Contrat à durée déterminée d’usage : 10 janvier 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00632

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Contrat à durée déterminée d’usage : 10 janvier 2024 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00632

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-4

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 JANVIER 2024

N° RG 22/00632

N° Portalis DBV3-V-B7G-VA6Y

AFFAIRE :

[R] [W]

C/

Société SAINT CLAIR LE TRAITEUR

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 1er février 2022 par le Conseil de Prud’hommes Formation de départage de CERGY PONTOISE

Section : C

N° RG : F 18/00518

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jean-Toussaint GIACOMO

Me Cédric GARNIER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [R] [W]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Jean-Toussaint GIACOMO de la SELARL ALTALEXIS, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0921

APPELANT

****************

Société SAINT CLAIR LE TRAITEUR

N° SIRET : 326 172 814

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Cédric GARNIER de la SELAS SELAS CS AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2149

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 9 novembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [W] a été engagé par la société Saint Clair Le Traiteur à partir du 1er septembre 2000 par contrats de travail à durée déterminée d’usage en qualité de maître d’hôtel. La dernière mission du salarié a été réalisée le 26 novembre 2018.

Cette société exerce une activité de traiteur. L’effectif de la société était, au jour de la rupture, d’au moins 11 salariés. Elle applique la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants.

Le 27 décembre 2018, M. [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise aux fins de requalification de ses contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 1er février 2022, le conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise (section Commerce) a :

– fixé à 2 030 euros bruts mensuels le salaire de référence ;

– requalifié en contrat de travail à durée indéterminée la relation de travail entre M. [W] et la SAS Saint Clair le Traiteur

– condamné la SAS Saint Clair le Traiteur à payer à M. [W] les sommes brutes qui suivent, avec intérêts à compter du 3 janvier 2019 :

.2 560 euros au titre de l’indemnité de requalification avec exécution provisoire

.10 488,33 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement

.4 060 euros au titre du préavis

.406 euros au titre des congés payés afférents au préavis

.1 970, 96 euros au titre des rappels de majorations, avec exécution provisoire

.197,10 euros au titre des congés payés afférents aux rappels de majorations, avec exécution provisoire

– condamné la SAS Saint Clair le Traiteur à payer à M. [W] les sommes qui suivent, avec intérêts à compter du présent jugement :

.15 000 euros bruts au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

.2 000 euros nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– dit que les intérêts seront capitalisés et produiront alors eux-mêmes intérêts à la fin de chaque année civile

– ordonné la remise d’une fiche de paie, d’un certificat de travail et d’une attestation Pôle Emploi, rectifiés en fonction du présent jugement

– débouté M. [W] du surplus de ses demandes ;

– condamné la SAS Saint Clair le Traiteur aux dépens ;

– débouté la SAS Saint Clair le Traiteur du surplus de ses demandes ;

– ordonné, en application de l’article L1235-4 du code du travail, le remboursement par la SAS Saint Clair le Traiteur des indemnités versées à Pôle Emploi à M. [W], dans la limite de six mois d’indemnités.

Par déclaration adressée au greffe le 28 février 2022, M. [W] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 10 octobre 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [W] demande à la cour de :

– dire et juger Monsieur [W] recevable en son appel partiel,

Y faisant droit,

– confirmer le jugement en ce qu’il a requalifié la relation de travail en relation de travail à durée indéterminée et dit la rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse lui allouant une indemnité de requalification, une indemnité de préavis, les congés payés afférents, une indemnité légale de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de toute causse réelle ni sérieuse,

– le réformer sur le quantum des sommes allouées et sur le surplus des demandes,

Statuant à nouveau ;

– fixer à 2850 euros bruts la rémunération mensuelle due à M. [W],

– condamner la société Saint Clair Le Traiteur à lui payer les sommes suivantes :

.5 700 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

. 570 euros à titre de congés payés afférents

. 15 006,75 euros à titre d’indemnité légale de licenciement (2 850/4 x 10 + 2 850/3 x 8 + 2 850 /3 x 3/12 + 2850 /3 x 17/365)

. 46 080 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

. 25 153 euros à titre de rappel de salaire sur temps plein et 2 515,30 euros au titre des congés payés afférents ; subsidiairement 23 600,66 euros à titre de rappel de salaire sur les périodes interstitielles et 2 341,5 au titre des congés payés afférents et plus subsidiairement 12 499 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de salaire

.10 741 euros à titre de rappel d’heures complémentaires et supplémentaires du 1er janvier 2016 au 26 novembre 2018 et 1 074,1 à titre de congés payés afférents

