CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 septembre 2023
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 654 F-D
Pourvois n°
X 22-17.082
F 22-17.389 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2023
1°/ Mme [E] [G], épouse [S], domiciliée [Adresse 4],
2°/ M. [U] [S], domicilié [Adresse 3],
ont formé les pourvois n° X 22-17.082 et F 22-17.389 contre un arrêt rendu le 13 avril 2022 par la cour d’appel de Lyon (8e chambre), dans le litige les opposant respectivement :
1°/ à la société Ast groupe, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Crédit foncier de France, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La société Ast groupe a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l’appui de leur recours, un moyen de cassation ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, un moyen de cassation ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme [S], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Ast groupe, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Crédit foncier de France, après débats en l’audience publique du 11 juillet 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° X 22-17.082 et F 22-17.389 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 13 avril 2022), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 27 mai 2021, pourvois n° 20-14.321, 20-13.204), M. et Mme [S] ont conclu avec la société Ast groupe un contrat de construction d’une maison individuelle, l’opération immobilière étant financée par des emprunts souscrits auprès de la société Crédit foncier de France (le CFF).
3. M. et Mme [S] ont assigné la société Ast groupe et le CFF en annulation et, subsidiairement, en résiliation des contrats de construction et de prêt et en indemnisation de leurs préjudices, avant de modifier leurs prétentions, en cours d’instance, en sollicitant, à titre principal, la constatation de l’anéantissement du contrat de construction par l’exercice de leur droit de rétractation.
Examen des moyens
Sur les moyens, pris en leur deuxième branche, des pourvois incidents n° X 22-17.082 et F 22-17.389 de la société Ast groupe, rédigés en termes identiques, réunis
4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur les moyens, pris en leurs première, troisième et quatrième branches, des pourvois incidents n° X 22-17.082 et F 22-17.389 de la société Ast groupe, rédigés en termes identiques, réunis
Enoncé des moyens
5. La société Ast groupe fait grief à l’arrêt d’ordonner la démolition de la construction à ses frais dans un délai de quatre mois à compter de la signification de l’arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un délai de six mois, alors :
« 1°/ que le maître d’ouvrage qui décide de faire usage de son droit de rétractation alors même que l’immeuble a déjà été construit, doit assumer les conséquences financières de son choix purement discrétionnaire, et il n’est pas fondé à obtenir du juge qu’il ordonne automatiquement au constructeur d’assumer la charge financière de la démolition de l’ouvrage ; qu’en l’espèce, les maîtres d’ouvrage ayant fait le choix de se rétracter de leurs engagements à une époque où l’immeuble avait déjà été intégralement construit et ayant également demandé la démolition de celui-ci la cour d’appel qui a ordonné la démolition de la construction ne pouvait en mettre automatiquement les frais y afférents à la charge du constructeur, la société Ast groupe, sans violer l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation ;
3°/ qu’un défaut de conformité au permis de construire ne suffit pas à caractériser une impropriété à destination de l’ouvrage, dès lors qu’il est sans conséquence sur l’habitabilité technique et effective de l’immeuble ; qu’en affirmant que la non-conformité par rapport au permis de construire s’agissant de l’altimétrie de la maison était établie et rendait l’immeuble impropre à sa destination, sans constater que la différence d’altimétrie par rapport au permis de construire aurait eu des conséquences graves sur l’habitabilité de l’ouvrage ou sa pérennité, la cour d’appel, qui a méconnu le principe de proportionnalité des réparations au regard de l’absence de conséquences dommageables de la non-conformité constatée, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 271-1 du code civil et du principe susvisé ;
4°/ que l’ouvrage non conforme à l’autorisation de construire délivrée peut faire l’objet d’un simple permis de construire modificatif, dès lors que les modifications envisagées n’apportent pas au projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même ; que, pour ordonner la démolition de la maison, la cour d’appel a constaté que la société Ast groupe ne rapportait pas la démonstration des mesures de compensation technique susceptibles de donner lieu à la délivrance d’un permis de construire modificatif, et qu’elle ne chiffrait pas le coût d’une éventuelle reprise susceptible de donner lieu à permis modificatif ; qu’en statuant ainsi, sans caractériser en quoi la différence de seulement 12 à 13 cm d’altimétrie entre la maison litigieuse et le permis de construire initialement obtenu aurait été de nature à apporter au projet un bouleversement tel qu’il en aurait changé la nature, sauf à prendre des mesures de compensation technique, quand la société Ast groupe soutenait, dans ses conclusions, qu’une simple demande de permis de construire modificatif, pour un coût de 1 000 euros, aurait suffi à permettre l’obtention du certificat de conformité de l’ouvrage, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation. »