Votre panier est actuellement vide !
AFFAIRE PRUD’HOMALE
RAPPORTEUR
N° RG 20/04542 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NDL5
S.A.R.L. LY FORMATION
C/
[Z]
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Lyon
du 03 Juillet 2020
RG :
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2023
APPELANTE :
Société LY FORMATION
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Cécile PESSON de la SARL OCTOJURIS – MIFSUD – PESSON – AVOCATS, avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
[R] [Z]
né le 22 Octobre 1958 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Marie-Cécile BAYLE, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 25 Mai 2023
Présidée par Régis DEVAUX, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Rima AL TAJAR, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
– Béatrice REGNIER, présidente
– Catherine CHANEZ, conseillère
– Régis DEVAUX, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 20 Octobre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
La S.A.R.L. Ly Formation exerce une activité d’enseignement supérieur, sous l’enseigne commerciale d’Ecoris. Elle applique la convention collective nationale des organismes de formation du 10 juin 1988 (IDCC 1516). Elle emploie moins de onze salariés.
M. [R] [Z] a été embauché par la société Ly Formation en qualité de formateur, technicien hautement qualifié ‘ échelon E1, coefficient 240, à compter du 4 septembre 2017, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée intermittent et à temps partiel. Il était prévu que M. [Z] enseigne les disciplines suivantes : informatique du transport, transport, qualité sécurité environnement. Le contrat écrit, daté du 4 septembre 2017, n’a pas été signé par le salarié.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 décembre 2017, M. [Z] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 21 décembre 2017. Il ne s’est pas présenté à l’entretien. Il a été licencié pour insuffisance professionnelle, par lettre recommandée avec accusé réception du 26 décembre 2017.
Le 26 juillet 2018, M. [R] [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon.
Par jugement du 3 juillet 2020, le conseil de prud’hommes de Lyon a :
– dit et jugé que le licenciement de M. [R] [Z] est dénué de cause réelle et sérieuse ;
– repositionné M. [R] [Z] au coefficient 310, cadre niveau F ;
– requalifié le contrat à durée déterminée d’usage de M. [R] [Z] en contrat à durée indéterminée ;
– condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 11 192 euros à titre de rappel de salaire
– 111,92 euros à titre de congés payés afférents
– 2 690 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail
– 2 690 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 2 690 euros de dommages et intérêts pour irrégularité du licenciement
– condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à la formation
– 321,88 euros titre de rappel de salaires
– 32,16 euros à titre de congés payés afférents
– 89,67 euros à titre d’un jour de rappel de congés payés
– 98,63 euros à titre de rappel de salaire du 4 janvier 2018, plus congés payés
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale
– 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation, en ce qui concerne les créances de nature salariale, et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;
– rappelé qu’aux termes de l’article R. 1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l’employeur est tenu de remettre, ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l’article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités ;
– fixé à 2 690 euros par mois la moyenne des trois derniers mois de salaire servant à l’application de l’article R. 1454-28 ;
– dit et jugé qu’il n’y a pas lieu d’étendre l’exécution provisoire au-delà de celle de droit ;
– condamné la société Ecoris aux entiers dépens.
La société Ly Formation a interjeté appel de ce jugement, par déclaration formulée par voie électronique le 14 août 2020. L’acte d’appel précise que l’appel est limité aux chefs de jugement expressément critiqués et qu’il « vise le fait que :
– le licenciement de M. [R] [Z] était requalifié comme étant sans cause réelle et sérieuse,
– des dommages et intérêts ont été octroyés pour absence de visite médicale
– des dommages et intérêts ont été octroyés pour absence de remise de documents – des rappels de salaires
– des manquements à la formation
– le reste (s’il y en a) du dispositif ».
Par ordonnance du 12 mars 2021, le conseiller de la mise en état de la chambre sociale de la cour d’appel de Lyon, statuant sur incident, a rejeté la demande de M. [Z] tendant à déclarer irrecevable l’appel de la société Ly Formation, et a condamné M. [Z] aux dépens de l’incident.
La procédure de mise en état a été clôturée le 25 octobre 2022.
Par arrêt du 27 janvier 2023, la chambre sociale de la cour d’appel de Lyon a, après avoir ordonné la réouverture des débats, invité la société Ly Formation et M. [R] [Z] à conclure sur le fait que la demande de la société Ly Formation de condamner M. [Z] au remboursement du préavis indûment payé en mars 2019 pour un montant de 763,14 euros, et la demande de M. [R] [Z] de condamner la société Ecoris à lui payer la de 1 566 € au titre d’un abondement complémentaire du plan épargne entreprise Crédit du Nord / Ecoris [Localité 5] Formation, n’ont pas été formulées devant le conseil de prud’hommes, et en conséquence sur la recevabilité de ces demandes devant la cour d’appel, avant de renvoyer la cause et les parties à l’audience du 10 mars 2023.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses conclusions après réouverture des débats, notifiées le 7 mars 2023, la société Ly Formation demande à la Cour de :
– dire que sa demande au titre du remboursement du préavis indûment payé en mars 2019 est recevable ;
– dire que la demande de M. [Z] au titre de l’abondement complémentaire du plan d’épargne est irrecevable ;
Réformant le jugement entrepris dans son intégralité,
– dire que les demandes de M. [Z] en indemnité de requalification, en rappel de salaires, en dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation, en dommages et intérêts pour remise tardive de documents, en dommages et intérêts pour absence de visite médicale, en dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité, sont infondées tant dans leur principe que dans leur quantum ;
– dire et juger dans tous les cas que M. [Z] ne fait état d’aucun préjudice indemnisable ;
– dire et juger que le licenciement de M. [Z] est régulier et fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
– débouter M. [Z] de toutes ses prétentions au titre du licenciement, infondées tant dans leur principe que dans leur quantum ;
– condamner M. [Z] au remboursement du préavis indûment payé en mars 2019 pour un montant de 763,14 euros ;
– condamner M. [Z] à lui payer la somme de 2 500 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.
La société Ly Formation fait valoir que sa demande au titre du remboursement du préavis indûment payé en mars 2019 est recevable, au regard de son caractère additionnelle à la demande de rejet de la prétention de M. [D] à un rappel de salaire, laquelle est soumise à l’appréciation de la Cour par la voie de l’appel principal ou, s’il est retenu que la déclaration d’appel est dépourvue d’effet dévolutif, de l’appel incident. Sur le fond, la société Ly Formation soutient qu’elle a rémunéré M. [Z] jusqu’au 4 mars 2019, alors que son préavis s’achevait le 26 février 2019. Par ailleurs, elle affirme que la demande de M. [Z] au titre de l’abondement complémentaire du plan d’épargne est irrecevable, dans la mesure où il s’agit d’une demande nouvelle.
Dans ses conclusions additionnelles après réouverture des débats, notifiées le 26 avril 2023, M. [R] [Z], intimé, demande pour sa part à la Cour de :
– dire que la déclaration d’appel de la société Ly Formation ne défère à la Cour aucun chef du jugement critiqué et que la Cour n’est par la suite saisie d’aucune demande ;
– confirmer le jugement rendu le 3 juillet 2020 par le conseil de prud’hommes de Lyon, en ce qu’il a :
– fixé à 2 690 € par mois la moyenne des trois derniers mois de salaire servant à l’application de l’article R. 1454-28 ;
– fixé la rémunération mensuelle devant s’appliquer à la somme de 32 285,62 € par an, soit 2 690 € par mois, au titre de la classification cadre 2, coefficient 310 de la convention collective applicable ;
– dit et jugé que le licenciement de M. [R] [Z] est dénué de cause réelle et sérieuse ;
– repositionné M. [R] [Z] au coefficient 310, cadre niveau F ;
– requalifié le contrat à durée déterminée d’usage de M. [R] [Z] en contrat à durée indéterminée ;
– condamné au paiement d’un rappel de salaire au titre de l’application du coefficient conventionnel rectifié depuis la date d’embauche outre pendant période de préavis, soit niveau cadre F, coefficient 310, en lieu et place de technicien qualifié E1 pour un montant de 11 192 euros
– condamné au paiement d’une indemnité de requalification du contrat de travail de 2 690 euros
– condamné au paiement de 2 690 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– condamné au paiement de 2 690 euros de dommages et intérêts pour irrégularité du licenciement
– condamné au paiement d’un rappel de salaires de 321,88 euros, outre 32,19 euros à titre de congés payés afférents
– condamné au paiement de la somme de 89,67 euros au titre d’un jour de congés payés
– condamné au paiement de la somme de 197,26 euros au titre de rappel de salaire des 4 et 5 janvier 2018
– condamné au paiement de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents, de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité, de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale, de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– infirmer le jugement rendu le 3 juillet 2020 par le conseil de prud’hommes de Lyon, en ce qu’il a :
– condamné la société Ecoris au paiement de la somme de 111,92 euros à titre de congés payés afférents au rappel de salaire d’un montant de 11 192 euros
– condamné la société Ecoris au paiement de la somme de 5 00 euros de dommages et intérêts pour manquement à la formation
Statuant à nouveau,
– condamner la société Ecoris au paiement de la somme de 1 119,20 euros à titre de congés payés afférents au rappel de salaire d’un montant de 11 192 euros
– condamner la société Ecoris au paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour manquement à la formation
En tout état de cause,
– condamner la société Ecoris à lui payer les sommes suivantes :
– 4 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– 1 566 € au titre d’un abondement complémentaire du plan épargne entreprise Crédit du Nord / Ecoris [Localité 5] Formation, sur la base d’un rappel de salaire de 11 192 euros
– condamner la société Ecoris aux dépens.
M. [Z] soutient que la déclaration d’appel de la société Ly Formation ne mentionne pas expressément les chefs du jugement critiqués, privant celle-ci de tout effet dévolutif.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la Cour se réfère aux dernières conclusions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile. Elle relève dès maintenant que ni la société Ly Formation, ni M. [Z] ne développent au fond un quelconque moyen à l’appui de leurs demandes de réformation des dispositions du jugement. Dès lors, il est rappelé aux parties que l’article 954 du code de procédure civile, en ses troisième et quatrième alinéas, dispose que, d’une part, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ; d’autre part, les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
1. Sur la délimitation de la saisine de la Cour
1.1 Sur l’effet dévolutif de l’acte d’appel
L’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction résultant du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et applicable au 14 août 2020, énonce que l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et ceux qui en dépendent. La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
En l’espèce, l’acte d’appel formalisé par la société Ly Formation mentionne expressément que l’appel vise le fait que le licenciement de M. [R] [Z] a été requalifié par le conseil de prud’hommes comme étant sans cause réelle et sérieuse, que des dommages et intérêts ont été octroyés pour absence de visite médicale, ainsi que des dommages et intérêts pour absence de remise de documents, « des rappels de salaires et des manquements à la formation, le reste (s’il y en a) du dispositif ».
L’appel ne tend pas à l’annulation du jugement, l’objet du litige n’est pas indivisible.
A l’analyse du dispositif du jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 3 juillet 2020 et des mentions de la déclaration d’appel, la Cour retient que la société Ly Formation lui a déféré les chefs du dispositif du jugement suivants, en ce que les premiers juges ont :
– dit que le licenciement de M. [R] [Z] est dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 2 690,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à la formation
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale.
La Cour retient que la formule finale mentionnée sur la déclaration d’appel « le reste (s’il y en a) du dispositif » ne vaut pas critique expresse d’un chef du dispositif précis et n’entraîne donc aucun effet dévolutif.
Si la déclaration d’appel vise le fait que des rappels de salaire ont été octroyés à M [Z], la société Ly Formation n’y a pas précisé le montant des rappels en cause. Ce faisant, il est impossible de déterminer si elle entendait critiquer le jugement, en ce qu’il l’a condamnée à payer à celui-ci 11 192 euros à titre de rappel de salaire, outre 111,92 euros à titre de congés payés afférents (correspondant au repositionnement du salarié au coefficient 310 – cadre niveau F), ou bien 321,88 euros titre de rappel de salaires, outre 32,16 euros à titre de congés payés afférents (correspondant à des prestations de BTS Transport). Du fait de cette imprécision, la déclaration d’appel n’emporte dévolution d’aucune de ces dispositions, qui dès lors sont définitives.
L’acte d’appel ne critique pas expressément le chef du dispositif condamnant la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 2 690 euros de dommages et intérêts pour irrégularité du licenciement. Le seul fait que l’indemnisation pour irrégularité du licenciement n’est pas cumulable avec l’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n’implique pas que le chef du dispositif du jugement statuant sur la première question dépende, au sens de l’article 562 du code de procédure civile, du chef du dispositif statuant sur la seconde. Dès lors, le chef du dispositif condamnant la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 2 690 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité du licenciement n’est pas déféré à la Cour ; la décision des premiers juges est définitive sur ce point.
L’acte d’appel ne critique pas expressément le chef du dispositif condamnant la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 2 690 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail, ni au demeurant le chef du dispositif requalifiant le contrat à durée déterminée d’usage de M. [R] [Z] en contrat à durée indéterminée. Dès lors, le chef du dispositif condamnant la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 2 690 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail n’est pas déféré à la Cour ; la décision des premiers juges est définitive sur ce point.
L’acte d’appel ne critique pas expressément le chef du dispositif repositionnant M. [R] [Z] au coefficient 310, cadre niveau F, ni celui condamnant la société Ly Formation à
payer à M. [Z] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. Dès lors, ces chefs du dispositif du jugement ne sont pas déférés à la Cour ; la décision des premiers juges est définitive sur ces points.
Dans la mesure où les dispositions du jugement du conseil de prud’hommes requalifiant le contrat à durée déterminée d’usage de M. [Z] en contrat à durée indéterminée et repositionnant celui-ci au coefficient 310, cadre niveau F, ne sont pas déférées à la Cour, le chef du dispositif du jugement condamnant la société Ecoris à payer à M. [Z] les sommes de 11 192 euros à titre de rappel de salaire et de 111,92 euros à titre de congés payés afférents, ne l’est pas non plus, en tout cas par l’appelant principal.
En effet, par la voie d’un appel incident, M. [R] [Z] a déféré à la Cour le chef du dispositif du jugement condamnant la société Ecoris à lui payer la somme de 111,92 euros à titre de congés payés afférents mais uniquement celui-ci.
1.2 Sur l’irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel
L’article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
En l’espèce, M. [R] [Z] n’a pas formulé, devant le conseil de prud’hommes, une demande tendant à voir condamner la société Ecoris à lui payer la somme de 1 566 € au titre d’un abondement complémentaire du plan épargne entreprise Crédit du Nord / Ecoris [Localité 5] Formation. Cette demande est donc nouvelle, en cause d’appel. Elle n’a pas pour finalité d’opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. Elle sera déclarée irrecevable.
Pour sa part, la société Ly Formation n’a formulé aucune demande devant le conseil de prud’hommes, dans la mesure où il a été noté que le défendeur était absent à l’audience du 29 novembre 2019 et sans conclusions déposées. Sa demande aux fins de condamner M. [Z] au remboursement du préavis indûment payé en mars 2019, pour un montant de 763,14 euros, est donc nouvelle. La société Ly Formation n’a toutefois pas demandé à ce qu’il soit prononcé compensation entre le montant ainsi réclamé et une somme d’argent dû par M. [Z]. Dès lors, au visa de l’article 564 du code de procédure civile, cette demande sera déclarée irrecevable.
2. Sur l’exécution du contrat de travail
2.1 Sur la demande relative aux congés payés afférents au rappel de salaire d’un montant de 11 920 euros
Le conseil de prud’hommes a requalifié le contrat à durée déterminée d’usage de M. [Z] en contrat à durée indéterminée et a repositionné celui-ci au coefficient 310, cadre niveau F, avant de condamner la société Ecoris à lui payer les sommes de 11 192 euros à titre de rappel de salaire et de 111,92 euros à titre de congés payés afférents.
Toutefois, le montant de l’indemnité pour les congés payés afférents étant égal à 10 % du montant du total des salaires, il convient de faire droit à la demande de M. [Z] et, infirmant le jugement , de condamner la société Ly Formation à lui payer la somme de 1 119,20 euros au titre de congés payés afférents.
