Contrat à durée déterminée d’usage : 25 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16742

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Contrat à durée déterminée d’usage : 25 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16742
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 25 MAI 2023

N° 2023/

FB/FP-D

Rôle N° RG 19/16742 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFC4D

[U] [L]

C/

SARL AZUREENNE DE PROPRETE INDUSTRIELLE (API)

Copie exécutoire délivrée

le :

25 MAI 2023

à :

Me Stéphane CHARPENTIER, avocat au barreau de NICE

Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NICE en date du 14 Juin 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00556.

APPELANTE

Madame [U] [D] épouse [L]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/010371 du 18/10/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Stéphane CHARPENTIER, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SARL AZUREENNE DE PROPRETE INDUSTRIELLE (API), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Avril 2023 prorogé au 25 mai 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023.

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [D] épouse [L] (la salariée) a été engagée le 5 décembre 2016 par contrat à durée déterminée à temps partiel pour la période du 5 décembre 2016 au 30 avril 2017 en qualité d’agent de propreté, qualification AS1, coefficient 150, moyennant une rémunération brute 9,94 euros de l’heure pour 80 heures mensuelles .

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des entreprises de propreté.

Par lettre du 11 janvier 2017 la salariée a adressé sa démission ‘basée sur des problèmes personnels et médicaux’.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment de la rupture.

La salariée a saisi le 19 juin 2017 le conseil de Prud’hommes de Nice de demandes en requalification en contrat à durée indéterminée et d’indemnité de requalification, en requalification en contrat à temps complet, de rappel de salaire subséquent, à titre subsidiaire d’un rappel au titre de la majoration des heures complémentaires, d’un rappel de salaire au titre de la majoration le dimanche, d’indemnité pour travail dissimulé, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 14 juin 2019 le conseil de prud’hommes de Nice a :

– débouté Madame [U] [L] de sa demande de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

– requalifié le contrat à durée déterminée à temps partiel en contrat à durée déterminée à temps complet;

– condamné la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Madame [U] [L] les sommes suivantes :

– 702,45 euros brut à titre de rappel de salaire pour requalification à temps complet,

– 70,24 euros brut à titre de congés payés sur rappel de salaire pour requalification à temps complet,

– 41,74 euros brut à titre de rappel de salaire pour majoration de travailles dimanches,

– 4,17 euros brut à titre de congés payés sur rappel de salaire pour majoration de travail les  dimanches,

– 1 000,00 euros net au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– débouté Madame [L] du surplus de ses demandes,

– débouté la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle de ses demandes reconventionnelles,

– condamné la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle aux entiers dépens.

La salariée a interjeté appel du jugement par acte du 29 octobre 2019 énonçant :

‘Objet/Portée de l’appel: Appel du jugement de la formation paritaire du Conseil de prud’hommes de Nice (RG 17/00556) du 14 Juin 2019, en ce qu’il a:

– Débouté Madame [U] [L] de sa demande de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

– Débouté Madame [L] du surplus de ses demandes,

– Débouté Madame [L] de ses autres demandes, à savoir:

o requalifier le contrat de travail à durée déterminée signé le 5 décembre 2016 en un contrat à durée indéterminée.

o condamner la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à verser à Madame [L] la somme de 2385,60 € à titre d’indemnité de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

o dire et juger que la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle a eu recours à Madame [L] de manière dissimulée par dissimulation d’heures supplémentaires.

o En conséquence, condamner la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à payer à Madame [L] la somme de 9045,54 Euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé’.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 janvier 2020 Mme [L] demande de :

RECEVOIR Madame [L] en toutes ses demandes, fins, conclusions,

La recevoir en son appel et l’y déclarer bien fondée,

REFORMER le jugement rendu, le 14 Juin 2019, par le Conseil de prud’hommes de Nice, en ce qu’il a :

– débouté Madame [U] [L] de sa demande de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

– débouté Madame [L] du surplus de ses demandes,

– débouté Madame [L] de ses autres demandes, à savoir:

o REQUALIFIER le contrat de travail à durée déterminée signé le 5 décembre 2016 en un contrat à durée indéterminée .

o CONDAMNER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à verser à Madame [L] la somme de 2385,60 € à titre d’indemnité de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

o DIRE ET JUGER que la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle a eu recours à Madame [L] de manière dissimulée par dissimulation d’heures supplémentaires.

o En conséquence, CONDAMNER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à payer à Madame [L] la somme de 9045,54 Euros à titre d’indemnité pur travail dissimulé.