.5 000 euros au titre des repos compensateurs de remplacement

.5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée légale et conventionnelle de travail et manquement à l’obligation de sécurité de résultat

.17 100 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

.15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale régulière

.15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour mauvaise foi dans l’administration de la preuve et résistance abusive

.2 500 euros en application de l’article 700 du CPC

– ordonner la délivrance des fiches de paye, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiés conformément à la décision à intervenir

– assortir les condamnations de l’intérêt au taux légal capitalisé à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes

– condamner la société Saint clair traiteur soa aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 aout 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Saint Clair Le Traiteur demande à la cour de :

– d’infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Cergy-Pontoise en date du 2 février 2022

Et statuant à nouveau de,

A titre principal,

– débouter M. [W] de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire, en cas de requalification,

– limiter l’indemnité de requalification à la somme de 2.030 euros ;

– limiter l’indemnité de l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 4.060 euros;

– limiter l’indemnité légale de licenciement à la somme de 10.488,33 euros ;

– limiter l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 6.090euros ;

– limiter le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires accomplies par M. [W] à la somme totale de 1.970,96 euros bruts ;

– débouter M. [W] du surplus de ses demandes ;

En tout état de cause,

– condamner M. [W] à payer à la société la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

– condamner M. [W] aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur la requalification de la relation de travail

Sur la prescription

Aux termes de l’article 21 de la loi du 14 juin 2013, les dispositions réduisant les délais de prescription s’appliquent à celles qui sont en cours à compter de la promulgation de la loi, soit le 17 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit en l’espèce 5 ans.

En cas de réduction de la durée du délai de prescription, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Aux terme de l’article L.1471-1 du code du travail, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

L’action en requalification d’un contrat à durée déterminée ou de contrats à durée déterminée successifs en un contrat à durée indéterminée s’analyse en une action portant sur l’exécution du contrat de travail. Elle est donc soumise, en application de l’article L. 1471-1 du code du travail, à un délai de prescription de deux ans (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.359, FS, P+B+I).

Le point de départ du délai de prescription diffère selon le fondement de l’action. La jurisprudence institue des règles fixant le moment où le salarié a connaissance du fait qui lui permet d’exercer l’action en requalification du contrat à durée déterminée, et donc du moment où il a été en mesure de constater l’irrégularité du contrat :

– Si l’action est fondée sur la réalité du motif du recours au contrat à durée déterminée indiqué sur le contrat, le point de départ du délai de prescription est le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat (Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.359, FS, P+B+I)

– Si l’action est fondée sur l’absence d’établissement d’un écrit, le point de départ du délai de prescription est fixé à l’expiration du délai de deux jours ouvrables imparti à l’employeur pour transmettre au salarié le contrat de travail (Soc., 15 mars 2023, pourvoi n°20-21.774 , publié).

***

Au cas présent, il convient de relever que le salarié n’indique pas dans le dispositif de ses conclusions à partir de quelle date il sollicite la requalification de son contrat de travail, l’employeur indiquant seulement, page 11, dans la partie ‘ rejet de la demande de requalification des contrats de travail’, que ‘les contrats d’usage sont prescrits antérieurement au 31 décembre 2016 ( saisine du 31 décembre 2018)’, le dispositif de ses écritures ne demandant pas l’infirmation du jugement en ce qu’il n’a pas retenu la prescription de l’action pour la période antérieure au 31 décembre 2016.

Le salarié produit des bulletins de paye entre le 1er octobre 2000 et le 30 juin 2001, les bulletins des mois de décembre 2014 et 2015 puis les bulletins de chaque mois à compter du 1er janvier 2016. Il fonde sa demande de requalification sur le motif du recours aux CDD et/ ou l’absence d’établissement d’un écrit à compter du 9 décembre 2015 outre plusieurs vacations à compter de cette date.

Dans ces conditions, la cour, à qui il appartient de déterminer si la demande de requalification des contrats d’usage conclus avant le 31 décembre 2016 est prescrite, relève que le salarié justifie de l’existence d’une relation de travail, ce qui n’est pas contredit par l’employeur, à compter du 14 novembre 2014 jusqu’au 11 décembre 2014 (cf bulletin de paye de décembre 2014 et attestation pôle emploi), puis du 17 novembre 2015 au 26 novembre 2018.

Ainsi, le salarié justifie avoir travaillé depuis le 14 novembre 2014 et il résulte de l’examen des contrats et bulletins de paie versés aux débats que les missions du salarié se sont succédées avec des périodes d’interruption plus ou moins longues sans jamais qu’il ne s’écoule plus de deux ans entre deux contrats.

