o dipendenza in Italia devono iscrivere alla Fondazione i propri agenti operanti in Italia impegnandosi al rispetto delle norme contenute nel presente Regolamento, mediante atto d’obbligo, redatto in lingua italiana, sul modello della Fondazione e con firma autenticata.

Traduction libre : 2. Les mandants étrangers qui n’ont pas de bureau ou de succursale en Italie doivent enregistrer leurs agents opérant en Italie auprès de la Fondation et s’engager à respecter les règles contenues dans le présent règlement, au moyen d’un acte d’obligation rédigé en langue italienne, sur le modèle de la Fondation et avec une signature authentifiée.

Le règlement Enasarco de 2013 a précisé : 1. Sono obbligatoriamente iscritti alla Fondazione tutti i soggetti di cui all’articolo 1 che operino sul territorio nazionale in nome e per conto di preponenti italiani o di preponenti stranieri che abbiano la sede o una qualsiasi dipendenza in Italia. L’obbligo di iscrizione riguarda sia gli agenti operanti individualmente sia quelli operanti in forma societaria o comunque associata, qualunque sia la configurazione giuridica assunta.

2. Resta ferma l’applicazione delle norme dell’Unione Europea e delle convenzioni internazionali in materia di coordinamento dei sistemi di sicurezza sociale.

3. Nei casi diversi da quelli disciplinati al comma 1 la Fondazione può autorizzare l’agente che lo abbia richiesto ad iscriversi alla Fondazione medesima. In tal caso l’agente è ammesso al versamento, a suo esclusivo carico, del contributo di cui all’articolo 4 e seguenti.

Traduction libre : 1. Sont obligatoirement inscrites à la Fondation toutes les personnes visées à l’article 1er qui opèrent sur le territoire national au nom et pour le compte de commettants italiens ou de commettants étrangers ayant leur siège ou un établissement (succursale) en Italie. L’obligation d’enregistrement concerne aussi bien les agents exerçant à titre individuel que ceux exerçant sous forme de société ou d’association, quelle que soit la configuration juridique adoptée.

2. L’application des normes de l’Union Européenne et des conventions internationales en matière de coordination des systèmes de sécurité sociale reste inchangée

3. Dans les cas autres que ceux visés au paragraphe 1, la Fondation peut autoriser l’agent qui en fait la demande à devenir membre de la Fondation. Dans ce cas l’agent est redevable de la contribution visée aux articles 4 et suivants.

Comme le relève l’avocat [L], consulté sur la teneur du droit italien par la SAS [F] Group (pièce 31 de l’appelante), le Règlement CE 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale a donc conduit à une obligation d’affiliation de l’agent commercial italien à l’ENASARCO.

La circulaire du 19 juillet 2012 rappelle en premier lieu l’obligation d’affiliation de l’agent à l’ENASARCO pour les mandants de l’Union Européenne qui n’ont ni siège ni établissement/succursale en Italie, en application du principe lex loci laboris et du principe d’égalité de traitement. Elle prévoit en second lieu la possibilité d’une contribution en substitution effectuée par l’agent lui-même.

Il résulte de l’ensemble de ces dispositions combinées que, comme l’a énoncé le tribunal de commerce de Grasse, le mandant a l’obligation d’affilier son agent italien exerçant en Italie à l’ENASARCO et il est réservé une faculté à l’agent lui-même, dans l’hypothèse où son mandant, même ressortissant de l’Union Européenne, n’y pourvoirait pas, d’effectuer lui-même cette affiliation.

En conséquence, l’absence d’affiliation, pourtant obligatoire en application des textes susvisés, constitue une faute imputable au mandant pour ce qui concerne la non-affiliation de la SAS Ardisson-Essenze et de M. [V] [M].

Il importe peu dès lors que l’agent bénéficie d’une faculté d’inscription personnelle, celle-ci ne pouvant être mise en ‘uvre qu’en raison de la carence du mandant.

Il est également inopérant d’invoquer l’absence de mise en demeure quand l’affiliation litigieuse relève d’un régime de prévoyance obligatoire, visé par le Règlement CE 888/2004. Il est tout aussi vain d’alléguer que le mail du 13 décembre 2013 ne concernerait pas la société Ardisson Essenze, puisque signé par M. [V] [M], quand la totalité de la teneur du message est un « relevé de conclusions » d’une réunion tenue entre les deux parties pour leurs futures relations commerciales après la signature du contrat du 1er janvier 2004.

Enfin, la cour relève que, même dûment informée par une documentation remise par M. [V] [M] et par la possibilité de consulter le site de l’ENASARCO, la SAS [F] Group a opposé un refus exprès dans son courriel en réponse du 2 avril 2014 en indiquant sous la demande d’affiliation « nous ne pouvons pour l’instant donner suite à cette demande, mon avocat doit revenir vers moi » et n’a jamais consenti à donner une autre explication à son agent.

Faute d’une quelconque preuve que les droits de M. [V] [M] ont été effectivement altérés par le défaut d’affiliation à l’ENASARCO du fait de la SAS [F] Group, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formulées par les intimés.

2.2. La modification des taux de commissions :

La modification unilatérale des taux de commissions par le mandant a été également invoquée par les intimés pour justifier la fin du contrat d’agence au 31 décembre 2015.

La SAS [F] Group soutient que la possibilité de la modification du taux de commission a été expressément prévue par le contrat et que tant M. [V] [M] que la SAS Ardisson-Essenze ont accepté les modifications proposées.

Les contrats litigieux contiennent tous deux une clause 8 relative à la rémunération de l’agent aux termes de laquelle le taux de commission de 5% ou 3% pourra faire l’objet d’une révision soit à la hausse, soit à la baisse en fonction de la spécificité des affaires.

Le droit à commission de l’agent est fixé par l’article 1748 du code civil italien. Les deux avocats consultés sur la teneur du droit italien lorsqu’il existe une modification du taux à commission prévu dans le contrat, exposent que le principe est celui de la liberté contractuelle de modifier un accord antérieur sans pouvoir déroger toutefois à des dispositions impératives.

La jurisprudence italienne considère les clauses permettant une modification unilatérale du contrat par l’une des parties comme nulles lorsqu’elles sont purement potestatives ou qu’elles rendent l’objet du contrat indéterminé. Toutefois, il a été également admis que « les parties peuvent prévoir de modifier les clauses contractuelles dans le but de mieux adapter le rapport aux exigences des parties, comme elles se sont modifiées au cours du temps. Il est toutefois nécessaire que le pouvoir unilatéral de modification ainsi accordé ait des limites de manière à ne pas exclure la force obligatoire du contrat à l’égard d’une des parties contractantes ; et il est aussi nécessaire que le pouvoir ainsi délimité soit exercé par le titulaire dans le principe de correction et de bonne foi » (pièce 44 des intimés, décision de la Cour de cassation italienne du 2 mai 2000).

La clause rappelée ci-dessus ne rend pas l’objet du contrat indéterminé et ne peut être qualifiée de potestative, aucun des termes de la clause ne soumettant la modification à la seule volonté du mandant.

En l’espèce, il résulte des pièces produites par l’appelante que le règlement des commissions s’établissait de la manière suivante : la SAS [F] Group adressait à son agent un relevé de commissions avec le virement des sommes correspondantes. Ce relevé était alors vérifié par l’agent qui établissait une facture transmise au mandant.

Ce processus garantit, en cas de minoration, comme en cas de hausse, le plein accord des parties et le principe de correction et de bonne foi exigé pour l’application du contrat par la loi italienne.

S’il existe effectivement des discussions, partielles et peu fréquentes, sur un taux de commission particulier dans les échanges produits aux débats, les baisses ont été justifiées par le mandant par les conditions économiques du secteur sans que cela ne soit ensuite contesté tant par M. [V] [M] que par la SAS Ardisson-Essenze, qui n’ont jamais justifié d’une quelconque mise en demeure du mandant ou d’un refus de facturation.

Les tableaux produits aux débats, mêmes expurgés des annotations manuscrites qui y figuraient et les rendaient difficilement lisibles, n’émanent que des intimés eux-mêmes et ont été manifestement établis postérieurement à la rupture ; ils ne peuvent en aucune manière constituer une preuve de baisses unilatérales non justifiées par un accord des parties.

Le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a rejeté la demande formée par les intimés à ce titre.

2.3. La violation de l’exclusivité de l’agent commercial :

La SAS [F] Group conteste toute violation de l’exclusivité des ventes en Italie consentie dans le contrat d’agence. Elle fait valoir que les intimés ne produisent aucune preuve, notamment aucun procès-verbal de constat de la prétendue violation de l’exclusivité et que la photographie produite est illisible. Elle ajoute qu’elle vend dans le monde entier des produits et qu’elle ne peut être responsable, même à supposer que les fûts photographiés ou objet des factures produites aux débats par la société Ardisson-Essenze soient les siens, d’une revente dans le territoire d’exclusivité de son agent commercial. Elle soutient enfin, que même à supposer qu’il s’agisse des mêmes fûts, elle n’a commis aucune faute dès lors que la vente portait sur des produits AGAN pour lesquels la société Ardisson-Essenze percevait une prime forfaitaire annuelle comme en attestent les documents produits aux débats.

