Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 11 JANVIER 2024
(n° , 18 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00116 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CE4YT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 9 novembre 2021 – Juge des contentieux de la protection de SENS – RG n° 11-20-00331
APPELANTE
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme à conseil d’administration agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE
N° SIRET : 542 097 902 04319
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
substitué à l’audience par Me Hinde FAJRI de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
INTIMÉS
Monsieur [E] [R]
né le 1er février 1944 à [Localité 7] (45)
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511
Madame [F] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V]
née le 19 novembre 1952 à [Localité 8] (ESPAGNE)
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Schmouel HABIB de la SELEURL HERACLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1511
La SELARL DEBOIS-[B], agissant par Maître [X] [B] en qualité de liquidateur judiciaire de la société FORCE ÉNERGIE (SARL)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 6]
DÉFAILLANTE
PARTIE INTERVENANTE
La SELARL [B]-PECOU, agissant par Me [X] [B] en qualité de mandataire ad litem de la société FORCE ÉNERGIE (SARL)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 6]
DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère chargée du rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V], ont passé commande le 1er décembre 2015 auprès de la société Force Énergie de panneaux solaires photovoltaïques en vue de la revente de l’énergie produite, au prix de 22 900 euros.
Le même jour, afin de financer cet achat, la société Sygma Banque aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas personal finance (ci-après société BNPPPF), leur a consenti un crédit de ce même montant remboursable en 120 mensualités de 265,65 euros chacune hors assurance, moyennant un taux d’intérêts nominal de 5,76 % l’an avec un différé d’amortissement de 12 mois.
Le 22 décembre 2015, M. [R] a signé un certificat de livraison et de fourniture de services aux termes duquel il a attesté que les travaux sont terminés et aux termes duquel le déblocage des fonds est sollicité.
Le raccordement de l’installation est effectif depuis le 17 août 2016 et M. [R] a validé un contrat d’achat de l’énergie produite par son installation avec la société EDF, le 21 octobre 2016.
Par jugement du 29 mai 2018, la liquidation judiciaire de la société Force Énergie a été prononcée et la Selarl de Bois-[B] prise en la personne de Maître [X] [B], a été désignée en qualité de liquidateur.
Par actes d’huissier des 3 et 7 septembre 2020, M. [R] et Mme [V] ont fait assigner la société Force Énergie prise en la personne de son liquidateur judiciaire et la société BNPPPF devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Sens, aux fins notamment d’obtenir l’annulation des contrats de vente et de crédit ainsi que le remboursement des sommes versées.
Suivant jugement contradictoire rendu le 9 novembre 2021 auquel il convient de se reporter, le tribunal a :
– déclaré recevable l’action de M. [R] et de Mme [V],
– prononcé la nullité du contrat de vente et constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit,
– condamné la société BNPPPF à rembourser à M. [R] et de Mme [V] les sommes versées au titre du contrat de crédit au jour du jugement ainsi que toute somme qui serait prélevée postérieurement à la décision par la banque au titre du contrat de crédit annulé,
– rejeté le surplus des demandes,
– condamné la société BNPPPF aux dépens et à la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Après avoir débouté M. [R] et Mme [V] de leur demande de communication d’un état des sommes versées, le tribunal a considéré que l’action était recevable nonobstant la procédure collective du vendeur en ce qu’elle ne tendait ni directement ni indirectement au paiement d’une somme d’argent.
Il a relevé que le bon de commande ne satisfaisait pas pleinement aux conditions posées à l’article L. 111-1 du code de la consommation au regard des caractéristiques essentielles des matériels vendus, à défaut de préciser la marque des panneaux, la marque et le modèle de l’onduleur et autres composants vendus, la ventilation du prix par éléments, la productivité effective de l’installation. Il a noté une discordance entre la durée de garantie fixée à 25 ans en première page et la garantie de bon fonctionnement de deux années visée aux conditions générales de vente. Il a constaté que le contrat encourait l’annulation au regard de l’article L. 121-17 du code de la consommation et que le contrat de crédit devait également être annulé.
Le tribunal a considéré que ni l’acceptation de la livraison et de l’installation du bien, ni la signature du certificat de livraison, ni la revente d’électricité sans commune mesure avec la productivité annoncée ne démontraient que les demandeurs aient compris, avant l’exécution du contrat de vente, quels vices l’entachaient et aient eu la volonté de renoncer à se prévaloir des irrégularités du bon de commande. Il a noté qu’aucun élément ne permettait de dire que M. [R] et Mme [V] aient entendu renoncer aux dispositions protectrices du droit de la consommation concernant la vente par démarchage.
Il a relevé que la société Sygma Banque en tant que professionnelle du crédit, était en mesure de constater que le contrat de vente ne respectait pas les dispositions d’ordre public de l’article L. 121-17 du code de la consommation et qu’elle avait commis une faute en débloquant les fonds sans avoir au préalable vérifié la régularité du contrat de vente, au vu d’une attestation imprécise la privant du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté et l’obligeant à rembourser aux emprunteurs les sommes versées par eux.
Il a enfin noté que la société BNPPPF ne pouvait se substituer au vendeur pour demander la restitution de l’installation.
Par une déclaration enregistrée électroniquement le 22 décembre 2021, la société BNPPPF a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions numéro 2 remises le 9 septembre 2022, l’appelante demande à la cour :
– d’infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré recevable l’action, prononcé la nullité du contrat de vente, constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit , condamné la banque à rembourser les sommes versées au titre du contrat de crédit au jour du jugement ainsi que toute somme qui serait prélevée postérieurement à la décision par la banque au titre du contrat de crédit annulé, débouté la banque de ses demandes, en ce compris sa demande subsidiaire, en cas de nullité du contrat, visant à la condamnation solidaire de M. [R] et de Mme [V] à lui payer la somme de 22 900 euros en restitution du capital prêté, sa demande plus subsidiaire visant à la condamnation solidaire de M. [R] et de Mme [V] à la somme de 22 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, sa demande visant à la condamnation solidaire de M. [R] et de Mme [V] à restituer, à leurs frais, les panneaux photovoltaïques installés chez eux entre les mains du liquidateur judiciaire, sa demande de compensation des créances réciproques à due concurrence, sa demande de condamnation solidaire de M. [R] et de Mme [V] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance, en ce qu’il a condamné la banque à payer la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
– statuant sur les chefs critiqués,
– à titre principal, de déclarer irrecevables les demandes en nullité des contrats, de dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées, de les rejeter ainsi que la demande en restitution des mensualités réglées,
– en tout état de cause, de constater que M. [R] et de Mme [V] sont défaillants dans le remboursement du crédit et de prononcer la résiliation judiciaire du contrat du fait des impayés avec effet au 9 novembre 2021 et de les condamner solidairement à lui payer la somme de 15 606,27 euros avec les intérêts au taux contractuel de 5,76 % l’an à compter du 10 novembre 2021 sur la somme de 14 450,25 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution de la somme versée en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées et de les condamner, en tant que de besoin, à restituer solidairement cette somme puis subsidiairement, de les condamner solidairement à lui régler les mensualités échues impayées au jour où la cour statue et de leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,
– subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande visant à être déchargés de l’obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter et les condamner, en conséquence à régler la somme de 22 900 euros en restitution du capital prêté,
– en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande visant à la privation de sa créance et la demande de dommages et intérêts, à tout le moins de les rejeter,
– très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l’emprunteur à charge pour lui de l’établir et eu égard à la faute de l’emprunteur ayant concouru à son propre préjudice, de limiter en conséquence la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [R] et de Mme [V] d’en justifier et en cas de réparation par voie de dommages et intérêts, de limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et de dire et juger que M. [R] et de Mme [V] restent tenus de restituer l’entier capital à hauteur de 22 900 euros,
– à titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de sa créance, de les condamner in solidum à payer la somme de 22 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, de leur enjoindre de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux au liquidateur judiciaire de la société Force Énergie, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et de dire et juger qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté et subsidiairement, de les priver de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,
– de débouter M. [R] et de Mme [V] de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens, ainsi que de toutes autres demandes, fins et conclusions,
– d’ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,
– en tout état de cause, de les condamner in solidum au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel et aux entiers dépens de première instance et d’appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes-Gil.
Soulignant le caractère exceptionnel de l’annulation ou de la résolution d’un contrat sur le fondement de l’article 1134 du code civil, elle invoque une action irrecevable ou mal fondée car exercée de mauvaise foi par une partie qui sait qu’elle conservera le bien acquis du fait de l’impossibilité matérielle pour l’autre de la récupérer.
Elle invoque le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions du code de la consommation.
Elle rappelle le caractère strict de l’interprétation de l’article L. 121-17 du code de la consommation et soutient que le premier juge est allé au-delà des exigences prévues par les textes.
Elle estime que le bon de commande n’a pas à être annulé, qu’il contient bien les caractéristiques essentielles de l’installation, que l’absence de mention relative à la marque n’est pas une cause de nullité, que les conditions particulières stipulent « date de livraison sous 3 mois », et les conditions générales comportent des articles 3 et 4 détaillant les conditions de livraison, que les modalités de pose, qui relèvent de contingences techniques n’ont pas à figurer au bon de commande et ne sont nullement requises à peine de nullité, que le délai de raccordement ne peut être défini puisqu’il relève de la société ERDF, que les modalités relatives au prix sont conformes, que le bon de commande comprend bien des stipulations relatives aux garanties et qu’il n’est nullement établi qu’il y aurait une divergence effective entre les mentions figurant dans les conditions particulières et celles figurant dans les conditions générales. Elle note que la preuve d’un préjudice n’est pas rapportée.
Elle fait valoir que les acquéreurs ont confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d’une nullité du bon de commande en laissant le vendeur procéder à l’installation des panneaux photovoltaïques, en réceptionnant l’installation sans réserve, en sollicitant de la banque qu’elle verse les fonds au vendeur, en laissant la société ERDF procéder au raccordement de l’installation, en utilisant l’installation pendant plusieurs années, en remboursant les échéances du crédit puis en initiant une action près de 5 années après la souscription à la limite du délai de prescription.
Elle note que les intimés ont poursuivi la revente d’énergie postérieurement à l’introduction de leur action en pleine connaissance des moyens allégués, qu’ils ne peuvent adopter une attitude contradictoire en sollicitant, d’un côté, la nullité des contrats et en poursuivant, de l’autre, leur exécution par la revente de l’électricité en sachant parfaitement qu’ils ne restitueront jamais l’installation. Elle fait observer que conformément au principe de l’estoppel, une partie ne peut avoir une attitude incompatible avec ses demandes.
Elle soutient que les allégations de dol au sens des anciens articles 1109 et 1116 du code civil ne sont aucunement étayées.
Elle note que si le vendeur a une obligation d’informations concernant les caractéristiques du matériel vendu, il ne lui incombe pas d’apporter des explications complémentaires concernant la durée de vie de l’ensemble des composants vendus, les assurances requises, ni les coûts que l’acquéreur peut être amené à exposer au cours de la vie du matériel au titre du remplacement des pièces par exemple, ce qui relève de l’usage normal d’un matériel et que de telles informations ne sont nullement requises par les dispositions du code de la consommation et excèdent le devoir d’informations du vendeur. Elle ajoute que les acquéreurs sont mal fondés à soutenir ne pas avoir été conscients que la production dépendait de l’ensoleillement, alors qu’il s’agit d’une donnée que tout acquéreur en « bon père de famille » ne saurait ignorer, et qu’ils n’auraient pas été informés des conditions relatives au différé de remboursement du crédit, ce alors qu’ils ont signé l’offre de crédit mentionnant précisément les conditions de remboursement. Elle ajoute qu’aucune expertise n’est produite quant à la rentabilité effective de l’installation ni quant au crédit d’impôt perçu.
Elle rappelle qu’à défaut d’annulation, le contrat de crédit doit recevoir exécution et que la demande en privation de la créance de la banque en restitution du capital prêté, qui se trouve dépourvue d’objet en l’absence de nullité du contrat doit être déclarée irrecevable, à tout le moins infondée.
Elle conteste toute annulation du contrat de crédit au motif que la banque n’aurait pas fait parvenir son accord dans le délai de 7 jours prévu par l’article L. 311-13 du code de la consommation et rappelle que les fonds ont été débloqués sur demande expresse de l’emprunteur, ce qui vaut tout à la fois agrément et manifestation de la volonté du client à continuer à bénéficier du crédit et que M. [R] et Mme [V] produisent le courrier adressé par la banque valant agrément. Elle ajoute que les emprunteurs ont remboursé les échéances du crédit jusqu’au jugement rendu assorti de l’exécution provisoire et qu’il est jugé que le remboursement des échéances vaut manifestation de la volonté du client à continuer à bénéficier du crédit au sens de l’article L. 311-13 du code de la consommation.
Elle indique que l’infirmation du jugement entraînera, en conséquence, l’obligation pour le couple [R]/[V] de restituer la somme perçue et sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 9 novembre 2021 du fait des mensualités impayées et leur condamnation au paiement de la somme due au titre du crédit soit 15 606,27 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,76 % l’an à compter du 10 novembre 2021 sur la somme de 14 450,25 euros et au taux légal pour le surplus, outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées.
Subsidiairement, elle ajoute que l’infirmation du jugement devrait donner lieu à restitution des sommes versées au titre de l’exécution provisoire et que la Cour condamnerait l’emprunteur à régler les échéances échues impayées au titre du crédit jusqu’à la date de l’arrêt à venir et lui ferait injonction d’avoir à reprendre le remboursement du crédit sous peine de déchéance du terme.
A titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats, elle demande restitution de sa créance.
Visant notamment les articles L. 311-31 et L. 311-51 du code de la consommation, elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande, dans l’exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans la délivrance des fonds sur la base d’un mandat de payer donné par les clients. Elle souligne que toutes les demandes des emprunteurs à son encontre sont vaines dès lors que les intéressés ne justifient pas du moindre préjudice ni d’un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque. Elle explique qu’en cas de nullité du contrat de crédit, seule la responsabilité civile délictuelle des parties peut être engagée, ce qui ne permet pas de faire valoir l’inexécution d’une obligation contractuelle supposée n’avoir jamais existé.
Elle précise qu’il n’y a aucun lien de causalité entre la faute dans le déblocage des fonds prêtés alors que la prestation n’est pas achevée, qui empêche l’acquéreur d’obtenir le cas échéant l’achèvement de la prestation et l’impossibilité pour l’acquéreur d’obtenir restitution du prix de vente auprès du vendeur, qui résulte de la liquidation judiciaire du vendeur.
