Nuisances sonores : décision du 25 septembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/00600

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Nuisances sonores : décision du 25 septembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/00600
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

1ère CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 25 SEPTEMBRE 2023

N° RG 22/00600 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MQ75

[W] [F]

c/

[H] [X]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 novembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection Tribunal judiciaire de BORDEAUX (RG : 20/02840) suivant déclaration d’appel du 05 février 2022

APPELANT :

[W] [F]

né le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 5] (60)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 4]

Représenté par Maître Eric BOURDET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

[H] [X]

née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 6] (64)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Maître Olivier MAILLOT de la SELARL CABINET CAPORALE – MAILLOT – BLATT ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sylvie HERAS DE PEDRO, Conseillère, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : M. Roland POTEE

Conseiller : Mme Sylvie HERAS DE PEDRO

Conseiller : Mme Bérengère VALLEE

Greffier lors des débats : Mme Séléna BONNET

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Par acte du 15 décembre 2019, prenant effet le jour même, Mme [H] [X] a donné à bail à Mme [L] [M] un bien à usage d’habitation, moyennant un loyer mensuel de 515 euros.

Le bail mentionne une surface habitable de 37 mètres carrés.

Par acte du 6 décembre 2019, Mme [X] a donné à bail à M. [W] [F] un bien à usage d’habitation, moyennant un loyer mensuel de 514 euros.

Ce bail mentionne également une surface habitable de 37 mètres carrés.

Arguant plusieurs désordres et nuisances subis, par acte du 30 novembre 2020, Mme [M] et M. [F] ont assigné Mme [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de voir notamment diminuer respectivement leur loyer mensuel initial de 515 euros (pour Mme [M]) et de 514 euros (pour M. [F]) à un montant de 359 euros (pour Mme [M]) et de 358 euros (pour M. [F]), et de la voir condamner au paiement de diverses sommes :

Pour Mme [M] :

* 6 000 euros au titre d’un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

* 1 800 euros au titre d’une infiltration par un vélux,

Pour M. [F] :

* 6 000 euros au titre d’un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

* 1 800 euros au titre de nuisances sonores,

* 1 800 euros au titre de problèmes d’humidité.

Par jugement du 29 novembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– dit que le loyer du bail conclu entre Mme [X] et Mme [M] pour un bien à usage d’habitation situé [Adresse 4] à [Localité 7], est réduit à un montant de 437 euros pour le mois de septembre 2020, puis à un montant mensuel de 359 euros, à compter d’octobre 2020,

– condamné Mme [X] à rembourser à Mme [M] le trop perçu de loyer depuis le 15 septembre 2020 soit une somme de 78 euros pour le loyer de septembre 2020 et une somme de 156 euros pour chaque loyer postérieur que Mme [M] justifiera avoir acquitté,

– dit que ce trop perçu produira intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– condamné Mme [X] à payer à Mme [M] la somme de 250 euros au titre d’un préjudice causé par une infiltration dans une fenêtre de toit du logement loué, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

– rejeté la demande formée par Mme [M] au titre d’un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

– déclaré irrecevables en l’état, faute de respect de la procédure prévue à l’article 3-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les demandes formées par M. [F] contre Mme [X] tendant à une diminution de loyer ainsi qu’à l’allocation d’une indemnité pour un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

– rejeté les demandes d’indemnisation formées par M. [F] au titre de nuisances sonores et de problèmes d’humidité dans le logement donné à bail par Mme [X],

– rejeté les demandes formées par M. [F] et par Mme [X], en application de l’article 700 du code de procédure civile, et condamné cette dernière à payer à Mme [M] la somme de 750 euros sur le fondement de cette disposition,

– rejeté toute autre demande des parties,

– condamné Mme [X] aux dépens,

– rappelé que le jugement est exécutoire à titre provisoire.

M. [F] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 5 février 2022.

Par conclusions déposées le 12 août 2022, M. [F] demande à la cour de :

– réformer le jugement du 29 novembre 2021 en ce qu’il a :

* déclaré irrecevables en l’état, faute de respect de la procédure prévue à l’article 3-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les demandes formées par M. [F] contre Mme [X] tendant à une diminution de loyer ainsi qu’à l’allocation d’une indemnité pour un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

* rejeté les demandes d’indemnisation formées par M. [F] au titre de nuisances sonores et de problèmes d’humidité dans le logement donné à bail par Mme [X],

* rejeté les demandes formées par M. [F] et par Mme [X], en application de l’article 700 du code de procédure civile,

* rejeté toute autre demande des parties,

Statuant à nouveau :

Sur le montant du loyer et du dépôt de garantie révisés :

– A titre principal, dire que le montant du loyer mensuel initial de 514 euros hors charges, figurant dans le contrat de bail du 6 décembre 2019, ainsi que le montant du dépôt de garantie de 514 euros, seront remplacés par le montant de 347 euros depuis le 6 décembre 2019, et condamner Mme [X] à rembourser à M. [F] le trop versé depuis l’origine du bail,

– A titre subsidiaire, dire que le montant du loyer mensuel initial de 514 euros, hors charges, figurant dans le contrat de bail du 6 décembre 2019, ainsi que le montant du dépôt de garantie de 514 euros, seront remplacés par le montant de 347 euros à compter du 30 novembre 2020, date de l’assignation, et condamner Mme [X] à rembourser à M. [F] le trop versé depuis le 30 novembre 2020,

Sur l’indemnisation des préjudices de jouissance :

– condamner Mme [X] à payer à M. [F] la somme de 9 600 euros,

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

– condamner Mme [X] à payer à M. [F] la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel, et la condamner aux dépens de première instance et d’appel,

– débouter Mme [X] de ses demandes contraires à celles de M. [F].

Par conclusions déposées le 18 juillet 2022, Mme [X] demande à la cour de :

– confirmer le jugement du 29 novembre 2021,

Par conséquent,

– déclarer M. [F] irrecevable en son action tant au titre de sa demande en diminution du loyer que celle en découlant et tendant à l’allocation d’une indemnité pour un préjudice de jouissance du fait d’une mezzanine inutilisable,

– débouter purement et simplement M. [F] de l’ensemble de ses autres demandes en ce qu’elles ne sont pas fondées et/ou devenues sans objet,

Si la cour venait à déclarer recevable l’action de M. [F] :

* sur la demande en diminution du loyer et celles en découlant :

– débouter purement et simplement M. [F] de sa demande de diminution de loyer et de restitution du trop-perçu depuis l’origine du bail en ce qu’elles ne sont pas fondées et/ou devenues sans objet,

– A défaut, fixer la prise d’effet de la diminution de loyer à compter de la date de l’assignation, soit le 30 novembre 2020,

– débouter purement et simplement M. [F] de sa demande d’indemnisation de préjudice du fait de la surface habitable,

* sur les autres demandes :

– confirmer le jugement du 29 novembre 2021 en ce qu’il rejette les demandes d’indemnisation formées par M. [F] au titre de nuisances sonores et de problèmes d’humidité dans le logement,

– débouter purement et simplement M. [F] de l’ensemble de ses autres demandes en ce qu’elles ne sont pas fondées et/ou devenues sans objet,

En tout état de cause :

– réformer le jugement du 29 novembre 2021 en ce qu’il rejette les demandes formulées par Mme [X] en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [F] à payer à Mme [X] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.

L’affaire a été envoyée à l’audience rapporteur du 12 juin 2023.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 30 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de diminution de loyer

L’article 3-1 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au litige dispose que lorsque la surface habitable de la chose louée est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans le contrat de location, le bailleur supporte, à la demande du locataire, une diminution de loyer proportionnelle à l’écart constaté. A défaut d’accord entre les parties ou à défaut de réponse dans un délai de 2 mois à compter de la demande en diminution de loyer, le juge peut être saisi,, dans le délai de 4 mois à compter de cette même demande, afin de déterminer,le cas échéant, la diminution de loyer à appliquer. La diminution de loyer acceptée par le bailleur ou prononcée par le juge prend effet à la date de signature du bail. Si la demande en diminution du loyer par le locataire intervient plus de 6 mois à compter de la prise d’effet du bail, la diminution de loyer acceptée par le bailleur ou prononcée par le juge prend effet à la date de la demande.

Selon l’article R111-2 du code de la construction et de l’habitation, pour le calcul de la surface habitable, il n’est pas tenu compte des parties d’une hauteur inférieure à 1,80 mètres.

M. [W] [F] fait valoir pour l’essentiel que la loi ne contraint pas le locataire à adresser une mise en demeure au propriétaire, bien qu’il l’ait fait dans un envoi groupé avec Mme [M], autre locataire de Mme [H] [X] confrontée à la même difficulté, qu’il suffit de constater l’absence d’accord entre le bailleur et le locataire pour la diminution de loyer, que le logement indiqué dans le bail comme ayant une superficie de 37 mètres carrés en a en réalité 24,88, en raison d’une hauteur de plafond d’une chambre en mezzanine inférieure à 1,80 mètres et sollicite la diminution de son loyer au prorata sur la base d’une superficie arrondie à 25 mètres carrés, soutenant qu’il a subi de ce fait un préjudice.