Statuant à nouveau,

Sur la requalification du contrat précaire en contrat à durée indéterminée

Vu l’article L1245-1 (modifié par loi n°2008-67 du 21 janvier 2008),

Vu l’article L1242-12 (modifié par loi n° 2016-1088 du 8 août 2016),

Vu l’article L1245-2 du Code du Travail,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces du dossier,

REQUALIFIER le contrat de travail à durée déterminée signé le 5 décembre 2016 en un contrat à durée indéterminée.

CONDAMNER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à verser à Madame [L], à titre d’indemnité de requalification, la somme de 4522,77 euros, sur la base d’un salaire à temps complet, et à titre subsidiaire, en retenant le salaire stipulé au contrat, la somme de 2385,60 Euros.

Le rappel de salaire sur heures complémentaires

Vu les articles D3171-8 et L3171-4 du Code du travail,

Vu les articles L3123-8 et L3123-29 du Code du travail (modifié par loi n°2016-1088 du 8 août 2016),

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces du dossier,

CONDAMNER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à verser à Madame [L] à titre de rappel de salaire sur heures complémentaires majorées, la somme de 539,24 Euros, outre 53,92 Euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés.

DIRE ET JUGER que cette condamnation sera compensée par celle prononcée par jugement rendu, le 14 Juin 2019, par le Conseil de prud’hommes de Nice, à titre de rappel de salaire pour requalification à temps complet.

Sur le travail dissimulé

Vu les articles L8221-5 du Code du travail et suivants du Code du travail,

Vu la jurisprudence,

Vu la convention collective applicable,

Vu les pièces du dossier,

DIRE ET JUGER que la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle a eu recours à Madame [L] de manière dissimulée par dissimulation d’heures supplémentaires.

En conséquence, CONDAMNER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à payer à Madame [L] à titre d’indemnité pour travail dissimulé, la somme de 9045,54 Euros, sur la base d’un salaire à temps complet, et à titre subsidiaire, en retenant le salaire stipulé au contrat, la somme de 4771,20 Euros.

En tout état de cause

DEBOUTER la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle de l’ensemble de ses demandes.

CONDAMNER, en outre, La SARL Azuréenne de Propriété Industrielle aux entiers dépens de la présente instance.

DIRE ET JUGER qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes, correspondant à des créances indemnitaires nées de la rupture ou de l’exécution du contrat de travail, retenues par l’huissier instrumentaire en application des dispositions de l’article A444-32 du Code de Commerce devront être supportées par la partie défenderesse.

CONDAMNER également La SARL Azuréenne de Propriété Industrielle à verser à Madame [L] une indemnité d’un montant de 3000 Euros, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 3 janvier 2023 la SARL Azuréenne de Propriété Industrielle demande de :

CONFIRMER le jugement rendu le 14juin 2019 par le Conseil de Prud’hommes de Nice DEBOUTER Madame [U] [L] de l’intégralité de ses demandes, droits, fins et prétentions.

CONDAMNER Madame [U] [L] au paiement de la somme de 3.000,00€ sur le fondement de l’article 700 du C.P.C. et aux entiers dépens.

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2023.

SUR CE

A titre préliminaire la cour constate que la société n’a pas formé appel incident des dispositions du jugement ayant requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps complet et l’ayant condamnée à un rappel de salaire sur la base d’un temps complet, les congés payés afférents et à un rappel de salaire au titre de la majoration pour le travail le dimanche, les congés payés afférents. Ces dispositions sont donc définitives.

Sur la requalification en contrat à durée indéterminée

Selon l’article L.1242-1 du code du travail, un contrat à durée déterminée, quelque soit son motif, ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

L’article L.1242-2 du même code prévoit qu’un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent :

– le remplacement d’un salarié absent

– l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise

– les emplois relevant de secteurs d’activités définis par décret ou par convention, accord collectif de travail étendu, où il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Il résulte de l’article L.1245-1 du code du travail qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des principes précités.

En application de l’article L.1242-12 du code du travail, le contrat à durée déterminée doit comporter l’indication précise du motif pour lequel il est conclu en le rattachant explicitement à l’un des cas autorisé. Il ne peut comporter qu’un seul motif. A défaut il est réputé conclu pour une durée indéterminée. Il s’agit d’une présomption irréfragable, à laquelle l’employeur ne peut apporter la preuve contraire.