De la même façon, s’agissant d’une faute dans la vérification du bon de commande, elle estime que la faute dans le déblocage des fonds prêtés alors que le bon de commande est irrégulier prive l’acquéreur d’une chance de renoncer à poursuivre le contrat s’il avait été alerté sur les irrégularités, mais n’est pas à l’origine de l’impossibilité pour l’acquéreur d’obtenir restitution du prix de vente, laquelle résulte de la liquidation judiciaire.
La banque note que l’évaluation d’un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien que les acquéreurs conserveront et souligne que la légèreté blâmable avec laquelle les emprunteurs ont signé l’attestation de fin de travaux constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée.
Elle rappelle que l’emprunteur ne peut solliciter à être indemnisé doublement, à la fois par la voie de décharge et par la voie de l’octroi de dommages et intérêts, que M. [R] et Mme [V] qui ont confirmé les contrats ne sont pas recevables à opposer à la banque une prétendue faute dans la vérification du bon de commande ou dans le déblocage des fonds prêtés, que la cour devra constater en conséquence, que la demande de dommages et intérêts est irrecevable, à tout le moins infondée.
Suivant conclusions numéro 2 remises le 28 septembre 2022, M. [R] et Mme [V] demandent à la cour :
– de confirmer la décision rendue en ce qu’elle a déclaré l’action recevable, annulé les contrats, condamné la banque à restituer les sommes versées au titre du contrat de crédit à jour du jugement ainsi que toutes les sommes qui seraient prélevées postérieurement à la décision au titre du contrat de crédit annulé outre la somme de 1 200 euros aux titre des frais irrépétibles,
– de l’infirmer en ce qu’elle n’a pas fait droit à leurs demandes indemnitaires,
– statuant à nouveau,
– de débouter la société BNPPPF venant aux droits de la société Sygma Banque de ses moyens, fins et conclusions,
– en tout état de cause, de la condamner à leur verser les sommes de 3 372 euros au titre de leur préjudice financier, de 3 000 euros au titre de leur préjudice économique et de leur trouble de jouissance, et de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner la société BNPPPF aux dépens de première instance et d’appel.
A titre principal, ils invoquent des irrégularités du bon de commande au regard des dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation en ce qui concerne la description et les caractéristiques du matériel promis à défaut de précision de la marque, du modèle, des références, de la dimension, du poids, de l’aspect, de la couleur des panneaux, du type de cellule (monocristallin ou polycristallin), de la marque, du modèle, des références, de la performance, de la dimension, du poids de l’onduleur ainsi que de l’ensemble des autres matériels en faisant partie (coffrets de protection, écran sous toiture, connectiques, clips de sécurité, câbles, disjoncteur, parafoudre ‘). Ils déplorent le manque de détail concernant l’impact visuel, l’orientation des panneaux, leur inclinaison et quant au délai de mise en service. Ils font remarquer que le fait de mentionner « marque Thomson ou équivalent » revient à ne pas renseigner le consommateur sur la marque des panneaux qui seront installés. Ils estiment que ces manquements formels ne leur ont pas permis de comparer les offres en la matière, viciant ainsi leur consentement et que ce n’est qu’à réception de la facture qu’ils ont pu s’apercevoir que la marque des panneaux installés était « EU SYNEXIUM ».
Ils estiment que la mention « date de livraison sous 3 mois » reste lacunaire sur cette information pourtant essentielle. Ils notent qu’aucun plan technique n’a été communiqué avec le bon de commande, l’absence de précision quant au coût de l’installation et observent que les dispositions relatives aux garanties du matériel sont contradictoires.
Ils dénoncent de nombreuses mentions manquantes quant aux caractéristiques essentielles du matériel vendu, une réticence d’informations, une référence mensongère à un partenariat avec les sociétés EDF et ERDF, une présentation fallacieuse de la rentabilité prévisible de l’installation et une présentation trompeuse de l’opération contractuelle en engagement sans grande conséquence caractérisant un dol et ayant affecté la validité de leur consentement au sens des articles 1109 et 1116 du code civil.
Au visa des articles L. 312-55 du code de la consommation, les intimés rappellent que la nullité du contrat principal ou sa résolution entraîne la nullité ou la résolution du contrat de crédit affecté.
Ils invoquent la nullité du contrat de crédit pour non-respect du délai de 7 jours posé à l’article L. 312-24 du code de la consommation, soutenant que l’accord de crédit ne leur a été notifié que par courrier du 29 décembre 2015 alors que le contrat de crédit a été signé le 1er décembre 2015 ce qui est tardif.
Ils contestent toute confirmation de l’acte entaché de nullité en relevant que l’absence d’opposition à l’installation, ou encore, l’absence d’exercice du droit de rétractation ni même le fait de s’acquitter de bonne foi des mensualités du crédit ne sont suffisants à caractériser leur volonté ferme et éclairée de couvrir les vices dont le contrat était affecté.
Ils soutiennent que la banque est tenue de vérifier la régularité du contrat principal, qu’elle a commis une faute en n’y procédant pas et en finançant un contrat nul, qu’elle a commis une faute en libérant les fonds sans que les travaux n’aient été achevés jusqu’au raccordement de l’installation et sa mise en service, et qu’elle ne peut se prévaloir de l’attestation de livraison pour s’exempter de sa responsabilité, de sorte qu’elle doit être privée de sa créance de restitution.
Si par extraordinaire la Cour décidait de ne pas faire droit à cette dernière demande, ils sollicitent la somme de 15 700 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire en que les fautes de la banque, tel que décrites leur causent nécessairement un lourd préjudice puisqu’ils doivent faire face à une situation financière compliquée, qu’ils n’auraient pas contracté, et ils n’auraient pas été contraints de subir cette situation stressante et précaire, et auraient, à tout le moins été informés qu’ils avaient signé un contrat nul au regard du droit de la consommation qui ne donnait pas les précisions nécessaires notamment, les modalités de pose et le rendement exact des panneaux.
En l’absence de faute de la banque, ils s’engagent à reprendre le paiement mensuel des échéances du prêt.
S’agissant des préjudices subis en lien avec les fautes de la banque, ils invoquent des frais de désinstallation de la centrale et de remise en état de la toiture avec un préjudice financier direct, personnel et certain, un trouble de jouissance et économique et un préjudice moral.
Le 28 février 2022, la déclaration d’appel a été dénoncée à la Selarl Debois-[B] en qualité de liquidateur de la société Force Énergie par acte remis à personne morale.
Régulièrement assignée en intervention forcée par la société BNPPPF suivant acte remis à personne morale le 2 novembre 2022, la Selarl de [B]-Pecou prise en la personne de Maître [X] [B] en qualité de mandataire ad litem de la société Force Énergie n’a pas constitué avocat.
Le 29 septembre 2023, M. [R] et Mme [V] lui ont fait signifier leurs écritures par acte délivré à perosnne morale.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 21 novembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La société Force Énergie a été placée en liquidation judiciaire le 29 mai 2018 et la Selarl de Bois-[B] prise en la personne de Maître [X] [B] a été désignée en qualité de liquidateur.
La société BNPPPF était donc bien fondée à mettre dans la cause la Selarl de Bois-[B] en tant que liquidateur judiciaire de la société Force Énergie.
A titre liminaire, la cour constate :
– que ne sont pas contestées les dispositions du jugement ayant rejeté la demande de communication de pièces et ayant admis la recevabilité de l’action en annulation au regard de la procédure collective du vendeur de sorte qu’il convient de les confirmer,
– que le contrat de vente est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,
– que le contrat de crédit affecté conclu 1er décembre 2015 est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
– qu’il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Sur les fins de non-recevoir
Sur la fin de non-recevoir soulevée sur le fondement de l’article 1134 du code civil
La société BNPPPF se fonde dans ses écritures sur l’article 1134 du code civil pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande en annulation des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d’un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.
Ce faisant, il n’est pas expliqué en quoi le non-respect des dispositions de l’article 1134 du code civil en leur version applicable en la cause viendraient fonder une irrecevabilité des demandes formulées.
Il s’ensuit qu’aucune irrecevabilité n’est encourue de ce chef et que la fin de non-recevoir formée à ce titre en cause d’appel doit être rejetée.
Sur la fin de non-recevoir de la demande de dommages et intérêts
La société BNPPPF soutient que les demandes formées à son encontre tendant à la priver de sa créance et à l’octroi de dommages et intérêts sont irrecevables car elles sont cumulatives de sorte que les emprunteurs pourraient dans le cadre de la réparation de leur préjudice, obtenir une double indemnisation.
Ce faisant, elle ne précise par le texte ou le principe susceptible de fonder une telle irrecevabilité.
La fin non-recevoir est donc rejetée.
La société BNPPPF soulève encore dans le corps de ses écritures le caractère irrecevable, à tout le moins non fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande.
Cette fin de non-recevoir dont le fondement n’est pas précisé n’est pas reprise dans le dispositif des écritures de sorte qu’il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point par application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.
Sur la nullité du contrat principal
Sur le moyen tiré du formalisme contractuel
Il résulte de l’article L. 121-18-1 du code de la consommation en sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable au présent litige, que le professionnel doit fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties, lequel doit comprendre à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17 dont l’article L. 121-18 du même code précise qu’elles doivent être rédigées de manière lisible et compréhensible. Ce contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L. 121-17.
En application des articles L. 121-17, L. 121-18 et L. 111-1 du code de la consommation dans leur version applicable au litige, le professionnel doit indiquer de manière lisible dans le contrat conclu hors établissement :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’État.
