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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-7
ARRÊT AU FOND
DU 12 MAI 2023
N° 2023/ 198
Rôle N° RG 21/03977 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BHD5G
Association FOOTBALL CLUB DE [Localité 3]
C/
[D] [K]
Copie exécutoire délivrée
le : 12 mai 2023
à :
SELARL RACINE
Me Martine MANELLI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES en date du 05 Mars 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 19/00221.
APPELANTE
Association FOOTBALL CLUB DE [Localité 3], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU de la SELARL RACINE, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
Madame [D] [K], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Martine MANELLI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Raphaelle BOVE, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Françoise BEL, Président de chambre
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
Madame Raphaelle BOVE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2023
Signé par Madame Françoise BEL, Président de chambre et Mme Agnès BAYLE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure, prétentions et moyens des parties:
Le 20 août 2016, Mme [D] [K] a conclu un protocole d’accord à durée déterminée jusqu’au 30 juin 2017, avec l’Association Football Club de [Localité 3] (AFCM) aux termes duquel elle s’est engagée à faire partie de l’effectif de l’AFCM par la signature d’une licence de dirigeante pour la saison 2016/2017, avait pour mission de tenir la buvette lors des matchs à domicile le week-end et percevait 10% de la recette hors-taxe sous forme de franchise.
Elle a signé un second protocole d’accord à durée déterminée du 3 juillet 2017 au 31 mai 2018 avec l’AFCM, lequel précisait à nouveau qu’elle s’engageait à faire partie de l’effectif du club par la signature d’une licence de dirigeante pour la saison 2017/2018 en qualité d’accompagnateur de l’équipe 1ère et percevrait 456 euros brut par mois au titre du régime de l’assiette forfaitaire du 1er juillet 2017 au 31 mai 2018.
Le 1er décembre 2017, Mme [K] a conclu avec l’AFCM un contrat de travail à durée déterminée jusqu’au 30 juin 2018 en qualité de secrétaire générale, pour un horaire hebdomadaire de 39 heures et une rémunération de 1500 euros.
A compter du 23 avril 2018, la salariée a été dispensée d’exécuter sa prestation de travail, en étant néanmoins rémunérée jusqu’au terme du contrat susvisé.
Le 4 mai 2018, Mme [K] a porté plainte contre son employeur pour insultes raciales et harcèlement commis sur son lieu de travail entre fin janvier 2018 et courant du mois de février 2018.
Par acte reçu le 21 juin 2018, Mme [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Martigues aux fins notamment de voir requalifier ses périodes d’activité au sein de l’AFCM en contrat de travail à durée indéterminée, le terme du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et voir condamner l’AFCM à lui verser les rappels de salaire et accessoires ainsi que les dommages et intérêts subséquents.
Par jugement du 5 mars 2021, le conseil de prud’hommes de Martigues a :
– requalifié les périodes d’activité de Mme [K] au sein de l’AFCM en qualité de salarié en contrat de travail à durée déterminée ;
– requalifié les contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 20 août 2016 au 30 juin 2018 ;
– dit que l’ancienneté de Mme [K] est à décompter du 20 août 2016 au 30 juin 2018;
– condamné l’AFCM prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] la somme de 1 500 euros nets au titre de l’indemnité de requalification;
-condamné l’AFCM prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] les sommes suivantes au titre des rappels de salaires et des congés payés :
– 5 962,91 euros et 605,40 euros au titre des congés payés pour l’année 2016,
– 8 674,07 euros et 900 euros au titre des congés payés pour la période de janvier à juin 2017,
– 5 220 euros et 750 euros au titre des congés payes pour la période de juillet à novembre 2017.
