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CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 septembre 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10447 F
Pourvoi n° C 17-18.056
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. V… T…, domicilié […] ,
2°/ M. A… L…, domicilié […] ,
3°/ la société Rousseau Roualt-Neveux Bernardeau Daigre, société civile professionnelle, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 22 février 2017 par la cour d’appel de Poitiers (3e chambre civile), dans le litige les opposant à M. W… D…, domicilié […],
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 18 juin 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Truchot, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. T…, L… et de la société Rousseau Roualt-Neveux Bernardeau Daigre ;
Sur le rapport de M. Truchot, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Donne acte à M. L… du désistement de son pourvoi conte l’arrêt rendu le 22 février 2017 ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. T…, L… et la société Rousseau Roualt-Neveux Bernardeau Daigre aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. T… et la société Rousseau Roualt-Neveux Bernardeau Daigre.
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné solidairement M. T… et la SCP Rousseau Roualt-Neveux Bernardeau Daigre à payer à M. D… la somme de 61 350 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt ;
AUX MOTIFS PROPRES QU’en vertu de l’article 207 III-4 1° de l’annexe II du code général des impôts, les dispositions de l’article 207 III-3 ne sont pas applicables aux cessions ou apports dispensés de taxe sur la valeur ajoutée en application de l’article 257 bis du même code ; qu’il est constant que la validité de l’acte de vente reçu le 13 mars 2009 par Me V… T… n’a pas été remise en cause et que les dispositions contractuelles n’ont pas été ultérieurement modifiées ; qu’ainsi la vente restant soumise aux dispositions de l’article 257 bis du code général des impôts, celles de l’article 207 III-3 de l’annexe II du code général des impôts ne lui sont pas applicables ; que M. W…D… ne disposant pas de la faculté de déduire une quelconque fraction du montant de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé initialement le bien, l’absence d’attestation délivrée à cet effet par le cédant et sa carence dans le processus de régularisation prévu par l’article 207 III-3 de l’annexe II du code général des impôts sont inopérantes ; que les notaires font valoir que dans l’hypothèse d’une vente soumis aux dispositions de l’article 207 III-3 de l’annexe II du code général des impôts, il n’est pas démontré que l’immeuble constituait pour le cessionnaire une immobilisation, ni que M. W…D… aurait pu bénéficier du transfert de la totalité des droits à déduction du cédant, qu’aucune démarche afin de rectification de la proposition de redressement notifiée le 26 juillet 2010 n’a été entreprise, et qu’en toute état de cause, le paiement de la TVA n’est pas constitutif d’un préjudice indemnisable ; que M. W…D… réplique que pour récupérer auprès du Trésor Public l’intégralité des droits à déduction transférés par le cédant, il lui suffisait d’opter concomitamment à l’acquisition de l’immeuble pour le paiement de la TVA sur les loyers dus par la Sarl Cap Ouest Investissement en vertu du bail professionnel qu’il lui a consenti ; que le redressement était justifié en son principe et que la perte du droit à déduction de la TVA constitue un préjudice indemnisable ; que la proposition de rectification notifiée le 26 juillet 2010 par la direction de contrôle fiscal Sud Ouest précise les modalités de calcul de la régularisation globale opérée sur la base de la TVA déduite par la Sarl Cap Ouest Investissement lors de l’acquisition de l’immeuble brut de béton le 13 octobre 2005 puis lors des travaux d’aménagement réalisés en 2005 et 2006 après vérification des immobilisations comptabilisées ; que la somme de 64 579 euros représente le total des fractions de TVA initialement déduite, calculées conformément aux dispositions précitées ; que l’éventuelle contestation de la rectification proposée le 26 juillet 2010 aurait, selon Me V… T…, permis d’opérer une régularisation par cinquième et non par vingtième sur certains travaux effectués en 2006, soit une différence de 9 137 euros en faveur de l’assujetti (12 183 euros – 3 046 euros) ; que selon M. W…D…, la différence est seulement de 1 790 euros ; que la proposition de rectification ayant été notifiée au gérant de la Sarl Cap Ouest Investissement, vendeur de l’ensemble immobilier, et non à M. W…D…, acquéreur du bien, le défaut de contestation par ce dernier est inopérant ; que le préjudice résultant pour M. W…D… de la faute commise par le notaire est constituée par la perte de chance, en qualité de cessionnaire d’un ensemble immobilier soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, de récupérer auprès du Trésor Public les droits à déduction transférés par le cédant, ce préjudice distinct du paiement de ladite taxe, étant en lui-même indemnisable ; que l’intérêt commun des parties était de soumettre le bail professionnel conclu entre elles à la taxe sur la valeur ajoutée pour prétendre au transfert des droits à déduction, et la délivrance de l’attestation requise par l’article 207 III-3 de l’annexe II du code général des impôts constituant une simple formalité, la probabilité de la chance perdue par M. W…D… sera évaluée à 95% du montant de la régularisation opérée ; que l’entier préjudice résultant pour M. W…D… de la faute commise par Me V… T… sera en conséquence réparé par le versement d’une indemnité de 61 350 euros, le jugement étant partiellement infirmé en ce sens ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU’en application de l’article 1382 du code civil, l’établissement de la responsabilité est subordonné, outre l’existence d’une faute, à l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice allégué ; qu’en l’espèce, il est établi que dans le courrier susvisé du 23 août 2010, Me A… L… a indiqué que « si une régularisation de la TVA devait intervenir, il suffirait de procéder par acte complémentaire avec l’accord de l’administration fiscale et de procéder à la facturation de la TVA à l’acquéreur comme il était d’usage préalablement à la réécriture de l’article 257 bis du code général des impôts » ; qu’il n’est également pas contesté qu’aucune régularisation de cette nature n’a été sollicitée par le demandeur ; que pour autant, les défendeurs n’établissent pas que l’accord de l’administration fiscale puisse intervenir pour cette régularisation, alors que seule la venderesse a été soumise à une proposition de rectification fiscale, à l’exclusion du vendeur (lire : l’acquéreur) ; que ce dernier n’est donc pas en mesure de se prévaloir de ladite régularisation pour se placer sous l’empire du droit commun de l’article 257 du code général des impôts en contrariété avec les mentions de l’acte soumettant les parties à l’article 257 bis du même code ; que dans ces conditions, la possibilité effective d’une régularisation telle que proposée par le notaire dans le courrier du 23 août 2010, soumise à l’accord de l’administration fiscale, n’est pas établie ; qu’il ne peut donc être considéré que la carence du demandeur à procéder à une telle régularisation par un nouvel acte avec la venderesse soit constitutif d’une faute à l’origine exclusive du préjudice dont il se prévaut, au regard du caractère purement hypothétique de la possibilité effective de procéder à une telle régularisation ; que de la même façon, il résulte de ce qui précède que le demandeur n’ayant pas fait l’objet d’une régularisation de sa situation fiscale ne pouvait se prévaloir, tant vis-à-vis de la venderesse que vis-à-vis de l’administration fiscale, des dispositions de l’article 257 du code général des impôts et de l’article 207 III de l’annexe II du même code, pour d’une part obtenir une attestation de la première et d’autre part se prévaloir de ladite attestation pour obtenir le transfert des droits à déduction de la taxe à la valeur ajoutée auprès de la seconde ; que de telles demandes seraient en effet contraires aux mentions de l’acte lui-même et au choix des parties de se soumettre au régime de l’article 257 bis du même code ; que l’absence de demande, par M. D…, de remise d’une attestation par la société Cap Ouest Investissement n’est pas constitutive d’une faute qui serait à l’origine d’un préjudice dont il se prévaut ; qu’il résulte au contraire de ce qui précède que le manquement à l’obligation de conseil du notaire est à l’origine directe du placement des parties sous le régime de l’article 257 bis du code général des impôts ; qu’or ledit placement sous ce régime privait de tout intérêt la soumission de la location consentie par M. D… à la venderesse sous le régime de la taxe à la valeur ajoutée, l’exercice de cette option ayant alors eu pour effet de renchérir le loyer dû par la société preneuse sans contrepartie pour le bailleur, percevant le même montant et n’ayant aucune somme à régulariser sur cette taxe à la valeur ajoutée du fait de la vente ; qu’il en résulte que l’absence d’option de M. D… pour le régime de la taxe à la valeur ajoutée n’est que la conséquence directe de la soumission de la vente à l’article 257 bis du code général des impôts, et partant, de la faute du notaire ; que dès lors, cette absence de soumission à la taxe à la valeur ajoutée n’est pas constitutive d’une faute du demandeur ayant concouru au dommage ; que dès lors le manquement du notaire à son obligation de conseil est la cause directe et exclusive de la privation de M. D… du transfert des droits à déduction sur le fondement des articles 257 du code général des impôts et 207 de l’annexe II dudit code ; les autres causes évoquées par les défendeurs étant soit dépourvues de lien avec le dommage, soit la conséquence directe de la même faute du notaire ;
ALORS QUE l’administration fiscale qui procède à un redressement doit tirer toutes les conséquences, y compris favorables, du nouveau régime fiscal qu’elle juge applicable ; qu’en relevant, pour retenir que M. D… avait été privé du bénéfice du transfert des droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée de la venderesse, que la vente, dont la validité n’avait pas été remise en cause, restait soumise au régime fiscal de l’article 257 bis du code général des impôts, le régime de l’article 207 III de l’annexe II du code général des impôts, motivant le redressement notifié à la seule société venderesse, ne lui étant pas applicable, de sorte que, même s’il en avait fait la demande, M. D… se serait heurté à un refus de l’administration fiscale de lui faire bénéficier du transfert des droits à déduction de la société venderesse, quand l’administration fiscale ne pouvait refuser de tirer les conséquences favorables à M. D… de l’application du régime fiscal de l’article 207 III de l’annexe II du code général des impôts qu’elle jugeait applicable, dès lors que celui-ci en faisait la demande, muni de l’attestation que la venderesse était tenu de lui délivrer, la cour d’appel a violé l’article 77, alinéa 1, du code de procédure fiscale, ensemble l’article 1382 (nouveau 1240) du code civil.