La cour constate que les intimés produisent aux débats deux bons de commande originaux signés le 1er décembre 2015 par M. [R] avec la société Force Énergie avec le même démarcheur, quasiment identiques si ce n’est que le bon de commande numéroté 78377 mentionne une marque des panneaux illisible alors que le bon de commande jaune numéroté 2160 mentionne une marque Thomson ou équivalent. Le bon de commande n° 2160 indique remplacer et annuler le précédent bon de commande. C’est d’ailleurs bien ce bon de commande qui a fait l’objet d’une analyse par le premier juge.
Il décrit l’objet de la vente comme suit :
« Panneaux solaires photovoltaïques, revente à EDF,
frais de raccordement ERDF à la charge de F-Energie à hauteur de 1 500 €
Démarches pour obtenir le Contrat d’Obligation d’Achat ERDF pendant 20 ans à la charge de F-Energie
Démarches administratives et mairie à la charge de F-Energie,
Installation de panneaux solaires photovoltaïques comprenant 12 panneaux monocristallins à haut rendement certifiés CE et NF de 250 WC, de marque Thomson ou équivalent d’une puissance globale de 3 000 WC
Total TTC 22 900 €
Prise en charge de l’installation complète comprenant kit d’intégration GSE, onduleur, coffret de protection, parafoudre, disjoncteur, accessoires et fournitures ».
Les caractéristiques essentielles du matériel vendu sont suffisantes et permettaient à l’acquéreur de comparer utilement la proposition de la société Force Énergie notamment en termes de prix avec des offres concurrentes en particulier pendant le délai de rétractation et de vérifier que tous les éléments nécessaires au fonctionnement de l’installation avaient bien été livrés et installés, avant de signer l’attestation de fin de travaux.
Contrairement à ce qui est soutenu, le bon de commande mentionne bien la marque « Thomson ou équivalent » des panneaux, leur norme, leur nombre, leur puissance unitaire et globale, le type de cellules (monocristallins) et détaille les matériels composant ledit système.
Il n’est pas étayé au-delà de considérations générales en quoi la mention du modèle, des références, de la dimension, du poids, de l’aspect et de la couleur des panneaux, de la marque, du modèle, des références, de la performance, de la dimension, du poids de l’onduleur ainsi que de l’ensemble des autres matériels vendus pouvaient constituer, in concreto, des caractéristiques essentielles du produit au sens de l’article précité, alors que la description du produit vendu est suffisamment détaillée au regard des exigences textuelles. Il en est de même des modalités de pose, de l’impact visuel, de l’orientation des panneaux ou de leur inclinaison et alors que la remise d’un plan technique ou le détail des modalités de pose des matériels ne sont pas exigés à peine de nullité.
L’article L. 111-1 du code de la consommation exige la mention du prix du bien ou du service sans que la mention du coût de l’installation ne soit requise à peine de nullité. Le prix toutes taxes comprises figure bien au bon de commande sans que ne soit exigée de mention particulière relative au détail du coût de l’installation ou au coût unitaire de chaque matériel ou prestation.
Le bon de commande stipule expressément que la livraison a lieu sous trois mois et les articles 3 et 4 de conditions générales de vente précisent les modalités de livraison.
Il ne peut être reproché au vendeur de n’avoir pas précisé de délai de réalisation du raccordement au réseau électrique, lequel dépend d’un tiers, la société ERDF, le vendeur ne pouvant s’engager en termes de délais que sur sa propre prestation.
Les conditions générales de vente prévoient qu’il existe des garanties « constructeur » et il n’est nullement établi que lesdites garanties ne correspondraient pas à la durée de 25 ans figurant aux conditions particulières. L’article 5 visé par les intimés concerne la garantie de bon fonctionnement d’une durée de deux années. La divergence alléguée n’est ainsi pas établie ni l’existence de contradictions entre les mentions.
Il convient donc d’infirmer le jugement ayant annulé le contrat de vente sur ce fondement et le contrat de crédit en conséquence.
Sur le moyen tiré d’un vice du consentement
Les intimés invoquent la nullité du contrat de vente pour dol sur le fondement des articles 1109 et 1116 du code civil en leur version applicable au contrat et L. 111-1 du code de la consommation.
Aux termes de l’article 1109 du code civil dans sa rédaction applicable au contrat, il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.
Selon l’article 1116 du code civil, dans sa rédaction alors applicable au contrat, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
En l’espèce, les intimés soutiennent que l’absence de nombreuses mentions obligatoires au contrat de vente telle que démontrée, ne leur a pas permis d’être renseignés sur les caractéristiques essentielles des biens vendus.
Aucune carence n’ayant été établie à l’encontre du vendeur dans la présentation du bon de commande, le moyen ne peut prospérer.
Ils reprochent au vendeur de n’avoir pas été renseignés quant au délai de raccordement, quant à l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de tels matériels, quant à la location obligatoire d’un compteur de production auprès de la société EDF sur 20 ans et quant à la durée de vie des matériels et notamment celle de l’onduleur électrique.