Il s’ensuit qu’aucune prescription n’est encourue dès lors que le dernier contrat est arrivé à terme le 26 novembre 2018 et que le salarié a introduit son action devant le conseil de prud’hommes le 27 décembre 2018.

Le salarié est donc recevable à demander la requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée, depuis le 14 novembre 2014, et non à compter du 31 décembre 2016 comme l’indique l’employeur.

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Le salarié expose que son emploi au sein de la société Saint Clair Le Traiteur a répondu à un besoin permanent et qu’elle était amenée à employer des maîtres d’Hôtel en toute saison.

Il indique que la permanence de son emploi se déduit également des périodes d’emploi révélées par le simple examen de ses fiches de paie et selon lesquels il apparaît qu’il travaillait régulièrement tout au long de l’année, que son salaire était mensualisé. Le salarié ajoute que l’employeur ne produit pas les 387 contrats qu’il a conclus avec lui, lesdits contrats n’étant jamais remis aux salariés.

L’employeur réplique qu’il justifie que l’activité de la société de traiteur haut de gamme est particulièrement fluctuante d’une semaine à l’autre et même d’un jour à l’autre sans que ces variations d’activité ne soient prévisibles longtemps à l’avance et que c’est donc le nombre d’affaires qui conditionne le recours à des salariés extras de sorte qu’aucune régularité ne peut être relevée et que la société ne peut que recourir à l’embauche de salariés Extra. Il précise que le caractère non permanent du poste occupé est également attesté par le fait qu’aucune régularité ne peut être trouvée dans les jours travaillés par le salarié d’un mois sur l’autre et que la durée de 60 vacations par trimestre civil a été respectée par la société.

Il ajoute produire pour les 2 dernières années de collaboration non prescrites, 2017 et 2018, un contrat de travail par mois travaillé et qu’en réalité, le salarié se voyait systématiquement remettre en main propre son contrat après signature, la jurisprudence invoquée par le salarié à ce titre ayant été totalement invalidée par le législateur de sorte que l’obligation de remise du CDD au salarié n’est plus sanctionnée par la requalification.

**

En vertu des articles L. 122-1, L. 122-1-1, L. 122-3-13, 1er alinéa, et D. 121-2 du code du travail, devenus les articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1 et D.1242-1 du même code dans leur rédaction successive applicable au litige , un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans des cas déterminés par la loi et doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif, à défaut de quoi il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

L’hôtellerie et la restauration sont des secteurs d’activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, en application des dispositions des articles L.1251-6 et D.1251-1 du code du travail.

S’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du même code, que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive n° 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.( Soc., 4 décembre 2019, pourvoi n° 18-11.989, publié).

Aux termes de l’article 14 de la convention collective des hôtels, cafés, restaurants, « l’emploi d’extra qui par nature est temporaire est régi par les dispositions légales en vigueur. Un extra est engagé pour la durée nécessaire à la réalisation de la mission. Il peut être appelé à être occupé dans un établissement quelques heures, une journée entière ou plusieurs journées consécutives dans les limites des durées définies par l’article 21-2c. Un extra qui se verrait confier par un même établissement des missions pendant plus de soixante jours dans un trimestre civil pourrait demander la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée.(…)».

Enfin, le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier. ( Soc., 29 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.359).

Il ressort du dossier que l’employeur ne produit pas tous les contrats d’usage conclus entre le 9 décembre 2015 et le 21 décembre 2016, pour lesquels le salarié produit des bulletins de paie, seuls les contrats à compter du 5 janvier 2017 étant produits aux débats.

Dès lors, en l’absence de contrat écrit pour une partie de la relation contractuelle, l’employeur ne peut écarter la présomption légale instituée par l’article L. 1242-12.

En conséquence, à défaut de contrat écrit, la relation de travail était donc nécessairement, dès le 9 décembre 2015, à durée indéterminée.

La relation de travail doit en conséquence être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, ainsi que l’ont retenu à juste titre les premiers juges.

En outre, le salarié a travaillé comme suivant de 2016 à 2018 :

2016

– Janvier : 81 heures ;

– Février : 151 heures ;

– Mars : 136 heures ;

– Avril : 116 heures ;

– Mai : 96 heures ;

– Juin : 136 heures ;

– Juillet : 81 heures ;

– Aout : 11 heures ;

– Septembre : 104 heures ;

– Octobre : 272 heures ;

– Novembre : 50 heures ;

– Décembre : 88 heures.

2017

– Janvier : 114 heures ;

– Février : 144 heures ;

– Mars : 105 heures ;

– Avril : 61 heures ;

– Mai : 0 heures ;

– Juin : 71 heures ;

– Juillet : 95 heures ;

– Aout : 38 heures ;

– Septembre : 92 heures ;

– Octobre : 115 heures ;

– Novembre : 136 heures ;

– Décembre : 124 heures.

2018

– Janvier : 75 heures ;

– Février : 86 heures ;

– Mars : 157 heures ;

– Avril : 72 heures ;

– Mai : 114 heures ;

– Juin : 126 heures ;

– Juillet : 54 heures ;

– Aout : 29 heures ;

– Septembre : 33 heures ;

– Octobre : 109 heures ;

– Novembre : 169 heures.

Ainsi, le salarié a travaillé, à l’exception du mois de mai 2017, tous les mois de l’année, à plusieurs reprises à temps complet, voire davantage et ce sous le régime de contrat à durée déterminée, l’employeur ayant fait appel régulièrement à ses services, chaque mois, pour exercer la même activité, à plusieurs reprises pour une durée allant jusque 20 jours ouvrés de travail par mois, le contrat d’extra indiquant toujours le même motif : ‘ pour occuper l’emploi de Resonsable Ech 1 en application de l’article L.1242-23) du code du travail’ .

Certes, il convient de relever le caractère irrégulier du nombre de jours travaillés par mois mais une récurrence dans l’organisation du travail d’année en année.

Le salarié n’a également jamais travaillé plus de 60 jours dans un trimestre civil mais il a travaillé à six reprises au moins 40 jours sur un même trimestre sur les douze trimestres concernés entre 2016 et 2018.

En outre, le salarié a toujours occupé un emploi qualifié dont le caractère saisonnier n’est pas rapporté de sorte que ses missions ne revêtaient un caractère ni exceptionnel ni saisonnier.

Si l’employeur soutient que le salarié était recruté en qualité d’extra uniquement lors de pics d’activité afin de renforcer, sur les mêmes postes, des équipes permanentes, il ne l’établit pas.

En exerçant de nombreuses missions par mois et ce à plusieurs reprises chaque année, le salarié a occupé un poste régulier l’amenant à travailler plusieurs jours d’affilée. Dès lors, par son objet et sa nature, l’emploi du salarié est devenu objectivement indispensable à l’activité normale et permanente de la société Saint Clair Le Traiteur compte tenu de la régularité des missions, de leur caractère continu et de leur importance sur une très longue période.

L’employeur ne justifie donc pas, par l’existence d’éléments concrets et précis, du caractère par nature temporaire de l’emploi de maître d’hôtel occupé par le salarié.

En conséquence il sera fait droit à la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, et le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, la cour ajoutant que la requalification intervient à compter du 14 novembre 2014 jusqu’au 28 novembre 2018.

Sur les conséquences financières de la requalification

Les parties sont en discussion sur la référence salariale applicable. Le salarié sollicite que la rémunération mensuelle soit fixée à la somme de 2 850 euros bruts mais indique en page 2 de ses conclusions que la moyenne des douze dernières rémunérations s’élève à la somme de 2 053 euros de novembre 2017 à octobre 2018 tandis que l’employeur fixe la moyenne des salaires sur les douze mois civils précédents le dernier contrat , soit également de novembre 2017 à octobre 2018 à la somme de 2 030 euros bruts comme retenue par les premiers juges.

Après examen des bulletins de paye, la moyenne sur les douze derniers mois travaillés complets s’élève à la somme de 2 030 euros.

Sur l’indemnité de requalification

En application de l’article L. 1245-2 alinéa 2, lorsqu’il est fait droit à la demande de requalification du salarié, il lui est accordé une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

L’indemnité de requalification étant au moins égale à un mois de salaire, elle doit être calculée en tenant compte des heures supplémentaires accomplies par le salarié. Mais l’indemnité de fin de contrat, destinée à compenser la précarité du salarié, n’est pas intégrée dans le calcul des salaires moyens de telle sorte qu’il n’y a pas lieu d’en tenir compte dans le calcul de l’indemnité de requalification. Le montant minimum de l’indemnité de requalification est calculé selon la dernière moyenne de salaire mensuel.

En l’espèce, les premiers juges ont condamné l’employeur au paiement d’une indemnité de requalification qui s’élève à la somme de 2 560 euros dont le salarié sollicite la confirmation et que la cour retient également au vu de la durée de la relation contractuelle, l’employeur n’établissant pas à titre subsidiaire que le jugement est entaché d’une erreur matérielle sur le montant de l’indemnité de requalification.

Par voie de confirmation du jugement, l’employeur sera condamné à verser au salarié la somme de 2 560 euros au titre de l’indemnité de requalification.

Sur ‘le rappel de salaire à temps plein’

Le salarié forme à titre principal une demande de rappel de salaire sur la base d’un temps plein, à titre subsidiaire une demande de rappel de salaire sur les périodes interstitielles, et, à titre très subsidiaire, une demande de dommages-intérêts pour perte de salaire.

La cour relève que la demande de rappel de salaire s’analyse en réalité d’abord en une demande de requalification du contrat de travail à temps plein puis d’une demande en paiement des périodes interstitielles.

Sur la requalification du contrat à temps plein

Aux termes de l’article L. 3123-14 du code du travail devenu L.3123-06 à compter du 10 août 2016, le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.

Le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps plein ( Soc., 23 novembre 2016, pourvoi n° 15-18.093, publié).

Il incombe alors à l’employeur de rapporter la preuve que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ( Soc., 12 mai 2015, pourvoi n° 14-10.623, publié).

Pour renverser cette présomption, l’employeur a donc une double preuve à rapporter.

Au cas présent, il a été précédemment relevé que l’employeur ne justifie pas de contrat de travail écrit sur une partie de la relation contractuelle de sorte que la requalification du contrat à temps plein est encourue.

Le salarié invoque l’imprévisibilité du rythme de travail, l’obligation de se tenir en permanence à la disposition de l’employeur, ce que ce dernier conteste.

L’employeur ne produit aucune pièce relative à l’activité du salarié lui permettant de prévoir à quel rythme il devait travailler, le salarié communiquant l’attestation de M. [B], salarié de la société Saint Clair Le Traiteur pendant plusieurs années, qui relate que les salariés étaient prévenus par le service du planning de la société de leur organisation de travail le vendredi pour le lundi suivant. M. [E] qui a travaillé pendant une ‘ dizaine d’années’ avec le salarié, témoigne également qu’il fallait rester ‘ disponible 7 jours sur 7 au cas où!’.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 28 novembre 2018, le salarié a d’ailleurs dénoncé cette situation à l’employeur en indiquant avoir accepté des missions ‘du jour au lendemain’, de sorte que l’imprévisibilité du rythme de travail alléguée par le salarié est établie.

Si le salarié a travaillé pour d’autres employeurs, il ressort des déclarations de revenus du salarié que ce n’est que de manière marginale. Il a ainsi perçu :

– un salaire annuel de 22 935 euros par la société Saint Clair Le Traiteur et de 2 476 euros par d’autres employeurs en 2016,

– un salaire annuel de 18 297 euros par la société Saint Clair Le Traiteur et de 1 651 euros par d’autres employeurs en 2017.

Si le salarié a fait part de son indisponibilité à l’employeur en 2017 et 2018, il invoque à chaque fois dans ses courriels la naissance d’un de ses enfants, la maladie de sa fille, la santé de son épouse, et une convocation à une visite médicale.

Mais surtout, l’employeur ne justifie pas que le salarié ne se tenait pas en permanence à sa disposition alors qu’aucun contrat n’est produit au titre de l’année 2016 au cours de laquelle il a effectué 1322 heures annuelles (soit en moyenne 110 heures mensuelles), aucun planning communiqué à l’avance, à l’exception de celui du mois d’août 2017 adressé au salarié le 18 juillet 2017.

La cour relève enfin qu’à plusieurs reprises, le salarié a travaillé à temps complet ou quasiment à temps complet (les mois de février , mars et octobre 2016- février et novembre 2017- mars, juin et novembre 2018).

L’employeur ne démontre donc pas que le salarié n’était pas dans l’obligation de se tenir en permanence à sa disposition.

Dès lors, il convient de requalifier le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein.

Sur les conséquences financières de la requalification à temps plein pendant les périodes interstitielles

Le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail. (Soc., 22 septembre 2010, pourvoi n° 09-42.344).

La charge de la preuve qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pendant les périodes interstitielles repose sur le salarié (Soc.,16 sept. 2015, n°14-16.277 ; Soc., 2 juin 2021, n° 19-16.183).

Par ailleurs, la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée du travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat. Réciproquement, la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations relatives à la durée du travail (Soc., 7 septembre 2017, pourvoi n° 16-16.643, publié).

Le calcul des rappels de salaire doit intervenir en tenant compte de la réalité de la situation de chaque période interstitielle telle que résultant de chacun des contrats à durée déterminée l’ayant précédée.

En l’espèce, le contrat de travail a été précédemment requalifié à temps complet et par les éléments qu’il a communiqués et que la cour a retenus, le salarié établit qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pendant les périodes interstitielles de sorte qu’il sera fait droit à la demande de rappel de salaire dont il convient de déterminer le montant, étant rappelé que le salarié a travaillé également plusieurs mois à temps complet.

Le salarié produit un décompte du rappel de salaire sur la base d’un salaire mensuel moyen qui s’élève à 2 560 euros, la cour ayant précédemment retenu la somme de 2 030 euros, ce qui ramène le calcul du salarié à la somme totale de 6 603 euros ( cf 2560 – 2 030 = 530 euros à déduire sur 35 mois = 18 550 euros de janvier 2016 à novembre 2018), somme non utilement contestée par l’employeur qui n’apporte aucun décomptealternatif.

Il convient donc, infirmant le jugement, de condamner l’employeur à verser au salarié les sommes de 6 603 euros bruts outre 660,30 euros bruts de congés payés afférents de rappel de salaire au titre d’un contrat à temps plein.

Sur la rupture du contrat de travail

L’employeur, qui, à l’expiration d’un contrat de travail à durée déterminée ultérieurement requalifié en contrat à durée indéterminée, ne fournit plus de travail et ne paie plus les salaires, est responsable de la rupture. Celle-ci s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Soc., 23 janvier 2019, pourvoi n° 17-14.327).

Lorsqu’un contrat de travail à durée déterminée est requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée, la rupture du contrat par la seule survenance de l’échéance du terme s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au cas présent, la relation contractuelle s’est achevée le 26 novembre 2018 par l’effet du dernier contrat d’usage.

La requalification des contrats de travail dits d’extras en contrat à durée indéterminée conduit à analyser la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera donc confirmé.

Les dispositions de l’article L. 1235-3, dans sa rédaction applicable au litige, issue de l’ordonnance du 22 septembre 2017, octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l’ancienneté du salarié.

Le salarié, qui n’a pas demandé de voir écarté l’application du barème, indique qu’il comptait plus de deux années d’ancienneté au 26 novembre 2018 sans davantage d’explication. Il sollicite une indemnité de 46 080 euros calculée d’après un salaire de référence qui s’élève à 2 850 euros, soit 16,16 mois de salaire, ce qui correspond à 21 ans d’ancienneté en application du barème, ce qui n’est pas le cas même si l’on considère que le salarié a produit des bulletins de paye en 2000 et 2001puis en fin d’année 2014 pour mémoire.

Pour sa part, à titre subsidiaire, l’employeurévalue l’indemnité due à trois mois de salaire.

Sachant que le salarié ne revendique précisément aucune ancienneté, que le contrat est requalifié à durée indéterminée à compter du 14 novembre 2014, cette date est retenue pour déterminer le point de départ de la relation contractuelle jusqu’au 26 novembre 2018 de sorte qu’ayant acquis une ancienneté de quatre années au moment de la rupture dans la société employant habituellement au moins onze salariés, le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre trois et cinq mois de salaire.

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié ( 2 030 euros bruts), de son âge (36 ans), de son ancienneté, de ce qu’il justifie avoir perçu des allocations Pôle Emploi en 2019 et 2020 puis créé une entreprise en exploitation directe en 2020, il y a lieu de condamner l’employeur à lui payer la somme de 10 000 euros bruts à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est infirmé de ce chef.

Le salarié est également en droit de percevoir l’indemnité compensatrice de préavis et l’indemnité légale de licenciement calculées sur la base d’un salaire moyen à temps complet qui s’élève à la somme de 2 030 euros, comme l’ont décidé les premiers juges. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à verser au salarié les sommes respectives de 4 060 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 406 euros de congés payés afférents, et de 10 488,33 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement.

Enfin, il convient en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, dont les dispositions d’ordre public sont dans le débat, d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de trois mois d’indemnités.

Sur les heures supplémentaires

Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences des dispositions légales et réglementaires applicables.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Au soutien de ses demandes, le salarié revendique la avoir effectué des heures supplémentaires au delà de la durée hebdomadaire de 35 heures de travail et il produit les pièces suivantes :

– la lettre du 30 novembre 2018 que le salarié a adressé à employeur pour lui faire part de sa situation et demandé le paiement des heures supplémentaires accomplies ainsi que l’indemnisation du préjudice subi du fait de la diminution continue de son travail,

– le décompte par semaine des ses heures,

– des feuilles de temps éditées par l’employeur et annexées aux fiches de paye,

– les attestations destinées à Pôle Emploi de certaines fiches de paye,

– les bulletins de paye sur lesquelles sont mentionnées les primes exceptionnelles versées au moment du salon de l’Auto,

– des feuilles de planning de travail de salariés dont avec mention des horaires de 4h à 20h ou 5h à 20h pour M. [W] durant trois vacations,

– les attestations de M. [K], M. [B], M. [P], M. [H], M. [E].

Ces éléments sont suffisamment précis et permettent à l’employeur de répliquer.

Pour sa part, l’employeur produit un tableau du temps de travail réalisé par le salarié par semaine ‘ sur la base des fiches récapitulatives des heures réalisées’ par le salarié par mois et considère que le décompte du salarié est fantaisiste.

En effet, l’employeur relève des incohérences dans ce tableau en ce que le salarié indique avoir réalisé 1351 heures supplémentaires à 50% en semaine 41 en 2016, la cour relevant que cette situation, la réalisation d’heures au-delà de la durée hebdomadaire totale d’une semaine de sept jour, se reproduit à plusieurs reprises ( semaine 40 en 2016- semaine 25 en 2017).

En outre, le tableau du salarié ne détaille pas les heures réalisées par jour et ne présente qu’un comptage hebdomadaire de sorte que cumul des heures n’est pas vérifiable comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges.

Certes, l’employeur ne produit pas les feuilles d’émargement mentionnant les heures de travail réelles que deux témoins, M. [K] et M. [P], indiquent avoir signées à la fin de chaque vacation en dépit des demandes de sommation du salarié, lequel n’a toutefois pas engagé de procédure pour obtenir la communication des pièces réclamées.

Toutefois, sachant que le tableau du salarié, très complexe à analyser, comporte des erreurs importantes, le décompte produit par l’employeur pour les années 2016 à 2018 sera donc retenu en ce que le salarié a accompli les heures supplémentaires ouvrant droit à paiement suivant ce calcul :

Par ailleurs, le salarié a accompli 221 heures supplémentaires en 2016, 97 heures supplémentaires en 2017 et 65 en 2017 selon la ventilation suivante :

-128 heures à 10%

– 89 heures à 20%

– 166 heures à 50%

‘Heures à majorées à 10% : la majoration s’élève à 1,735euros par heure, soit 128 h x 1,735 = 222,08 euros bruts ;

‘ Heures majorées à 20% : la majoration s’élève à 3,47euros par heure, soit 89 x 3,47 = 308,83 euros bruts ;

‘ Heures majorées à 50% : la majoration s’élève à 8,675euros par heure, soit 166 x 8,675 = 1 440,05 euros bruts.

Total = 1 970,96 euros bruts.

En conséquence, par voie de confirmation du jugement, il convient condamner l’employeur à verser au salarié au titre du rappel de salaire sur les heures supplémentaires la somme de 1 970,96 euros bruts, outre 197,09 euros de congés payés afférents.

Sur les repos compensateurs

Le salarié sollicite la condamnation de l’employeur au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des repos compensateurs sans apporter d’éléments sur les modalités observées pour déterminer cette somme, l’employeur contestant la demande.

Selon les dispositions de la convention collective applicable, le contingent annuel d’heures supplémentaires ouvrant droit à repos compensateurs est fixé à ‘360 heures par an pour les établissements permanents’.

La cour relève que le salarié qui a réalisé 221 heures supplémentaires en 2016, 97 heures en 2017 et 65 en 2017 ne peut prétendre à l’indemnisation sollicitée et la décision des premiers juges est donc confirmée.

Sur les dommages-intérêts pour non-respect de la durée légale et conventionnelle de travail

Aux termes de l’article L. 3131-1 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 10 août 2016, tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3131-2 et L. 3131-3 ou en cas d’urgence, dans des conditions déterminées par décret.

Il est constant que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation. (Soc., 26 janvier 2022, pourvoi n° 20-21.636, publié).

Le salarié justifie par la communication du planning établi par l’employeur qu’il a travaillé au-delà de la durée légale de travail à deux reprises pendant un salon, l’employeur ne le contestant pas (pièce n° 12 du salarié).

Ce non-respect du temps de repos quotidien, même sur une courte période, est de nature à induire fatigue et stress supplémentaire pour le salarié, qui occupait un emploi qui nécessitait une très longue période en station debout comme cela résulte des témoignages, qui sera réparé par la somme sollicitée de 500 euros, au paiement de laquelle, par voie d’infirmation, il convient de condamner l’employeur.

Sur le travail dissimulé

L’article L. 8221-5 du code du travail dispose qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L’article L. 8223-1 dispose qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le salarié invoque des heures non déclarées, une dissimulation généralisée à d’autres salariés et une dissimulation pendant toute la durée de la relation contractuelle.

Il n’est pas établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, omis de mentionner sur les bulletins de salaire les heures réellement effectuées par son salarié ou de respecter ses obligations déclaratives pour tout ou partie de l’activité du salarié, étant précisé que le calcul des heures est également la conséquence de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein auquel l’employeur ne se considérait pas lié.

Le salarié sera en conséquence débouté de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé sur le fondement de l’article L. 8223-1 du code du travail, le jugement étant donc confirmé de ce chef.

Sur les dommages-intérêts pour défaut de visite médiale régulière

L’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond (Soc., 13 avril 2016, pourvoi n° 14-28.293, Bull. 2016, V, n° 72).

Il n’est pas contesté que le salarié n’a pas bénéficié d’une visite médicale périodique sur la période que la cour détermine débuter en décembre 2014, faute pour le salarié de n’avoir produit aucune pièce relatives aux années précédentes.

En cas d’absence de visite médicale périodique, il appartient au salarié de justifier de l’existence d’un préjudice.

Si le salarié se prévaut d’un accident du travail en mai 2014 dont il ne justifie pas, d’une charge importante de travail pendant les vacations dont témoignent plusieurs salariés, il n’apporte aucun élément sur le préjudice résultant pour lui des manquements de l’employeur.

Par voie de confirmation du jugement, le salarié sera débouté de sa demande, faute de démonstration de son préjudice.

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive

Le salarié invoque l’absence de bonne foi de l’employeur dans l’exécution de ses obligations et soutient qu’il a délibérément fait obstacle à la manifestation de la vérité tout en contestant tout dépassement d’horaire.

Toutefois, l’employeur a présenté à titre subsidiaire le calcul des sommes dues au salarié pour paiement des heures supplémentaires et le salarié, qui a sollicité la communication de pièces n’a introduit aucune action pour ce faire.

En outre, il n’est justifié d’aucun préjudice à ce titre, la cour ayant au contraire fait droit en partie aux demandes du salarié. Cette demande sera également rejetée par voie de confirmation du jugement.

Sur les intérêts

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d’orientation et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du jugement en cas de confirmation des condamnation et du présent arrêt pour le surplus.

Les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite.

Sur la demandes de remise des documents de fin de contrat

Il y a lieu d’ordonner la remise d’un certificat de travail d’une attestation Pôle emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

L’employeur succombant, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Il conviendra de condamner l’employeur aux dépens d’appel et à payer au salarié une indemnité de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, l’employeur étant débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

CONFIRME le jugement, mais seulement en ce qu’il condamne la société Saint Clair Le Traiteur à payer à M. [W] les sommes de 2 560 euros au titre de l’indemnité de requalification, de 10 488,33 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement, de 4 060 euros au titre du préavis outre 406 euros de congés payés afférents, de 1 970, 96 euros au titre des rappels d’heures supplémentaires outre 197,09 de congés payés afférents, en ce qu’il déboute M. [W] de sa demande au titre des repos compensateurs, d’indemnité pour travail dissimulé, de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale et résistance abusive, en ce qu’il condamne la société Saint Clair Le Traiteur à verser la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens et en ce qu’il déboute société Saint Clair Le Traiteur de ses demandes à ce titre,

L’INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société Saint Clair Le Traiteur à verser à M. [W] les sommes suivantes :

– 6 603 euros bruts de rappel de salaire sur un contrat à temps plein,

– 660,30 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 10 000 euros bruts à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 500 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la durée légale et conventionnelle de travail,

DIT que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d’orientation et les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du jugement s’agissant de la créance indemnitaire confirmée par la cour et de la présente décision pour la créance indemnitaier relative au non-respect de la durée légale de travail,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

ORDONNE d’office le remboursement par la société Saint Clair Le Traiteur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies à M. [W] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de trois mois d’indemnités,

ORDONNE la remise par la société Saint Clair Le Traiteur à M. [W] des documents sociaux conformes à la présente décision,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Saint Clair Le Traiteur à payer à M. [W] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et déboute l’employeur de sa demande fondée sur ce texte,

CONDAMNE la société Saint Clair Le Traiteur aux dépens d’appel .

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président

 


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