Droit de rétractation : Décision du 14 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/02411

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Droit de rétractation : Décision du 14 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/02411

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT AU FOND

DU 14 DECEMBRE 2023

N° 2023/ 198

Rôle N° RG 20/02411 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFTQX

Association [Localité 5] SPORTS NATATION

C/

[P] [I]

S.A.S. LOCAM

Société INPS GROUPE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Christophe COUTURIER

Me Alain KOUYOUMDJIAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire d’AIX EN PROVENCE en date du 13 Janvier 2020 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/03066.

APPELANTE

Association [Localité 5] SPORT NATATION prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège est sis [Adresse 4]

représentée et assistée de Me Christophe COUTURIER de la SCP COUTURIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMES

S.A.S. LOCAM, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]

représentée et assistée de Me Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Maître [P] [I] es qualité de mandataire liquidateur de la Société INPS GROUPE

demeurant [Adresse 3]

défaillant

Société INPS GROUPE, prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège est sis [Adresse 1]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Décembre 2023.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Décembre 2023

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Plusieurs contrats ont été conclus entre l’association [Localité 5] Sport Natation (société locataire), la société Locam (société de financement et de location du matériel) et la société Copy Management (société fournisseuse du matériel devant en assurer la maintenance) dans le cadre d’une opération tripartite de fourniture, de location et de maintenance d’un photocopieur de marque Ineo+35 :

-un contrat entre la société Locam et Copy Management par lequel la première a acquis un copieur de marque Ineo + 35 auprès de la seconde,

-le 14 juin 2013, un contrat de location longue durée entre l’association [Localité 5] Sport Natation et la société Locam portant sur un photocopieur de marque ineo+ 35 moyennant le paiement de 63 loyers mensuels de 334,88 euros TTC chacun (le contrat devait durer du 10 août 2013 au 10 janvier 2018),

-le 19 juin 2012, un contrat conclu entre la société Copy Management devenue société INPS Groupe et l’association [Localité 5] Sport Natation, prévoyant une garantie et la maintenance avec une facturation par copie effectuée.

Le bon de commande du 19 juin 2013 conclu entre la société [Localité 5] Sport Natation et la société Copy Management prévoyait que les loyers seraient finalement d’un montant de 394,68 euros TTC.

Le 12 juillet 2013, un procès-verbal de livraison et de conformité du photocopieur loué était établi, signé tant par l’association [Localité 5] Sport Natation que par la société Copy Management.

L’association [Localité 5] Sport Natation s’est acquittée pendant 27 mois des loyers d’un montant de 394,68 Euros.

Estimant qu’elle avait été victime d’une escroquerie de la part tant de la société Copy Management que de celle de la société INPS Groupe, en ce que en particulier les mensualités versées excédaient désormais la valeur du matériel loué, l’association [Localité 5] Sport Natation a décidé de cesser le versement des loyers.

Par courrier recommandé du 20 novembre 2015 dont la société locataire a accusé réception le 23 novembre suivant , la société Locam mettait en demeure cette dernière d’avoir à régler dans le délai de 8 jours les sommes dues, précisant qu’à défaut cela entraînerait la déchéance du terme et l’exigibilité des sommes dues.

L’association [Localité 5] Sport Natation refusait de régler les sommes demandées.

Par acte d’huissier de justice du 29 janvier 2016, la société Locam a fait assigner l’association [Localité 5] Sport Natation devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence aux fins notamment d’obtenir la condamnation de l’association [Localité 5] Sport Natation à lui payer les somme de 15 444 euros représentant 39 loyers outre celle de 1544,40 euros, au titre de clause pénale de 10%.

Le 6 décembre 2016, l’association [Localité 5] Sport Natation appelait en la présente cause la société INPS Groupe, anciennement Copy Management.

La société INPS Groupe a fait l’objet d’une liquidation judiciaire et Me [P] [I] a été désigné en qualité de liquidateur.

Par jugement du 13 janvier 2020 , le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a :

-rejeté les demandes de l’association [Localité 5] Sport Natation quant à la cause du contrat et les clauses abusives ,

-constaté la résiliation du contrat signé par l’association [Localité 5] Sport Natation le 14 juin 2013, à la date du 30 novembre 2015 ,

-ordonné la réouverture des débats sur la question de l’application de l’article 1231-5 du code civil à la somme réclamée par la société Locam de 16 988,40 euros ,

-dit qu’il sera sursis à statuer sur les demandes ,

-renvoyé l’affaire a l’audience de mise en état,

-réservé les dépens.

L’association [Localité 5] Sport Natation a formé un appel le 14 février 2020.

Sa déclaration d’appel est ainsi rédigée : ‘L’objet de l’appel est de demander à la cour d’appel la réformation de la décision de première instance, en ce qu’elle a :

– rejeté les demandes de l’association [Localité 5] Sport Natation quant a la cause du contrat et les clauses abusives ,

-constaté la résiliation du contrat signé par l’association [Localité 5] Sport Natation le14juin 2013, a la date du 30 novembre 2015.

Les 31 juillet et 4 août 2020, l’appelante a signifié sa déclaration d’appel à Me [I] , liquidateur, par dépôt de l’acte d’huissier en l’étude, et à la société INPS Groupe selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 septembre 2023.

Compte tenu de l’accord des parties en ce sens, le conseiller de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture du 19 septembre 2023 et a prononcé une nouvelle ordonnance de clôture le 18 octobre 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 septembre 2023, l’association [Localité 5] Sport Natation demande à la cour de :

vu les dispositions d’ordre public de l’article L 221-5 2° du code de la consommation,

à titre principal,

-réformer le jugement en ses dispositions au fond ,

-prononcer la nullité du contrat de location financière du 14juin 2013 ,

-condamner solidairement la société Locam et la société INPS Groupe à lui restituer la somme de 10 656,36 Euros au titre des loyers indûment versés,

à titre subsidiaire,

vu les articles 1104 et 1109 du code civil,

-réformer le jugement en ses dispositions au fond,

-prononcer la nullité du contrat de location financière pour cause dérisoire,

-condamner solidairement la société Locam et la société INPS Groupe à lui restituer la somme de 10 656,36 Euros, au titre des loyers indûment versés,

à titre infiniment subsidiaire,

-prononcer la caducité du contrat de location financière du 14 juin 2013 a compter du 12 Avril 2014, en raison de la disparition de la cause ,

-condamner solidairement les sociétés Locam et INPS Groupe à lui restituer les montants des loyers trop perçus du 12 avril 2014 au 12 novembre 2015, soit la somme de 7104,24 euros.

en tout état de cause,

-confirmer le jugement en ce qu’il ordonne la réouverture des débats sur la question de’application de l’article 1231-5 du code civil , dit qu’il sera sursis à statuer sur les demandes, renvoyé l’affaire à la mise en état,

-condamner solidairement les sociétés Locam et INPS Groupe au paiement de la somme de 7 000 euros sur 1e fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner solidairement la société Locam et la société INPS Groupe au paiement des entiers dépens directement distraits.

Concernant sa demande d’annulation du contrat de location, la société locataire invoque tout d’abord les dispositions d’ordre public de l’article L 221-5-2° du code de la consommation, relatives au droit de rétractation. Elle ajoute, en application de l’article L 221-5-2° du code de la consommation, le contrat de location devait contenir les informations relatives au droit de rétractation (conditions, modalités, délais) et comprendre le formulaire type de rétractation et que tel n’est pas le cas en l’espèce.

Toujours concernant sa demande d’annulation du contrat de location, la société locataire invoque ensuite l’absence de cause ou l’existence d’une cause dérisoire et cite les article 1131 ancien et 1169 nouveau du code civil relatifs à la cause de l’obligation. Concernant le caractère dérisoire de la cause de son engagement, l’appelante explique que les loyers dont elle s’est acquittée (10 656, 36 euros) excédent la valeur financière du matériel loué ( 3500 euros).

Toujours pour soutenir que la cause de son engagement est dérisoire, l’appelante fait aussi valoir que :

-elle s’est engagée auprès de la société Locam pour la location d’un photocopieur dont la maintenance était assurée par la société INPS Groupe , anciennement Copy Management, aujourd’hui liquidée ajoutant que la société Locam sollicite le paiement d’un matériel pour

lequel les prestations de service associées a la fourniture ne sont plus possibles,

-le contrat d’adhésion signé par elle a conféré un avantage excessif à la société locataire et a ainsi créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties à son détriment,

-le contrat litigieux est vidé de toute obligation à la charge de la société de location.

Concernant les clauses abusives du contrat d’adhésion, qui vident l’obligation de la société Locam, l’association [Localité 5] Sport Natation relève celles-ci :

-l’article 7 des conditions générales qui précise que ‘Si le bien est atteint de vices rédhibitoires ou cachés ou en cas de détérioration ou de fonctionnement défectueux, de mauvais rendement ou dommages quelconques causés par ce bien, le locataire renonce à tout recours contre le loueur, que ce soit pour obtenir des dommages et intérêts, la résiliation ou la résolution du contrat et ne pourra différer au prétexte de cette contestation, aucun règlement de loyer.

-L’article 8 du contrat : ‘ le locataire prendra en charge tous les dommages, directs ou indirects, causés à des personnes ou des tiers et assurera les indemnités qui pourraient être demandées au loueur à quelque titre que ce soit, demeurant dans les mêmes conditions responsable de tous les risques de détérioration, perte, destruction partielle ou totale, même s’il s’agit d’un cas fortuit ou de force majeure »,

-l’article 10.2 du contrat précise que si le matériel ne peut pas être réparé, le locataire doit : soit le remplacer à l’identique à ses frais, soit demander la résiliation du contrat, mais en se portant acquéreur ou bien inutilisable ou en le faisant acquérir par un tiers,

-l’article 7 du contrat : ‘par dérogation aux dispositions de l’article 1724 du code civil, le locataire renonce à demander au loueur toute indemnité ou diminuation de loyer, si pour une raison quelconque, le bien devait temporairement ou définitivement inutilisable’.

L’association locataire estime que la cause des engagements de la société Locam est dérisoire, car elle a inséré au contrat une clause exonératoire de responsabilité en cas de défectuosité de la chose. Selon l’appelante, en raison de la présence des ces clauses, la société de location n’est débitrice d’aucune obligation qu’i1 s’agisse de vices rédhibitoires, de vices cachés, de détérioration, de fonctionnement défectueux ou d’impossibilité de fournir les prestations de service et d’entretien prévues au contrat faisant observer que, pour sa part, elle doit quoiqu’il advienne poursuivre le paiement des loyers.

L’association [Localité 5] Sport Natation expose enfin que l’absence de contrepartie est bel et bien existante au moment même de la formation du contrat et que la société Locam a recours à des manoeuvres dolosives.

Sur sa demande subsidiaire de réformation du jugement et de prononcé de la caducité du contrat de location du 14 juin 2013, l’association [Localité 5] Sport Natation invoque , en droit, l’article 1186 du code civil et la disparition de l’un des éléments essentiels du contrat de location à savoir sa cause.

L’appelante précise que la cause du contrat litigieux de location financière a disparu à compter du règlement par elle du prix de la valeur réelle du copieur. Elle précise que le moment où elle a réglé la valeur réelle du matériel se situe au dernier loyer versé par elle , soit le 12 avril 2014 et qu’il y aura donc lieu de considérer que la cause du contrat n’est plus simplement dérisoire mais a purement et simplement disparu.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2023 , la société Locam demande à la cour de :

-ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture,

-recevoir les conclusions en réponse de la société Locam,

-débouter l’association [Localité 5] Sport Natation de ses demandes d’annulation du contrat, de constat de sa caducité, de restitution des loyers, d’application de l’article L 221-5-2° du code de la consommation,

-le cas échéant juger prescrite l’action en nullité sur le fondement de l’article L 221-5-2° du code de la consommation,

-confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de l’association [Localité 5] Sport Natation quant à la cause du contrat et les clauses abusives et constaté la résiliation du contrat signé par l’association [Localité 5] Sport Natation le 14 juin 2013, à la date du 30 novembre 2015 ,

-condamner l’association [Localité 5] Sport Natation à lui payer la somme de 16 988,40 euros avec intérêts de droit au taux légal à compter du 20 novembre 2015 et se ventilant comme suit :

* principal 15 444 euros

* clause pénale 1 544,40 euros

-ordonner la restitution du matériel objet du contrat de location au siège social de la société Locam et aux frais de l’association [Localité 5] Sport Natation, sous astreinte de 20 euros par jour de retard,

-ordonner la capitalisation des intérêts en vertu de l’article 1154 du code civil,

-condamner l’association [Localité 5] Sport Natation à lui verser une somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Sur la prescription de l’action en nullité sur le fondement de l’article L 221-5-2° du code de la consommation, l’intimée fait valoir qu’elle a engagé l’action en paiement sur la base d’un contrat de location souscrit le 14 juin 2013 et que, de plus, les textes invoqués par l’appelante sont inapplicables au litige, dés lors qu’ils n’étaient pas en vigueur au moment de la conclusion du contrat de location.

Sur la confirmation du jugement en ce qu’il n’a pas retenu que le contrat est nul pour absence de cause et pour existence d’une cause dérisoire, l’intimée expose qu’effectivement le contrat est bien causé et qu’il n’est pas vicié dés lors qu’elle a financé un matériel « photocopieur » dont la valeur est de 18 303, 80 euros et que les loyers payés par l’appelante à savoir 63 loyers mensuels de 334,88 euros TTC correspondent au coût du matériel et non pas à un matériel de 3500 euros.La société Locam fait encore valoir qu’elle a déboursé la somme de 16 303.80 euros afin de permettre la mise à disposition du matériel au profit de l’association [Localité 5] Sport Natation.

Toujours pour répondre à cette prétendue absence de cause, la société Locam expose que la liquidation judiciaire du fournisseur, la société INPS Groupe n’entraîne pas l’absence de cause au contrat précisant que le contrat de location a été résilié pour défaut de paiement préalablement à la liquidation judiciaire cette dernière.

Sur le rejet de la demande d’annulation du contrat pour dol, la société Locam soutient qu’il n’existe aucun dol de la part d’INPS Groupe et encore moins de sa part à elle. Aucun cas de dol n’est rapporté et prouvé par l’appelant.

Sur les clauses abusives évoquées par l’appelante, la société Locam se justifie clause par clause et formule notamment les observations suivantes :

-l’article 7 n’est pas du tout léonin, dans la mesure où cette clause exonératoire a pour contrepartie l’existence d’un « mandat ad litem » au profit du locataire d’agir à l’encontre du fournisseur en cas de vices cachés ou équivalent,

-concernant les articles 8, 9 ,10 ,10-2, il s’agit de clauses classiques à tout contrat de location étant rappelé une fois de plus que c’est le locataire qui utilise le matériel et non Locam, qu’il en a la garde et telle est la raison pour laquelle le locataire doit assurer le matériel.

La société Locam ajoute que, quand bien même lesdites clauses seraient considérées comme nulles par la cour, aucune de ces clauses qui serait invalidée ne saurait toutefois entraîner la nullité du contrat de location.

Sur le rejet de la demande de l’appelante de prononcé de la caducité du contrat de location, la société Locam soutient qu’elle a bien justifié de la valeur du matériel fourni.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler qu’au visa de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, sont interdépendants les contrats concomitants ou successifs, qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière. Par ailleurs sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance.

En l’espèce, les contrats de location longue durée et de maintenance successivement conclus par les parties sont des contrats interdépendants.

Sur la demande principale de l’appelante d’annulation du contrat de location de longue

-sur la prescription de l’action en nullité fondée sur la violation de l’article L 221-5 2° du code de la consommation :

L’article 2224 du code civil dispose : Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’article L221-5 du code de la consommation, dans sa version invoquée, en vigueur du 1er juillet 2016 au 28 mai 2022 inapplicable au litige compte de la date de souscription du contrat de location le 14 juin 203, dispose :Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État ;

En l’espèce, le contrat litigieux de location a été conclu le 14 juin 2013 et c’est à cette date que la société locataire a pu avoir connaissance de la supposée causes de nullité dont elle se prévaut à savoir l’absence de formulaire type de rétractation et d’informations relatives au droit de rétractation.

En tout cas, la société locataire n’explique pas , le cas échéant, à quelle autre date différente de celle de la souscription du contrat de location, il faudrait situer le début du délai de la prescription quinquennale.

Il y a donc lieu de considérer que le délai de la prescription quinquennale de l’action en nullité fondée sur le code de a consommation a commencé à courir à la date du 14 juin 2013, date de la signature du contrat de location longue durée ne comportant pas les mentions formelles obligatoires relatives au droit de rétractation. Or, l’association [Localité 5] Sport Natation a sollicité le prononcé de l’annulation du contrat de location par son assignation introductive d’instance du 5 avril 2019, soit au delà du délai de cinq ans.

Ainsi, la cour , faisant droit à la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale, ne peut que déclarer irrecevable comme prescrite l’action en nullité fondée sur la violation de l’article L 221-5-2° du code de la consommation.

-sur le moyen de nullité tiré de l’absence de cause ou du caractère dérisoire de la cause en raison de la disproportion entre la valeur du matériel et les loyers payés :

Au soutien de sa demande d’annulation du contrat pour absence de cause ou pour cause dérisoire, l’appelante se fonde notamment sur l’article 1169 du code civil et invoque d’abord le fait que le montant des loyers réglés par elle excède dans des proportions très importantes la valeur réelle du matériel.

En vertu de l’article 9 de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne.

En l’espèce, le contrat litigieux ayant été conclu le 14 juin 2013 soit avant le 1er octobre 2016, il est ainsi soumis au code civil antérieur à cette réforme.

C’est donc à tort qu’au soutien de sa demande d’annulation du contrat de location pour absence de cause ou caractère dérisoire de la cause, la société locataire invoque l’article 1169 du code code civil relatif au caractère illusoire de la cause dans sa version applicable à compter du 1er octobre 2016.

Les dispositions applicables à la cause de ce contrat du 14 juin 2013 sont les articles 1108 et suivants du code civil, dans leurs rédactions applicables jusqu’au 1er octobre 2018.

L’article 1108 du code civil dispose, jusqu’au 1er octobre 2016 :

Quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :

Le consentement de la partie qui s’oblige ,

Sa capacité de contracter ,

Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ,

Une cause licite dans l’obligation.

L’article 1131 du code civil ajoute :L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

Il résulte des ces dispositions que la cause de l’obligation d’une partie est la contrepartie à la charge de l’autre contractant et que la cause doit s’apprécier au jour de la formation du contrat.

Il appartient à l’appelante de démontrer que lorsqu’elle a souscrit le contrat de location de longue durée le 14 juin 2013, la contrepartie convenue à son obligation de paiement était illusoire ou dérisoire.

Sur ce point, les prestations réciproques des parties peuvent être d’inégale valeur sans que cela vicie la cause du contrat. D’ailleurs, l’article 1118 du code civil, dans sa version d’origine énonçait : « la lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats ou à l’égard de certaines personnes, ainsi qu’il sera expliqué en la même section ».

En l’espèce, il résulte du contrat litigieux du 14 juin 2013, que la cause de l’obligation de l’appelante de régler ses loyers à la société Locam est, en contrepartie, la mise à disposition d’un photocopieur fourni par cette dernière.

Le contrat critiqué avait dès lors bien une cause lors de sa formation et le moyen nullité sera rejeté. Le jugement confirmé de ce chef.

-sur le moyen de nullité tiré de l’absence de cause en raison de la liquidation de la société fournisseuse et de maintenance

La société de location invoque encore, au titre de l’absence de cause au contrat de location, le fait que la société INPS Groupe a disparu en ayant fait objet d’une liquidation judiciaire de telle sorte que la société Locam sollicite le paiement d’un matériel pour lequel les prestations de service associées à la fourniture ne sont plus possibles.

Cependant, l’existence de la cause , au regard d’une demande d’annulation d’un contrat pour absence de cause ou caractère dérisoire de la cause, s’apprécie au moment de la conclusion du contrat.

Or, en l’espèce, il n’est pas démontré par la société appelante que la société de maintenance avait déjà disparu au moment de la souscription du contrat de location.

Ce moyen de nullité n’est donc pas de nature à vicier la cause du contrat et à entraîner sa nullité.

-sur l’absence de cause fondée sur l’existence de clauses déséquilibrées au sein du contrat de location longue durée

L’article 1171 du code civil, entrée en vigueur depuis le 1 er octobre 2018, dispose :Dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.

L’association [Localité 5] Sport Natation invoque encore, en droit, le fait que le contrat ainsi conclu, rédigé par la société Locam, était un contrat d’adhésion qui comportait un avantage excessif pour la société de location et qui comprenait des clauses le vidant de toutes obligations pour cette dernière.

Cependant, l’article 1171 du code civil, qui sanctionne les clauses non négociables créant un déséquilibre significatif, n’est entré en vigueur que le 1er octobre 2018 et ne saurait en conséquence s’appliquer au contrat de location longue durée datant du 14 juin 2013.

En tout état de cause, à supposer que de telles clauses existent dans le contrat d’adhésion signé, la conséquence ne saurait cependant être l’annulation du contrat ainsi signé, mais le caractère réputé non écrit desdites clause.

Il en est de même s’agissant des clauses du contrat de location inconciliables avec cette interdépendance, qui sont seulement réputées non écrites.

Le moyen de nullité invoqué par l’association [Localité 5] Sport Natation, tiré de l’existence de clauses déséquilibrées en faveur de la société Locam, est inefficace.

-sur le moyen de nullité tiré de l’existence de manoeuvres dolosives

L’article 1116 du code civil dans sa version en vigueur jusqu’au 1er octobre 2016 dispose :Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.Il ne se présume pas et doit être prouvé.

En l’espèce, l’appelante invoque des manoeuvres dolosives mais sans démontrer suffisamment leur réalité.Le fait que le contrat comporte des éventuels déséquilibres au détriment de l’appelante ne constitue pas, à lui seul, une manoeuvre dolosive au sens de l’article 1116 du code civil.En outre, la mise en liquidation judiciaire du fournisseur du matériel, n’est pas non plus la preuve d’une telle manoeuvre dolosive. Rien ne permet d’affirmer que la société de location est à l’origine de cette liquidation et qu’il existait une connivence frauduleuse entre celle-ci et la société fournisseuse et de maintenance. L’existence de manoeuvres commerciales frauduleuses n’est pas assez caractérisée par les pièces produites.

Ce moyen de nullité n’est pas efficace.

Les moyens de nullité du contrat de location longue durée étant inondés, la demande de l’appelante d’annulation du contrat de location longue durée pour cause dérisoire ne peut qu’être rejetée.

Sur la demande subsidiaire de l’appelante de prononcé de la caducité du contrat de location longue durée

Au soutien de sa demande tendant au prononcé de la caducité du contrat de location du 14 juin 2013, la société locataire invoque la disparition de la cause et se fonde sur les articles 1186 et 1187 du code civil.

Cependant, les articles invoqués sont entrées en vigueur que le 1er octobre 2016 et ne sauraient en conséquence s’appliquer au contrat de location longue durée conclus par l’association [Localité 5] Sport Natation qui date du 14 juin 2013.

Avant l’entrée en vigueur de l’article 1186 du code civil et antérieurement au 1er octobre 2016, il était de principe qu’un acte juridique était caduc en cas de disparition de l’un de ses éléments constitutifs en cours d’exécution, ou bien sa cause et son objet.

Également antérieurement au 1er octobre 2016, il était jugé que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivaient dans une opération incluant une location financière étaient interdépendants et la résiliation de l’un quelconque d’entre eux entraînait la caducité, par voie de conséquence, des autres,

En l’espèce, comme précédemment relevé et jugé par la cour, ce n’est pas parce que le contrat de location longue durée ne prévoit pas d’équivalences des prestations à la charge des parties que, pour autant, celui-ci encourt la caducité pour ce motif.Le contrat de location longue durée conclu avec la société Locam trouve sa cause dans la mise à disposition du photocopieur et également du contrat interdépendant, qui est le contrat de fourniture et de maintenance conclu avec la société INPS Groupe.

Ainsi, même si, à à un moment donné, la locataire a versé un certain nombre de loyers dépassant la valeurs du matériel loué, la cause de l’engagement de la locataire n’a pas pour autant disparu pour ce motif. Le contrat principal de location longue durée n’encourt pas la caducité.

En conséquence, le moyen de caducité est inopérant et la demande subsidiaire de l’appelante de prononcé de la caducité du contrat de location doit être rejetée.

Le jugement est confirmé en ce qu’il rejette les demandes de l’association [Localité 5] Sport Natation quant à la cause du contrat et les clauses abusives.

La cour , qui n’a pas annulé le contrat de location longue durée et qui n’a pas non plus constaté la caducité de ce dernier, déboute l’association [Localité 5] Sports Natation de sa demande de condamnation solidaire des sociétés Locam et INPS Groupe à lui restituer les montants des loyers perçus du 12 avril 2014 au 12 novembre 2015, soit la somme de 7 104, 24 euros.

Sur la demande de la société de location de constat de la résiliation du contrat de location

Vu l’article 1134 ancien du code civil,

L’article 12 du contrat de location longue durée, intitulé ‘Résiliation contractuelle du contrat’, stipule : ‘a) pour défaut de respect dudit contrat, le contrat de location pourra notamment être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée sans effet, dans les cas suivants : (…) Non paiement d’un loyer ou d’une prime d’assurance à son échéance (…)’.

Il est admis que l’association locataire a cessé de régler les loyers dûs à un certain moment, la mise en demeure de paiement par recommandée du 20 novembre 2015 de la société de location précisant que quatre loyers impayés à compter du 10 août 2015 sont dus.

Les conditions d’application de la clause résolutoire de plein droit pour défaut de paiement de loyer sont réunies. La cour confirme le jugement en ce qu’il constate la résiliation du contrat signé le 14 juin 2013 à la date du 30 novembre 2015 (soit 8 jours après la réception de la mise en demeure de paiement conformément à l’article 12 du contrat de location longue durée).

Sur la demande de l’appelante de confirmation du sursis

En l’espèce, en l’absence d’opposition sur ce point , la cour confirme le sursis à statuer et la réouverture des débats ordonnés par le premier juge sur la question de la qualification éventuelle de clause pénale de la somme réclamée par la société Locam.

Au demeurant, le tribunal judiciaire a justement relevé que les parties devaient au préalable conclure sur ce point.

Sur les demandes reconventionnelles en paiement de la société Locam

L’article 568 du code de procédure civile dispose :Lorsque la cour d’appel infirme ou annule un jugement qui a ordonné une mesure d’instruction, ou qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l’instance, elle peut évoquer les points non jugés si elle estime de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive, après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d’instruction.L’évocation ne fait pas obstacle à l’application des articles 554,555 et 563 à 567.

Il est de principe que s’agissant des jugements mixtes, l’évocation par la cour d’appel n’est possible que lorsque l’appel d’un jugement de sursis à statuer a été autorisé.

Le jugement dont il a été fait appel est un jugement mixte, qui tranche une partie du principal mais ordonne le sursis à statuer sur une demande de la société de location . En effet le jugement n’a pas statué sur les demandes reconventionnelles en paiement de la société Locam au titre des loyers impayés et de la clause pénale.

Dés lors que le tribunal de première instance n’a pas d’ores et déjà vidé sa saisine concernant les demandes en paiement de la société de location, la cour d’appel ne saurait statuer sur ces dernières sans méconnaître le principe du double degré des juridictions.

De plus, le code de procédure civile n’autorise pas la cour d’appel à évoquer l’affaire en l’état du jugement qui a été rendu .

En effet, s’il est exact que l’évocation de l’affaire est possible dans les deux cas prévus à l’article 568 du code de procédure civile (jugement ordonnant une mesure d’instruction ou jugement qui, statuant sur une exception de procédure, a mis fin à l’instance) mais également en cas de sursis à statuer, c’est uniquement à la condition, pour ce dernier cas , que l’appel ait été autorisé par un premier président en application de l’article 380 du code de procédure civile

Les demandes de la société Locam de condamnation de la société [Localité 5] Sport Natation à lui payer des sommes se heurtent au double degré de juridiction et à l’absence d’évocation de l’affaire par la cour. Ces demandes sont donc sans objet à ce stade de la procédure devant la cour d’appel et il n’y a donc pas lieu de statuer.

Sur les frais du procès

En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, l’association [Localité 5] Sport Natation sera condamnée aux entiers dépens de cette instance.

Il n’est pas inéquitable de rejeter la demande de la société Locam sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

L’association [Localité 5] Sport Natation , dont les prétentions sont rejetées en cause d’appel, est déboutée de ses demandes relatives à l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, rendu par défaut :

-déclare irrecevable comme prescrite l’action en nullité de l’association [Localité 5] Sport Natation du contrat de location longue durée fondée sur la violation de l’article L 221-5-2° du code de la consommation,

– confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

-rejette la demande principale de l’association [Localité 5] Sport Natation d’annulation du contrat de location pour cause dérisoire,

-rejette la demande subsidiaire de l’association [Localité 5] Sport Natation de prononcé de la caducité du contrat de location,

-déboute l’association [Localité 5] Sports Natation de sa demande de condamnation solidaire des sociétés Locam et INPS Groupe à lui restituer les montants des loyers perçus du 12 avril 2014 au 12 novembre 2015, soit la somme de 7 104, 24 euros,

– dit n’y avoir lieu , à ce stade de la procédure , à statuer sur les demandes de la société Locam de condamnation de la société [Localité 5] Sport Natation à lui payer des sommes,

-rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamne l’association [Localité 5] Sport Natation aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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