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BR/CD
Numéro 23/03836
COUR D’APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 21/11/2023
Dossier : N° RG 22/00679 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IEQE
Nature affaire :
Demande formée par le propriétaire de démolition d’une construction ou d’enlèvement d’une plantation faite par un tiers sur son terrain
Affaire :
[T] [Y] [Z] [J] [I],
[A] [D] épouse [I]
C/
[U] [W]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 21 Novembre 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 18 Septembre 2023, devant :
Madame REHM, Magistrate honoraire, chargée du rapport,
assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l’appel des causes,
Madame REHM, en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame FAURE, Présidente
Madame de FRAMOND, Conseillère
Madame REHM, Magistrate honoraire
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [T] [Y] [Z] [J] [I]
né le 15 octobre 1968 [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Madame [A] [D] épouse [I]
née le 29 avril 1985 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentés et assistés de Maître SOULIE de la SELARL SOULIE MAUVEZIN, avocat au barreau de TARBES
INTIME :
Monsieur [U] [W]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 10] (NOUVELLE CALEDONIE)
Représenté par Maître MOURA, avocat au barreau de PAU
Assisté de Maître DUCOURAU de la société CABINET DUCOURAU AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX
sur appel de la décision
en date du 09 FEVRIER 2022
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TARBES
RG numéro : 21/00236
EXPOSE DU LITIGE
Par acte reçu le 15 octobre 2007 par Maître [J] [G], notaire à [Localité 15], l’association ADAPEI CHARENTE a vendu à Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] devenue par la suite épouse [I], un ensemble immobilier bâti et non bâti anciennement affecté à l’usage des colonies de vacances composé d’un grand bâtiment qui servait de dortoir, d’un deuxième bâtiment non attenant, comprenant au rez-de-chaussée la cuisine, et à l’étage plusieurs chambres, d’un troisième bâtiment non attenant à usage de local de jeux avec préau et d’un grand terrain, sis au lieu-dit [Localité 13] à [Localité 5] (65) figurant au cadastre section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 9] et [Cadastre 6] lieu-dit [Localité 13] pour une surface totale de 02 h 37 a 95 ca.
Préalablement à cette vente les parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 9] et les parcelles [Cadastre 7] et [Cadastre 8] ont fait l’objet d’un bornage de division le 15 février 2007.
Le 09 novembre 2018, Monsieur [U] [W] est devenu propriétaire des parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 7] et [Cadastre 8] sur lesquelles est édifiée une grange qui est l’ancienne chapelle [16], parcelles qui sont situées à l’extrémité Sud du fonds des époux [I].
Au cours de l’été 2018, ont été entrepris des travaux d’aménagement pour élargir la voie d’accès aux parcelles susvisées ainsi que des travaux de rénovation de la grange.
Se plaignant de nuisances provoquées par les engins de chantier intervenant sur la propriété de leur voisin ainsi que par un groupe électrogène fonctionnant en dehors des heures autorisées, reprochant à Monsieur [U] [W] d’avoir procédé à des travaux de modification de la grange sans autorisation administrative, et lui reprochant d’avoir enfoui les bornes délimitant la limite séparative entre les deux fonds ainsi que d’avoir modifié par les aménagements réalisés les écoulements des eaux de ruissellement, les époux [I] ont fait intervenir leur assurance de protection juridique, BPCE ASSURANCES qui a chargé le cabinet POLYEXPERT CONSTRUCTION de procéder à une expertise.
A la suite de la réunion d’expertise du 18 mars 2019 à laquelle Monsieur [U] [W], bien que convoqué, n’était pas présent, le cabinet POLYEXPERT CONSTRUCTION a établi un rapport en date du 22 avril 2019 concluant à la responsabilité de Monsieur [U] [W] dans les nuisances subies par les époux [I].
Par ailleurs, un arrêté interruptif des travaux a été ordonné le 07 août 2019 par le maire de la commune d'[Localité 5] (65) aux motifs que les travaux litigieux avaient été réalisés sans déclaration préalable alors qu’ils avaient pour effet de modifier l’aspect extérieur d’un bâtiment existant et pour violation de l’interdiction de stationnement isolé d’une caravane.
Monsieur [U] [W] a exercé un recours devant le tribunal administratif de Pau à l’encontre de cet arrêté ; la procédure est toujours en cours.