2.2 Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation
Dans ses dernières conclusions, M. [Z] n’a développé aucun moyen au soutien de sa demande de condamnation de l’employeur pour manquement à l’obligation de formation, si bien que ce manquement n’est pas caractérisé. En outre, il n’allègue pas, ni ne justifie avoir subi un préjudice de ce fait, alors qu’il lui incombe de démontrer l’existence d’un tel préjudice (Cass. Soc., 3 mai 2018 – pourvoi n° 16-26.796).
Dès lors, le jugement déféré sera infirmé, en ce qu’il a condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation.
2.3 Sur la demande de dommages et intérêts pour absence de visite médicale
Dans ses dernières conclusions, M. [Z] n’a développé aucun moyen au soutien de sa demande de condamnation de l’employeur pour manquement à l’obligation d’organiser une visite médicale, si bien que ce manquement n’est pas caractérisé. En outre, il n’allègue pas, ni ne justifie avoir subi un préjudice de ce fait, alors qu’il lui incombe de démontrer l’existence d’un tel préjudice (Cass. Soc., 27 juin 2018 – pourvoi n° 17-15.438).
Le jugement déféré sera infirmé, en ce qu’il a condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale.
2.4 Sur la demande de dommages et intérêts pour remise tardive de documents
Dans ses dernières conclusions, M. [Z] n’a développé aucun moyen au soutien de sa demande de condamnation de l’employeur pour manquement à l’obligation de formation, si bien que ce manquement n’est pas caractérisé. En outre, il n’allègue pas, ni ne justifie avoir subi un préjudice de ce fait, alors qu’il lui incombe de démontrer l’existence d’un tel préjudice (Cass. Soc., 22 mars 2017 – pourvoi n° 16-12.930 ).
Le jugement déféré sera infirmé, en ce qu’il a condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents et 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité.
3. Sur la rupture du contrat de travail
3.1 Sur le bien-fondé du licenciement
En application de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d’objectivité. Elle doit être exacte. La cause sérieuse suppose une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.
Aux termes de l’article L. 1232-6 alinéa 2 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur. Ces motifs doivent être suffisamment précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n’est pas nécessaire. L’employeur est en droit, en cas de contestation, d’invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier des motifs. Si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l’article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce.
Si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l’encontre du salarié et les conséquences que l’employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.
En outre, la faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il incombe à l’employeur d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, la lettre de licenciement adressée le 26 décembre 2017 à M. [R] [Z] est rédigée dans les termes suivants :
« Nous avons décidé de vous licencier pour insuffisance professionnelle caractérisée par votre inaptitude durable à exécuter votre travail de formateur de façon satisfaisante.
(‘) Malgré votre expérience passée, vous n’avez pas été en mesure de nous fournir des sujets d’examen pour les élèves de BTS en première année dans les matières que pourtant vous auriez dû normalement maîtriser au regard de ce que vous nous avez indiqué lors de votre embauche. Là encore, nous vous venus immédiatement en aide et nous vous avons transmis des sujets déjà préparés provenant de notre école à [Localité 4], vous demandant préalablement de les ajuster réellement aux cours que vous aviez donnés à nos étudiants. Tel n’a pas été le cas et de nombreux étudiants paniqués sont venus se plaindre des difficultés rencontrées pour réaliser lesdites épreuves.
Nous avons dû également gérer les doléances de la majorité de vos élèves que ce soit en BTS première et deuxième année dans les sections AG et TPEL et également en Bachelor GARH.
Il s’avère en effet que les étudiants se plaignaient de ne pas avoir le support de cours, que lorsque ceux-ci existaient, vous leur demandiez de les télécharger sur un support numérique disponible seulement durant quelques jours, rendant ainsi les élèves, ne disposant pas d’outil informatique, incapables d’avoir accès à vos cours’ En outre, il nous a été indiqué à de très nombreuses reprises que vous transmettiez comme support de cours les publications wikipedia, ce qui nous apparaît très insuffisant comme support de cours et laissant supposer par les étudiants un manque évident de préparation des cours’
Il s’avère également que vous demandiez à vos étudiants d’apprendre sur des documents volumineux, uniquement les titres’ Or, là encore, il ne s’agit pas d’une posture pédagogique répondant aux attentes légitimes de nos étudiants, qui ont comme vous le savez un examen national à valider à la fin de leur cursus.
Il nous a également été à de nombreuses reprises rapporté que vous n’arriviez pas à répondre aux étudiants face à leurs questions, n’ayant de cesse de répéter à l’identique le cours que vous veniez de faire et que les étudiants n’avaient pas compris.
Qui plus est, les élèves sont venus se plaindre très fréquemment, insistant sur le fait que vos cours ne traitaient pas des thèmes prévus puisque l’école facilite le travail des enseignants en fournissant pour chaque matière et chaque niveau un plan de cours à suivre pour chaque séance tout au long de l’année scolaire.
Les élèves étaient angoissés du fait de l’échéance finale, paniqués également lors des partiels et mécontents de ne pas trouver un enseignant en mesure d’écouter leurs questions et surtout d’y répondre de manière claire.
Le même problème est d’ailleurs apparu lors de la réunion avec les tuteurs de nos étudiants qui, lors d’une journée au sein de nos locaux à [Localité 5] ne vous comprenaient pas, générant des tensions que vous n’avez su gérer, obligeant l’intervention d’une responsable pédagogique afin de calmer les professionnels ayant fait le déplacement.
Ces différentes situations ont créé un tel problème relationnel, que vos élèves qui venaient en cours, refusaient d’assister à vos cours et s’installaient dans une autre salle, estimant qu’ils ne perdaient plus de temps avec vous et préféraient donc travailler seul. A ma connaissance, une telle situation ne s’est jamais produite à Ecoris.
Vous comprendrez alors que cette situation ne peut plus perdurer.
Nous considérons que l’accumulation de ces faits constitue évidemment une cause réelle et sérieuse. (…) »
Dans ses dernières conclusions, la société Ly Formation ne développe aucun moyen à l’appui de sa demande d’infirmation du jugement du conseil de prud’hommes, en ce qu’il a dit que le licenciement de M. [Z] est dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société Ecoris à lui payer les sommes de 11 192 euros à titre de rappel de salaire, outre congés payés afférents et 2 690 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dès lors, ces dispositions ne pourront qu’être confirmées, sauf à rectifier que la dénomination de la société (Ly Formation, et non pas Ecoris).
4. Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
La société Ly Formation, partie perdante, sera condamné aux entiers dépens. Sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Pour un motif tiré de l’équité,la société Ly Formation sera condamnée à payer à M. [Z] 1 500 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile, s’agissant des frais irrépétibles exposés au cours de l’instance d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour
Déclare irrecevable la demande de la société Ly Formation, tendant à voir condamner M. [Z] au remboursement du préavis indûment payé en mars 2019, pour un montant de 763,14 euros ;
Déclare irrecevable la demande de M. [R] [Z] tendant à voir condamner la société Ecoris à lui payer la de 1 566 € au titre d’un abondement complémentaire du plan épargne entreprise Crédit du Nord / Ecoris [Localité 5] Formation ;
Dans la limité des dispositions du jugement qui lui sont déférées,
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon du 3 juillet 2020, en ce qu’il a dit que le licenciement de M. [R] [Z] est dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société Ly Formation à lui payer la somme de 2 690 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon du 3 juillet 2020, en ce qu’il a condamné la société Ecoris à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
– 11 192 euros à titre de rappel de salaire, ainsi que 111,92 euros à titre de congés payés afférents ;
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale ;
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation ;
– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de documents ;
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité ;
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et ajoutant,
Rejette les demandes de M. [R] [Z] en dommages et intérêts pour absence de visite médicale et en dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation ;
Rejette les demandes de M. [R] [Z] en dommages et intérêts pour remise tardive de documents et en dommages et intérêts pour remise tardive de document de portabilité ;
Condamne la société Ly Formation à payer à M. [R] [Z] 11 192 euros à titre de rappel de salaire, ainsi que 1 119,20 euros à titre de congés payés afférents ;
Condamne la société Ly Formation aux dépens de l’instance d’appel ;
Rejette la demande de la société Ly Formation en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condmne la société Ly Formation à payer à M. [R] [Z] 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,