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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 17 JANVIER 2024
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/03027 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDNV5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mars 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRÉTEIL – RG n° 19/01112
APPELANTE
S.A. SET UP , prise en la personne de son réprésentant légal
N° SIRET : 405 166 554
[Adresse 6]
[Localité 10]
Représentée par Me Stéphane HASBANIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0398
INTIME – APPELANT INCIDENT
Monsieur [I] [Z]
Né le 5 juin 1965
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Anne LELEU-ÉTÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : B745
INTME
Association AGS CGEA ILE DE FRANCE EST
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Jean-charles GANCIA, avocat au barreau de PARIS
PARTIES INTERVENANTES
S.A.S. [U] prise en la personne de Me [C] [U] en sa qualité de liquidateur judiciiare de la SA SET UP
[Adresse 4]
[Localité 9]
Représentée par Me Stéphane HASBANIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0398
S.E.L.A.S. BL & ASSOCIES, prise en la personne de Me [E] [O] ne sa qualité d’administrateur judiciaire de la SA SET UP
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Stéphane HASBANIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0398
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne MENARD, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Anne MENARD, présidente
Fabienne ROUGE, présidente
Véronique MARMORAT, présidente
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Anne MENARD, Présidente de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
EXPOSE DU LITIGE :
La société Set Up a une activité de conception et de fabrication de décors, notamment pour la secteur de l’audiovisuel et de l’événementiel.
Depuis l’année 1996, monsieur [Z] a régulièrement travaillé pour la société.
Il a été engagé par contrat à durée indéterminée le 1er juillet 2011.
Il a été licencié pour faute le 27 décembre 2018, en raison de malfaçons et manquements constatés sur un chantier, d’une attitude agressive et méprisante à l’encontre des autres salariés de l’entreprise, et du défaut de suivi des directives.
Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil le 1er août 2019.
Par jugement en date du 11 mars 2021, le conseil a :
– dit que la date d’entrée de monsieur [Z] au sein de la société est le 21 août 1996
– fixé la créance de monsieur [Z] au passif de la société aux sommes suivantes :
30.099,42 euros à titre de complément d’indemnité conventionnelle de licenciement,
65.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
1.300 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonné la remise par maître [P] de documents sociaux rectifiés ;
– condamné monsieur [Z] au paiement de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l’écrasement des données de son ordinateur portable professionnel, et ordonné la compensation ;
– déclaré le jugement opposable à l’ AGS CGEA IDF Est.
La société Set Up et maître [P] en qualité de commissaire à l’exécution du plan ont interjeté appel de cette décision le 24 mars 2021.
La société Set Up a été placée en liquidation judiciaire le 22 février 2023 et maître [U] est intervenu en qualité de mandataire liquidateur.
Par conclusions récapitulatives du 19 septembre 2023, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, maître [U] en qualité de mandataire liquidateur de la société Set Up et maître [P] demandent à la cour de mettre hors de cause monsieur [P] en qualité de commissaire à l’exécution du plan, d’infirmer le jugement, de débouter monsieur [Z] de toutes ses demandes, et de le condamner au paiement de la somme de 20.000 euros en raison du préjudice résultant de l’écrasement des données de son ordinateur, et de celle de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives du 13 septembre 2023, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [Z] demande à la cour de confirmer le jugement sur la date d’entrée dans les effectifs de la société, sur le rappel d’indemnité de licenciement, et en ce qu’il a dit que le licenciement n’avait pas de cause réelle et sérieuse.
Il sollicite l’infirmation pour le surplus, de débouté de la demande reconventionnelle au titre des données écrasées, et la fixation au passif de la société Set Up des sommes suivantes :
71.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
1663,62 euros au titre des intérêts légaux ;
2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives du 25 septembre 2023, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l’AGS demande à la cour d’infirmer le jugement sur les condamnations prononcées, de débouter le salarié de ses demandes, subsidiairement de limiter le montant des dommages et intérêts à la somme de 12.914,61 euros, et en tout état de cause de dire que sa garantie s’exercera dans les limites et plafonds légaux.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
– Sur l’ancienneté de monsieur [Z]
Monsieur [Z] fait valoir qu’il a commencé à travailler pour la société Set Up le 21 août 1996, et a effectué des travaux pour son compte dans le cadre de contrats à durée déterminée d’usage à intervalles réguliers depuis cette date. Les périodes travaillées sont reprises de manière précise dans le jugement, ce qui permet de constater qu’elles ne sont nullement continues. L’employeur produit les contrats et les documents de fin de contrat des années 2010 et 2011.