Aucune solution amiable n’ayant pu être trouvée au litige, par exploit du 27 juin 2019, les époux [I] ont fait assigner Monsieur [U] [W] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Tarbes aux fins d’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire.
Par ordonnance en date du 24 septembre 2019, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et a commis pour y procéder Monsieur [F] [S], expert près la cour d’appel de Toulouse, avec la mission suivante :
– se rendre sur les lieux et les décrire ;
– se faire communiquer tous les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission ;
– vérifier l’emplacement des bornes et procéder, si besoin, au rétablissement du bornage entre les parcelles B [Cadastre 6]/B [Cadastre 9] (fonds [I]) et B [Cadastre 7]/B [Cadastre 8] (fonds [W]) conformément au PV en date du 15 février 2007 ;
– déterminer si Monsieur [W] devait obtenir et dans l’affirmative, s’il a ou non obtenu une autorisation d’urbanisme pour réaliser les travaux sur la grange établie sur ses parcelles ;
– déterminer si des empiétements ont eu lieu sur les parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 9] et [Cadastre 6] au lieu-dit [Localité 14], en raison des travaux entrepris par Monsieur [W] sur sa propriété ; dans l’affirmative, décrire la nature, l’étendue et les conséquences de ces empiétements et déterminer la nature et le coût des travaux de remise en état des parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 9] et [Cadastre 6] au lieu-dit [Localité 14] ;
– déterminer si les travaux entrepris par Monsieur [W] sur sa propriété ont aggravé la servitude d’écoulement des eaux de ruissellement ; dans l’affirmative, décrire la nature, l’étendue et les conséquences de cette aggravation et déterminer la nature et le coût des travaux de remise en état des parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 9] et [Cadastre 6] au lieu-dit [Localité 14] ;
– déterminer si les travaux entrepris par Monsieur [W] sur sa propriété ont généré des préjudices et notamment des nuisances sonores ; dans l’affirmative, déterminer la nature et l’étendue de ces préjudices ;
– d’une manière générale, déterminer la nature et l’étendue des préjudices subis par les époux [I], entendre tous sachants dont les observations seraient utiles à la solution du litige, d’une manière générale fournir au tribunal tous renseignements et procéder à toutes investigations permettant de l’éclairer sur le litige opposant les parties.
L’expert [S] qui s’est adjoint un géomètre-sapiteur en la personne de Monsieur [H] [O], ingénieur géomètre-expert et expert près la cour d’appel de Toulouse, a clôturé son rapport le 24 octobre 2020.
En lecture de ce rapport, par exploit du 20 janvier 2021, Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] ont fait assigner Monsieur [U] [W] devant le tribunal judiciaire de Tarbes, statuant selon les règles de procédure orale, aux fins de le voir condamner :
– à remettre en état la zone constitutive de l’empiétement de leur parcelle B [Cadastre 9] sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la signification à venir du jugement,
– à remettre dans son état d’origine la grange édifiée sur la parcelle n° [Cadastre 7] sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 2 mois suivant la signification du jugement à venir,
– à leur payer les sommes suivantes :
* 7 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le trouble de jouissance assorti de l’intérêt au taux légal à compter du jugement avec le bénéfice de la capitalisation,
* 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont le coût de l’expertise judiciaire.
Par jugement contradictoire du 09 février 2022, le tribunal judiciaire de Tarbes a :
– débouté Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] de l’ensemble de leurs demandes,
– débouté Monsieur [U] [W] de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
– condamné Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] à la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] aux dépens en ce compris les frais d’expertise.
Pour statuer ainsi, le premier juge a constaté qu’il résultait du rapport d’expertise judiciaire que si un empiétement avait bien eu lieu sur le fonds des époux [I], cet empiétement n’était pas le fait de la construction d’un ouvrage mais de l’aménagement d’un chemin forestier dans le but d’en faire une voie carrossable et que les époux [I] qui demandent la condamnation sous astreinte de Monsieur [U] [W] à exécuter les travaux de remise en état des lieux, ne produisaient aucun élément permettant de déterminer quel était l’état des lieux existant au moment de leur acquisition, ce qui ne permettait pas au tribunal d’ordonner une réparation en nature.
Par ailleurs, le premier juge a retenu que le seul préjudice susceptible de résulter de l’empiétement provenait de l’ensevelissement d’une des bornes délimitant le terrain, lequel a été réparé dans le cadre de l’expertise puisque le sapiteur a remis la borne concernée en place, ce qui a eu pour effet de restaurer la ligne divisoire et de mettre un terme à l’empiétement.
C’est dans ces conditions que le tribunal a rejeté la demande de remise en état de la zone constitutive de l’empiétement formée par les époux [I].
Le tribunal a débouté les époux [I] de leur demande de dommages et intérêts en réparation de leur trouble de jouissance causé par l’empiétement du fait de la modification apportée à la perméabilité des sols et de la disparition d’un muret sur le côté droit dans le sens du chemin communal vers la chapelle, faute par eux de prouver qu’ils étaient à l’origine de la construction du muret et au motif par ailleurs, que l’expert judiciaire n’avait relevé aucune difficulté particulière concernant l’écoulement des eaux pluviales du fait des travaux litigieux.
Le tribunal a également débouté les époux [I] de leur demande de remise dans son état d’origine de la grange de Monsieur [U] [W] par la suppression de toutes les ouvertures et menuiseries installées, en considérant que la preuve n’était pas rapportée du caractère fautif de ces réalisations, alors qu’une instance devant le tribunal administratif de Pau était en cours sur la légalité de la décision du maire de la commune d'[Localité 5] (65) de retirer la non-opposition à déclaration préalable des travaux concernés et que les époux [I] ne rapportaient pas la preuve du préjudice que ces travaux pouvaient leur causer.
Enfin, le tribunal a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formée par Monsieur [U] [W], la preuve d’une faute commise par les époux [I] dans l’exercice de leur droit n’ester en justice n’étant pas rapportée.
Par déclaration du 07 mars 2022, Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] ont relevé appel de cette décision, la critiquant en toutes ses dispositions.
Aux termes de leurs conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 07 avril 2022, Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] demandent à la cour de :
– infirmer le jugement dont appel,
Statuant à nouveau :
– condamner Monsieur [U] [W] sur le fondement des articles 544 et 1240 du code civil, à remettre en état la zone constitutive de l’empiétement sur la parcelle B [Cadastre 9], par le retrait du lit de gravier compacté, ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification du jugement à intervenir,
– condamner Monsieur [U] [W] à verser à Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] la somme de 7 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance,
– condamner Monsieur [U] [W] sur le fondement de l’article 1240 du code civil, à remettre dans son état d’origine la grange édifiée sur la parcelle B [Cadastre 7], ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification du jugement à intervenir,
– débouter Monsieur [U] [W] de l’ensemble de ses demandes,
– condamner Monsieur [U] [W] à verser à Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– déclarer que l’ensemble de ces sommes portera intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir, avec capitalisation des intérêts au terme d’un délai d’un an et renouvelable tous les ans,
– condamner Monsieur [U] [W] aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.
Par ordonnance en date du 1er février 2023, le conseiller chargé de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions déposées au greffe de la cour par le conseil de Monsieur [U] [W] le 05 janvier 2023, alors que le délai à cette fin expirait le 15 juillet 2022.
L’ordonnance de clôture a été fixée au 16 août 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1°) Sur les griefs invoqués par les époux [I]
Les époux [I] reprochent à Monsieur [U] [W] :
– un empiétement sur leur propriété correspondant aux parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 9] et [Cadastre 6] en raison des travaux entrepris ;
– d’avoir procédé à des travaux de rénovation de la grange sans autorisation administrative.
Sur l’empiétement
Les époux [I] soutiennent que le chemin d’accès au fonds de Monsieur [U] [W] déborde sur la parcelle cadastrée B [Cadastre 9] leur appartenant, les travaux réalisés par ce dernier ayant consisté à mettre en oeuvre une bande de roulement matérialisée par un lit de gravier compacté ; ils expliquent que la remise en état consistera à procéder à l’enlèvement du lit de gravier qui constitue l’assiette du chemin créé sur la partie constitutive de l’empiétement ; ils sollicitent ainsi la condamnation sous astreinte de Monsieur [U] [W] à retirer le lit de gravier compacté.
Ils font valoir par ailleurs que ces travaux leur ont causé un préjudice puisqu’ils ont modifié la perméabilité des sols sur son emprise et qu’ils ont eu un impact sur les abords autrefois constitués d’un muret sur le côté droit lorsque l’on arpente cet accès depuis le chemin communal vers la chapelle.
En l’espèce, le sapiteur, Monsieur [H] [O], a établi un plan d’état des lieux et a analysé le plan de division réalisé par Monsieur [E] [R] le 15 février 2007 ; il a ainsi constaté que la cinquième borne avait été manifestement ensevelie lors des opérations de terrassement.
Il résulte du rapport d’expertise judiciaire et notamment du rapport du sapiteur concernant la détermination d’éventuels empiétements, que ‘la mise en corrélation entre le plan de division réalisé en 2007 par Monsieur [E] [R] et le plan d’état des lieux réalisé par le sapiteur, a permis de mettre en évidence une zone d’empiétement sur la propriété [I]’ et que ‘cet empiétement représente environ 2 m² et porte sur la parcelle cadastrée section B n° [Cadastre 9]’, l’expert précisant par ailleurs qu’en revanche le sapiteur n’avait pu déterminer d’empiétement au Sud de la parcelle au niveau de la borne ensevelie car la limite du droit de la propriété de la commune n’avait pas été définie dans le cadre de l’intervention de Monsieur [E] [R] en 2007.
Monsieur [H] [O], sapiteur, a obtenu du successeur de Monsieur [E] [R], détenteur de l’archive du plan de dévision réalisé par ce dernier, une version numérique de ce plan et il a ensuite procédé à un recalage HELMERT de l’archive sur le plan de l’état des lieux réalisé afin de permettre la réimplantation de la dernière borne en lieu et place de celle d’origine, en précisant que la transformation d’HELMERT faisait ressorti un écart moyen quadratique de 7 millimètres sur les quatre bornes retrouvées, ce qui lui a permis de replacer la cinquième borne sans ambiguïté lors de la réunion d’expertise du 24 juillet 2020.
Le premier juge a ainsi justement retenu qu’il avait de ce fait, été mis fin à l’empiétement litigieux sur la propriété des époux [I].
Comme l’a à juste titre considéré le premier juge, les époux [I] ne produisent aucun document et notamment aucune photographie permettant de connaître l’état des lieux existant au moment de leur acquisition, le rapport du cabinet de POLYEXPERT qu’ils invoquent, les photos prises dans le cadre de l’expertise judiciaire datant de l’année 2019 et étant donc largement postérieurs à l’année 2007, année d’acquisition de leur bien par les époux [I] de sorte qu’il n’existe aucun élément permettant de déterminer quel était l’état des lieux existant au moment de leur acquisition, ce qui ne permet pas d’ordonner une réparation en nature.
Contrairement à ce que soutiennent les époux [I], il ne résulte nullement du rapport d’expertise judiciaire que la remise en état des lieux consisterait à enlever un lit de gravier constituant l’assiette du chemin créé sur la partie constitutive de l’empiétement, comme le soutiennent, sans en rapporter la preuve, les époux [I], l’expert ne faisant nullement état ‘d’une bande de roulement matérialisée par un lit de gravier compacté’ mais indiquant au contraire qu’il s’agit d’un aménagement ancien qui semble à usage forestier et que l’empiétement de 2 m² signifié sur le compte-rendu du sapiteur concerne des travaux entrepris non pas par Monsieur [U] [W] mais par l’ancien propriétaire, sur une partie du terrain qui n’est plus utilisée et condamnée d’accès.
Il s’ensuit que le jugement entrepris qui a rejeté leur demande tendant à la condamnation de Monsieur [U] [W] à remettre les lieux en l’état sera confirmé.
Le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a débouté les époux [I] de leur demande d’indemnisation d’un trouble de jouissance lié aux travaux réalisés par Monsieur [U] [W], du fait de la modification apportée à la perméabilité des sols et à la disparition d’un muret sur le côté droit dans le sens du chemin communal vers la chapelle.
En effet, non seulement la preuve n’est pas rapportée que Monsieur [U] [W] soit à l’origine de cet empiétement, ce qu’il conteste formellement, mais il résulte d’un courrier adressé par les époux [I] à Monsieur [P] [L], précédant propriétaire de la grange et des parcelles vendues à Monsieur [U] [W], que c’est Monsieur [P] [L] qui a entrepris des travaux de terrassement qui ont enseveli les bornes.
Par ailleurs, outre le fait que comme cela vient d’être indiqué, il ne résulte pas du rapport d’expertise judiciaire que les travaux litigieux aient consisté en la mise en oeuvre d’une bande de roulement matérialisée par un lit de gravier compacté, l’expert judiciaire a indiqué ne pas avoir constaté d’aggravation ou de difficultés particulières liées à l’écoulement des eaux de pluie et de ruissellement, de sorte que les époux [I] ne rapportent pas la preuve que l’empiétement litigieux leur ait causé un quelconque préjudice.
Quant au muret dont ils invoquent la disparition, c’est justement que le premier juge a constaté qu’ils ne rapportaient pas la preuve que ce muret avait été construit sur leur fonds aucun élément du dossier et notamment les rapports d’expertise ne l’établissant.
Sur la réalisation sans autorisation administrative de travaux de rénovation de la grange
Les époux [I] reprochent au premier juge d’avoir considéré que la preuve d’une faute commise par Monsieur [U] [W] en réalisant des travaux sans autorisation administrative n’était pas rapportée puisque la procédure administrative était toujours en cours, et ils font valoir que, comme tout acte administratif, l’arrêté interruptif des travaux pris le 07 août 2019 par le maire d'[Localité 5] (65) relevant plusieurs infractions au code de l’urbanisme est exécutoire par provision et que le recours exercé n’ayant aucun effet suspensif, le comportement fautif de Monsieur [U] [W] est établi.
Ils soutiennent par ailleurs que contrairement à ce qu’a considéré le premier juge qui a estimé qu’ils n’expliquaient pas en quoi ces travaux leur causaient un préjudice, il est établi que les travaux de rénovation de la grange sans autorisation ont été à l’origine d’un empiétement sur leur propriété et de nuisances sonores, autant de préjudices qu’ils n’auraient pas subis si Monsieur [U] [W] avait sollicité une autorisation administrative de réaliser ces travaux, ce qui lui aurait immanquablement été refusé compte tenu du caractère naturel et non urbain de la zone.
Ils en déduisent que l’ensemble de ces éléments justifient la condamnation de Monsieur [U] [W] à remettre dans son état d’origine la grange édifiée en supprimant notamment toutes les ouvertures et les menuiseries installées.
En l’espèce, la cour constate qu’il n’existe aucun lien de causalité entre les préjudices invoqués par les époux [I] (empiétement et nuisances sonores liés aux travaux réalisés) et leur demande de remise en état de la grange et notamment la suppression des ouvertures et des menuiseries installées dont ils n’expliquent pas en quoi elles leur causeraient un quelconque préjudice.
Quelle que soit l’issue de la procédure administrative en cours et de la reconnaissance ou non du caractère irrégulier des travaux entrepris par Monsieur [U] [W], force est de constater que les époux [I] échouent à rapporter la preuve d’un quelconque préjudice lié au caractère irrégulier des travaux réalisés par Monsieur [U] [W].
Concernant en particulier les préjudices qu’ils invoquent, non seulement il a été démontré que la preuve n’était pas rapportée que ce soit Monsieur [U] [W] qui ait été à l’origine de l’empiétement mais il a été également constaté que les époux [I] n’établissaient pas avoir subi un quelconque préjudice du fait de cet empiétement.
Quant aux nuisances sonores qu’ils invoquent, il résulte du rapport d’expertise judiciaire qu’au vu de la distance séparant le fonds [W] et le fonds [I], il est impossible que les appareils utilisés par Monsieur [U] [W], bétonnière et groupe électrogène prétendument à l’origine de nuisances sonores, aient pu induire des nuisances acoustiques et sonores aux époux [I], l’expert précisant à la page 23 de son rapport que ‘seuls les bruits de la nature (insectes, grillons, oiseaux, etc) étaient audibles depuis le jardin et l’habitation des époux [I].’
C’est donc justement que le premier juge a débouté les époux [I] de leur demande de condamnation de Monsieur [U] [W] à remettre la grange dans son état d’origine et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
2°) Sur les autres demandes
Les époux [I] ont relevé appel de l’ensemble des dispositions du jugement prononcé le 09 février 2022 par le tribunal judiciaire de Tarbes en ce compris les dispositions ayant débouté Monsieur [U] [W] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts.
En l’absence de demande formée par les appelants sur ces dispositions et d’appel incident de la part de Monsieur [U] [W], il y a lieu de les confirmer.
3°) Sur les demandes annexes
Le jugement de première instance sera confirmé en ce qui concerne les condamnations au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Les époux [I] seront déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et seront condamnés aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
Déboute Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [T] [I] et Madame [A] [D] épouse [I] aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme DEBON, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBON Caroline FAURE