N° RG 21/01822 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IYJA
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
11-19-274
Jugement du JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DU HAVRE du 22 Février 2021
APPELANTE :
S.A. COFIDIS
société à directoire et conseil de surveillance, au capital de 53 758 872 euros, immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le numéro 325 307 106, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Me Antoine ETCHEVERRY de la SELARL DAMC, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEES :
Madame [D] [E]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Solène LOUE, avocat au barreau du HAVRE
S.A.S.U. AGENCE NATIONALE POUR L’ÉCOLOGIE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
N’ayant pas constitué avocat, bien que régulièrement assigné par acte d’huissier de justice en date du 17/06/2021.
S.E.L.A.S. MJS PARTNERS
prise en la personne de Maître [X], liquidateur de la société AGENCE NATIONALE POUR L’ECOLOGIE
[Adresse 2],
[Adresse 2]
N’ayant pas constitué avocat, bien que régulièrement assigné par acte d’huissier de justice en date du 17/06/2021.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 28 Avril 2022 sans opposition des avocats devant Madame TILLIEZ, Conseillère, rapporteur.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame GOUARIN, Présidente
Madame TILLIEZ, Conseillère
Madame GERMAIN, Conseillère
GREFFIER
LORS DES DEBATS ET DE LA MISE A DISPOSITION:
Madame DUPONT
DEBATS :
A l’audience publique du 28 Avril 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 30 Juin 2022, prorogée pour être rendue le 8 Septembre 2022
ARRET :
Réputé contradictoire
Prononcé publiquement le 08 Septembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame GOUARIN, Présidente et par Madame DUPONT, Greffière.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant bon de commande du 26 avril 2017, Mme [D] [E] a conclu un contrat avec la société Agence Nationale pour l’Ecologie portant sur la fourniture, la livraison et l’installation d’une centrale photovoltaïque, moyennant un prix de 22 900 euros TTC, à la suite d’un démarchage à domicile.
Le paiement du prix des travaux a été financé au moyen d’un prêt souscrit par Mme [E] auprès de la société Cofidis, suivant offre préalable acceptée le 26 avril 2017, pour un montant de 22 900 euros remboursable en 132 mensualités d’une échéance de 206,08 euros chacune après un différé d’amortissement de 6 mois, au taux effectif global de 2,96% l’an.
Le 10 mai 2017, les panneaux photovoltaïques et la pompe à chaleur ont été installés au domicile de Mme [E] et le 1er juin 2017, elle a reçu la facture de l’Agence Nationale pour l’Ecologie d’un montant de 21 000 euros.
Le remboursement des échéances du prêt Cofidis d’une mensualité de 206,21 euros a débuté le 10 janvier 2018.
En l’absence de résolution amiable du litige, Mme [E] a assigné la société Agence Nationale pour l’Ecologie et la société Cofidis devant le tribunal d’instance du Havre par actes d’huissier datés des 24 janvier 2019 et 04 février 2019, aux fins notamment d’annulation du contrat du 26 avril 2017 souscrit avec l’Agence Nationale pour l’Ecologie ainsi que du contrat de crédit affecté souscrit auprès de la société Cofidis, de restitution du matériel, de condamnation de la société Cofidis en remboursement du montant des échéances du prêt déjà payées, outre le paiement de frais de procédure.
Par acte d’huissier en date du 20 septembre 2019, Mme [E] a assigné la Selas MJS Partners, en la personne de Maître [Z] [X], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Agence Nationale pour l’Ecologie, devant le tribunal d’instance du Havre à des fins identiques.
