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Arrêt n°
du 4/01/2023
N° RG 21/01913
CRW/FJ
Formule exécutoire le :
à :
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 4 janvier 2023
APPELANTE :
d’un jugement rendu le 21 septembre 2021 par le Conseil de Prud’hommes de CHARLEVILLE MÉZIÈRES, section Activités Diverses (n° F 20/00135)
INNOVATION DÉVELOPPEMENT FORMATION (ID FORMATION)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par la SELARL CORNU-LOMBARD-SORY, avocats au barreau de LILLE
INTIMÉE :
Madame [H] [E]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, avocats au barreau des ARDENNES
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 7 novembre 2022, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine ROBERT-WARNET, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 4 janvier 2023.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Madame Christine ROBERT-WARNET, président
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller
Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Monsieur Francis JOLLY, greffier
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
[H] [E] a été embauchée par la société Innovation Développement Formation (ci-après ID Formation) dans le cadre d’un contrat à durée déterminée, à compter du 4 septembre 2015, régulièrement renouvelé, en qualité de formatrice, ce jusqu’au 30 septembre 2016.
Prétendant notamment à la requalification du contrat liant les parties en un contrat à durée indéterminée, [H] [E] a saisi, par requête enregistrée au greffe le 31 juillet 2018, le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières.
Après radiation de l’affaire prononcée le 5 juillet 2019, celle-ci a été réinscrite le 19 mai 2020.
Aux termes de ses dernières écritures, [H] [E] prétendait à la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée à compter du 4 septembre 2015, rendant sans cause réelle et sérieuse la rupture de ce contrat.
Elle sollicitait en conséquence, la condamnation, sous exécution provisoire, de son employeur au paiement des sommes suivantes :
– 5 000 euros à titre d’indemnité de requalification,
– 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect par l’employeur de ses obligations,
– 1 383,28 euros à titre d’heures supplémentaires,
– 138,33 euros à titre de congés payés afférents,
– 1 722 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 172,20 euros à titre de congés payés afférents,
– 10’000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
– 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 21 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières, faisant partiellement droit à ces demandes, a requalifié en contrat à durée indéterminée la relation salariale, à compter du 1er septembre 2016.
En conséquence, faisant partiellement droit aux demandes formées par la salariée, il a condamné la société Innovation Développement Formation à payer à [H] [E] les sommes de :
– 1 383,28 euros à titre d’heures supplémentaires,
– 138,32 euros à titre de congés payés afférents,
– 344,40 euros à titre d’indemnité de requalification,
– 344,40 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 34,44 euros à titre de congés payés afférents,
– 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
– 750 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
En revanche, il a débouté [H] [E] en ses autres demandes et la société Innovation Développement Formation en sa demande reconventionnelle fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Innovation Développement Formation a interjeté appel de cette décision le 18 octobre 2021.
Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 22 juin 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens de la partie appelante par lesquelles la société Innovation Développement Formation soulève, in limine litis, la prescription de l’action en requalification du contrat fondée sur la validité du motif de recours. À titre subsidiaire, elle prétend au rejet des moyens développés par [H] [E].
Elle conteste également la requalification retenue par les premiers juges, au motif de la transmission tardive du dernier contrat à durée déterminée, alors que la méconnaissance des dispositions de l’article L 1242-13 du code du travail n’entraîne pas la requalification automatique du contrat en un contrat à durée indéterminée.
Tout au plus, elle soutient qu’en application des dispositions de l’article L 1245-1 al 2 du même code, elle serait redevable à l’endroit de sa salariée d’une indemnité d’un montant maximal d’un mois de salaire.
À titre subsidiaire, si la cour confirmait la requalification de la relation salariale, elle maintient que le montant de l’indemnité de requalification ne saurait être supérieur à 340,40 euros, entendant voir limiter le montant des dommages-intérêts, sur la base du seul préjudice subi.
Enfin, contestant l’exécution d’heures supplémentaires prétendue par [H] [E], elle conclut au débouté de celle-ci en l’ensemble des demandes qui ont été accueillies par les premiers juges, à la confirmation du jugement s’agissant des dispositions qui rejettent ou atténuent les prétentions de [H] [E].
En tout état de cause, elle sollicite la condamnation de [H] [E] au paiement des sommes de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et sa condamnation au paiement de la même somme au titre des frais exposés à hauteur d’appel.