Mme [H] [X] réplique pour l’essentiel que M. [W] [F] ne justifie pas lui avoir adressé une mise en demeure préalable, que si à la suite d’une erreur matérielle la surface a été indiquée dans le bail comme étant de 37 mètres carrés, elle avait remis à M. [W] [F] un certificat de surface mentionnant une surface habitable de 25 mètres carrés de sorte qu’il n’a subi aucun préjudice.

Il résulte effectivement du libellé de l’article 3-1 de la loi précitée que les conditions posées de défaut de réponse à une demande de diminution de loyer et celle de défaut d’accord entre les parties sont alternatives et non cumulatives.

Cependant, M. [W] [F] ne démontre pas que Mme [H] [X] a exprimé un refus de diminution de loyer avant qu’il ne l’assigne devant le juge du contentieux de la protection de Bordeaux, de sorte qu’il lui appartient de démontrer qu’il a adressé une mise en demeure restée sans réponse, le contraignant à agir en justice.

Or, force est de constater que M. [W] [F] ne démontre pas avoir adressé une mise en demeure à sa bailleresse dans le cadre de sa contestation de la surface habitable du logement, alors que l’envoi d’une telle mise en demeure est un préalable nécessaire pour vérifier si le bailleur donne ou non son accord à la demande amiable de diminution du loyer.

La pièce intitulée « lettre recommandée avec demande d’avis de réception valant mise en demeure », datée du 14 septembre 2020, ne vaut pas preuve de son envoi et de sa réception par Mme [X], qui conteste l’avoir reçue.

C’est par une analyse pertinente des pièces qui lui étaient soumises que le premier juge a dit que l’ accusé de réception produit par M. [W] [F] ne mentionne que Mme [M] en qualité de destinataire et que la lettre de Mme [M] ne porte aucune référence à la lettre qu’aurait adressé M. [W] [F] en même temps.

Ainsi, M. [W] [F] échoue à rapporter la preuve, qui lui incombe, de ce qu’il a respecté la procédure préalable prévue à l’article 3-1 de la loi précitée, de sorte que le jugement déféré qui l’a déclaré irrecevable en sa demande sera confirmé.

Sur la demande en dommages et intérêts pour troubles de jouissance

M. [W] [F] fait valoir pour l’essentiel, tant sur le fondement de l’obligation de délivrance du bailleur que sur celui du logement indécent, qu’il a subi un préjudice de jouissance résultant du bruit occasionné par la VMC dans sa chambre ainsi que de problèmes d’humidité, troubles auxquels la bailleresse n’a remédié qu’en mai 2021.

Mme [H] [X] réplique pour l’essentiel que bien que M. [W] [F] n’ait jamais démontré la défectuosité de la VMC, elle l’a fait changer en janvier 2021, puis remplacer en mai 2021 à la suite d’une dégradation par M. [W] [F], que M. [W] [F] n’a pas fait de remarque sur le bruit de la VMC à son entrée dans les lieux et qu’il a fait obstruction à la venue d’entreprises.

Si Mme [H] [X] a remplacé le velux selon facture du 5 février 2021, il ne ressort d’aucune pièce du dossier qu’il n’était pas étanche, les photographies produites par M. [W] [F], contestées par Mme [H] [X], ne permettant pas d’établir qu’elles concernent un velux du logement litigieux.

M. [W] [F] ne produit aucune autre pièce susceptible de démontrer qu’il a souffert de problèmes d’humidité dans son logement, imputables à sa bailleresse.

Il ressort en revanche d’un mail adressé par l’agence immobilière à Mme [H] [X] le 3 mai 2021 que l’agence a mandaté une entreprise pour réaliser l’isolation phonique du coffrage VMC et la réalité de nuisances sonores provoquées par cette VMC est donc avérée.

Néanmoins, il n’est produit par M. [W] [F] aucune pièce justificative du quantum de son préjudice relatif au volume sonore qui excéderait les normes admises.

Le jugement qui a débouté M. [W] [F] de sa demande en dommages et intérêts sera confirmé.

Sur les autres demandes

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

M. [W] [F] qui succombe en son appel en supportera donc la charge.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

M. [W] [F] qui succombe, sera condamné à payer à Mme [H] [X] la somme de 800 euros sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [W] [F] à payer à Mme [H] [X] la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [W] [F] aux entiers dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame Bérengère VALLEE, conseiller, en remplacement de Monsieur Roland POTEE, président, légitimement empêché, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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