Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRET DU 19 OCTOBRE 2022
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 19/07822 – N° Portalis DBVK-V-B7D-ONOZ
ARRET N°
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 13 NOVEMBRE 2019
TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER
N° RG 18015379
APPELANTE :
S.A.S Locam
prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour la SELARL LEXI Conseil&Défense, avocats au barreau de SAINT ETIENNE
INTIMES :
Madame [I] [P]
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Charlotte BARTHELEMY, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour Me Rachel VERT, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE
Monsieur [C] [U]
es qualité de mandataire liquidateur de la SARL I.M.E
[Adresse 4]
[Localité 6]
assigné à domicile le 11 mars 2020
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 SEPTEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
Mme Cécile YOUL-PAILHES, Conseillère
M. Frédéric DENJEAN, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT
ARRET :
– par défaut
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.
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FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Démarchée par la société Chrome Bureautique, désormais dénommée Impressions Multifonctions et Equipements (IME), Mme [I] [P], exerçant la profession d’infirmière libérale a signé le 13 janvier 2016 un bon de commande d’un photocopieur de marque Olivetti ainsi que le même jour un contrat de maintenance, et un contrat de partenariat client référent.
Un contrat de location financière daté du 03 février 2016 était conclu avec la SA Locam prévoyant le règlement de 63 mensualités de 239€ HT chacune jusqu’en juillet 2021.
Le matériel était livré selon procès-verbal de livraison et de conformité daté du 04 février 2016.
Locam payait le matériel à Chrome Bureautique selon facture du 05 février 2016 et émettait l’échéancier.
Par actes d’huissier du 21 et 22 novembre 2018, Mme [P] a fait assigner les sociétés IME et Locam devant le tribunal de commerce de Montpellier sur le fondement des dispositions du code de la consommation, subsidiairement du code de commerce en poursuivant le constat de la résiliation du contrat principal et la caducité du contrat accessoire par interdépendance des contrats.
Par jugement du tribunal de commerce du 04/09/2017, une procédure de redressement judiciaire de la société IME était ouverte, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 24 novembre 2017.
Par jugement du 13 novembre 2019, le tribunal de commerce de Montpellier a :
dit que le contrat de location conclu le 03 février 2016 par Mme [P] avec la société Locam et les contrats de maintenance et garantie ainsi que le contrat de partenariat client référent, signés le 13 janvier 2016 avec les sociétés du groupe IME sont interdépendants et indissociablement liés et que le contrat de commande de matériel est le contrat principal, le contrat de location longue durée et le contrat de partenariat en étant les accessoires
dit que toutes les conditions sont remplies pour que les dispositions de l’article L221-3 du code de la consommation s’appliquent aux contrats interdépendants
dit que la société Locam ne rapporte pas la preuve du respect des obligations prévues par le code de la consommation
prononcé en conséquence la nullité des contrats de fourniture et maintenance, de partenariat client référent et de location financière
dit qu’il incombe à Mme [X], ès-qualités, de récupérer à ses frais au cabinet d’infirmière de Mme [P] le photocopieur
condamné la société Locam à restituer à Mme [P] le montant des loyers versés depuis le 10 mai 2016, arrêté à la somme de 9560€ HT soit 11472€TTC au jour de ses conclusions, sauf à parfaire au jour de la présente décision
débouté la société Locam de toutes ses demandes
Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire
Condamné la société Locam à payer à Mme [P] la somme de 1000€au titre de l’article 700 du code de procédure civile
condamné la société Locam aux entiers dépens de l’instance, dont frais de greffe liquidés et taxé.
vu la déclaration d’appel du 04 décembre 2019 par la société Locam.
Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 août 2020 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles elle demande de réformer le jugement et de condamner Mme [P] à lui payer la somme de 10095,36€ avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 janvier 2019 ; subsidiairement, en cas d’anéantissement du contrat de location, de condamner Mme [P] à lui payer une indemnité de jouissance d’un montant égal à celui du loyer jusqu’à restitution de l’imprimante ou, à tout le moins la date de liquidation judiciaire de la société IME ;
en tout état de cause, de la condamner à lui payer la somme de 2000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 mars 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles Mme [P] demande à titre principal, de confirmer le jugement et décline à titre subsidiaire, très subsidiaire, infiniment subsidiaire des demandes sur des fondements textuels différents tendant à l’annulation ou à la caducité des contrats, y ajoutant de condamner la société Locam à lui payer la somme de 3000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Me [U], à qui la déclaration d’appel et les conclusions initiales de la société Locam ont été signifiées à domicile par acte d’huissier du 10 mars 2020 en sa qualité de liquidateur de la société IME n’a pas constitué avocat.
Vu l’ordonnance de clôture du 16 août 2022.
MOTIFS
La société Locam soutient que c’est à tort que les premiers juges ont fait application des dispositions du code de la consommation, particulièrement des articles L121-16 et suivants devenus L221-3 et suivants alors que Mme [P] a reconnu avoir contracté dans le cadre et pour les besoins de son activité professionnelle. Cette application est pour elle contraire aux dispositions de l’article liminaire du même code et Locam cite diverses jurisprudences refusant d’appliquer les dispositions du code de la consommation à des professionnels commerçants. Elle souligne de surcroît que Mme [P] ne justifie pas qu’elle employait moins de cinq salariés au jour du contrat.
Toutefois, les premiers juges, par une motivation pertinente en fait et en droit que la cour adopte ont justement analysé que l’usage d’un photocopieur/numériseur/télécopieur n’entrait pas dans le champ de l’activité principale d’infirmière libérale exercée par Mme [P].
L’exercice à titre individuel de la profession d’infirmière libérale n’a conféré à Mme [P] qui justifie n’employer aucun salarié au jour du contrat, aucune compétence pour apprécier l’intérêt tant matériel que financier à s’engager dans la location du photocopieur et dans le partenariat en cause, dans la mesure où les services qui lui ont été proposés étaient étrangers à son champ de compétence professionnelle et n’ont été appréhendés par elle que pour faciliter l’exercice de son activité d’infirmière libérale.
L’usage par la société Locam d’un formulaire préimprimé selon lequel son cocontractant atteste que le contrat est en rapport direct avec son activité professionnelle, formule destinée à la protéger en l’état de la législation applicable antérieurement au contrat, n’exlut en rien l’application des dispositions nouvelles qui évoquent l’activité principale du cocontractant.
Locam poursuit ensuite la réformation en soulignant que la location financière est exclue du champ d’application des dispositions du code de la consommation relative aux contrats hors établissement. Elle se décrit comme une société de financement, soumise au code monétaire et financier, agréée pour exercer à titre habituel l’activité de location avec option d’achat. L’opération de location simple est une activité connexe autorisée par l’article L311-2 de ce code. C’est ainsi que le contrat rappelle que sont exclus du champ d’application des dispositions relatives aux contrats conclus hors établissement du code de la consommation les contrats portant sur les services financiers.
Cependant, l’application des règles du droit de la consommation tant au bon de commande qu’au contrat de partenariat, dépourvus de formulaire de rétractation, donc nuls, cumulée avec l’interdépendance des contrats entre ceux-ci et le contrat de location affecte ab initio la validité de ce dernier, la nullité des premiers entraîant la nullité du dernier. L’interdépendance des contrats a été très exactement analysée par les premiers juges dont la cour adopte les motifs.
Mais encore, l’analyse proposée par Locam procède d’une assimilation entre opérations de banque et services financiers que le code monétaire et financier différencie en les traitant par des dispositions spécifiques insérées :
– au Titre 1 du Livre III, articles L.311-1à L.318-5 pour les opérations de banque,
– au Titre IV du Livre III, articles L.341 à L.343-6 pour les services financiers.
Les dispositions relatives aux locations simples de mobilier sont insérées dans le titre 1 mais dans la définition des opérations connexes aux opérations de banque énumérées à l’article L.311-2 du code monétaire et financier.
S’il est ensuite exact, que l’article L.222-1 du code de la consommation prévoit que le chapitre ‘Dispositions particulières au contrat conclu à distance portant sur des services financiers’ s’applique aux services mentionnés au Livre Ier à III (…) du code monétaire et financier, (le Livre III contenant l’article L.311-2), il n’en demeure pas moins que l’exclusion de l’article L.221-2 ne peut concerner que les services financiers du Livre III dudit code.
La société Locam ne prétend d’ailleurs pas avoir mis en oeuvre le formalisme prévu aux articles L.222-1 et suivants prévoyant notamment l’envoi au client des informations énoncées à l’article L.222-5 en temps utile et avant qu’il ne soit lié par le contrat.
Il en résulte que Mme [P] peut valablement invoquer le bénéfice des dispositions de l’article L. 121-16-1 III du code de la consommation (devenu l’article L. 221-3) précité, renvoyant aux articles L.121-17 (devenu L. 221-5 à L. 221-7) et L.121-18-1 (devenu L. 221-9) insérés aux sous-sections 2 et 3 prévoyant notamment que le contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I 2° de l’article L. 121’17 au nombre desquelles l’indication du délai et des modalités d’exercice du droit de rétractation ainsi que le formulaire type de rétractation accompagnant le contrat (…).
C’est donc à juste titre que les premiers juges, ayant constaté que les dispositions du code de la consommation étaient applicables au litige, que la société Locam ne justifiait pas du respect de telles dispositions ont constaté l’anéantissement de l’ensemble contractuel et remis les parties dans leur état antérieur.
Le jugement sera confirmé dans toutes ses dispositions, étant observé que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, ce qui n’est pas le cas de prétentions fianncières actualisées non reprises dans le dispositif de conclusions qui demandent confirmation du jugement sauf à y ajouter au titre des dsipositions de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens d’appel.
S’agissant de la demande d’indemnité de jouissance, la référence au loyer contractuel manque de pertinence en l’état de l’anéantissement du contrat. Il est acquis aux débats que Mme [P] a eu la jouissance du photocopieur devenu propriété de la société Locam suite à facturation du 05 février 2016. Le principe d’une indemnité est acquis mais son quantum sera modérée à la somme mensuelle de 10€. En l’état de la demande de la société Locam de ce chef, son terme sera arrêté au 24 novembre 2017.
Il sera ajouté au jugement de ce chef, compensation étant ordonnée avec la créance de restitution de Mme [P].
Partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, la société Locam supportera les dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe
Confirme le jugement en toutes ses dispositions
statuant à nouveau,
Y ajoutant,
Condamne Mme [I] [P] à payer à la société Locam la somme mensuelle de 10 euros au titre d’indemnité de jouissance du 04 février 2016 au 24 novembre 2017.
Ordonne la compensation entre cette indemnité de jouissance et la créance de restitution des loyers de Mme [P] envers la société Locam.
Condamne la société Locam aux dépens d’appel avec distraction au profit de Me Barthélemy, avocat, qui en affirme son droit.
Condamne la société Locam à payer à Mme [I] [P] la somme de 2500€ par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT