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ARRET N°
du 23 janvier 2024
R.G : N° RG 23/00858 – N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKYM
[H]
c/
Etablissement Public [Localité 3] AUBE HABITAT
BD
Formule exécutoire le :
à :
la SCP SCRIBE-BAILLEUL-SOTTAS
la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE
ARRET DU 23 JANVIER 2024
APPELANTE :
d’un jugement rendu le 07 avril 2023 par le tribunal judiciaire de Troyes
Madame [V] [H]
[Adresse 1]
[Localité 3]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-001874 du 20/06/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de REIMS)
Représentée par Me Angelique BAILLEUL de la SCP SCRIBE-BAILLEUL-SOTTAS, avocat au barreau de l’AUBE
INTIMEE :
Etablissement Public OPH [Localité 3] AUBE HABITAT industriel et commercial, inscrit au RCS DE TROYES sous le n° 341 498 061, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, et Me Chloé RICARD, avocat au barreau de l’AUBE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
M. Bertrand DUEZ, président de chambre
Madame Christel MAGNARD, conseiller
Madame Claire HERLET, conseiller
GREFFIER :
Madame Lucie NICLOT, greffier
DEBATS :
A l’audience publique du 12 décembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 janvier 2024,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2024 et signé par M. Bertrand DUEZ, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Exposé du litige
Par acte sous seing privé du 2 août 2019, l’OPH Aube Immobilier, devenu l’OPH [Localité 3] Aube Habitat (ci après nommée société [Localité 3] Aube Habitat), a donné en location à Mme [V] [H] un logement situé [Adresse 1], moyennant le règlement d’un loyer mensuel de 408,18 euros.
Se plaignant de nuisances sonores et olfactives de la part de la locataire depuis mars 2021, le bailleur a assigné Mme [H] en résiliation du bail par exploit de commissaire de Justice du 17 janvier 2023.
Par jugement du 7 avril 2023, rendu en l’absence de Mme [H] et avec exécution provisoire, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Troyes a :
Prononcé la résiliation du bail passé entre l’OPH AUBE IMMOBILIER devenu l’OPH [Localité 3] AUBE HABITAT et madame [V] [H] relatif au logement situé [Adresse 1], à compter du 7 avril 2023 ;
Dit que madame [V] [H] est occupante sans droit ni titre,
Ordonné, en conséquence, à défaut de libération spontanée des lieux, l’expulsion de Madame
[V] [H] et de celle de tous occupants de son chef par toutes voies, moyens de droit et au besoin avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier et ce, conformément à l’article L.4l2-l du code des procédures civiles d’exécution, à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement de quitter les lieux,
Fixé l’indemnité d’occupation due à compter du 7 avril 2023 au montant du loyer courant, provisions sur charges comprises et réévaluée comme le serait le loyer si le contrat de bail n’avait pas été résilié,
Condamné madame [V] [H] à payer à l’OPH [Localité 3] HABITAT le montant de cette indemnité d’occupation jusqu’à libération effective des lieux,
Débouté l’OPH [Localité 3] AUBE HABITAT de sa demande de réduction du délai pour quitter les lieux et de sa demande de dommages et intérêts,
Condamné madame [V] [H] à payer à l’OPH [Localité 3] AUBE HABITAT la somme de 200€ (deux cent euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné madame [V] [H] aux entiers dépens,
Le 17 mai 2023 Mme [H] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
Par conclusions d’appelante n° 2 signifiées et déposées à la cour le 21 novembre 2023 Mme [H] rectifie l’erreur matérielle de sa déclaration d’appel et demande l’infirmation de la décision déférée sauf en ce qu’elle a rejeté la demande du bailleur en réduction du délai accordé au locataire pour quitter les lieux et la demande en dommages-intérêts de la société [Localité 3] Aube Habitat.
Mme [H] sollicite qu’il soit constaté l’absence de tout trouble de voisinage et que la société [Localité 3] Aube Habitat soit condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions Mme [H] expose principalement qu’elle ne générait aucune nuisance, mais qu’une voisine a eu la volonté de lui causer des problèmes et que son bailleur s’est rangé du côté de cette dernière.
Mme [H] conteste les attestations produites par le bailleur. Elle précise qu’il est impossible que les voisins soient gênés par les aboiements de ses chiens puisque les animaux sont en pension chez un tiers depuis juin 2021.
Mme [H] verse aux débats trois attestations de voisins de son appartement justifiant de l’absence de musique intempestive ou d’autres nuisances sonores ou olfactives de sa part.
Pour le surplus des arguments à l’appui des moyens de l’appelante il sera renvoyé aux conclusions de celle ci conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
Par conclusions d’intimé signifiées et déposées à la cour le 27 octobre 2023 la société [Localité 3] Aube Habitat sollicite la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions et la condamnation de Mme [H] aux dépens d’appel et à lui payer la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions la société [Localité 3] Aube Habitat expose que, contrairement à ce que prétend Mme [H], les nuisances invoquées, qui ont commencé dès l’entrée dans les lieux de la locataire, perdurent, malgré plusieurs mises en demeure et un accord amiable demeurés sans effet.
La société [Localité 3] Aube Habitat estime que les attestations produites par Mme [H] sont des attestations de complaisance.
Pour le surplus des arguments à l’appui des moyens de l’intimée il sera renvoyé aux conclusions de celle ci conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
La procédure a fait l’objet d’une ordonnance de clôture le 5 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la demande de résiliation du bail
L’article 1103 du code civil précise que : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits». L’article 1104 du code civil ajoute que : « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public ».
L’article 1728 du code civil applicable à la date du contrat dispose :
« Le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° D’user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention ;
2° De payer le prix du bail aux termes convenus ».
L’article 1729 du code civil dispose que : « Si le preneur n’use pas de la chose louée raisonnablement ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail ».
L’article 7.b de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précise que le locataire est obligé :
« b) D’user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location ».
Il revient aux juges du fond de déterminer, par leur pouvoir souverain, si l’inexécution de l’obligation contractuelle invoquée est suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire d’un contrat de bail.
En l’espèce pour prononcer la résiliation du bail le premier juge a retenu que par accord écrit du 4 juin 2021 Mme [H] s’était engagée à ne plus causer de nuisances au voisinage et que les attestations concordantes du bailleur justifient suffisamment que l’appelante n’a pas cessé les troubles après le 4 juin 2021.
Il apparaît en effet que dès son entrée dans les lieux Mme [H] a été la cause de nuisances, notamment sonores et de diverses incivilités.
Le bailleur lui a envoyé une mise en demeure de se conformer aux clauses du bail par courrier du 22 mars 2021. (Pièce n° 3)
Le 4 juin 2021 Mme [H] s’est engagée à ne plus générer de nuisances sonores, ne plus entreposer d’effets personnels dans les communs et respecter la salubrité du logement et des parties communes.
Un courrier du bailleur en date du 4 juin 2021 a résumé cet accord signé et non contesté par l’appelante. (Pièce n° 4)
Pour autant il apparaît que la société [Localité 3] Aube Habitat a été contrainte d’envoyer de nouvelles mises en demeure à Mme [H] pour les même motifs par LRAR des 16 décembre 2021, 1er juin 2022 et 24 juin 2022 (pièces n° 5 – 6 – 7)
Ce courrier mentionnait que depuis septembre 2021 les occupants du logement de Mme [H] ont de nouveau repris les nuisances au voisinage ayant notamment nécessité l’intervention de la police le 20 novembre 2021 à 05h30 (musique, salissures des communs, dépôt de sacs poubelle sur le palier).
Il apparaît également à la lecture du courrier de mise en demeure du 1er juin 2022 que Mme [H] a été reçue par le médiateur du bailleur le 22 décembre 2021 et que le 25 mai 2022 des ‘cris, chants, fêtes diurnes et nocturnes’ étaient constatés par le bailleur dans l’appartement de Mme [H].
Il apparaît également que le 14 juin 2022 Mme [H] a été une nouvelle fois reçue par le médiateur de la société [Localité 3] Aube Habitat pour les même motifs et que la fille de la locataire a reconnu : ‘simplement user de musique à forte puissance pour faire le ménage’.
Les derniers courriers envoyés précisaient que le bailleur comptait engager la résiliation du bail si les nuisances ne cessaient pas. Le 11 juillet 2022 une ultime mise en demeure était envoyée à Mme [H] par la société [Localité 3] Aube Habitat précisant engager une procédure de résiliation du bail.
Il ressort également des quatre attestations versées aux débats par le bailleur et datées 7, 21 et 22 juin 2022 (pièces 8 à 11) qu’il émane de l’appartement de Mme [H] des nuisances sonores (musique forte, bruits de meubles aboiements de chiens sur le balcon).
Il ressort des attestations n° 9 et 10 que lorsque les voisins de l’appartement de Mme [H] osent formuler des remarques, ceux ci sont grossièrement insultés par Mme [H] et/ou par sa fille.
Pour contester ces attestations Mme [H] verse aux débats une attestation de M. [J] qui précise héberger les chiens de Mme [H] depuis l’hiver 2021-2022 et prétend que les attestations produites par le bailleur sont inexactes et uniquement destinées à lui nuire.
Toutefois, il sera relevé que les attestations des autres locataires de la société [Localité 3] Aube Habitat sont toutes datées de juin 2022 et indiquent toutes que les nuisances occasionnées par les incivilités de Mme [H] et de sa fille ou les aboiements intempestifs des chiens perdurent.
La réponse apportée par la fille de Mme [H] au médiateur de la société [Localité 3] Aube Habitat le 14 juin 2022 est suffisamment éloquente pour considérer que Mme [H] et les occupants de son chef n’entendent pas modifier leur façon de vivre pour adopter une occupation de leur appartement conforme aux règles sociales.
Ces attestations ne sont pas le fruit d’une seule personne comme le laisse entendre l’appelante, mais de quatre personnes différentes, qui attestent de manière actualisée et circonstanciée de la persistance des mêmes nuisances imputables à Mme [H].
Bien que Mme [H] produise deux attestations de personnes indiquant ne jamais avoir été ‘dérangé’ par cette dernière (pièce n° 3 et 5), les attestations produites par la société [Localité 3] Aube Habitat seront considérées comme plausibles et véridiques dès lors qu’il n’est pas contesté que Mme [H] a été, à plusieurs reprises, reçues en 2021 et en 2022 par le médiateur du bailleur pour la persistance des nuisances imputables à l’occupation de son logement et que la police est intervenue plusieurs fois à son domicile pour les mêmes causes.
Ainsi, les éléments de fait apportés par le bailleur sont suffisamment probants pour justifier du fait que Mme [H] persiste à ne pas adopter une attitude conforme à une vie paisible en collectivité et ce, malgré les multiples rappels qui lui ont été faits.
La persistance de cette attitude rend impossible le maintien du bail de Mme [H].
En conséquence, la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
2/ Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
Il ressort des articles 696 et 700 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens et que, sauf considération d’équité, la partie tenue aux dépens doit supporter les frais irrépétibles de procédure exposés par l’autre partie.
Mme [H] succombant à son appel sera tenue des dépens de cette procédure et devra payer à la société [Localité 3] Aube Habitat la somme de 500 €sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
La cour, statuant publiquement par décision contradictoire :
Confirme en toutes ses dispositions la décision rendue par le tribunal judiciaire de Troyes le 7 avril 2023.
Y ajoutant :
Condamne Mme [V] [H] aux dépens de l’appel
Condamne Mme [V] [H] à payer à la société OPH [Localité 3] Aube Habitat la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles de la procédure d’appel.
Le greffier Le président