L’article 1 du contrat d’agence concède l’exclusivité de la commercialisation des huiles essentielles ainsi que des synthétiques sur le territoire italien, l’article 3 précise que la SAS [F] garantit que toutes les commandes d’huiles essentielles à destination d’un client du secteur ainsi défini (Italie sauf Calabre) et qui parviendraient directement, seront transmises à la SAS Arisson-Essenze à l’exception du cas de l’article 4 qui définit le client restant la propriété de la SAS [F] Group sur le territoire d’exclusivité de l’agent commercial.

Pour justifier de la violation de cette clause d’exclusivité, la SAS Ardisson-Essenze se borne à produire une photographie de ce qui semble être un fût étiqueté « [F] », une attestation et une facture qui établissent que la société CP Essenze a commandé à la société de droit hollandais AAKO du galaxolyde qui a été reçu en fûts étiquetés « [F] ».

Or, d’une part, la SAS Ardisson-Essenze ne justifie donc que d’un fait isolé pour lequel elle serait seulement en droit d’obtenir un droit à commission en application de l’article 1748 du code civil italien et, d’autre part, les produits concernés « Galaxolyde AGAN » sont expressément évoqués par la SAS Ardisson-Essenze dans le courriel du 13 décembre 2014 comme donnant lieu à une « prime de vente », laquelle a fait l’objet de versements réguliers comme en attestent les pièces 38 à 41 de la SAS [F], sans que ni ces versements, ni même les montant fixés ne soient jamais contestés par la SAS Ardisson-Essenze avant la lettre de résiliation du contrat d’agence commerciale.

Il ne peut en outre être tiré aucune conséquence de la présence de clauses dans les contrats d’agence commercial conclus par la société Ardisson-Essenze avec les sociétés Payan et Citroflor stipulant l’existence de mandats confiés par des sociétés tierces, quand le silence observé par le contrat conclu avec la SAS [F] oblige à déterminer la volonté et le comportement des parties à ce titre.

C’est par conséquent à tort que le tribunal de commerce a énoncé que la SAS [F] Group avait violé la clause d’exclusivité de son agent.

2.4. la violation de l’obligation d’exclusivité et du devoir de loyauté par l’agent commercial invoquée par la SAS [F] Group :

La SAS [F] Group reproche à la SAS Ardisson-Essenze de ne pas l’avoir informée de ce qu’elle avait conclu, un contrat d’agence commerciale avec la société Payan le 30 décembre 2013 et avec la société Citroflor le 3 février 2014, ces sociétés commercialisant des produits similaires aux siens. Elle soutient que la SAS Ardisson-Essenze a ainsi commis une faute qui lui a occasionné un manque à gagner d’un montant de 180 000 euros.

La SAS Ardisson-Essenze ne conteste pas ces faits, mais fait valoir qu’elle n’était liée par aucune obligation de non-concurrence ou d’exclusivité à l’égard de son mandant lequel était en outre parfaitement informé de ces activités.

L’article 1743 du code civil italien instaure un droit d’exclusivité réciproque pour chacune des parties au contrat d’agence commerciale. La jurisprudence, telle qu’exposée dans les deux consultations produites aux débats, considère que le droit d’exclusivité est un élément naturel, mais non essentiel du contrat d’agence commerciale de sorte qu’il peut valablement y être dérogé par une manifestation de volonté des parties laquelle peut résulter d’une clause du contrat ou être déduite du comportement des parties.

Il n’est pas dénié que le contrat d’agence commercial du 1er janvier 2014 ne comporte aucune clause d’exclusivité en faveur du mandant. Les intimés ont produit en pièce 37, l’attestation de M. [U], directeur général de la société Payan Bertrand de laquelle il résulte que la SAS [F] connaissait parfaitement l’existence du contrat signé avec cette dernière société. En outre, même à considérer que les attestations de l’épouse et du fils de M. [M] ne puissent être considérées comme suffisamment probantes quant aux circonstances de la rencontre entre le dirigeant de la SAS [F] et celui de la société Citroflor, il n’en demeure pas moins que, comme l’a exactement relevé le tribunal de commerce, la SAS [F], qui ne pouvait ignorer le mandant donné par la société Citroflor en raison de ses relations suivies avec celle-ci, n’a jamais fait grief à la société Ardisson-Essenze de l’existence de ces mandats avant la procédure.

Le comportement des parties démontre en conséquence que la SAS [F] Group a accepté tacitement l’existence d’autres mandats de représentation que le sien.

Le moyen n’est pas fondé.

3. Les conséquences de la rupture du contrat d’agence commerciale :

L’article 1751 du code civil italien dispose qu’au moment de la cessation du rapport, le mandant est tenu de verser à l’agent une indemnité lorsque les conditions suivantes sont réunies :

– l’agent a apporté de nouveaux clients au mandant ou a sensiblement développé les affaires avec les clients existants et le mandant reçoit encore des avantages substantiels dérivant des affaires avec lesdits clients ;

– le paiement de l’indemnité est équitable, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, en particulier des commissions que l’agent perd et qui résultent des affaires avec lesdits clients.

L’indemnité n’est pas due (‘) quand l’agent met fin au contrat, sauf à ce que la rupture soit justifiée par des circonstances attribuables au mandant ou à des circonstances attribuables à l’agent (‘).

Les parties ne discutent pas que les deux conditions cumulativement exigées par l’article 1751 du code civil italien sont réunies.

Il résulte de l’analyse des motifs de la rupture du contrat d’agence commercial, que l’absence d’affiliation de l’agent au régime de prévoyance obligatoire pour les agents commerciaux italiens constitue un juste motif de rupture, attribuable au seul mandant et que l’indemnité de fin de contrat, calculée conformément aux dispositions impératives de l’article 1751 du code civil italien est due. Elle n’est toutefois due qu’à la seule société Ardisson-Essenze, M. [V] [M] ayant mis fin à son contrat sans invoquer aucune circonstance imputable au mandant et sans qu’il puisse être considéré que le contrat conclu avec la société Ardisson-Essenze, personne morale distincte, ne soit que la continuité de celui précédemment conclu.

C’est donc à tort que les intimés prétendent intégrer dans les calculs les commissions versées à M. [V] [M] lorsqu’il exerçait à titre personnel, dans le cadre d’un contrat différent.

Le calcul de l’indemnité de résiliation ne peut donc s’opérer qu’au regard de la moyenne des deux années de commissions perçues pour 2014 et 2015, sans intégrer le rappel de commissions dont la réclamation est rejetée par la cour soit, selon les propres chiffres des intimés, non discutés par l’appelante :

23 774,17 € (2014) + 12 974,58 € (2015) = 36 748,75 /2 = 18 374,37 euros.

Le jugement est également infirmé de ce chef.

3.1 les commissions sollicitées pour les commandes avant la rupture et dans un délai raisonnable à compter de celle-ci :

La SAS [F] Group conteste que le bon de commande GRC du 23 décembre 2015 lui a été transmis ou qu’elle a livré les produits ou que l’opération a été conclue grâce l’intervention de la SAS Ardisson-Essenze. S’agissant des commandes des 14 janvier 2016 ([C]), 8 janvier 2016 (Kerry) et 23 juin 2016 (MFC), elle dénie tout droit à commission à la société Ardisson-Essenze, ces commandes ayant été régularisées après la cessation du contrat.

Sur ce, l’article 1748 alinéa 3 du code civil italien édicte que l’agent a droit à commission pour les affaires conclues après la cessation du contrat d’agence si la proposition est parvenue au mandant ou à l’agent à une date antérieure à la fin du rapport ou dans les autres cas, si l’affaire est conclue dans un délai raisonnable après la date de cessation du contrat et si la conclusion est liée de manière principale à l’activité exécutée par l’agent.

Les bons de commandes litigieux sont tous adressés à la SAS [F] Group qui ne discute pas que les produits commandés sont des produits commercialisés dans le cadre du contrat conclu avec la société Ardisson-Essenze. La commande du 23 décembre 2015, faite pendant que le contrat était encore en cours, a nécessairement été traitée par la SAS [F] Group postérieurement à la cessation du contrat et les commandes postérieures l’ont été dans le délai de six mois après la fin du contrat, ce qui constitue un délai raisonnable au regard des dispositions de l’article 1748 du code civil italien susvisé.

C’est donc à juste titre que le tribunal de commerce de Grasse a condamné la SAS [F] Group à régler à la SAS Ardisson-Essenze la somme de 819,92 euros. Le jugement déféré est confirmé de ce chef.

4. Les demandes accessoires :

La SAS [F] qui succombe pour la plus grande part dans son appel, est condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile à la société Ardisson-Essenze et M. [V] [M] ensemble.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Grasse du 21 octobre 2019 en ce qu’il a :

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze la somme de 21 384.04 euros à titre d’indemnité de fin de contrat,

– dit que la société Établissements [F] a procédé à une vente sur le territoire italien à une société de droit hollandais et en infraction de l’article 3 du contrat du 1er janvier 2014,

– condamné la société Établissements [F] à payer à la société Ardisson Essenze la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts et débouté la société Ardisson Essenze pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute la société Ardisson-Essenze de ses demandes au titre d’une violation de son exclusivité par la SAS [F] Group,

Condamne la SAS [F] Group à payer à la société Ardisson-Essenze la somme de 18 374,37 euros au titre de l’indemnité de fin contrat,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SAS [F] Group aux dépens,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la SAS [F] Group à payer à la société de droit italien Ardisson-Essenze et M [V] [M], ensemble, la somme de cinq mille euros.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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