En cas de litige portant sur le motif du recours énoncé dans le contrat à durée déterminée, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la réalité de ce motif.

En l’espèce la salariée invoque à l’appui de sa demande en requalification en contrat à durée indéterminée :

– à titre principal un moyen reposant sur une pluralité de motifs énoncée au contrat, à savoir un contrat à durée déterminée d’usage, un accroissement temporaire d’activité et le remplacement de salariés absents, ce qui constitue un motif incertain et donc une absence de motif;

– à titre subsidiaire, un moyen reposant l’absence de justification de chacun des motifs en soulignant, qu’au contraire des énonciations du jugement déféré, l’absence de personnel ne peut constituer le motif d’accroissement temporaire d’activité au sens de l’article L.1242-2 du code du travail et que les mentions obligatoires inhérentes au motif de remplacement d’un salarié absent font défaut;

La société conclut au rejet de la demande et affirme qu’en dépit d’une rédaction ‘maladroite’ du contrat, son motif repose sur le seul accroissement temporaire d’activité, lequel résulte des absences des salariés augmentant mécaniquement la charge de travail. Il indique que ce motif est justifié et qu’il était clairement énoncé dans l’offre d’emploi de sorte que la salariée était pleinement informée des raisons de son recrutement.

En l’espèce la cour constate que le contrat à durée déterminé est ainsi rédigé s’agissant du motif :

‘Cet emploi pour lequel il est d’usage de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature et du caractère par nature temporaire de cet emploi est conclu pour une durée déterminée.

Pour surcroît d’activité, en remplacement du personnel en congés payés et /ou personnel absent’.

Alors que le recours au contrat à durée déterminée doit comporter un seul et unique motif, précisément défini et identifié parmi les cas de recours autorisés, chacun étant distinct et ne se confondant pas entre eux, la cour relève que cet énoncé fait ressortir que la société se réfère tout à la fois au contrat d’usage, à l’accroissement temporaire d’activité et au remplacement de salariés absents, ce dernier étant présenté comme l’élément constitutif et justificatif de l’accroissement d’activité.

Il s’ensuit que le contrat à durée déterminée ne comporte pas d’indication précise de son motif ni n’est conforme au principe de son unicité.

En conséquence et en infirmant le jugement déféré, la cour prononce la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée déterminée.

Sur l’indemnité de requalification

En application de l’article L. 1245-2 du même code, la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée ouvre droit pour le salarié à une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

En l’espèce la salariée sollicite la somme de 4 522,77 euros correspondant à trois mois de salaire sur la base du temps complet (1 507,59 euros) et subsidiairement celle de 2 385,60 euros correspondant à trois mois de salaire sur la base du temps partiel stipulé au contrat de travail, en faisant valoir que ‘les circonstances de l’espèce’ justifient l’allocation d’une indemnité supérieure au minimum légal .

La société conclut au rejet de la demande en faisant valoir que c’est la salariée qui est à l’origine de la rupture et qu’elle ne justifie pas du quantum de sa réclamation.

La cour dit que du fait de la requalification en contrat à durée déterminée, l’indemnité de requalification revient à la salariée, la circonstance que celle-ci soit à l’origine de la rupture n’ayant une éventuelle incidence que sur l’indemnité de fin de contrat.

Sur le montant de cette indemnité de requalification, comme il a été dit à titre préliminaire, le jugement déféré est définitif en ce qu’il a requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps complet. Dans ces conditions l’indemnité de requalification ne peut être inférieure à un mois de salaire sur la base d’un contrat de travail à temps complet, soit la somme non contestée de 1 507,59 euros.

Dès lors, compte tenu de son ancienneté et des circonstances de l’espèce telles qu’elles résultent des pièces produites aux débats, il y a lieu de lui allouer une indemnité d’un montant de 1 507,59 euros, aucun élément ne justifiant de porter cette indemnité à une somme supérieure.

En conséquence et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser à la salariée la somme de 1 507,59 euros à titre d’indemnité de requalification.

Sur le rappel de salaire au titre des heures complémentaires et la demande de compensation.

Les heures complémentaires sont les heures de travail réalisées par le salarié au delà de la durée prévue au contrat de travail à temps partiel.

En application des articles L. 3171-2 alinéa 1er et L.3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard de ces exigences légales et réglementaires. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce la salariée sollicite la somme de 539,24 euros à titre de rappel d’heures complémentaires et celle de 53,92 euros au titre des congés payés afférents en faisant valoir qu’elle a effectué 113 heures en décembre 2016 et 30 heures en janvier 2017 et n’a été rémunérée que de 71 heures et 26 heures sur les mois considérés.

Mais quand bien même la salariée présente un décompte précis des heures qu’elle prétend avoir effectué, du fait de la requalification en contrat à temps complet, ordonnée par le conseil de Prud’hommes au motif de l’absence de mention de la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine dans le contrat à temps partiel, ayant par suite donné lieu à un rappel de salaire sur la base d’un temps complet, ces dispositions étant définitives, les heures comprises entre le temps partiel et le temps complet n’ont plus la nature d’heures complémentaires donnant lieu aux majorations légales et la salariée ne peut prétendre à un rappel à ce titre, cette demande étant antinomique avec la requalification en contrat à temps plein.

La cour relève d’ailleurs que la demande de rappel d’heures complémentaires était formée à titre subsidiaire en première instance en cas de rejet de sa demande de requalification en contrat à temps complet.

En conséquence, la cour dit que la demande n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

La cour rejette par voie de conséquence en ajoutant au jugement déféré la demande accessoire de compensation avec le rappel de salaire alloué sur la base du contrat à temps complet.

Sur le travail dissimulé

Il résulte de l’article L.8221-1 du code du travail qu’est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d’emploi salarié.

Aux termes de l’article L.8821-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur notamment de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Il résulte de l’article L.8223-1 du code du travail qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l’employeur a recours en commettant les faits prévus à l’article L.8821-5 a droit à une indemnité forfaire égale à six mois de salaire.

Toutefois le travail dissimulé n’est caractérisé que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle. Ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Il revient au salarié de rapporter la preuve de l’élément intentionnel du travail dissimulé.

En l’espèce la salariée sollicite à titre principal la somme de 9 045,54 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé sur la base d’un salaire à temps complet et subsidiairement la somme de 4 771,20 euros sur la base du salaire contractuel à temps partiel.

A l’appui elle fait valoir qu’elle était payée forfaitairement à la chambre et non en fonction du temps réel de travail, l’employeur convertissant le travail en minutes, à savoir trois chambre à l’heure, soit 20 minutes par chambre, ce qui est en deçà du temps effectivement passé pour le ménage et ne comprend pas la préparation des chariots de ménage, le déchargement du linge sale, les temps d’attente de libération des chambres.

Elle fait ainsi valoir que la société n’a pas mis en place de système de contrôle fiable du temps de travail et que le seul document de décompte de la durée du travail était constitué d’un relevé du nombre de chambres par jour, sans feuille de présence mentionnant les horaires de début et de fin de poste. A l’appui elle renvoie au nombre d’heures comptabilisé sur son bulletin de paie de décembre coïncidant justement à la multiplication du nombre de nombre de chambres par le temps pré-défini de 20 minutes alors qu’il résulte de son décompte horaire qu’elle a accompli un nombre d’heures supérieur, ce que la société ne conteste pas.

La salariée souligne qu’il résulte de la réponse même de la société à sa réclamation en février 2017 qu’elle admet avoir retenu un temps de travail forfaitaire à la chambre, ce qui n’est pas conforme aux dispositions de l’article D.3171-8 du code du travail et est contraire aux stipulations de son contrat de travail qui fixe une rémunération sur la base d’un taux horaire, précisant avoir alerté l’inspecteur du travail par lettre du 17 février 2017 qui l’a invitée à saisir le conseil de Prud’hommes.

Elle ajoute que la généralisation du système pour une entreprise employant trente et un salariés traduit le caractère intentionnel du travail dissimulé.

La salariée produit :

– son contrat de travail stipulant s’agissant de la rémunération : ‘La salariée Mme …percevra une rémunération brute correspondante au salaire national de sa catégorie, soit 9,94 euros brut de l’heure’;

– une feuille de présence des salariés à l’entête de la société faisant figurer sur un planning le nom d’un salarié pour chaque jour du mois de décembre 2016 avec le nombre de chambre et sa signature;

– l’attestation Pôle Emploi en ce qu’elle indique un effectif de trente et un salariés;

– son bulletin de salaire de décembre 2016 mentionnant 71 heures;

– le cour en réponse de la société à sa mise en demeure de régularisation des heures ‘supplémentaires’ du 8 février 2017 énonçant : ‘Concernant votre réclamation, nous vous rappelons les termes de votre contrat de travail : base 3 chambres à l’heure.

Vous trouverez la copie de la feuille de présence de 12/2016 signée par vos soins’;

– son courrier dactylographié à l’attention de la direction départementale du travail, avec ajout manuscrit de la date du 17 février 2017, indiquant :

‘J’ai le regret de porter à votre connaissance les faits suivants:

Durant le mois de décembre j’ai travaillé 113 heures seulement sur ma fiche de paie seul 71 heures sont payés, en plus de cela j’ai également travaillé 3 dimanche dans le mois, normalement les dimanches travaillés sont majorés mais dans mon cas sur la fiche de paie aucun dimanche n’y figure.

J’ai constaté qu’entre la fiche de paie du mois de décembre le smic horaire est de 9,67 et sur la fiche de paie du mois de janvier le smic horaire est différent 9,76 pour janvier.

La fiche de paie du mois de décembre est arrivé très tardèrent et de ce fait je n’ai pas pu recevoir l’aide au retour de l’emploi de Pole Emploi.

Dans le contrat de travail il y stipule que je dois effectuer trois chambres par heure, et que je serais également amené à faire des heures supplémentaires, les heures supplémentaire je l’ai bien effectues seulement elles n’ont pas été payés.

Je vous joins tout des documents en ma possession bulletin de salaire, contrat.

En vous remerciant à l’avance pour votre intervention’;

La société conclut au rejet de la demande et fait valoir que la salariée confond objectif assigné de trois chambres à l’heure en exécution du pouvoir de direction de l’employeur, lequel était réaliste et réalisable, d’ailleurs accepté par la salariée lors de la souscription de son contrat de travail et dissimulation d’heures de travail.

Elle affirme qu’il n’y avait aucun temps annexe, d’attente de libération des chambres ou de préparation, la gouvernante de l’hôtel leur mettant à disposition tout le matériel nécessaire et souligne qu’en cause d’appel la salariée se prévaut pour la première fois d’échanges avec l’inspection du travail l’ayant incitée à saisir la juridiction prud’homale, au moyen d’un courrier supposé envoyé à cette administration alors qu’il ne mentionne aucune adresse ni justificatif d’envoi, avec une date ajoutée manuscritement, qui ne présente donc aucune valeur probante.

Comme il a déjà été dit ci-dessus, du fait de la requalification définitive en contrat à temps complet pour un motif étranger à l’accomplissement d’heures complémentaires mais reposant sur le défaut d’une des mentions obligatoires à la validité du contrat à temps partiel, celui-ci est réputé à temps complet depuis le début de la relation contractuelle et la cour a rejeté la demande formée à ce titre.

Dans ces conditions, l’élément matériel du travail dissimulé n’est pas établi.

Sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’élément intentionnel, la cour dit que la demande n’est pas fondée.

En conséquence la cour confirme le jugement en ce qu’il a rejeté la demande au titre du travail dissimulé.

Sur les dispositions accessoires

La cour confirme le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société aux dépens d’appel et a alloué à la salariée une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société qui succombe au principal est condamnée aux dépens d’appel.

En application de l’article 700 du code de procédure civile il est équitable que l’employeur contribue aux frais irrépétibles que la salariée a exposé en cause d’appel. La société est en conséquence condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros et est déboutée de sa demande à ce titre.

II résulte de l’application des articles R.444-52, R.444-53, 30 et R.444-55 du code de commerce, que lorsque le recouvrement ou l’encaissement est effectué sur le fondement d’un titre exécutoire constatant une créance née de l’exécution d’un contrat de travail, le versement d’une provision avant toute prestation de recouvrement ne peut pas être mise à la charge du créancier, de sorte que la cour dit en confirmant le jugement déféré qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande tendant à faire supporter par l’employeur en cas d’exécution forcée du présent arrêt le droit proportionnel dégressif mis à la charge du créancier

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a :

– rejeté la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée de Mme [D] épouse [L],

– rejeté la demande d’indemnité de requalification de Mme [D] épouse [L],

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Prononce la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

Condamne la SARL Azuréenne de Propreté Industrielle à verser à Mme [D] épouse [L] la somme de 1 507,59 euros à titre d’indemnité de requalification,

Dit que la somme allouée est exprimée en brut,

Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions,

Y ajoutant,

Rejette la demande de compensation de Mme [D] épouse [L],

Condamne la SARL Azuréenne de Propreté Industrielle à verser à Mme [D] épouse [L] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais d’appel,

Condamne la SARL Azuréenne de Propreté Industrielle aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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