Vu les conclusions transmises au greffe par RPVA le 23 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample informé des moyens de la partie intimée par lesquelles [H] [E], continuant de prétendre au bien-fondé de l’ensemble de ses demandes renouvelle l’intégralité de celles qu’elle avait initialement formées, pour les sommes alors sollicitées, demandant toutefois confirmation du jugement déféré en ce qu’il a fait droit à ses demandes en paiement de rappel d’heures supplémentaires et de congés payés afférents, prononcé l’exécution provisoire de la décision en ce qu’elle est de droit, condamné l’employeur aux dépens, dit que les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation tandis que les autres indemnités produiront intérêts au taux légal à compter de la décision.
Elle ajoute à hauteur d’appel une demande tendant à la condamnation de la société Innovation Développement Formation au paiement d’une indemnité de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, s’agissant des frais exposés à hauteur de cour.
Sur ce :
Sur la demande en paiement d’heures supplémentaires
[H] [E] affirme avoir effectué des heures supplémentaires sur la période courant du mois de janvier 2016 au mois de septembre 2016.
Toutefois, il résulte des avenants au contrat de travail que sur cette période, elle a été embauchée à temps complet jusqu’au 30 juin 2016 puis à compter du 1er juillet 2016 à temps partiel. Ainsi, comme l’ont relevé les premiers juges, les heures réclamées pour les périodes à temps partiel doivent être qualifiées d’heures complémentaires.
S’il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que si l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En l’espèce, les premiers juges ont relevé que la demande est fondée par la production de travaux administratifs de la salariée qui produit aux débats des mails envoyés lors de la pause méridienne et au-delà de 17 heures. Ils ont exactement constaté la récurrence de cette pratique et l’absence de réaction de la société ID Formation et ainsi retenu l’existence d’un accord implicite d’exécution d’heures supplémentaires.
A hauteur d’appel, la société ID Formation ne produit pas davantage d’élément pour justifier des horaires réellement effectués par [H] [E].
Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement qui a accueilli [H] [E] dans sa demande.
Sur l’obligation de sécurité
L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, doit en assurer l’effectivité en prenant les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, en justifiant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L4121-1 et L4121-2 du code du travail, qu’elles soient préventives ou correctives.
S’agissant des mesures préventives, il incombe à l’employeur de prévenir, par des moyens adaptés, tout risque lié non seulement à l’exécution de la prestation de travail, mais également à l’environnement professionnel dans lequel elle s’exécute.
Lorsqu’est invoqué un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, il lui incombe, pour exonération de sa responsabilité, d’établir qu’il ne pouvait avoir conscience du danger auquel son salarié se trouvait exposé ou qu’il avait pris les mesures nécessaires pour l’en prémunir.
En l’espèce, pour prétendre au paiement d’une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, la salariée fait valoir que le climat social très négatif existant dans l’entreprise, générant des comportements virulents et agressifs est à l’origine d’une altération de son état de santé. Au soutien de ses allégations, elle produit aux débats des attestations de collègues et aussi de son médecin qui, le 6 août 2016 a relevé chez elle l’existence d’une dysthymie réactionnelle.
Aucune de ces attestations ne satisfait aux conditions formelles énoncées par les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ce qui pourtant, est insuffisant à les priver de fiabilité et à les écarter des débats.
Une seule de ces attestations (pièce 18) fait état d’une agression verbale, subie par [H] [E], de la part de Madame [T] [L], le 5 septembre 2016.
En l’absence d’éléments complémentaires quant à la nature de cette agression verbale, survenue postérieurement au constat fait par le médecin de [H] [E], laquelle ne rapporte pas la preuve du lien existant entre son état de santé et le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat qu’elle dénonce, la décision déférée mérite d’être confirmée, pour les présents motifs se substituer à ceux retenus par les premiers juges.
Sur la requalification de la relation salariale
* sur la prescription
[H] [E] soutient que ses contrats de travail à durée déterminée avaient pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
La société ID Formation prétend à la prescription de l’action.
L’action en requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée procède d’une action portant sur l’exécution du contrat de travail tel que jugé par la cour de cassation (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.359).
L’article L.1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, dispose que toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
L’action fondée sur le motif du recours du contrat à durée déterminée a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat.
Le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier.
En l’espèce, [H] [E] a saisi le conseil de prud’hommes le 31 juillet 2018 alors que le terme du dernier contrat de travail à durée déterminée était le 30 septembre 2016 en sorte que l’action en requalification n’est pas prescrite.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
* sur le bien-fondé de la demande
[H] [E] sollicite la requalification de ses contrats de travail à durée déterminée d’usage en contrat à durée indéterminée aux motifs que :
– le contrat à durée déterminée d’usage avait pour objet et pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, à savoir des prestations d’accompagnement vers et dans l’emploi ;
– son emploi ne relevait pas de la catégorie professionnelle des formateurs et n’avait rien de temporaire en sorte qu’il ne répondait pas aux conditions de recours au contrat d’usage tel que stipulées à l’article 5.4.3 de la convention collective nationale des organismes de formation ;
– le nombre des renouvellements de son second contrat a excédé les dispositions légales ;
– le dernier avenant de son contrat de travail lui a été transmis tardivement.
S’agissant du premier point, aux termes de l’article L.1242-1 du code du travail, ‘un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise’.
L’article L1242-2 3° du même code autorise la conclusion d’un contrat de travail à durée déterminée pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dans le cas d’emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
Selon l’article 5.4.3 de la convention collective nationale des organismes de formation, relatif au cas particulier du contrat de travail à durée déterminée d’usage pour les formateurs :
‘En raison de la nature de l’activité des organismes de formation et de l’usage constant dans ce secteur d’activité de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée pour certains emplois ayant un caractère temporaire, il est possible de faire appel au contrat de travail à durée déterminée de l’article L. 1242-2-3 du code du travail :
– pour des actions limitées dans le temps requérant des intervenants dont les qualifications ne sont pas normalement mises en oeuvre dans les activités de formation de l’organisme ;
– pour des missions temporaires pour lesquelles il est fait appel au contrat à durée déterminée en raison de la dispersion géographique des stages, de leur caractère occasionnel ou de l’accumulation des stages sur une même période ne permettant pas de recourir à l’effectif permanent habituel.’
En l’espèce, [H] [E] a été embauchée pour la période courant du 4 septembre 2015 au 30 septembre 2016 en qualité de ‘formatrice pour assurer la formation Pôle emploi’sur différentes prestations (PE; OE; MOV, ATE ATELIERS) qui varieront selon les avenants, à [Localité 6] et [Localité 5].
Pour justifier du caractère temporaire de l’emploi de [H] [E], la société ID Formation produit aux débats les marchés passés avec Pôle emploi. Il ressort de ces pièces que les marchés sont attribués en vue d’assurer en divers sites géographiques des prestations spécifiques, dont celles confiées à [H] [E], pour une période ferme et limitée et que leur reconduction, qui n’est pas tacite, est soumise à une notification de Pôle Emploi.
La société ID Formation affirme ensuite que ces missions requéraient de la part des formateurs des qualités spécifiques, relatives aux actions d’insertion, qui n’étaient pas mises en oeuvre dans les formations généralistes qu’elles dispensaient. Cependant, elle ne fait que procéder par voie d’affirmation et [H] [E] conteste ce fait.
[H] [E] produit aux débats une présentation de la société ID Formation disponible sur internet, dans une version visible le 21 octobre 2019 selon laquelle ‘depuis 2004, ID formation met en oeuvre une méthode innovante et efficace pour accompagner les demandeurs d’emploi dans leur recherche…’. Il apparaît ainsi que depuis quinze ans, l’accompagnement des demandeurs d’emploi constitue une activité permanente de la société ID formation.
En outre, selon ses statuts, la société ID Formation a pour objet ‘toute activité entrant dans le champ de la formation professionnelle telle que définie par la réglementation en vigueur’ mais également ‘toutes activités annexes, connexes ou complémentaires s’y rattachant directement ou indirectement’ en sorte que son objet est large. Les statuts ne limitent pas l’objet de la société ID Formation a des formations généralistes.
[H] [E] produit également une offre d’emploi datée du 21 janvier 2019 pour un contrat de travail à durée déterminée de ‘conseiller en insertion professionnelle [Localité 6]’ dont le but est d’apporter ‘appuis et conseils à des demandeurs d’emploi’. Cet emploi est également basé à [Localité 6], comme celui qu’occupait [H] [E] étant relevé que le lieu d’activité figurant sur ses différents contrats et avenants était fixe. Il concerne également l’accompagnement des demandeurs d’emploi.
La société ID Formation ne démontre nullement que les missions confiées à [H] [E] requéraient de sa part des qualités spécifiques et nécessitaient de recourir à cette dernière sur de courtes périodes alors que les activités correspondent notamment à l’objet de la société depuis une quinzaine d’années.
La société ID Formation a ainsi pourvu irrégulièrement à un besoin durable et permanent.
En conséquence, la requalification de la relation salariale s’impose et prend effet à la date du 4 septembre 2015, sans qu’il y ait d’examiner les autres moyens développés par la salariée au soutien de cette prétention, comme surabondants.
* sur les conséquences de la requalification
[H] [E] demande que les indemnités soient basées sur un salaire de référence fixé à 1.722 euros.
En application des dispositions de l’article L.1251-41 du code du travail, le salarié a droit à une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire. Cette indemnité comprend le salaire de base et les accessoires du salaire, comme a pu le juger la cour de cassation (Soc. 3 mai 2016, n°14-29.739). Ainsi, son montant n’est pas fixé par référence au salaire moyen perçu par le salarié. En conséquence, et compte tenu du nombre de contrats, de leurs renouvellements et de la durée de la relation contractuelle, la société ID Formation sera condamnée à payer à [H] [E] la somme de 500 euros de ce chef et le jugement sera infirmé sur le quantum.
La rupture de la relation salariale requalifiée en un contrat à durée indéterminée par la seule survenue de son terme, sans que la procédure de licenciement prévue par les articles L 1232 – 2 et L 1232 – 5 du code du travail ait été respectée, signifiant que la cause réelle et sérieuse de ce licenciement n’a pas été évoquée dans une quelconque lettre de licenciement, rend sans cause réelle et sérieuse ce licenciement.
La salariée revendique donc, à bon droit, le bénéfice d’une indemnité compensatrice de préavis, fixée, au regard de son ancienneté dans l’entreprise, conformément aux dispositions de l’article L 1234 – 1 du code du travail à la durée d’un mois, pour cette indemnité, par application des dispositions de l’article L.1234-5 du code du travail être calculée, sur le salaire mensuel de base, en tenant compte de tous les salaires et avantages qu’elle aurait perçus si elle avait accompli son travail, en ce compris les heures supplémentaires et complémentaires lorsqu’elles constituent un élément stable et constant de la rémunération.
En l’espèce, la variabilité du volume d’heures complémentaires mensuellement effectuées ne permet pas d’intégrer celles-ci dans la base de calcul servant à la détermination du montant d’indemnité compensatrice de préavis.
Pour prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 1 722 euros, outre l’intégration de ces heures complémentaires, [H] [E] prétend, à tort, que devraient être intégrés le montant de l’indemnité de congés payés et de l’indemnité d’usage perçues sur son salaire de septembre 2016.
La décision déférée mérite d’être confirmée en ce qu’elle a fait une exacte application des dispositions de l’article L 1234 – 5 du code du travail en condamnant l’employeur au paiement de la somme de 334,40 euros à titre d’indemnité de préavis outre 34,44 euros à titre des congés payés afférents.
Les premiers juges ont, à bon droit, fait application des dispositions de l’article L 1235 – 5 du code du travail, en leur rédaction applicable à l’espèce. Ils ont exactement rappelé que l’indemnisation se faisait sur la base du préjudice subi. Toutefois, sauf à se prévaloir de son âge (52 ans), de la situation générale de l’emploi dans la région Grand Est, la salariée ne justifie pas d’un préjudice subi pour la somme qu’elle sollicite.
Compte tenu de son ancienneté dans l’entreprise, en l’absence d’élément quant à sa situation professionnelle postérieure à son licenciement, la société Innovation Développement Formation sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré sera donc infirmé, pour le montant de l’indemnisation qu’il a retenue.
Sur les autres demandes
Il y a lieu de préciser que toute condamnation est prononcée sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables.
Les condamnations salariales porteront intérêts à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation.
Les dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse porteront intérêts à compter du jugement et l’indemnité de requalification, compte tenu de l’infirmation du jugement sur le montant de celle-ci, à compter du présent arrêt.
Compte tenu des termes de la présente décision, la société ID Formation sera condamnée à payer à [H] [E] une indemnité de 800 euros au titre des frais irrépétibles que celle-ci a exposés à hauteur d’appel, s’ajoutant à la somme à laquelle elle a été condamnée par les premiers juges, de ce chef.
En revanche, elle sera déboutée en ce même chef de demande.
Par ces motifs :
La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières le 21 septembre 2021 en ce qu’il a :
– fixé au 1er septembre 2016, la date de prise d’effet de la requalification de la relation contractuelle,
– condamné la société ID Formation à payer à [H] [E] la somme de 344,40 euros au titre de l’indemnité de requalification,
– dit que l’indemnité de requalification produira intérêt au taux légal à compter du jugement,
– condamné la société ID Formation à payer à [H] [E] la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Requalifie la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 4 septembre 2015,
Condamne la société ID Formation à payer à [H] [E] :
– 500 euros au titre de l’indemnité de requalification,
– 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
outre intérêts au taux légal à compter de la présente décision,
Précise que toutes les condamnations sont prononcées sous réserve de déduire les cotisations salariales ou sociales éventuellement applicables,
Condamne la société ID Formation à payer à [H] [E] une indemnité de 800 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a exposés à hauteur d’appel,
Déboute la société ID Formation en sa demande en paiement fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société ID Formation aux dépens de l’instance d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT