Droit de rétractation : Décision du 9 janvier 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 23/01423

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Droit de rétractation : Décision du 9 janvier 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 23/01423

ORDONNANCE

COUR D’APPEL D’AMIENS

TAXES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 09 JANVIER 2024

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A l’audience publique du 10 Octobre 2023 tenue par Madame Véronique ISART, Présidente déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la cour d’appel d’Amiens en date du 20 Juillet 2023,

Assistée de Madame Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

Dans la cause enregistrée sous le numéro N° RG 23/01423 – N° Portalis DBV4-V-B7H-IW6W du rôle général.

ENTRE :

Monsieur [S] [I]

[Adresse 3]

[Localité 2]

DEMANDEUR au recours contre l’ordonnance de taxe rendue par le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats au Barreau de SAINT QUENTIN le 09 février 2023, suivant lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 22 Mars 2023.

Comparant en personne.

ET :

Maître [N] [Z]

[Adresse 4]

[Localité 1]

DEFENDEUR au recours.

Comparant en personne.

Après avoir entendu :

– en son recours et ses observations : M. [I],

– en ses observations : Me [Z].

Madame le Président a mis l’affaire en délibéré et indiqué aux parties que l’ordonnance serait rendue le 09 Janvier 2024.

Après en avoir délibéré conformément à la Loi, la présente décision a été rendue à la date indiquée.

*

* *

Maître [N] [Z] a été le conseil de M. [S] [I] dans le cadre d’une procédure d’appel devant la cour d’appel d’Amiens à l’encontre d’un jugement rendu le 27 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Soissons.

Le 20 janvier 2021, une convention d’honoraires a été régularisée entre les parties.

Elle prévoyait un mode de facturation au temps passé, à savoir une facturation au taux horaire de 220 euros HT de l’heure.

Dans le cadre de ce dossier, Maître [Z] a adressé à M. [I] :

le 14 décembre 2020, une facture N°20201055 d’un montant de 1 281 euros TTC, facture réglée en plusieurs échéances (600 euros le 17 décembre 2020, 381 euros le 25 janvier 2021, 150 euros le 25 mars 2021 et 150 euros le 18 mai 2021), correspondant à des honoraires à hauteur de 880 euros HT et le timbre fiscal en appel de 225 euros ;

le 16 novembre 2022, une facture N°202211513 d’un montant de 792 euros TTC, correspondant à des honoraires sur la base de trois heures de travail ;

le 6 septembre 2022, une facture de clôture N°20221881 d’un montant de 692,80 euros TTC, correspondant à des courriers sur la base de 33×12 soit 396 euros HT, frais de dactylographie juridique sur la base de 10 pages x 14 euros soit 140 euros HT, frais de copies de pièces sur la base de 61 pages x 0,50 euros soit 30,50 euros HT et le timbre CNBF de 13 euros.

M. [I] s’est acquitté de la première facture uniquement soit 1 281 euros. Il conteste les deux dernières factures.

Les 4 et 18 janvier puis 18 février 2022, Maître [Z] a adressé à M. [I] une mise en demeure de s’acquitter du solde restant dû à hauteur de 1 484, 80 euros correspondant aux deux factures impayées N°202211513 et N°20221881.

Le 15 novembre 2022, M. [I] a saisi le tribunal judiciaire de Saint-Quentin d’une action en responsabilité contre Maître [Z], affaire actuellement pendante devant le tribunal judiciaire de Reims suite au dessaisissement de la juridiction saint-quentinoise.

Le 11 octobre 2022, Maître [Z] a saisi M. le Bâtonnier de l’ordre des avocats de Saint-Quentin d’une demande de taxation de ses honoraires.

L’ordonnance rendue le 9 février 2023 par Mme la délégataire de M. le Bâtonnier a :

déclaré incompétent le juge de l’honoraire pour statuer sur les fautes reprochées par M. [I] à son conseil Maître [Z] ;

rejeté en conséquence l’exception d’inexécution soulevée par M. [I] fondée sur les fautes reprochées à son avocat ;

déclaré recevable la demande de taxation d’honoraires présentée par Maître [Z] à l’encontre de M. [I] ;

débouté M. [I] de l’ensemble de ses contestations ;

fixé les honoraires, frais et débours dus par M. [I] au titre des factures impayées à la somme de 1 484,80 euros TTC ;

condamné M. [I] en conséquence au règlement de la somme totale de 1 484,80 euros ;

condamné M. [I] à régler à Maître [Z] la somme de 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mars 2023, M. [I] a demandé à Mme la Première présidente de bien vouloir :

infirmer l’ordonnance de taxe rendue par M. le Bâtonnier ;

condamner Maître [Z] à lui verser la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il soutient pour l’essentiel que :

son conseil a omis, devant la cour d’appel, de soulever la nullité de la saisie attribution en cours à son encontre et d’évoquer la jurisprudence à ce sujet ;

Maître [Z] a omis, par négligence, de demander la nullité de la saisie attribution dans le dispositif de ses conclusions en cause d’appel devant la cour d’appel d’Amiens ;

il a été contraint de relancer constamment son conseil afin qu’il réalise les diligences nécessaires pour son dossier ;

Maître [Z] lui avait promis un geste sur la facture des honoraires, promesse qu’il n’a pas tenue ;

le nombre de correspondances facturées est extravagant et ne pourra être prouvé ;

les seules explications reçues au sujet de la procédure se faisaient soit par mail soit par téléphone, il n’a jamais reçu de courriers ;

la convention d’honoraires faisait état, en prévision, de quatre heures de travail sur le dossier et non pas neuf heures comme retenu dans l’ordonnance du bâtonnier.

Par courrier en réponse du 4 octobre 2023, Maître [Z] demande à Mme la Première présidente de bien vouloir :

déclarer M. [I] irrecevable et, à tout le moins, infondé en son recours ;

constater que M. [I] a été destinataire d’un décompte précis, conforme à l’article 11-7 du règlement intérieur national de la profession d’avocat ;

débouter M. [I] de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions ;

confirmer l’ordonnance de taxe rendue par Maître Marie Aldama, déléguée taxateur, le 9 février 2023, en toutes ses dispositions ;

condamner M. [I] au paiement d’une indemnité complémentaire de 400 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens qui comprendront les frais d’exécution.

Il fait valoir pour l’essentiel que :

il ne fait aucun doute que M. [I] est mécontent de la décision qui a été rendu à son encontre par la cour d’appel d’Amiens ;

il n’a commis aucune faute professionnelle ;

il n’appartient pas, en tout état de cause, au juge taxateur de se prononcer sur une faute commise par le conseil, dès lors ces arguments seront écartés ;

M. [I] conteste la convention d’honoraires qu’il a reçue le 8 janvier 2021 et signée douze jours plus tard à son domicile, après régularisation de l’appel, ce qui écarte toute contrainte ;

il n’a jamais émis aucune contestation, ni formulé aucune observation quant à la facturation des honoraires avant d’obtenir l’arrêt rendu par la cour d’appel ;

l’honoraire facturé entre dans l’évaluation faite par la convention d’honoraires ;

la facture des frais de clôture est parfaitement justifiée.

A l’audience du 10 octobre 2023, M. [I] présent en personne et non assisté, conteste la régularité de la convention d’honoraires qu’il indique avoir signée, au motif qu’il l’a signée en ligne et que le délai de rétractation de 14 jours ne lui a pas été accordé. Il précise ne pas contester parce qu’il n’a pas eu gain de cause mais contester la nature des prestations effectuées et le temps facturé, indiquant que les nombreux échanges qu’il considère inutiles qui lui ont été facturés ont eu lieu parce que son conseil ne prenait pas en compte ses observations.

Me [Z] présent en personne, indique que la convention d’honoraires a été signée le 20 janvier 2021 et que le demandeur a eu le temps de la lire ; que le temps estimé pour le travail à faire était de 9 h sur un dossier qui était plus compliqué qu’il ne l’est présenté, que la 3ème facture est une facture de clôture comprenant la facturation des frais logistiques et que ce qui a été facturé correspond à 7 h de travail et non 9 h ; qu’il a fait preuve de compréhension envers son client l’ayant autorisé à régler en 4 fois le montant de la première facture.

L’affaire a été mise en délibéré au 9 janvier 2024.

SUR CE,

Sur l’exercice du droit de rétractation :

M. [I] ne conteste pas avoir signé la convention d’honoraires avec son conseil le 20 janvier 2021. Il indique ne pas l’avoir fait en connaissance de cause et n’avoir pas été informé de son droit de rétractation pour l’avoir signée en ligne.

Il est relevé néanmoins que Me [Z] a informé par courrier en date du 14 décembre 2020 son client des impératifs procéduraux afférents à son dossier et qu’il était joint à ce courrier le barème affiché en son étude qu’il demandait à ce dernier de lui retourner signé, ce qui démontre que M. [I] avait connaissance déjà à cette date des modalités de facturation du cabinet, et que par ailleurs le contenu et la rédaction de la convention ne prêtent à aucune confusion.

Il est relevé enfin que la signature électronique d’une convention est légalement possible et que si l’information relative au délai de rétractation, dont il n’est pas démontré ici qu’elle n’ait pas eu lieu, était effectivement absente, l’article L 221-20 du code de la consommation octroie une prolongation de 12 mois à ce délai initial de 14 jours, M. [I] n’ayant pas non plus exercé de droit de rétractation dans ce délai prolongé dont il bénéficiait. La convention s’impose donc entre les parties, sur le fondement de l’article 1103 du code civil qui rappelle que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Sur la contestation des honoraires de Me [Z] :

Conformément à l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, « sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés ».

Plus généralement, l’article 1103 du code civil rappelle que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

En l’espèce, il ressort de la convention d’honoraires établie le 20 janvier 2021 entre Me [Z] et M. [I], dont l’existence est non contestée par les parties, que Me [Z] devait assurer la défense des intérêts de M. [I] dans une procédure en appel d’un jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Soissons le 27 novembre 2020.

Ladite convention prévoyait un mode de facturation au temps passé, à un taux horaire de 220 € de l’heure HT avec une estimation établie dans le cadre d’un budget prévisionnel clairement détaillé d’une facturation évaluée à 9h, soit 1980 euros HT.

Me [Z] a détaillé les prestations effectuées pour le compte de son client de la façon suivante :

un rendez vous en date du 14 décembre 2020 par téléphone au cours duquel les étapes de la procédures ont été communiquées ainsi que les risques et avantages de la procédure envisagée.

3 jeux de conclusions qui sont produits.

Il est relevé que la facturation établie a été la suivante :

une facture provisionnelle en date du 14 décembre 2020 d’un montant HT de 880 euros (4 heures) et 225 euros au titre du timbre fiscal d’appel soit 1281 euros TTC.

Une facture provisionnelle complémentaire en date du 16 novembre 2021 d’un montant HT de 660 euros, soit 792 euros HT pour 3 heures supplémentaires.

Une facture de clôture de 692,80 euros TTC au titre de frais de fonctionnement divers dont le coût de facturation n’est pas excessif.

Ainsi, les pièces versées au débat établissent que Me [Z] a accompli l’intégralité des diligences afférentes à sa mission.

Il est enfin relevé que les critiques de M. [I] concernant la qualité des prestations et diligences effectuées relèvent de la mise en cause de la responsabilité professionnelle et échappent à la compétence de la première présidente de la cour d’appel.

Il convient en conséquence de confirmer l’ordonnance de taxe rendue le 9 février 2023 qui a :

fixé les honoraires, frais et débours dus par M. [I] au titre des factures impayées à la somme de 1 484,80 euros TTC ;

condamné M. [I] en conséquence au règlement de la somme totale de 1 484,80 euros ;

condamné M. [I] à régler à Maître [Z] la somme de 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens :

M. [I] succombant à l’instance sera condamné à payer les entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DÉBOUTONS M. [I] de son recours ;

CONFIRMONS en toutes ses dispositions l’ordonnance de taxe entreprise, rendue le 9 février 2023 ;

CONDAMNONS M. [I] aux dépens de la présente instance.

Mme CHAPON, Mme ISART

GREFFIER PRÉSIDENT

 


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