Monsieur [Z] ne sollicite pas la requalification des contrats à durée déterminée d’usage, et ne vise pas de fondement juridique à sa demande tendant à voir fixer sa date d’embauche au 21 août 1996.
Aux termes de l’article L1243-11 du code du travail, lorsque la relation contractuelle de travail se poursuite après l’échéance du terme du contrat à durée déterminée, celui-ci devient un contrat à durée indéterminée. Le salarié conserve l’ancienneté qu’il avait acquise au terme du contrat de travail à durée déterminée.
En l’espèce, le contrat à durée indéterminée n’a pas directement succédé à une série de contrats à durée déterminée, mais il y a eu de très nombreuses interruptions, de sorte que le jugement sera infirmé en ce qu’il a tenu compte de l’ancienneté totale de monsieur [Z], et a fait droit à sa demande de complément d’indemnité de licenciement.
– Sur le licenciement
Aux termes des dispositions de l’article L 1232-1 du Code du travail, tout licenciement motivé dans les conditions prévues par ce code doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; en vertu des dispositions de l’article L 1235-1 du même code, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Par application des dispositions de l’article L 1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur ; la motivation de cette lettre, précisée le cas échéant dans les conditions prévues par les articles L1235-2 et R1232-13 du même code, fixe les limites du litige.
En l’espèce, la lettre de licenciement est motivée dans les termes suivants :
‘Tu es employé au sein de notre entreprise depuis le 1er juillet 2011 et occupe le poste de chef d’atelier de décors, statut cadre.
A ce titre, tu as la responsabilité de préparer, suivre et mener à bon terme les chantiers qui te sont confiés.
Notre attente impérieuse est plus que jamais depuis ces 3 dernières années la satisfaction des clients et la préservation des moyens de SET UP.
Or, nous avons été contraints de constater la persistance de graves problèmes dans l’exécution de tes missions.
Premier grief : Malfaçons et manquements sur le chantier [K] [W]
Nous rappelons à titre préalable que tu étais en charge et avais la responsabilité du dossier [K] [W] dont la mise en place a eu lieu début novembre 2018 et que tu es parti en vacances au soir du chantier sans rien signaler d’anormal.
Or, la société a eu la surprise de recevoir le 7 novembre 2018 un appel outré du client faisant état de graves problèmes quant à la « qualité » de nos prestations au point de nous menacer de ne pas nous payer et de cesser dans l’avenir toute collaboration avec SET UP.
Cette situation a nécessité, outre de faire appel à nos bonnes relations passées et à des trésors de diplomatie, l’envoi en urgence et en ton absence de [B] [M], lequel a constaté le bien-fondé des réclamations du client.
Nous avons ainsi été contraints d’effectuer de nombreuses heures de reprise ce qui a désorganisé nos équipes et surtout généré un surcoût non refacturable au client.
Évidemment, notre image de marque auprès de [K] [W], client particulièrement prestigieux et important, est à présent atteinte alors même que SET UP ne cesse de batailler pour trouver de nouveaux débouchés en dehors du secteur de l’audiovisuel et notamment accroître son chiffre d’affaires dans l’aménagement de boutiques.
Je t’ai interrogé pour avoir ta position sur cette situation et, suite à ta réponse par mail du 14 novembre 2018, ai ensuite mené mon enquête pour tirer les choses au clair.
Il en est résulté les constats suivants :
1° ) des travaux inutiles ont à nouveau été effectués sur ce chantier, d’abord en amont de son installation en raison de plans ou de demandes modifiés par toi en cours de fabrication, puis du fait des erreurs commises durant la mise en place.
Or, nous avions alerté en mai 2016 l’ensemble de l’encadrement sur la situation difficile de l’entreprise et la nécessité de préserver et mieux exploiter notre outil de production et nos ressources humaines et matérielles, et de prendre enfin en compte le fait que l’entreprise ne pouvait plus se permettre d’assumer des dépenses et coûts injustifiés.
Ce message était collectif mais te concernait naturellement également : tu t’étais d’ailleurs senti seul visé et publiquement mis en cause.
Malgré cela, en dépit des mises en garde et discussions réitérées qui ont suivi, et du sérieux et de la précision que nous sommes en droit d’attendre d’un cadre expérimenté, ton travail amène toujours régulièrement à la réalisation par les salariés de l’entreprise, souvent dans l’urgence, de travaux inutiles du fait de plans absents, imprécis ou inexacts.
A chaque fois, ceci génère des surcoûts non répercutables et désorganise nos services.
Nous pensons notamment à l’Expo Design {décembre 2017), à la fabrication des bureaux de Radio France (juillet 2018) mais il y en a d’autres (Equipe 21, TPMP, Les Enfants de la télé…). Le chantier [K] [W] en constitue donc une énième illustration d’un défaut dans l’exécution de tes obligations professionnelles (préparation, surveillance, contrôle…).
Le problème dernièrement survenu sur le dossier Téléthon, dont que tu avais la responsabilité, illustre pareillement le défaut de prise en compte et préservation des intérêts de l’entreprise.
J’ai en effet appris que des matériels mobilisés sur ce chantier ont disparu.
Or, [A] [T], notre magasinier, m’indique que ceux-ci sont restés sans surveillance pendant plusieurs jours dans l’atelier, faute d’avoir été prévenu par toi du retour des bus.
Ayant finalement appris que ces bus lui étaient destinés, il a constaté que ceux-ci n’avaient pas été fermés (cadenas retrouvés à l’intérieur des bus) et surtout la disparition de matériels, ce qui met donc en cause ta responsabilité.
2°) tu as faussement mis en cause tes collègues, tes supérieurs et la société pour masquer tes manquements.
A lire ton mail du 14 novembre 2018, tu n’étais responsable de rien et les difficultés rencontrées soit avaient pour origine plusieurs de tes collègues et la société, soit avaient été vues avec ta hiérarchie.
Tu as ainsi d’abord prétendu avoir notamment été confronté la veille du chantier à la défection d'[X] [N] – menuisier en CDI de SET UP – suite à l’intervention de [S] [R], ce qui t’avait amené à le remplacer au pied levé par un menuisier débutant.
Or, [X] [N] et [S] [R] contestent formellement tes propos.
La logique de ton explication aurait d’ailleurs dû t’amener à te tourner vers ta hiérarchie pour obtenir notre arbitrage si [S] et [X] t’avaient fait faux bond et ainsi mis, et par ricochet le chantier [K] [W], en difficulté. Or, tu ne nous as rien signalé.
[J] [G] et [L] [V] sont également tombés des nues en lisant le rôle que tu leur prêtes et contestent tes propos.
Tu as ensuite également prétendu avoir subi une défection de dernière minute de la part d’un intermittent ([H] [D]} et finalement dû fonctionner avec une équipe réduite et peu compétente en raison de tes difficultés à recruter, difficultés que tu imputes au niveau de rémunération pratiqué par SET UP.
Or, le chantier [K] [W] était prévu de longue date.
Tu avais donc largement le temps de prendre tes dispositions pour constituer une équipe
compétente et suffisante.
Nos autres responsables, dont [S] [R], et plus largement la société SET UP, y réussissent sans problème.
Tu n’es surtout à aucun moment venu nous rendre compte, avant et pendant l’exécution du chantier, d’un quelconque problème d’effectif, ce que tu aurais dû faire si tu estimais, de ce fait, ne pas être en mesure de mener à bien ce chantier.
Rien ne justifie à cet égard que tu aies encore fait appel à [H] [D], surtout sur le chantier [K] [W], alors que nous avons déjà eu des problèmes avec lui et, qui plus est, l’ait tout de même laissé intervenir le 6/11 bien que celui-ci, à te lire, t’avait fait faux bond le 5/11.
C’est dire que le problème d’effectif que tu invoques soit t’est pleinement imputable et établit en réalité un défaut manifeste de préparation sérieuse et suffisamment à l’avance de ce chantier, soit n’est en rien à l’origine des erreurs commises sur le chantier.
Dans tous les cas, il en ressort que tu es bien seul responsable des insatisfactions du client [K] [W] faute d’avoir normalement préparé, suivi, dirigé et participé à ce chantier. Nous rappelons à cet égard que tu es toi-même un menuisier expérimenté.
Les problèmes de rayures rencontrés avec les impressions et les portraits en constituent une autre illustration alors même qu’il t’incombe justement de donner des instructions adéquates, d’effectuer des vérifications en sorte de les prévenir. Ici encore, il t’appartenait de rendre compte à ta hiérarchie des erreurs commises à l’emballage par nos salariés si ceux-ci étaient en cause.
Le fait que tu n’aies pas hésité à mettre en cause la société et tes collègues de façon mensongère pour tenter de te dédouaner est naturellement inacceptable et constitue à nos yeux une circonstance aggravante.
Je note à cet égard que tu as prétendu durant l’entretien que « [S] [R] n’arrête pas de casser du sucre sur mon dos du coup les gars de mon équipe vont bosser pour [S], ce n’est pas moi qui ai du mal à recruter c’est [S] qui me pique mon équipe » (sic).
Or, les témoignages que j’ai recueillis ne vont pas dans ton sens. Cette situation génère ainsi une évidente perte de confiance.
2 ème grief : Attitude agressive et trop souvent méprisante vis-à-vis des autres salariés de l’entreprise.
De nombreux salariés nous ont rapporté que tu persistes, en dépit des mises en garde qui t’ont été faites, à adopter une attitude cassante et méprisante vis-à-vis des personnels, notamment intermittents, appelés à travailler sur tes chantiers, et qu’ ils ne supportent plus tes injonctions de dernière minute.
Ceci génère des tensions au sein de l’entreprise et surtout amène nombre d’intermittents à ne plus vouloir travailler pour notre société sur les chantiers dont tu assures la réalisation.
C’est ce qui est en réalité peut-être aussi à l’origine des difficultés de recrutement dont tu t’es soudainement plaint dans ton mail du 14 novembre 2018.
Quoiqu’il en soit, tu as indiqué durant l’entretien avoir conscience de la réalité de notre grief et que « c’était mon problème et j’y travaille ».
Ce problème n’est cependant pas nouveau et nuit à l’image de l’entreprise et surtout à la qualité de nos prestations faute de pouvoir, à te lire, bénéficier de personnels compétents sur les chantiers dont tu as la responsabilité.
3ème grief : Défaut de suivi des directives de l’entreprise
Le chantier [K] [W] m’a donné l’occasion d’apprendre que le service RH doit encore régulièrement te relancer et réagir dans l’urgence, voire à en retard, pour connaître l’identité des personnes devant intervenir et intervenues pour SET UP et le nombre d’heures effectuées par elle.
Or, ceci nous expose à des contentieux et à la mise en cause de la responsabilité de l’entreprise notamment en cas d’accident du travail ou de demande de requalification.
Plus largement, ce grief témoigne ici encore de ta persistance d’un comportement tendant à ne pas tenir compte de nos directives (demande d’accord pour des congés, participation aux réunions) et à placer tes collègues dans l’obligation de travailler dans l’urgence.
Tels sont les griefs qui nous interdisent de te maintenir parmi notre personnel et nous contraignent en conséquence à prononcer ton licenciement, lequel prend effet à la date d’envoi du présent courrier’.
– Malfaçons et manquements dans le chantier [K] [W]
Sans contester qu’il y ait pu y avoir des malfaçons ayant nécessité des reprises sur ce chantier, monsieur [Z] fait valoir qu’il avait parallèlement la charge de quatre dossiers importants, et qu’il travaillait sans prendre de congé et avec des horaires très lourds ; qu’il n’a pas eu à sa disposition du personnel compétent, et que deux des salariés qu’il avait pressentis pour travailler avec lui, lui ont fait faux bond, l’obligeant à recruter du personnel inexpérimenté ; qu’il s’est expliqué sur chaque malfaçon dans un email auquel il n’a pas obtenu de réponse et qui est utilisé contre lui.
Il souligne par ailleurs qu’il n’y a eu aucune plainte de la société.
La cour constate qu’en dehors des propres courriers de monsieur [Z] pour s’en expliquer, la société Set Up ne produit pas la moindre pièce permettant d’établir la réalité et la gravité des malfaçons qu’elle impute à monsieur [Z].
Elle ne produite ni constat opéré sur place, ni surtout plainte de la société. Elle ne justifie pas non plus de l’ampleur des travaux de reprise qu’elle soutient avoir dû mettre en oeuvre durant les congés de monsieur [Z], étant précisé que ce dernier a indiqué avoir prévu différents travaux de reprise avec le client, à réaliser dès son retour.
Monsieur [Z] dans son courrier du 5 novembre 2018 s’est expliqué avec précision sur l’origine de chacune des malfaçons, dont aucune ne revêt une gravité importante, et sur les mesures correctives qu’il avait ou entendait apporter.
L’employeur ne conteste pas non plus que monsieur [Z] avait parallèlement la charge de quatre chantiers, qu’il cite. La société Set Up, tentant de faire peser sur le seul salarié la charge de la preuve, se contente de relever que ce dernier ne précise pas la date d’attribution de ces chantiers, le nombre de jours de fabrication et de montage prévus, les dates des chantiers, le nombre de salariés requis, toutes informations dont elle dispose elle-même.
Par ailleurs, monsieur [Z] expose que sur les deux menuisiers qu’il avait recruté, l’un a vu son engagement annulé à l’initiative d’un autre chef constructeur, et l’autre ne s’est pas présenté sans explication. Là encore l’employeur conteste ces éléments sans présenter la moindre pièce relative à ces difficultés de recrutement, ni d’explication sur les raisons pour lesquelles l’un des deux menuisiers pressentis a vu son engagement annulé au bénéfice d’un autre chef constructeur.
Par ailleurs, en lui reprochant d’avoir mis en cause ses collègues, ses supérieurs et la société pour ‘masquer ses manquements’, l’employeur reproche au salarié d’avoir tenté de se défendre des griefs présentés contre lui, ce qui constitue une liberté fondamentale.
– Attitude à l’égard des salariés de la société
Ce second grief mentionné dans la lettre de licenciement est très imprécis.
Sur les cinq attestations visées par l’employeur à cet égard dans ses conclusions, trois ne concernent pas l’attitude à l’égard des salariés de la société, mais des questions d’organisation du travail. Les deux autres sont très imprécises et ne rapportent aucun événement dont les attestants aient été personnellement témoins.
– Respect des directives
Il est reproché à monsieur [Z] de transmettre avec retard l’identité et le nombre d’heures effectuées par les salariés qu’il recrutait sur ses chantiers.
Il est produit des échanges de mails qui ne permettent nullement de caractériser un quelconque retard de monsieur [Z] dans la transmission des données relatives aux salariés de son équipe.
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la réalité des griefs invoqués par l’employeur n’est pas établi, de sorte que jugement sera confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Monsieur [Z] avait sept années d’ancienneté à la date de son licenciement, de sorte que par application des dispositions de l’article L1235-3 du code du travail, il peut obtenir une indemnité dont le montant se situe entre 3 et 8 mois d’ancienneté. Il avait 53 ans à la date de son licenciement, et justifie des difficultés professionnelles rencontrées par la suite. Par ailleurs, le préjudice a nécessairement été majoré par l’ancienneté de la relation de travail, même si les quinze premières années n’ont pas été retenues au titre de l’ancienneté.
Compte tenu de ces éléments, il lui sera alloué une somme de 34.400 euros sur le fondement des dispositions précitées.
– Sur la demande de dommages et intérêts
Il n’est pas justifié d’un préjudice distinct de celui résultant de la rupture injustifiées de son contrat de travail, de sorte qu’il ne sera pas fait droit à la demande de dommages et intérêts complémentaires.
-Sur la demande reconventionnelle au titre de l’écrasement des données informatiques
L’employeur indique et justifie de ce que les données présentes sur l’ordinateur professionnel de monsieur [Z] ont été effacées par ce dernier.
Toutefois, aucun élément ne vient établir un préjudice à hauteur des 20.000 euros demandés, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a alloué à la société Set Up une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant au temps qui a été consacré pour reconstituer les données essentielles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Met hors de cause maître [P], le jugement du 22 février 2023 ayant mis fin à sa mission ;
Infirme le jugement, mais seulement en ce qu’il a fait droit à la demande de complément d’indemnité de licenciement conventionnelle, ainsi que sur le quantum de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Statuant à nouveau de ces seuls chefs,
Déboute monsieur [Z] de sa demande de complément d’indemnité conventionnelle de licenciement ;
Fixe la créance de monsieur [Z] au passif de la société Set Up, représentée par son mandataire liquidateur maître [U], à la somme de 34.400 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Déclare l’arrêt opposable à l’ AGS, qui devra sa garantie dans les limites et plafonds légaux.
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société Set Up représentée par son mandataire liquidateur maître [U] aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier La présidente