Suivant jugement réputé contradictoire en date du 22 février 2021, le tribunal judiciaire du Havre a :
– ordonné la jonction des instances enregistrées au répertoire général sous les numéros 11-19-274 et 11-19-1237 sous le numéro unique 11-19-274,
– rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société Cofidis,
– déclaré le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire compétent,
– prononcé l’annulation du contrat de vente conclu le 26 avril 2017 entre Mme [E] et la société Agence Nationale pour l’Ecologie,
– dit que cette annulation emporte restitution par Mme [E] de la société venderesse, prise en la personne de Maître [X] de la société MJS Partners, en sa qualité de mandataire judiciaire, du matériel livré et installé à son domicile, dans le délai de 2 mois à compter de la signification du jugement,
– dit que Mme [E] devra mettre à disposition de la société Agence Nationale pour l’Ecologie, prise en la personne de Maître [X] de la société MJS Partners, en sa qualité de mandataire judiciaire, l’ensemble du matériel vendu et posé à son domicile,
– débouté Mme [E] de sa demande de fixation au passif de la société de la somme de 2.576,49 euros au titre du préjudice financier,
– constaté la résolution judiciaire consécutive du contrat de crédit affecté conclu le 26 avril 2017 entre Mme [E] et la société Cofidis,
– condamné la société Cofidis à restituer à Mme [E] les mensualités réglées par elle en exécution du contrat de crédit,
– débouté la société Cofidis de sa demande de remboursement du capital emprunté en présence d’une faute du prêteur dans le déblocage des fonds,
– condamné solidairement la société Agence Nationale pour l’Ecologie, prise en la personne de Maître [X] de la société MJS Partners, en sa qualité de mandataire judiciaire et la société Cofidis à payer à Mme [E] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné solidairement la société Agence Nationale pour l’Ecologie, prise en la personne de Maître [X] de la société MJS Partners, en sa qualité de mandataire judiciaire et la société Cofidis aux dépens de l’instance,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– rejeté toutes autres demandes des parties.
Par déclaration électronique en date du 28 avril 2021, la société Cofidis a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal judiciaire du Havre et a signifié sa déclaration d’appel le 17 juin 2021 à la S.E.L.A.S. MJS Partners, en la personne de Maître [X], en sa qualité de liquidateur de la Sasu Agence Nationale pour l’Ecologie.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 avril 2022.
EXPOSE DES DEMANDES DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions communiquées par RPVA le 11 janvier 2022, signifiées le 26 janvier 2022 à étude, à la S.E.L.A.S. MJS Partners, en la personne de Maître [X], en sa qualité de liquidateur de la Sasu Agence Nationale pour l’Ecologie, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé des motifs, la société Cofidis demande à la cour d’appel de :
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
– déclarer Mme [E] mal fondée en ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter,
– déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
Y faisant droit :
– condamner Mme [E] à reprendre l’exécution du contrat de crédit, conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement,
– condamner Mme [E] à rembourser à la société Cofidis, en une seule fois, l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire, au jour de l’arrêt à intervenir,
A titre subsidiaire, si la cour confirmait la nullité des conventions :
– condamner Mme [E] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 22.900 euros, au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, en l’absence de faute de la société Cofidis, et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité,
En tout état de cause :
– condamner Mme [E] à lui payer une indemnité d’un montant de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [E] aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions communiquées par RPVA le 12 octobre 2021, signifiées le 19 octobre 2021 à personne morale, à la S.E.L.A.S. MJS Partners, en la personne de Maître [X], en sa qualité de liquidateur de la Sasu Agence Nationale pour l’Ecologie, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé des motifs, Mme [D] [E] demande à la cour d’appel, au visa de l’article 1343-5 du code civil, de :
– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
– débouter la société Cofidis de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la société Cofidis au paiement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, aux entiers dépens,
Subsidiairement :
– lui accorder des délais de paiement à hauteur de 210 euros par mois, durant 24 mois à compter de la décision à intervenir étant précisé que le solde sera versé lors de la dernière échéance,
– débouter la société Cofidis de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIVATION
I- Sur les demandes de nullité du contrat de vente et de nullité du contrat de crédit
A- Sur la demande de nullité du contrat de vente
La société Cofidis critique la décision ayant annulé le bon de commande n°174, alors que le prêteur n’a connu qu’un bon de commande n°276 ; que les deux bons de commande prévoyaient bien un délai de livraison maximal de trois mois et que l’absence de délai de livraison ne constituerait de toute façon qu’une cause de nullité relative, couverte par l’acceptation de la livraison de l’emprunteur en signant une attestation ; qu’en outre, le bon de commande n°276 prévoyait expressément un ballon thermodynamique de marque Thermor, d’une contenance de 200 litres, d’une valeur de 4 500 euros; que la facture litigieuse invoquée ne permet pas de prouver que le matériel commandé serait différent de celui qui a été livré ; que le contenu du bon de commande n°276 est conforme aux exigences posées par la Cour de cassation dans son arrêt en date du 02 juin 2021 ; que le prix unitaire de chaque composante n’a pas à figurer obligatoirement sur le bon de commande ; que s’agissant des caractéristiques du matériel, Mme [E] a accepté la livraison d’une pompe à chaleur en lieu et place d’un chauffe-eau thermodynamique et a d’ailleurs signé l’attestation de livraison sans réserve, le changement de matériel non mentionné sur le bon de commande n°276 n’étant pas opposable au prêteur ; qu’en outre, la loi n’impose pas au vendeur de faire figurer sur le bon de commande les éléments techniques des matériaux (référence, poids, taille, surface, détails de pose des panneaux solaires et de l’onduleur, ce dernier étant de même marque et de même puissance que les panneaux sauf précision contraire expresse) ; que seul le bon de commande financé par la société Cofidis doit être pris en compte s’agissant du prix du matériel, la facture ne constituant pas un élément de preuve ; que la nullité d’un contrat ne peut être encourue sur un seul problème d’exécution que revêt la prétendue impossibilité de conclure un contrat de revente avec EDF, en l’absence d’attestation sur l’honneur remplie par l’installateur, invoquée par Mme [E].
Aux termes de l’article L221-9 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5. […]
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
Aux termes de l’article L221-5 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ; […]
Aux termes de l’article L111-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.
Les dispositions du présent article s’appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité, lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d’une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l’environnement.
L’article L242-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige prévoit que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En l’espèce, il convient de relever que le bon de commande n°174 signé le 26 avril 2017 par Mme [D] [E] avec la société Agence Nationale pour l’Ecologie comporte des irrégularités sur les caractéristiques essentielles et le prix du bien, ainsi que sur le délai d’exécution du contrat.
En effet, ont été mentionnées la fourniture et l’installation de douze panneaux photovoltaïques ainsi qu’un ballon thermodynamique de marque Thermor, d’une contenance de 200 litres, alors que Mme [E] justifie qu’une pompe à chaleur lui a en réalité été livrée.
En outre, un montant de 4 500 euros figure sur le bon de commande au titre de la fourniture d’un autre matériel sans précision sur la teneur de celui-ci, alors que la facture définitive mentionne une pompe à chaleur d’un montant différent de 8 000 euros.
Ensuite, deux TVA différentes sont cochées, le calcul ne permettant pas de déterminer le pourcentage réellement appliqué et le prix global définitif est de 21 000 euros TTC, alors que le prix global initial était de 22 900 euros TTC.
Enfin, le délai de la pose de l’installation est prévu selon une mention pré-imprimée ‘sous trois mois maximum à dater de la signature du présent document ‘ alors que la société Agence Nationale pour l’Ecologie s’engageait contractuellement ‘à accomplir toutes les démarches administratives relatives au dossier et à accompagner [Mme [E]] jusqu’à l’obtention de son contrat d’achat avec E.D.F, à savoir : déclaration préalable à la mairie, demande de raccordement auprès d’E.R.D.F, règlement des frais de raccordement auprès d’E.R.D.F; obtention de l’attestation consuel’ et que le délai global de trois mois ne constitue pas une indication suffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1 3° du code de la consommation, dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose du matériel et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global ne permet pas à l’acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations (Cass. Civ I, 15 juin 2022 n° 21-11.747).
La société Cofidis soutient vainement que seul le bon de commande n°276 lui est opposable, alors que le contrat de crédit affecté produit aux débats par Mme [E] et signé avec le prêteur le 26 avril 2017 vise bien comme nature du bien à financer ‘photovoltaïque et ballon thermodynamique’ pour un montant de 22 900 euros prévu au bon de commande n°174 produit par Mme [E].
Si la nullité relative peut être couverte tacitement par l’exécution volontaire du contrat au visa de l’article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est néanmoins subordonnée à la preuve que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer.
En l’espèce, le seul rappel des textes au verso du bon de commande ne permet pas de considérer que Mme [E] avait connaissance des irrégularités susvisées.
En outre, si Mme [E] a signé le 16 mai 2017 une attestation de livraison et d’installation, aux termes de laquelle elle reconnaît avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises et avoir constaté expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués par la société au titre de l’installation ont été pleinement réalisés, alors que la société Agence Nationale pour l’Ecologie s’était engagée à réaliser en outre toutes les démarches administratives relatives au dossier et à accompagner sa cliente jusqu’à l’obtention de son contrat d’achat avec E.D.F, cet engagement n’a nécessairement pas pu être réalisé dans un délai si court.
Ce document ne constitue donc pas un élément suffisant pour considérer que Mme [E] a voulu, le 16 mai 2017, en connaissance de cause, ratifier le bon de commande entaché de nullité.
L’exécution partielle du contrat de crédit par Mme [E] ne prouve pas plus la connaissance du vice affectant le contrat principal.
Le contrat de vente sera donc annulé, conformément à ce qui a été décidé par le juge de première instance.
Le premier juge a en outre exactement retenu que cette annulation emportait restitution par Mme [E] au liquidateur de la société Agence Nationale pour l’Ecologie du matériel livré et installé à son domicile.
B- Sur la demande de nullité du contrat de crédit
Aux termes de l’article L311-32 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
En l’espèce, l’annulation du contrat signé le 26 avril 2017 entre Mme [D] [E] et la société Agence Nationale pour l’Ecologie entraîne de plein droit l’annulation du contrat de crédit affecté signé le même jour entre Mme [D] [E] et la société Cofidis.
Le jugement entrepris ayant statué en ce sens sera donc confirmé.
II- Sur la faute de la société Cofidis et le remboursement du capital prêté
Le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds ne peut prétendre au remboursement du capital prêté.
La société Cofidis critique la décision du premier juge ayant retenu une telle faute de sa part et en ayant tiré les conséquences en la déboutant de sa demande de remboursement de la somme de 22 900 euros empruntée.
Elle fait valoir qu’elle n’avait pas l’obligation contractuelle de vérifier la mise en service effective de l’installation, ni l’obtention des autorisations administratives au vu de l’attestation signée sans réserve par Mme [E] le 16 mai 2017, que cette attestation était d’ailleurs suffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l’opération et donc ratifiée en connaissance de cause, qu’aucune faute n’est imputable à la banque si le bon de commande a l’apparence de la régularité et qu’enfin, Mme [E] n’établit pas l’existence d’un préjudice justifiant une dispense de remboursement du capital dû à la banque.
C’est cependant par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a retenu une telle faute du prêteur en constatant que celui-ci avait débloqué la totalité des fonds sur la base de l’attestation de livraison et d’installation signée par Mme [E] le 16 mai 2017 et de l’attestation de conformité daté du même jour, sans s’assurer de la réalité de l’exécution des travaux et des prestations en totalité auprès de l’emprunteur, alors que le contrat prévoyait la livraison des panneaux photovoltaïques et d’un ballon thermodynamique, mais également de leur installation, de la déclaration préalable à la mairie, de la demande de raccordement auprès d’E.R.D.F, du règlement des frais de raccordement auprès d’E.R.D.F et de l’obtention de l’attestation consuel.
Il ressort des pièces communiquées que la société Cofidis ne s’est pas assurée de la régularité formelle du bon de commande.
Celui-ci présentait en effet des irrégularités flagrantes, dès lors qu’à la place du ballon prévu, c’est finalement une pompe à chaleur qui a été livrée et que celle-ci ne fonctionnait pas lors de la signature de l’attestation le 16 mai 2017.
En outre, la société Agence Nationale pour l’Ecologie n’a communiqué l’attestation sur l’honneur requis de sa part et à adresser à EDF que le 03 mars 2019, la mise en service effective de l’installation n’ayant donc pu être réalisée qu’à compter du 03 mars 2019. Ensuite, le délai entre la signature du bon de commande le 20 avril 2017 et celle de l’attestation de livraison et d’installation le 16 mai 2017 est bien trop court pour que le prêteur puisse opposer valablement à Mme [E] son absence d’obligation de s’assurer de la mise en service effective de la centrale photovoltaïque, alors que l’exécution complète du contrat principal n’était pas plausible à la date du 16 mai 2017.
D’ailleurs, l’attestation de livraison et d’installation signée par Mme [E] ne mentionnait pas précisément la réalisation par la société Agence Nationale pour l’Ecologie de la déclaration préalable à la mairie, de la demande de raccordement auprès d’E.R.D.F et du règlement des frais de raccordement auprès d’E.R.D.F pourtant mis à sa charge dans le contrat principal, ce qui ne permettait pas à la société Cofidis de considérer que le contrat financé avait reçu une exécution parfaite.
Enfin, le prêteur a débloqué une somme de 22 900 euros alors que la facture définitive fixait le montant dû à 21 000 euros.
Ces manquements de la société Cofidis sont constitutifs d’une négligence fautive source de préjudice pour Mme [E] dès lors que celle-ci ne peut obtenir la restitution du prix de l’installation auprès de son fournisseur en liquidation judiciaire, qu’elle est tenue de restituer le matériel du fait de l’annulation du contrat de vente, la société Cofidis ne justifiant pas qu’une clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif de la société Agence Nationale pour l’Ecologie rendant impossible la restitution du matériel serait intervenue et que Mme [E] justifie en outre que le fonctionnement de l’installation n’a pu débuter qu’à réception d’une attestation requise de son vendeur et délivrée en mars 2019, alors qu’elle a dû débuter le remboursement de ses mensualités de prêt dès janvier 2018.
Eu égard aux éléments susvisés, il convient d’évaluer le préjudice subi par Mme [E] à la somme de 8 000 euros et d’infirmer la décision du premier juge qui a considéré que la réparation du préjudice subi par Mme [E] s’entendait à la fois de la privation de la société Cofidis de son droit d’obtenir le remboursement du capital prêté à Mme [E] et restant dû et de l’obligation de l’établissement de crédit de rembourser à l’emprunteur les sommes déjà versées.
Mme [E] devra donc rembourser à la société Cofidis le capital emprunté, déduction faite des mensualités déjà réglées et de la somme de 8 000 euros allouée à Mme [E] au titre du préjudice subi, le montant dû étant assorti des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt .
III- Sur les délais de paiement
Mme [E] sollicite des délais de paiement à hauteur de 210 euros par mois, durant 24 mois, à compter de la décision à intervenir, en précisant que le solde sera versé lors de la dernière échéance.
La société Cofidis s’en rapporte à la décision de la cour sur cette demande.
Mme [E] produit à l’appui de sa demande un avis d’imposition de 2020 faisant état de ressources mensuelles à hauteur de 1 758 euros.
Ce justificatif ne permet pas de considérer que l’intéressée dispose d’une capacité financière suffisante pour faire face à un échéancier de paiement.
Elle sera donc déboutée de sa demande de délais de paiement.
IV- Sur les demandes accessoires
Les parties succombant chacune partiellement en leurs demandes conserveront chacune leurs propres dépens d’appel.
Elles seront en outre déboutées de leurs demandes respectives de frais irrépétibles d’appel.
En outre, les dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance seront confirmées.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme le jugement du tribunal judiciaire du Havre en date du 22 février 2021, sauf en ce qu’il a condamné la société Cofidis à restituer à Mme [E] les mensualités réglées par elle en exécution du contrat de crédit et débouté la société Cofidis de sa demande de remboursement du capital emprunté en présence d’une faute du prêteur dans le déblocage des fonds,
Condamne Mme [D] [E] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté, déduction faite des mensualités déjà réglées et de la somme de 8 000 euros allouée à Mme [E] au titre du préjudice subi, le montant dû étant assorti des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Déboute Mme [D] [E] de sa demande de délais de paiement,
Déboute les parties de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Laisse aux parties la charge de leurs dépens d’appel.
La greffièreLa présidente
C. DupontE. Gouarin
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