Nuisances sonores : décision du 10 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/55770

·

·

Nuisances sonores : décision du 10 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/55770
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 23/55770 –
N° Portalis 352J-W-B7H-C2KUR

N°: 9

Assignation du :
12, 13 Juillet 2023

EXPERTISE[1]

[1] 3 Copies exécutoires
délivrées le:
+1 copie expert

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 10 janvier 2024

par Maïté GRISON-PASCAIL, 1er Vice-président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier

DEMANDEUR

Monsieur [N] [G]
16 rue des Bernardins
75005 PARIS

représenté par Maître Guillaume SERGENT de l’AARPI SCHMELCK AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #P0141

DEFENDEURS

S.A.S. PARIS COCKTAIL BAR
16 rue des Bernardins
75005 PARIS

représentée par Me Shounit TROGMAN, avocat au barreau de PARIS – #E1295

Monsieur [K] [F]
9 rue de la république
94220 CHARENTON LE PONT

représenté par Maître Alexandra AGREST de la SELEURL LEXPERIA, avocats au barreau de PARIS – #C0143

DÉBATS

A l’audience du 29 Novembre 2023, tenue publiquement, présidée par Maïté GRISON-PASCAIL, 1er Vice-président, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties comparantes,

Vu l’assignation en référé délivrée les 12 et 13 juillet 2023 à la requête de M. [N] [G] aux fins de désignation d’un expert judiciaire sur le fondement des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, concernant les nuisances principalement sonores qu’il déclare subir en provenance de l’établissement “Le Noddi” exploité par la société Paris Cocktail Bar situé 16 rue des Bernardins à Paris 75005, propriété de M. [K] [F], et de condamnation des défendeurs à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

Vu les écritures déposées et développées oralement dans l’intérêt de la société Paris Cocktail Bar qui s’oppose à la demande et sollicite la condamnation de M. [G] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens;

Vu les écritures déposées et développées oralement dans l’intérêt de M. [F] qui formule protestations et réserves sur la demande ;

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

L’application de ce texte, qui subordonne le prononcé d’une mesure d’instruction à la seule démonstration d’un intérêt légitime à établir ou à préserver une preuve en vue d’un litige potentiel, n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien-fondé des demandes formées ultérieurement, sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure, ni sur les chances du procès susceptible d’être engagé.

Au soutien de sa demande, M. [G] explique qu’il subit dans son appartement du 1er étage depuis plusieurs années des nuisances, notamment sonores, en provenance du bar à coktails situé au rez-de-chaussée de l’immeuble ; qu’il a déposé de multiples plaintes ; que ces nuisances ont un impact sur sa santé ; que nonobstant les mesures prises, les nuisances perdurent.

La société Paris Cocktail Bar indique qu’elle exploite un bar à ambiance musicale qui existe depuis près de 120 ans et que seul M. [G] se plaint de nuisances, qu’il a déposé plainte des centaines de fois, multiplie les comportements répréhensibles en insultant les clients, en jetant des seaux d’eau, en prenant des photos ; qu’elle a fait réaliser une étude d’impact, pris des mesures en installant un régulateur sonore, un fumoir intérieur avec climatisation, des rideaux anti-bruit ; qu’après 22 heures, toute sortie de l’établissement est définitive. Elle estime infondée la mesure d’instruction sollicitée et dénonce le comportement de M. [G] qui cherche à faire fermer le bar.

Il est produit aux débats les multiples plaintes déposées par M. [G] depuis 2019, deux courrier et courriel de la mairie de Paris en 2020 et janvier 2022 faisant notamment état d’un contrôle sur place ayant mis en évidence des “non-conformités à la réglementation applicable aux établissements diffusant des sons amplifiés”, deux certificats médicaux établis le 24 novembre 2021 et 28 janvier 2023 par le docteur [O] mentionnant, sur les déclarations de M. [G], l’existence de troubles du sommeil, anxiété, état de stress chronique.

L’étude d’impact réalisée le 5 novembre 2021 par la société 3db.fr mentionne notamment l’obligation d’installer un limitateur par bande de fréquences, ce qui a été fait au mois de mars 2022.

Si la société Paris Cocktail Bar a pris des mesures en 2022 pour supprimer les nuisances liées à l’exploitation de son établissement, en revanche, il a été constaté le 10 juin 2023, entre 23h30 et 00h05, par Maître [B], commissaire de justice, que des personnes se trouvaient devant le bar parlant “et rigolant fort”, que la musique était audible depuis la voie publique et les parties communes de l’immeuble ; que dans l’appartement de M. [G] au 1er étage, fenêtres fermées à double vitrage, on entendait la musique, forte et constante ou en diminution, les conversations des clients, la musique résonnant dans l’appartement.

Dès lors, ce constat ayant été dressé postérieurement aux mesures prises par la société Paris Cocktail Bar, il existe des indices plausibles de l’existence de nuisances sonores perdurant toujours actuellement, pouvant excéder les troubles normaux de voisinage, justifiant la mesure d’instruction sollicitée.

La mesure d’instruction sollicitée sera donc ordonnée dans les termes du dispositif ci-après, aux frais avancés du demandeur qui y a intérêt.

Aucune considération tirée de l’équité ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, les responsabilités n’étant pas établies : les demandes sont rejetées.

La partie demanderesse conservera en l’état la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire en premier ressort,

Ordonnons une mesure d’expertise ;

Désignons en qualité d’expert :

[L] [C]
LCF Acoustique SAS
182 Rue de Vaugirard
75015 PARIS 15
Tél : 01 47 34 15 28
Port. : 06 87 61 51 56
Email : [L]@leconfortacoustique.com

qui pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

avec mission, les parties régulièrement convoquées, après avoir pris connaissance du dossier, s’être fait remettre tous documents utiles, et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant, de :

– Se rendre sur les lieux 16 rue Bernardins à Paris 75005 après y avoir convoqué les parties;
– Examiner les nuisances sonores alléguées dans l’assignation, et, le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, tous désordres connexes ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, sans préjudice des dispositions de l’article 238 alinéa 2 du code de procédure civile ;
– Procéder à toutes investigations utiles afin de renseigner l’existence de ces nuisances, en procédant ou en faisant procéder, de jour comme de nuit, à toutes mesures acoustiques strictement nécessaires et décrire les constatations ainsi faites,
– Au besoin, après information des parties, réaliser seul des constatations inopinées et en rendre compte après exécution,
– Donner son avis sur la réalité des nuisances alléguées, sur la date de leur apparition, sur leur origine, sur leurs causes et sur leur importance,
– Donner son avis sur d’éventuelles insuffisances au regard des prescriptions réglementaires ou contractuelles, aux usages et aux règles de l’art,
– Donner tout élément d’information utile permettant de déterminer si par sa durée, sa répétition ou son intensité, le bruit est susceptible de porter atteinte ou non à la tranquillité et la santé des occupants de l’appartement, propriété de M. [G],
– Après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres et/ou nuisances, et leurs délais d’exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’oeuvre, le coût de ces travaux;
– Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres et/ou nuisances, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;
– Faire toutes observations utiles au règlement du litige

Autorisons le demandeur, en cas d’urgence reconnue par l’expert, à faire exécuter à ses frais et pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables, l’expert devant déposer un pré rapport définissant la nature des travaux nécessaires ;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

✏ convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;

✏ se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;

✏ se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;

✏ à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
→ en faisant définir un enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l’article 280 du code de procédure civile, et dont l’affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l’article 269 du même code ;
→ en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées ;
→ en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

✏ au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnable ;
→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il RG n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai;

Fixons à la somme de 6 000 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par M. [N] [G] à la régie du tribunal judiciaire de Paris au plus tard le 11 mars 2024 ;

Disons que, faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Disons que le terme du délai fixé par l’expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l’instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations, sauf les exceptions visées à l’article 276 du code de procédure civile ;
Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-1 du Code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe du Tribunal judiciaire de Paris (Contrôle des expertises) avant le 02 décembre 2024, pour le rapport définitif, sauf prorogation de ces délais dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du Juge du contrôle ;

Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme OPALEXE et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons M. [G] aux dépens ;

Rappelons que l’exécution provisoire est de droit.

Fait à Paris le 10 janvier 2024

Le Greffier,Le Président,

Daouia BOUTLELISMaïté GRISON-PASCAIL

Service de la régie :
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris
☎ 01.87.27.98.58
Fax 01.44.32.53.46
[email protected]

Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :

➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : FR76 1007 1750 0000 0010 0022 487
BIC : TRPUFRP1
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 “Prénom et Nom de la personne qui paye” pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial

➢ chèque établi à l’ordre du régisseur du Tribunal judiciaire de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)

Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).

Expert : Monsieur [C] [L]

Consignation : 6000 € par Monsieur [N] [G]

le 11 Mars 2024

Rapport à déposer le : 02 Décembre 2024

Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris.

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x