– qualifié la rupture de la relation contractuelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse;
– dit que la procédure de licenciement n’a pas été respectée;
– condamné l’AFCM prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] les sommes suivantes :
– 1 500 euros nets au titre de l’indemnité du préjudice pour non-respect de la procédure de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 500 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que 150 euros au titre des congés payés incidents,
– 600 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
– 4 500 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice subi par le licenciement sans cause réelle et sérieuse;
– condamné l’AFCM prise en la personne de son représentant légal en exercice à délivrer à Mme [K] les documents suivants, l’ensemble sans astreinte: le reçu pour solde de tout compte, le certificat de travail, l’attestation Pôle Emploi, un bulletin de salaire rectifié des condamnations du présent jugement;
-condamne l’AFCM prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] la somme de 1 300 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes;
– condamné l’AFCM aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration du 16 mars 2021, l’AFCM a relevé appel du jugement.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 22 février 2023, l’AFCM demande à la cour :
– d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 5 mars 2021,
Et, statuant à nouveau,
À titre principal :
– de constater l’absence de contrat de travail entre l’AFCM et Mme [K] du 20 août 2016 au 1er décembre 2017 ;
– de débouter Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la requalification des conventions de dirigeant bénévole en contrat de travail ;
– de débouter Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé;
– de constater la légalité du contrat à durée déterminée d’usage conclu entre l’AFCM et Mme [K] du 1er décembre 2017 au 30 juin 2018 ;
– de débouter Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la requalification du contrat de travail en durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ;
– de débouter Mme [K] de l’ensemble de ses demandes ;
– de la condamner à verser à l’AFCM la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
À titre subsidiaire :
– de fixer le salaire moyen de Mme [K] à 54 euros bruts par mois pour la période du 20 août 2016 au 1 er décembre 2017 ;
– de débouter Mme [K] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 20 août 2016 au 1er décembre 2017 ;
– de réduire la demande de prime de précarité à 836,4 euros ;
– de réduire la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
à 200 euros ;
– de réduire la demande d’indemnité conventionnelle de licenciement à 175 euros ;
– de réduire la demande d’indemnité compensatrice de préavis à 1 500 euros brut ;
-de réduire la demande d’indemnités de congés sur préavis à 150 euros brut ;
À titre infiniment subsidiaire :
– de réduire la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 1 500 euros;
En tout état de cause de débouter Mme [K] de ses demandes :
– d’indemnité pour travail dissimulé ;
– d’indemnité pour non-respect de la procédure;
– au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’AFCM sollicite à titre liminaire le rabat de l’ordonnance de clôture du 20 janvier 2023 et de juger recevables ses dernières conclusions susvisées, aux fins notamment de déclarer irrecevables les dernières conclusions et pièces produites par l’intimée les 11 et 17 janvier 2023 en raison de la violation du principe du contradictoire liée à leur transmission tardive et au non-respect de l’article 954 du code de procédure civile.
À titre principal, l’appelante fait valoir :
-Sur l’absence de tout lien de subordination entre Mme [K] et l’AFCM entre le 20 août 2016 et le 1er décembre 2017 que :
– l’intéressée était dirigeante bénévole et à ce titre n’était liée par aucun contrat de travail avec l’AFCM, ni tenue à aucune obligation mais participait à l’organisation des matchs sur la seule base du volontariat ;
– la contrepartie financière limitée donnée à cette dernière sur la période en cause, inférieure à 3/4 du SMIC, telle qu’autorisée par la réglementation, ne peut être assimilée à une rémunération salariale ;
– les conventions de bénévolat signées par Mme [K] ne mettaient à sa charge aucune prestation de travail mais seulement l’obligation de signer une licence de dirigeante pour chaque saison. À ce titre, l’intimée n’apporte aucune preuve s’agissant des prestations de travail qu’elle aurait effectuées sur cette période ;
– l’AFCM n’a jamais exercé de lien de subordination sur l’intéressée, ne lui a jamais donné aucune consigne, directive, imposé de contrainte, demandé de rendre des comptes et n’avait aucun pouvoir de sanction à son encontre ;
-Sur la requalification du terme du contrat de travail de l’intimée : l’AFCM expose que le contrat conclu à compter du 1er décembre 2017 est un contrat de travail à durée déterminée d’usage tel que prévu par la convention collective du sport en son article 4.7.2, que celui-ci a été conclu en respectant les conditions de forme et de fond lui étant imposées, le caractère temporaire de l’emploi étant justifié par le rythme des saisons sportives et l’aléa des résultats sportifs.
S’agissant de sa rupture, elle rappelle que si la salariée a été dispensée d’activité à compter du 23 avril 2018, elle a perçu l’intégralité de sa rémunération, son contrat prenant fin le 30 juin 2018 soit le jour de son terme, aucune requalification à son sens n’étant de ce fait possible.
À titre subsidiaire :
– sur la demande indemnitaire faite au titre du travail dissimulé, le club fait valoir qu’aucune intention frauduleuse n’est démontrée, tel que relevé en première instance;
– sur la fixation du salaire de l’intimée et les demandes de rappel de salaire si les conventions de dirigeant bénévole devaient être requalifiées en contrat de travail, l’AFCM précise quels étaient les horaires de présence de l’intéressée sollicitant cette fixation à un maximum de 54 euros brut pas mois. Elle relève que ce montant est inférieur à ce qu’elle a perçu aux termes de ce qui était indiqué dans les conventions qu’elles avaient conclues, aucune demande de rappel de salaire n’étant dès lors justifiée entre le 20 août 2016 et le 1er décembre 2017;
– sur le paiement de la prime de précarité, le club rappelle que celle-ci a déjà été versée comme relevé par le conseil des prud’hommes;
– sur la demande indemnitaire formulée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, le club précise que les preuves apportées par l’intimée ne justifient pas matériellement l’existence des faits rapportés de harcèlement et discrimination. En l’absence de toute démonstration de préjudice, l’AFCM demande à limiter à 200 euros le versement de dommages et intérêts et à titre infiniment subsidiaire à 1500 euros au regard des barèmes légaux, cette somme ne pouvant en tout état de cause dépasser 3000 euros compte tenu du maximum légal. Se référant à la convention collective du sport, le club indique que l’indemnité conventionnelle de licenciement ne peut être supérieure à 175 euros et que l’indemnité de préavis est d’un mois, soit une somme de 1500 euros outre 150 euros au titre des congés payés afférents.
– sur la demande indemnitaire formulée pour non-respect de la procédure de licenciement, l’AFCM expose qu’aux termes de l’article L.1235-2 du code du travail, celle-ci est exclusive de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 10 janvier 2023, la salariée demande à la cour :
– de débouter l’AFCM de l’ensemble de ses demandes,
– de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne l’indemnité pour travail dissimulé, la prime de précarité, les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l’astreinte pour communication de documents salariaux rectifiés,
Et statuant à nouveau,
– de condamner l’AFCM à lui verser les sommes de :
– 9000 euros au titre du travail dissimulé,
– 3305,40 euros au titre de la prime de précarité,
– 9000 euros au titre du préjudice subi en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse, à titre subsidiaire 4500 euros,
– 100 euros d’astreinte par jour de retard, 8 jours après la signification de la décision à intervenir pour lui délivrer les bulletins de salaires rectifiés, le reçu pour solde de tout compte, le certificat de travail et l’attestation ‘pôle emploi’,
– 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir :
-Sur les protocoles d’accord et le contrat à durée déterminée pour lesquels elle sollicite une requalification en contrat à durée indéterminée à temps complet ainsi que le paiement d’indemnités et prime subséquentes :
– que les conditions de forme et de fond pour sa nomination en qualité de dirigeante bénévole n’ont pas été respectées au regard des statuts de l’association;
– qu’elle a toujours perçu une rémunération ce qui est interdit par le statut de dirigeant bénévole;
– que les bulletins de salaire et l’attestation pôle emploi lui ayant été remis mentionnent respectivement une ancienneté à compter du 1er septembre 2016 et du 20 août 2016;
– que le contrat à durée déterminée ne peut s’analyser en un contrat d’usage ce dernier ne respectant pas les conditions de fond et de forme de ce type de contrat eu égard notamment au nombre de jours travaillés par la salariée et au fait qu’elle ne participait en aucune façon aux activités physiques et/ou sportives du club;
-qu’elle n’a jamais eu aucune autonomie dans la gestion de son travail depuis la signature du premier protocole d’accord, réalisant ses prestations de travail sous la subordination des dirigeants du club;
– que ses horaires et planning de travail lui étaient imposés, justifiant notamment qu’à compter du 3 juillet 2017, en sus de gérer la buvette, elle effectuait des tâches de secrétariat, ses horaires étant bien supérieurs à ceux allégués par l’AFCM;
– que les deux protocoles d’accord ne font référence à aucun jour ou horaire de travail, de sorte qu’il y a lieu dans le cas d’une requalification en contrat de travail à durée indéterminée de juger qu’il s’agit d’un contrat à temps complet;
– que pour le paiement de la prime de précarité, il y a lieu de calculer celle-ci sur la totalité de la rémunération qu’aurait dû percevoir la salariée et non, tel que retenu en première instance, sur la seule période de travail retenue par l’AFCM.
Sur la demande d’indemnité au titre du travail dissimulé, que l’intention frauduleuse du club est notamment démontrée par l’utilisation indue des protocoles d’accord en lieu et place d’un contrat de travail.
Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences indemnitaires :
– qu’aux termes de la requalification des conventions successives en contrat de travail à durée indéterminée il convient d’analyser la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui octroyer notamment une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, aucune démarche particulière n’ayant été réalisée à ce titre;
– qu’elle a fait l’objet de propos discriminatoires et été victime de harcèlement, ces faits pour lesquels elle a porté plainte, ayant conduit à ce que l’AFCM l’autorise à ne pas finir d’exécuter son contrat de travail tout en la rémunérant.
L’ordonnance de clôture a été révoquée et une nouvelle clôture fixée avant l’ouverture de l’audience, par mention au dossier, avis ayant été donné aux conseils des parties verbalement.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions déposées.
Motifs
Sur la recevabilité des pièces transmises par Mme [K]
L’intimée a communiqué ses dernières pièces les 10 janvier (pièces n°25 à 28) et 17 janvier 2023 (pièce n°29 et 30).
Tout en constatant que certaines de ces pièces, en possession de l’intéressée dès 2021, auraient pu être versées aux débats antérieurement , la cour relève toutefois qu’ayant conclu pour la dernière fois le 22 février 2023, l’AFCM a bénéficié du temps nécessaire pour examiner ces pièces tenues pour avoir été communiquées en temps utile et a développé des observations de fond sur lesdites pièces de sorte qu’aucune violation du principe du contradictoire ne peut être constatée et qu’il convient de les déclarer recevables.
Sur la qualification des conventions signées entre Mme [K] et l’AFCM
Le contrat de travail se définit comme une convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place moyennant rémunération ; il appartient à celui qui se prévaut de l’existence d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve.
Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
En l’espèce, l’intimée a signé avec l’AFCM deux protocoles d’accord successifs du 20 août 2016 au 30 juin 2017 puis du 1er juillet 2017 au 31 mai 2018, les parties ayant conclu au cours de l’exécution du deuxième protocole un contrat à durée déterminée en date du 1er décembre 2017 et prenant fin le 30 juin 2018.
Sur les conditions dans lesquelles s’est exercée l’activité de Mme [K] du 20 août 2016 au 1er décembre 2017, la cour constate que :
– dans le protocole d’accord du 20 août 2016, sa mission était précisément fixée’tenir la buvette lors des matchs à domicile le week-end’, cette clause caractérisant clairement une instruction du club relevant du pouvoir de direction de l’employeur ; qu’il n’est pas contesté que l’intimée a effectivement accompli cette tâche et reçu en contrepartie une rémunération celle-ci étant contraire à l’esprit du bénévolat;
– dans le second protocole d’accord du 3 juillet 2017, les missions de l’intimée et sa rémunération sont à nouveau précisément établies par le club ‘accompagnateur de l’équipe 1ère’ percevant ‘456 euros brut par mois’, l’intimée ne bénéficiant à nouveau d’aucune autonomie dans le choix des tâches qu’elle pouvait accomplir pour le club et ce en contradiction avec le principe de liberté d’action attaché au bénévolat;.
– l’intimée justifie en outre par la production de plusieurs mails qui lui ont été envoyés par l’agent du président du club dès fin août 2017 qu’il lui était demandé de gérer les licences des joueurs et notamment leur règlement, de leur rappeler leurs rendez-vous médicaux, de contacter certains fournisseurs ou encore de s’occuper d’établir des certificats d’hébergement; que l’intimée a commencé à exercer des fonctions administratives bien avant d’être nommée secrétaire générale le 1er décembre 2017, les échanges versés attestant que dès août 2017 elle était en capacité de gérer seule les tâches administratives lui ayant été confiées en ce qu’elle connaissait le fonctionnement interne du club au-delà de la seule tenue de la buvette prévue au protocole d’accord;
Ces écrits démontrent qu’il existait un pouvoir de direction et de contrôle de la part des dirigeants du club à l’endroit de l’intimée, dans le cadre du contrat de prestation de service, les demandes faites étant impératives et leur exécution pouvant en être contrôlée.
Dans la poursuite des relations contractuelles, le club a décidé d’une rupture du second protocole d’accord plus de six mois avant son terme et l’a fait suivre d’ un contrat de travail à durée déterminée. La salariée est désignée en qualité secrétaire générale, elle exécute les missions décrites dans le contrat similaires pour la plupart d’entre elles à celles que l’intéressée réalisait déjà auparavant notamment sous la direction de l’agent du président du club;
– il est versé des bulletins de salaire de l’intimée mentionnent une date d’entrée au 1er septembre 2016.
Il s’en déduit que Mme [K] a exercé une activité salariée dans un lien de subordination à l’AFCM dès la contractualisation en la forme d’un protocole de sorte ce contrat est requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, à compter du commencement de la relation contractuelle entre les parties soit dès le 30 août 2016. Le contrat à durée déterminée conclu 1er décembre 2017 bénéficie de la requalification ordonnée sans pour autant être premier contrat irrégulier.
La décision entreprise ordonnant la requalification est confirmée par substitution de motifs.
Il n’y a lieu d’examiner dès lors le moyen tiré du contrat d’usage.
Sur la prime de précarité et l’indemnité de requalification
La requalification en contrat à durée indéterminée portant sur la relation contractuelle objet des protocoles d’accord à compter du 30 août 2016, la demande d’indemnité de requalification, non fondée sur une disposition légale est rejetée. Le jugement est infirmé de ce chef.
L’appel incident portant sur la prime de précarité est nécessairement rejetée.
Sur l’indemnité pour travail dissimulé
L’article L’8221-5 du code du travail énonce qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur ‘:
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
L’article L’8223-1 du même code prévoit qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l’article L’8223-1, de la volonté chez l’employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.
En l’espèce, la cour considère, au vu des éléments versés, établissant sans équivoque le lien de subordination et la soustraction aux formalités de déclaration préalable obligatoire et de remise des bulletins de salaire pendant plus d’un année, que l’intention frauduleuse de l’AFCM est caractérisée.
En conséquence il convient d’infirmer le jugement entrepris de ce chef et de condamner l’AFCM à verser à Mme [K] la somme de 9000 euros.
Sur les rappels de salaire
L’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.
En l’espèce, les deux protocoles d’accord signés entre les parties ne mentionnent aucune durée de travail. L’AFCM succombe par ailleurs à démontrer que l’intimée entre le 20 août 2016 et le 1er décembre 2017, n’était présente qu’au maximum 5 heures 30 par mois, et ce pour tenir la buvette lors des matchs à domicile, des pièces produites au dossier et mentionnées supra établissant que celle-ci avait déjà connaissance du fonctionnement administratif du club et exerçait des missions à ce titre dès août 2017. Il y a lieu par conséquent de confirmer la décision de première instance ayant requalifié ces protocoles en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et d’octroyer à la salariée les rappels de salaire sollicités sur la base d’une rémunération de 1500 euros par mois fixée dans le contrat signé le 1er décembre 2017 et une fois défalquées les montants lui ayant été versés par le club, soit les sommes de :
– 5962,91 euros de salaire au titre de l’année 2016 outre 605,40 euros de congés payés,
– 8674,07 euros de salaire outre 900 euros de congés payés pour la période de janvier à juin 2017,
– 5220 euros de salaire outre 750 euros de congés payés pour la période de juillet à novembre 2017.
Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences indemnitaires
La rupture du contrat de travail à durée indéterminée s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ce contrat a pris fin le 23 avril 2018, l’employeur par courrier du 11 mai 2018 ayant confirmé son souhait de dispenser la salariée de se rendre sur son lieu de travail et d’exercer ses missions à compter de cette date.
Lors de la rupture de son contrat de travail, la salariée avait près de deux ans d’ancienneté et était soumise aux dispositions de la convention nationale du sport dont l’article 4.4..3.2 prévoit un préavis d’un mois pour les salariés ayant moins de deux ans d’ancienneté et une indemnité de licenciement égale à 1/5 de mois par année travaillée pour les cinq premières années, de sorte que le versement des sommes allouées en première instance sera confirmé, soit :
– 1500 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre 150 euros de congés payés afférents et
– 600 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement.
S’agissant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’article L.1235-3-1 du code du travail précise que les barèmes indemnitaires fixés à l’article L.1235-3 ne sont pas applicables lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du même article lequel énonce notamment le cas des licenciements discriminatoires ou prononcés après la commission de faits de harcèlement moral ou sexuel, la salariée alléguant avoir été victime de ces deux types d’actes.
Or, outre le fait que la salariée ne sollicite pas la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement nul, la cour relève que les pièces produites au dossier soit une plainte formulée à son initiative ainsi que deux attestations de footballeurs du club au moment des faits, dont une produite cinq ans après le début de la procédure et non datée, sont insuffisantes à laisser présumer l’existence de tout fait de harcèlement ou de discrimination, la matérialité des actes énoncés dont notamment la mise à l’écart dans un bureau du club, n’étant pas rapportée.
Compte tenu de son ancienneté soit un an et dix mois au moment de la rupture du contrat, l’article L.’1235-3 du code du travail prévoit que l’indemnité qui peut lui être allouée au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être supérieure à deux mois de salaire.
Il y a lieu en conséquence d’infirmer le jugement de première instance lui ayant octroyé trois mois de salaire soit la somme de 4500 euros et de condamner l’AFCM à lui verser la somme de 3000 euros.
Il ressort de l’article L.’1235-2 du code du travail que le salarié ne peut prétendre cumuler des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour irrégularité de procédure. L’intimée ne peut en conséquence prétendre à des dommages-intérêts au titre de l’irrégularité de la procédure qu’elle invoque. En conséquence, la décision entreprise sera infirmée de ce chef et la salariée déboutée de sa demande indemnitaire pour non-respect de la procédure de licenciement.
Sur les autres demandes
Il y a lieu d’ordonner la remise par l’AFCM des documents de fin de contrat et du bulletin de paie conformes à la présente décision. Il n’y a lieu à assortir cette remise d’une astreinte.
L’appelante succombant en ses demandes principales sera condamnée aux dépens outre le versement d’une somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La cour,
Déclare recevables les pièces n° 25 à 30 communiquées par Mme [K];
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celles relatives au versement de l’indemnité de requalification, de l’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, de l’indemnité pour travail dissimulé et au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [K] de sa demande d’indemnité pour requalification du contrat de travail à durée déterminée;
Déboute Mme [K] de sa demande d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement;
Condamne l’association football club de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] la somme de 9000 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé;
Condamne l’association football club de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
Condamne l’association football club de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice à remettre à Mme [K] une attestation Pôle Emploi, un bulletin de salaire, un reçu pour solde de tout compte et un certificat de travail conformes aux condamnations qui précèdent;
Condamne l’association football club de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice à payer à Mme [K] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes;
Condamne l’association football club de [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice aux entiers dépens de l’instance.
LE GREFFIER LE PRESIDENT