Il n’est démontré aucune intention de tromper de la part du vendeur à l’origine d’une erreur des acquéreurs, les seules pièces produites étant une fiche intitulée « à quoi sert un onduleur » et un extrait du site Internet « legavox » relatif aux litiges sur la garantie des onduleurs.
M. [R] et Mme [V] reprochent au vendeur d’avoir fait état de partenariats mensongers avec les sociétés EDF et ERDF pour pénétrer leur habitation.
Il n’est pas démontré en quoi il serait critiquable pour la société venderesse de faire état de partenariat avec la société EDF ou la société ERDF dès lors que le raccordement de l’installation et la possibilité de vendre l’électricité produite dépendent d’elles.
Il n’est pas non plus démontré que la société Force Energie a fait état de perspectives de rendement chiffrées qu’elle savait fallacieuses ni qu’elle se serait engagée sur une quelconque rentabilité de l’installation ni sur la performance de son installation photovoltaïque. Les intimés ne produisent à cet égard aucune expertise chiffrée de nature à établir la rentabilité effective de leur installation.
Ils soutiennent que la société venderesse a faussement présenté l’offre de financement comme étant sans grandes conséquences et que ce n’est qu’après écoulement du droit de rétractation, qu’ils ont pu apprendre le caractère définitif du contrat et connaître formellement les modalités de financement du bon de commande signé.
Ces allégations ne sont nullement étayées. Au demeurant, il est remarqué que le fait de signer le bon de commande et de signer simultanément le contrat de crédit s’y rapportant suffisait à informer une personne normalement avisée qu’elle s’engageait dans une relation contractuelle ferme, sauf exercice du droit de rétractation.
Les prétentions de M. [R] et de Mme [V] relatives à un dol non démontré sont donc rejetées.
Il n’y a donc pas lieu à annulation du contrat de vente et le contrat de crédit n’est pas nul de plein droit.
Sur l’annulation du contrat de crédit
Les intimés soutiennent que la nullité du contrat de crédit est encourue au regard des règles relatives à l’agrément, motif pris que la banque n’aurait pas fait parvenir son accord dans le délai de sept jours prévu par l’article L. 312-24 du code de la consommation.
L’article L. 311-13 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, précise expressément que le versement des fonds vaut agrément et que l’accord donné postérieurement au délai de sept jours ne remet pas en cause le contrat si l’emprunteur souhaite toujours en bénéficier.
En l’espèce, les fonds ont été débloqués sur demande expresse de M. [R], emprunteur, ce qui vaut tout à la fois agrément et manifestation de la volonté du client à continuer à bénéficier du crédit. Les intimés produisent également en pièce n° 7 le courrier adressé par la banque à M. [R] le 29 décembre 2015 valant agrément. Le moyen est donc infondé et la demande doit être rejetée.
Sur la responsabilité de la société Sygma Banque
Si M. [R] et Mme [V] invoquent une faute de la banque pour avoir consenti un crédit et débloqué les fonds sur la base d’un bon de commande nul, les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que le bon de commande n’est pas annulé pour irrégularité.
Ils soutiennent également que la banque a commis une faute dans la libération des fonds sans vérifier que les travaux étaient finalisés jusqu’au raccordement au réseau électrique et sans interroger la société Force Énergie au préalable et sans avoir obtenu des réponses de sa part. Ils estiment que le prêteur ne peut se fonder sur l’attestation de fin de travaux qui ne présume pas de l’exécution complète des travaux jusqu’au raccordement. Ils expliquent que l’installation n’a été raccordée que le 17 août 2016 soit huit mois après signature de l’attestation de fin de travaux.
Selon l’article L. 311-31 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au contrat, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci.
Les dispositions de l’article L. 311-51 du même code prévoient que le prêteur est responsable de plein droit à l’égard de l’emprunteur de la bonne exécution des obligations relatives à la formation du contrat de crédit, que ces obligations soient à exécuter par le prêteur qui a conclu ce contrat ou par des intermédiaires de crédit intervenant dans le processus de formation du contrat de crédit, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.
En revanche, il n’appartient pas au prêteur de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et il ne saurait être garant de l’exécution du contrat principal.
Il est rappelé que le contrat de crédit souscrit prévoit expressément que les fonds sont versés dès la justification au prêteur de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation de services à l’emprunteur.
Le 22 décembre 2015, M. [R] a attesté que les travaux, objets du financement, ont été pleinement effectués et a demandé le déblocage des fonds entre les mains du vendeur.
Le certificat de livraison permet d’identifier sans ambiguïté l’opération financée au moyen du contrat de crédit signé par M. [R] et Mme [V] le 1er décembre 2015 avec présence d’un numéro de dossier 41171551 que l’on retrouve tant sur la commande qu’au contrat de crédit.
Les opérations de raccordement au réseau électrique et de mise en service de l’installation échappant à la compétence de la société Force Énergie, il ne saurait être reproché à la banque de n’avoir pas opéré de contrôle quant à des autorisations données par des organismes tiers, ni quant à la réalisation effective du raccordement au réseau électrique relevant d’ERDF, structure également tierce par rapport à l’ensemble contractuel. Le délai de huit mois pour rendre effectif le raccordement au réseau électrique n’a rien de particulièrement remarquable.
Cette attestation est donc suffisante pour apporter la preuve de l’exécution du contrat principal sans qu’aucune faute ne soit établie à l’encontre de l’organisme financeur.
M. [R] et Mme [V] ne justifient par ailleurs d’aucun préjudice en lien direct avec les conditions de libération du capital de 22 900 euros.
Il s’ensuit que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a retenu une faute de la banque, l’a privée de son droit à restitution du capital emprunté et l’a condamnée à rembourser à M. [R] et à Mme [V] les sommes versées au titre du crédit et les intimés déboutés de leurs demandes.
Dans le corps de leurs écritures, les intimés indiquent que si la cour ne privait pas la banque de sa créance, ils sollicitent la somme de 15 700 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire, en ce que les fautes de la banque, tel que décrites, leur causent nécessairement un lourd préjudice.
Cette prétention n’est pas reprise au dispositif de leurs écritures de sorte que la cour n’est pas tenue de statuer sur ce point.
Ils se basent sur les mêmes manquements pour invoquer une faute contractuelle de la banque et demander l’indemnisation de leur préjudice sur le fondement de l’article 1240 du code civil.
La preuve d’une faute de nature extracontractuelle sur la base de ces mêmes griefs n’est pas démontrée de sorte que les demandes en indemnisation doivent être rejetées.
Il résulte de ce qui précède que M. [R] et Mme [V] sont tenus de poursuivre l’exécution du contrat de crédit.
Sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement déféré et de résiliation du contrat de crédit
L’appelante indique que les emprunteurs ont cessé de régler les échéances du crédit du fait de l’exécution provisoire qu’ils ont sollicitée, et l’exécution provisoire s’opérant aux risques de celui qui la sollicite, qu’elle n’a d’autre choix que de solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de crédit avec effet au 9 novembre 2021 et leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 15 606,27 euros correspondant au capital restant dû à cette date et à l’indemnité de résiliation. Elle sollicite en outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement ainsi que subsidiairement, la condamnation solidaire des emprunteurs aux mensualités échues impayées au jour où la cour statue.
L’appelante produit à l’appui de sa demande une copie de l’offre de crédit, la fiche de dialogue, la notice d’informations relative à l’assurance, la fiche conseil en assurance, la fiche d’explications et de mise en garde et la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, tous documents signés des emprunteurs.
Ces éléments n’établissent pas suffisamment l’arrêt du paiement des échéances. Les intimés n’émettent pour autant aucune contestation à ce sujet, le premier juge ayant constaté que les échéances du crédit avaient été réglées jusqu’au mois de novembre 2021, inclus.
La situation judiciaire ne suffit pas à qualifier de grave le manquement imputable aux emprunteurs qui avaient spontanément assumé leurs obligations jusqu’alors.
Il convient donc de rejeter la demande de résiliation du crédit et de paiement des sommes dues par suite de l’anéantissement du contrat.
L’action en paiement de la banque a été introduite il y a moins de deux années de sorte qu’elle est recevable.
M. [R] et Mme [V] doivent être condamnés à payer les mensualités échues impayées du mois de décembre 2021 au mois de janvier 2024 inclus et devront reprendre le remboursement du crédit à compter de l’échéance du mois de février 2024.
Il convient de rappeler que le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification ou de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.
Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de la société BNPPPF de ce chef.
Sur les autres demandes
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles doivent être infirmées. M. [R] et Mme [V] qui succombent sont tenus in solidum aux dépens de première instance et d’appel. Ils sont condamnés in solidum sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à la société BNPPPF une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les parties sont déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Rejette les fins de non-recevoir ;
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a rejeté la demande de communication de pièces et a admis la recevabilité de l’action en annulation au regard de la procédure collective du vendeur, et en ce qu’il a rejeté la demande de la banque de faire injonction aux acquéreurs de restituer le matériel au liquidateur judiciaire de la société Force Énergie ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] de l’intégralité de leurs demandes ;
Déclare la société BNP Paribas personal finance recevable en son action en paiement ;
Déboute la société BNP Paribas personal finance de sa demande de résiliation du contrat de crédit ;
Condamne M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] in solidum à payer à la société BNP Paribas personal finance les mensualités échues impayées du mois de décembre 2021 au mois de janvier 2024 inclus ;
Rappelle que M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] devront reprendre le remboursement du crédit à compter de l’échéance du mois de février 2024 ;
Rappelle que M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] restent redevables de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement qui est infirmé ;
Rejette les demandes plus amples ou contraires ;
Condamne M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] in solidum aux dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la Selas Cloix et Mendes-Gil ;
Condamne M. [E] [R] et Mme [F] [M] [Z] [I] [Y] [O] épouse [V] in solidum à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente