Droit de rétractation : Décision du 21 septembre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/01933

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Droit de rétractation : Décision du 21 septembre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/01933

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/01933 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OCIO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 29 JANVIER 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 16/00140

APPELANTS :

Monsieur [E] [P]

né le 17 Novembre 1950 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Adresse 10]

et

Madame [J] [F] épouse [P]

née le 10 Octobre 1950 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Adresse 10]

Représentée par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

substitué par Me Mélody VAILLANT, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Madame [A] [Z] épouse [B]

née le 05 Février 1958 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

et

Mademoiselle [I] [B]

née le 20 Juin 1986 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

et

Monsieur [D] [B]

né le 20 Septembre 1989 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Stéphane CABEE de la SCP CABEE-BIVER, avocat au barreau de CARCASSONNE substitué par Me Jean-Luc BIDOIS, avocat au barreau de CARCASSONNE

Maître [T] [Y]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Claire JOUHANNEAU, avocat au barreau de TOULOUSE

SARL ARIEG’IMMO agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Séverine VALLET de la SCP D’AVOCATS COSTE, DAUDE, VALLET, LAMBERT, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Amandine FONTAINE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 30 Mai 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 juin 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Fabrice DURAND, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

– contradictoire,

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 12 mai 2010 passé en l’étude de maître [T] [Y], notaire, monsieur [G] [B] et madame [A] [Z] épouse [B] ont acquis auprès de monsieur [M] [X] une maison à usage d’habitation située à Gineste, commune de [Localité 7], dans [Localité 9].

Monsieur [G] [B] est décédé le 1er novembre 2010.

Par acte authentique du 18 mai 2011 également instrumenté par maître [T] [Y], monsieur [E] [P] et madame [J] [F] épouse [P] ont acquis cette maison auprès de madame [A] [Z] veuve [B] et ses deux enfants [I] et [D] [B].

Se plaignant de divers désordres affectant leur immeuble, les époux [P] ont mandaté un expert, le cabinet Phenix Conseil, lequel, aux termes d’un rapport en date du 13 février 2012, a relevé notamment des infiltrations entre la maison et le garage, des défauts d’aération de ventilation et d’isolation, la fissuration des faux plafond et la réalisation non conforme du conduit de fumée.

Les époux [P] ont saisi le juge des référés près le tribunal de grande instance de Carcassonne aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire au contradictoire des consorts [B] et de monsieur [X].

Par ordonnance du 18 octobre 2012, monsieur [S], architecte DPLG, a été désigné en qualité d’expert judiciaire. Il a rendu son rapport le 28 août 2014.

Par actes d’huissier des 15, 21 décembre 2015 et 14 janvier 2016, les époux [P] ont assigné les consorts [B], maître [T] [Y] et la SARL Arieg’Immo en résolution de l’acte de vente authentique du 18 mai 2011 avec remboursement du prix de vente et versement de diverses sommes au titre de dommages et intérêts, des travaux de reprise et des préjudices subis.

Par jugement contradictoire du 29 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Carcassonne a notamment :

– Condamné les consorts [B] à payer aux époux [P] la somme de 8 000 euros pour défaut d’information ;

– Condamné maître [Y] à relever et garantir indemnes les consorts [B] de l’intégralité de la condamnation sus-prononcée à leur encontre ;

– Condamné les consorts [B] à payer aux époux [P] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et dit que maître [Y] devra les garantir intégralement ;

– Condamné les époux [P] à payer à la SARL Arieg’Immo la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

Par acte du 20 mars 2019, les époux [P] ont régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par leurs conclusions enregistrées au greffe le 14 novembre 2019, les époux [P] sollicitent l’infirmation du jugement et demandent à la cour :

– d’ordonner la résolution de l’acte de vente authentique conclu le 18 mai 2011,

– de condamner solidairement les intimés à leur verser :

* le remboursement du prix de vente soit 143 000 euros outre intérêts au taux légal à compter de la signature de l’acte,

* 50 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance et le préjudice lié à l’obligation de trouver une nouvelle habitation,

* 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, ils sollicitent la condamnation solidaire des intimés à leur payer la somme de 175 471,91 euros au titre de la démolition/reconstruction de leur maison, compte tenu de sa non conformité aux règles parasismiques ainsi que :

* 2 675,58 euros au titre des frais de déménagement et garde-meuble

* 29 100 euros au titre du préjudice de jouissance subi du fait des désordres affectant l’ouvrage

* 1 200 euros au titre du préjudice de jouissance qu’ils subiront pendant la durée des travaux de reprise

* 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire, ils sollicitent la condamnation solidaire des intimés à leur payer la somme de 73 020,08 euros au titre des travaux de reprise et :

* 29 100 euros au titre du préjudice de jouissance subi du fait des désordres affectant l’ouvrage

* 1 200 euros au titre du préjudice de jouissance qu’ils subiront pendant la durée des travaux de reprise

* 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile.

En tout état de cause, ils sollicitent la condamnation des intimés aux entiers dépens comprenant notamment les frais d’expertise.

Par leurs conclusions enregistrées au greffe le 4 septembre 2019, les consorts [B] sollicitent la confirmation du jugement sauf en ce qu’il :

-a retenu une diminution de 8 000 euros du prix de vente pour défaut d’information conforme à l’article L 217-4 du code de la consommation,

-les a condamnés à verser cette somme, ainsi qu’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile aux époux [P],

-les a déboutés de leur demande à être relevés et garantis par maître [Y] et l’agence Arieg’Immo, pris solidairement, de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre,

-laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

Ils demandent à la cour de :

– débouter les époux [P] de tous leurs chefs de demandes,

– condamner solidairement l’agence Arieg’Immo et Maître [Y] à relever et garantir les consorts [B] de tous chefs de condamnation qui pourraient être prononcés à leur encontre au profit des époux [P],

– condamner les époux [P] in solidum ou tout autre succombant au principal aux entiers dépens, en ce compris ceux de référé et d’expertise, dont distraction au profit de la SCP Cabee Biver Spanghero en application d el’article 699 du code de procédure civile, et à leur verser la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 code de procédure civile.

Par ses conclusions enregistrées au greffe le 18 septembre 2019, maître [T] [Y] sollicite la confirmation du jugement sauf en ce qu’il l’a condamnée à relever et garantir les consorts [B] de l’intégralité de la condamnation prononcée à leur encontre au profit des époux [P] au titre de la diminution du prix de vente pour défaut d’information et la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et a laissé à sa charge ses propres dépens.

Maître [T] [Y] demande à la cour, statuant à nouveau, de débouter les époux [P] et les consorts [B] de leurs demandes dirigées à son encontre, et de condamner les époux [P] aux dépens de première instance et d’appel et à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions enregistrées au greffe le 10 septembre 2019, la SARL Arieg’Immo sollicite la confirmation du jugement déféré et la condamnation des époux [P] ou de tout autre succombant aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 30 mai 2023.

Pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS

Sur les demandes dirigées contre les consorts [B]

Les époux [P] formulaient en première instance des demandes sur les fondements de l’article 1792 du code civil, de l’article 1641 du code civil ainsi que des articles L125-5 du code de l’environnement et L 217-4 du code de la construction et de l’habitat.

Le jugement les a déboutés de leur demande sur le fondement de l’article 1792 du code civil, et ce chef de jugement n’est pas discuté en appel, contrairement aux deux autres fondements.

L’action sur le fondement des vices cachés

Le tribunal a retenu qu’il n’était pas démontré que les consorts [B] avaient eu connaissance des désordres rendant l’immeuble impropre à sa destination et que, la mauvaise foi des vendeurs n’étant pas établie, la clause de non garantie des vices cachés insérée dans l’acte de vente devait recevoir application.

Les époux [P] contestent cette analyse, soulignant que l’impropriété à destination a été évoquée par l’expert judiciaire s’agissant des infiltrations à la jonction du garage et de la maison, et que l’expert a précisé que ces désordres étaient présents dès l’origine. Ils prétendent que les vendeurs avaient nécessairement connaissance des infiltrations soit parce qu’ils les ont eux mêmes subies, la commune étant en altitude et particulièrement soumise aux intempéries, soit parce qu’ils en ont constaté les traces (tâches…). Ils soulignent d’ailleurs que les défauts concernant le chauffe-eau électrique avaient été signalés par monsieur [G] [B]. Selon eux, les vendeurs ont produit un DPE trompeur en toute connaissance de cause lors de la vente.

Les consorts [B] demandent l’application de la clause de non garantie, soulignant n’avoir aucune compétence en matière immobilière. Ils précisent que les époux [B] n’ont séjourné que très peu de temps ( à peine un mois) dans la maison, et dans des périodes peu pluvieuses (été), de sorte qu’ils n’ont pas eu à déplorer d’infiltrations. S’agissant du quitus donné par les époux [B] s’agissant des travaux d’isolation des combles et de réalisation des bardages extérieurs, ils indiquent ne pas avoir identifié les désordres pour lesquels l’expert judiciaire a indiqué qu’ils n’étaient ‘pas forcément compréhensibles pour des profanes’.

Aux termes du rapport d’expertise judiciaire, l’immeuble est affecté de désordres, et notamment d’infiltrations, de nature à le rendre impropre à sa destination et ces désordres existaient lors de la vente du bien par les consorts [B] aux consorts [P] (pièce 25 des époux [P]).

Il résulte par ailleurs des pièces du dossier ( pièces 2 des consorts [B] et 1 des époux [P]) que les époux puis les consorts [B] n’ont été propriétaires du bien litigieux que du 12 mai 2010 au 18 mai 2011, et qu’ils n’y ont séjourné, s’agissant d’une résidence secondaire, que pendant de courtes périodes, à savoir du 14 au 21 juillet 2010, du 25 juillet au 3 août 2010 et du 7 au 12 août 2010 (pièce 4 des époux [B]), avant de revendre le bien suite au décès de monsieur [G] [B], survenu le 1er novembre 2010.

L’expert judiciaire estime qu’en tant que profanes en matière de construction, ils ont pu ne pas déceler les malfaçons affectant les travaux d’isolation des combles et de réalisation des bardages extérieurs, et qu’ils ont pu ne pas avoir à subir d’infiltrations, ayant peu séjourné sur place, et leurs séjours ayant eu lieu pendant des périodes peu pluvieuses.

Si, comme l’affirment les époux [P], la commune de [Localité 7] se situe en altitude et serait de ce fait particulièrement sujette aux intempéries, les pièces du dossier n’établissent pas l’existence d’intempéries précisément aux moments où les époux [B] ont occupé les lieux, alors que la période d’été est peu propice aux précipitations.

Concernant les traces d’infiltrations, elles apparaissent comme non détectables par les époux [B] dès lors que les époux [P] eux mêmes ne les ont pas remarquées avant de subir des infiltrations.

S’agissant enfin des désordres relatifs au chauffe-eau, le mail envoyé par monsieur [G] [B] à l’agence Arieg’immo le 15 mai 2010 (pièce 3 des époux [B]) évoque une simple difficulté au niveau du compteur électrique ayant entrainé un défaut d’eau chaude un matin, et non des infiltrations.

Dans ces conditions, il n’est pas établi que les vendeurs avaient connaissance, des vices non apparents qui existaient lors de la vente.

C’est par conséquent par une exacte appréciation des faits de la cause que le tribunal a retenu que la clause de non garantie de l’acte de vente devait recevoir application au cas d’espèce, en l’absence de mauvaise foi des vendeurs.

Le jugement sera confirmé.

L’action sur le fondement des articles L125-5 du code de l’environnement et L 217-4 du code de la construction et de l’habitat

Le tribunal a relevé que les documents annexés à la vente faisaient état d’un risque très faible de sismicité (Zone A1) alors que selon la nouvelle délimitation, entrée en vigueur le 1er mai 2011, soit entre le compromis de vente (30 mars 2011) et l’acte authentique (18 mai 2011), la commune de [Localité 7] a été placée en zone de sismicité 3 dite modérée, et que de ce fait, l’information donnée était erronée, et équivalait à un défaut d’information entraînant soit la résolution de la vente, soit la réduction du prix. Il a estimé que les époux [P] ne démontrant pas qu’une information exacte sur la sismicité les auraient conduits à ne pas contracter, alors que l’aggravation du risque était mineure (de faible à modéré), il convenait de décider d’une réduction du prix, et ce à hauteur de la somme de 8 000 euros.

Pour les consorts [B], l’article L 125-5 du code de l’environnement impose au vendeur une simple information sur l’existence d’un risque, ce qui a été fait, seul le zonage indiqué étant périmé. Ils rappellent qu’il incombe à l’acquéreur de se documenter sur l’environnement du bien qu’il souhaite acquérir. Ils font valoir qu’en tout état de cause, il appartient au juge de déterminer l’incidence des risques naturels et technologiques dont l’acquéreur n’a pas eu connaissance en temps utiles, et qu’en l’espèce, le risque de séisme est très relatif, aucun séisme grave ne s’étant produit depuis cinq siècles dans la zone concernée, de sorte que l’information périmée n’affecte pas la valeur de l’immeuble et ne cause aucun préjudice à l’acquéreur.

Les époux [P] prétendent quant à eux que les vendeurs étaient tenus à une obligation d’information de résultat, à laquelle ils ont failli, de sorte que l’existence ou non d’un préjudice immédiat est sans incidence sur la sanction. Ils font valoir que le risque sismique est réel, la commune ayant déjà été classée en état de catastrophe naturelle pour cette raison. Ils estiment l’absence d’information liée au risque sismique déterminante, de nature à entraîner la résolution de la vente.

Il n’est pas contesté que l’information donnée sur la sismicité (zone 1A, risque très faible, au lieu de zone 3, risque modéré) était erronée de quelques jours au moment de la vente ( entrée en vigueur de la nouvelle réglementation le 1er mai 2011 alors que l’acte authentique de vente est signé le 18 mai 2011).

Cette information inexacte équivaut à un défaut d’information, l’obligation d’information comprenant nécessairement celle de délivrer une information exacte, puisqu’une information erronée n’est pas susceptible de renseigner l’acquéreur de manière précise.

Aux termes des textes visés, il s’agit d’une obligation de résultat qui donne nécessairement lieu à une sanction (résolution de la vente ou réduction du prix) en cas de non respect, peu important, s’agissant du principe de la sanction, que la commune soit ou non dans les faits sujette aux tremblements de terre, puisque l’information légale est relative aux risques encourus et non à la réalisation desdits risques, et qu’il existe ou non un préjudice pour les acquéreurs.

En revanche, il y a lieu de tenir compte des circonstances de l’espèce et de l’impact du défaut d’information sur les acquéreurs pour déterminer l’étendue de la sanction.

En l’espèce, aucun élément du dossier ne laisse apparaître que les acquéreurs attachaient une importance particulière au risque sismique. Par ailleurs, le changement de zone a engendré une augmentation du risque très relative, puisque le risque est passé de très faible à modéré.

Dans ces conditions, ainsi que parfaitement apprécié par le premier juge, le défaut d’information n’est en l’espèce pas de nature à entraîner la résolution de la vente mais justifie une légère réduction du prix de vente, justement appréciée à la somme de 8 000 euros.

Sur les demandes dirigées contre le notaire

Le tribunal a retenu que la responsabilité délictuelle de maître [T] [Y] était engagée concernant le risque sismique, du fait de l’omission d’indiquer la bonne information sur l’acte de vente, le niveau du risque ayant été modifié par décret entré en vigueur entre la signature du compromis de vente et celle de l’acte authentique. Il a en revanche considéré que le notaire avait correctement informé les vendeurs sur l’absence de possibilité d’action contre les vendeurs sur le fondement de l’article 1792 du code civil, le projet d’acte ayant été modifié en ce sens et communiqué aux époux [P] plusieurs jours avant la vente, et les époux [P] ne démontrant pas qu’ils auraient renoncé à la vente si le notaire les avaient informés plus précisément.

Les époux [P] persistent à soutenir que maître [T] [Y] a manqué à ses obligations professionnelles à leur égard puisqu’elle :

-ne les aurait pas informés de la possibilité de se faire assister par un autre notaire, qui les auraient alerté sur la modification de l’acte de vente concernant l’absence de recours contre les vendeurs sur le fondement de l’article 1792 du code civil et les auraient avisés de l’existence d’un délai de rétractation,

-ne les aurait pas informés de ce que le projet d’acte était modifié (et ce d’autant que le projet modifié n’a été adressé qu’à monsieur [P], et par mail), de sorte que la modification relative à la responsabilité décennale, qui leur est défavorable, ne leur est apparu qu’après la signature de l’acte, alors qu’ils ne disposaient de fait plus de recours possible contre le constructeur monsieur [X], devenu insolvable.

Maître [T] [Y] conteste s’être opposée à l’intervention d’un autre notaire, qu’elle a effectué l’ensemble des démarches nécessaires à la vente et a très précisément et très clairement détaillées l’absence de garantie décennale et l’absence d’assurance dommages-ouvrage avec les conséquences susceptibles de découler de cette situation, la seule erreur, qui concernait le recours en responsabilité décennale du fait des travaux, ayant été corrigée entre le compromis et l’acte authentique, avec information donnée aux époux [P] de ce qu’ils pouvaient rechercher la responsabilité décennale de monsieur [X], constructeur, mais non des époux [B]. Elle ajoute que la solvabilité de monsieur [X] n’était pas en doute au moment de la vente et qu’elle n’avait pas connaissance des désordres affectant le bien. S’agissant du risque sismique, elle souligne que l’état des risques naturels et technologiques annexé à la vente datait de moins de six mois (30 mars 2011), et qu’elle ne pouvait pas anticiper la date d’entrée en vigueur du décret modifiant la zone. Elle soutient enfin que la restitution d’une partie du prix de vente par le vendeur ne constitue pas un préjudice indemnisable en cas de faute notariale.

Il résulte des éléments du dossier que :

-les époux [P] ont envisagé d’être assistés par leur notaire, maître [W] [L], mais y ont renoncé d’eux mêmes (pièce 32 des époux [P]), de sorte que le défaut d’intervention du notaire personnel des époux [P] n’est pas imputable à maître [T] [Y],

-l’acte authentique a été signé par les époux [P] sans réserve, de sorte qu’ils ont renoncé par la même à soulever l’éventuelle irrégularité de la notification du droit de rétractation,

-le projet d’acte authentique portant une modification quant à la responsabilité décennale des vendeurs a été communiqué à monsieur [P] par mail le 9 mai 2011, soit près de 10 jours avant la vente, ce qui n’est pas contesté par les époux [P] qui n’ont émis aucune réserve à ce sujet lors de la signature de l’acte de vente, alors qu’ils avaient la possibilité de faire lire l’acte par un professionnel,

au moment de la vente, l’insolvabilité éventuelle de monsieur [X] n’était pas connue,

-l’acte de vente contient des informations erronées sur le risque sismique.

Dans ces conditions, aucune faute ne peut être reprochée au notaire dans le cadre de la vente litigieuse, à l’exception de l’erreur relative au risque sismique.

En ne mettant pas à jour les informations contenues à ce sujet dans l’acte de vente, alors que la réglementation avait changé depuis quelques jours, le notaire a commis une faute de nature délictuelle engageant sa responsabilité.

Cette faute est directement à l’origine d’un préjudice pour les vendeurs, condamnés à indemniser les époux [P] pour ce défaut d’information à hauteur de la somme de 8 000 euros.

Dans ces conditions, le jugement sera confirmé.

Sur les demandes dirigées contre l’agent immobilier

Le tribunal a considéré que les époux [P] ‘ne démontrent pas en quoi l’agence immobilière devrait être considérée comme un professionnel de la construction immobilière alors qu’elle n’a pour objet que les transactions immobilières’.

Les époux [P] soulignent que l’agence a réalisé les deux ventes impliquant les consorts [B], et que madame [V] se trouve être la gérante de cette agence et de deux autres sociétés ayant pour objet la rénovation et la construction de biens immobiliers, de sorte qu’elle ne peut valablement affirmer ne pas avoir de compétences en la matière. Selon eux, madame [V] ne pouvait ignorer les désordres affectant le bien, pour avoir suivi les travaux. Ils ajoutent qu’elle a produit un diagnostic DPE erroné et leur a fourni des infos erronées concernant la qualité de professionnel de la construction de M. [X], ce qui les a induits en erreur lors de la passation de l’acte authentique.

La SARL Arieg’immo soutient ne pas être un professionnel de la construction et ne pas avoir les capacités techniques de mettre en doutes les informations qui lui sont fournies concernant le bien ( diagnostics…). Elle souligne avoir parfaitement veillé à ce que les documents nécessaires, et notamment le DPE, soient annexés à l’acte de vente.

Ainsi que parfaitement relevé par le tribunal, l’agence immobilière est un professionnel de l’immobilier mais non de la construction.

Dès lors il ne peut lui être reproché l’existence d’un DPE erroné, pas plus qu’une connaissance des désordres affectant l’immeuble, le fait que la gérante de la SARL Arieg’ Immo soit également gérante d’autres sociétés ayant de possibles compétences en matière de construction étant totalement indifférent à la qualité de la SARL Arieg’ Immo, qui dispose de la personnalité morale et ne peut être confondue avec sa gérante.

Concernant enfin la qualité de monsieur [X], il sera fait observer que ce dernier apparaît en qualité de maçon lorsqu’il a vendu le bien litigieux (pièce 2 des consorts [B]), de sorte que sa qualité de professionnel de la construction revêt un caractère réel.

Dans ces conditions, le jugement sera confirmé.

Sur les demandes accessoires

Eu égard à l’issue du litige, le jugement sera confirmé.

En cause d’appel, les époux [P], qui succombent totalement en leur demandes à l’égard de la SARL Arieg’immo, seront condamnés à payer à la SARL Arieg’Immo la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [B] seront quant à eux condamnés à payer aux époux [P] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, mais seront garantis intégralement du paiement de cette somme par maître [Y].

Les dépens d’appel seront laissés à la charge des époux [P], eu égard à ce que leur appel n’a pas prospéré.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Carcassonne ;

Y ajoutant,

Condamne madame [A] [Z] veuve [B], madame [I] [B] et monsieur [D] [B] à payer à monsieur [E] [P] et madame [J] [F] épouse [P] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et condamne maître [T] [Y] à les garantir intégralement de cette condamnation ;

Condamne monsieur [E] [P] et madame [J] [F] épouse [P] à payer à la SARL Arieg’immo la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne monsieur [E] [P] et madame [J] [F] épouse [P] aux entiers dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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