Contrat à durée déterminée d’usage : 30 janvier 2024 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04914

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Contrat à durée déterminée d’usage : 30 janvier 2024 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04914
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C4

N° RG 21/04914

N° Portalis DBVM-V-B7F-LD7T

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP ALPAVOCAT

la SELARL MBA & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 30 JANVIER 2024

Appel d’une décision (N° RG 20/00011)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GAP

en date du 15 novembre 2021

suivant déclaration d’appel du 24 novembre 2021

APPELANT :

Monsieur [C] [T]

né le 27 Juin 1972 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Elisabeth LECLERC MAYET de la SCP ALPAVOCAT, avocat au barreau de HAUTES-ALPES,

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000356 du 03/02/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE),

INTIMEE :

S.A.R.L. [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège,

SIRET N° : 529 903 163 00010

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Anne Charlotte ALLEGRET de la SELARL MBA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Annette PAUL, avocat au barreau de GRENOBLE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 27 novembre 2023,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente en charge du rapport et Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 30 janvier 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 30 janvier 2024.

EXPOSE DU LITIGE

M. [C] [T] a été embauché par la société à responsabilité limitée (SARL) [Adresse 3] selon six contrats à durée déterminée d’usage du 18 mars 2019 au 31 mars 2019 en qualité de commis de cuisine polyvalent, puis selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er avril 2019 pour exercer les mêmes fonctions.

Par avenant du 1er mai 2019, M. [T] a été promu aux fonctions de chef de partie.

Par courrier en date du 12 août 2019, M. [T] a pris acte de la rupture de son contrat de travail au motif du non-paiement d’heures supplémentaires et de non-respect des temps de pause.

Le 6 février 2020, M. [T] a saisi le conseil de prud’hommes de Gap aux fins de voir dire et juger que sa prise d’acte a produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes à la rupture de la relation de travail, outre le paiement de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires impayées.

Par jugement du 15 novembre 2021, le conseil de prud’hommes de Gap a :

– Dit et jugé que la SARL [Adresse 3] n’a commis aucun manquement de nature à justifier la prise d’acte de la rupture de contrat de travail de M. [T] qui s’analyse donc comme une démission,

– Débouté en conséquence M. [T] de l’ensemble de ses demandes formées à ce titre à savoir :

– 781,70 euros brut à titre à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 78,17 euros brut à titre de congés payés sur préavis,

– 2 359 euros net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 3 123,52 euros brut outre 10 % au titre des congés payés, soit la somme de 312,35 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la période du mois d’avril 2019 au mois d’août 2019, et de congés payés sur ses heures supplémentaires et, à titre subsidiaire, la somme de 1 486,65 euros, outre 148,66 euros à titre de congés payés,

– 520,44 euros net à titre de remboursement d’avantage en nature,

– 525,60 euros brut à titre d’indemnité pour repas non pris,

– La remise à M. [T] des bulletins de paye rectifiés portant mention des heures supplémentaires effectuées, une attestation ASSEDIC portant mention d’une prise d’acte requalifiée en licenciement aux torts de l’employeur sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

– Dit qu’il n’y a pas lieu à travail dissimulé et débouté M. [T] de sa demande formée à ce titre,

– Débouté les parties de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

– Dit n’y avoir lieu à demande au titre de l’exécution provisoire,

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec avis de réception.

M. [T] en a relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction le 24 novembre 2021.

Par conclusions transmises par voie électronique le 20 novembre 2023, M. [T] demande à la cour d’appel de :

« Infirmer la décision entreprise sur les chefs suivants :

– Dit et jugé que la SARL [Adresse 3] n’a commis aucun manquement de nature à justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [T] qui s’analyse donc comme une démission,

– Débouté en conséquence M. [T] de l’ensemble de ses demandes formées à ce titre, à savoir :

– 718,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 78,71 euros brut à titre de congés payés sur préavis,

– 2 359 euros net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 3 123,52 euros brut outre 10 % au titre des congés payés, soit la somme de 312,35 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la période d’avril 2019 à août 2019, et de congés payés sur ses heures supplémentaires et, à titre subsidiaire, la somme de 1 486,65 euros, outre 148,66 euros à titre de congés payés,

– 520,44 euros net à titre de remboursement d’avantage en nature,

– 525,60 euros brut à titre d’indemnité pour repas non pris,

– La remise à M. [T] des bulletins de paye rectifiés portant mention des heures supplémentaires effectuées, une attestation ASSEDIC portant mention d’une prise d’acte requalifiée en licenciement aux torts de l’employeur sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

– Dit qu’il n’y a pas lieu à travail dissimulé et débouté M. [T] de sa demande formée à ce titre,

– Débouté les parties de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sans statuer sur la demande formulée au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

– Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

– Dit n’y avoir lieu à demande au titre de l’exécution provisoire,

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Jugeant de nouveau,

Requalifier la prise d’acte de M. [T] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence, condamner la SARL [Adresse 3] à lui payer :

– Une somme de 781,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 78,17 euros brut à titre de congés payés sur préavis,

– Une somme de 2 359 euros net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Juger que l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé et le condamner au paiement d’une somme de 14 155 euros à ce titre,

Condamner également la SARL [Adresse 3] à payer à M. [T] :

– La somme de 3 123,52 euros brut, outre 10 % au titre des congés payés, soit la somme de 312,35 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la période du mois d’avril 2019 au mois d’août 2019, et de congés payés sur heures supplémentaires et, à titre subsidiaire, la somme de 1 486,65 euros, outre 148,66 euros à titre de congés payés,

– 520,44 euros net à titre de remboursement d’avantages en nature,

– 520,44 euros brut à titre d’indemnité pour repas non pris,

Condamner la SARL [Adresse 3] à remettre au salarié :

– Ses bulletins de paie rectifiés portant mention des heures supplémentaires effectuées,

– Une attestation ASSEDIC portant mention d’une prise d’acte requalifiée en licenciement aux torts de l’employeur,

Sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

Condamner la SARL [Adresse 3] à payer à Me Leclerc-Mayet la somme de 2 000 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la première instance,

Ajoutant à la décision de première instance,

Condamner la SARL [Adresse 3] à payer à Me Leclerc-Mayet la somme de 2 500 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure d’appel,

Condamner la SARL [Adresse 3] aux entiers dépens de première instance et d’appel ».

Par conclusions transmises par voie électronique le 2 juin 2022, la SARL [Adresse 3] demande à la cour d’appel de :

« Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Gap le 15 novembre 2021 en ce qu’il a :

– Dit et jugé que la société n’avait commis aucun manquement de nature à justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [T] qui s’analyse donc comme une démission,

– Débouté en conséquence M. [T] de l’ensemble de ses demandes formées à ce titre, à savoir :

– 718,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 78,71 euros brut à titre de congés payés sur préavis,

– 2 359 euros net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 3 123,52 euros brut outre 10 % au titre des congés payés, soit la somme de 312,35 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la période d’avril 2019 à août 2019, et de congés payés sur ses heures supplémentaires et, à titre subsidiaire, la somme de 1 486,65 euros, outre 148,66 euros à titre de congés payés,

– 520,44 euros net à titre de remboursement d’avantage en nature,

– 525,60 euros brut à titre d’indemnité pour repas non pris,

– La remise à M. [T] des bulletins de paye rectifiés portant mention des heures supplémentaires effectuées, une attestation ASSEDIC portant mention d’une prise d’acte requalifiée en licenciement aux torts de l’employeur sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

– Dit qu’il n’y a pas lieu à travail dissimulé et débouté M. [T] de sa demande formée à ce titre,

– Débouté les parties de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sans statuer sur la demande formulée au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

– Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

– Dit n’y avoir lieu à demande au titre de l’exécution provisoire,

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

En conséquence,

Dire et juger que la SARL [Adresse 3] n’a commis aucun manquement de nature à justifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [T],

Dire et juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [T] doit s’analyser en une démission,

Débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes et, notamment, celles tendant à voir la SARL [Adresse 3] condamnée à lui verser :

718,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 78,71 euros brut à titre de congés payés sur préavis,

2 359 euros net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

3 123,52 euros brut outre 10 % au titre des congés payés, soit la somme de 312,35 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires sur la période d’avril 2019 à août 2019, et de congés payés sur ses heures supplémentaires et, à titre subsidiaire, la somme de 1 486,65 euros, outre 148,66 euros à titre de congés payés,

520,44 euros net à titre de remboursement d’avantage en nature,

525,60 euros brut à titre d’indemnité pour repas non pris,

2 000 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la première instance,

2 500 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure d’appel,

En tout état de cause,

Condamner M. [T] à payer à la SARL [Adresse 3] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [T] aux éventuels dépens,

Subsidiairement,

Si par extraordinaire la cour d’appel faisait droit en tout ou partie aux demandes à caractère salarial de M. [T] :

– Dire que les condamnations prononcées sont fixées en brut et sous réserve des cotisations sociales et contributions éventuellement applicables ».

La clôture de l’instruction a été prononcée le 27 novembre 2023.

L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 27 novembre 2023, a été mise en délibéré au 30 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires :

Aux termes de l’article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Selon l’article L. 3121-27 du même code, la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

La durée légale du travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l’article L. 3121-28 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile selon l’article L. 3121-29.

Selon l’article L. 3171-2 du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l’article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Selon l’article 8 de l’avenant n° 1 du 13 juillet 2004 relatif à la durée et à l’aménagement du temps de travail, aux congés payés, au travail de nuit et à la prévoyance de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997 :

« b) En cas d’horaire non collectif, les dispositions de l’article D. 212-21 et D. 212-22 du code du travail s’appliquent comme suit :

Lorsque les salariés d’un atelier, d’un service ou d’une équipe au sens de l’article D. 212-20 ne sont pas occupés selon le même horaire collectif de travail affiché :

– la durée du travail de chaque salarié concerné doit être décomptée selon les modalités suivantes :

— quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d’heures de travail effectuées ;

— chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens du nombre d’heures de travail effectuées par chaque salarié. Ce document est émargé par le salarié et tenu à la disposition de l’inspection du travail ;

– un document mensuel, dont le double sera annexé au bulletin de paie, sera établi pour chaque salarié. Ce document devra comporter, en plus des mentions relatives à l’ouverture du droit au repos compensateur, les mentions suivantes :

— le cumul des heures supplémentaires effectuées depuis le début de l’année ;

— le nombre d’heures de repos compensateur acquises au cours du mois en distinguant, le cas échéant, les repos compensateurs de remplacement du paiement des heures supplémentaires ;

— le nombre d’heures de repos compensateur effectivement prises au cours du mois ».

Il ressort du contrat de travail à durée déterminée du 1er avril 2019 que les horaires de travail de M. [T] n’ont pas été déterminés contractuellement, le contrat se limitant à prévoir que « le salarié effectuera un horaire mensuel de travail de 169 heures, soit 39 heures par semaine réparties du lundi au dimanche selon planning » et que « la répartition de l’horaire de travail est portée à la connaissance du personnel par un planning affiché dans les locaux de l’entreprise » (article 5).

Par ailleurs, la durée de travail étant de 169 heures, le contrat stipule que « le salarié percevra un salaire mensuel brut de base de 1599,03 euros pour 151,67 heures (‘), auquel s’ajouteront 17,33 heures supplémentaires au taux majoré légal ou conventionnel en vigueur » (article 6).

L’avenant au contrat de travail du 1er mai 2019 n’a pas modifié ces stipulations, sauf à porter la rémunération de base à 1 954,36 euros brut par mois.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires impayées, M. [T] qu’à partir du mois de mai 2019, le chef de cuisine a demandé aux salariés, dont lui-même, de ne faire apparaître que les horaires d’arrivée prévus par le planning et non les horaires d’arrivée réels, de sorte que les tableaux remis à la fin de chaque de mois, à l’exception de celui du mois d’avril 2019, ne font pas mention des horaires réels pour les heures d’arrivée du matin et du soir. Il ajoute que dans les faits, il lui était impossible de réaliser l’ensemble des tâches nécessaires pour être prêts pour les repas du midi et du soir s’il arrivait aux horaires prévus par les plannings le matin et le soir et qu’il était contraint d’arriver plus tôt que les horaires prévus en raison de la charge de travail.

Il verse aux débats :

– Une fiche sous forme de tableau portant le titre « Fiche horaire mensuelle par salarié » pour le mois d’avril 2019 remplie informatiquement, et portant une signature avec la mention « Le 09/05/19 Bon pour accord » sous les mots « Visa chef de cuisine », ce tableau faisant mention des heures d’arrivée et de départ du matin, et du soir, et le nombre d’heures travaillées par jour avec un décompte pour la totalité du mois, soit 206h30 réalisées dans le mois, le salarié indiquant que ce tableau a été réalisé par le chef de cuisine à partir de la fiche horaire qu’il lui avait remise ;

– Trois fiches sous forme de tableaux portant le titre « Fiche horaire mensuelle par salarié » remplies manuscritement par le salarié et portant sa signature, pour les mois de juin, juillet et août 2019, ces tableaux faisant mention des heures d’arrivée et de départ du matin, et du soir, et le nombre d’heures travaillées par jour avec un décompte pour la totalité du mois, soit 184h15 pour le mois de juin 2019, 194h45 pour le mois de juillet 2019 et 62h30 pour le mois d’août 2019, le salarié indiquant qu’il s’agit de fiches horaires complétées chaque jour et remises au chef de cuisine à la fin de chaque mois, ne tenant pas compte des horaires réels d’arrivée ;

– Un tableau reconstituant les horaires réalisés au cours du mois de mai 2019 et faisant mention d’un total de 203 heures effectuées au cours de ce mois, le salarié indiquant qu’il n’a pas conservé de copie de la fiche horaire mensuelle remise à son employeur pour ce mois ;

– Cinq tableaux pour les mois d’avril, mai, juin, juillet et août 2019 remplis manuscritement par le salarié et faisant mention des horaires d’arrivée et de départ du matin et du soir et le total des heures réalisées au cours du mois, avec, pour chacun des mois concernés la mention du total de ces heures, soit respectivement 228h30, 228h30, 212h, 221h45 et 68h45, le salarié indiquant que ces tableaux rendent compte des horaires réellement effectués dès lors qu’il prenait son poste plus tôt que les horaires qu’il a mentionnés sur les fiches horaires remises au chef de cuisine ;

– Des calculs précis des montants des rappels de salaire dus par semaine au titre des heures supplémentaires impayées ;

– Des fiches sous forme de tableaux (« Fiche horaire mensuelle par salarié ») au nom de M. [V] [J], plongeur, remplies manuscritement et portant la signature du salarié, pour les mois de février 2019 et avril 2019, 

– Deux attestations de M. [J], une attestation de M. [H] et M. [E], qui tous trois indiquent qu’ils ont été employés par la SARL [Adresse 3] sur des périodes où M. [T] était lui-même salarié de la SARL [Adresse 3], et attestent que les horaires des plannings prévisionnels n’étaient jamais respectés compte tenu de la charge de travail liée à l’arrivée du nouveau chef de cuisine, que les employés en cuisine devaient prendre le poste plus tôt que l’horaire prévu, que le personnel de cuisine n’avait pas le temps de prendre sa pause repas, que les salariés devaient bien remplir les fiches horaires manuscritement et les remettre au chef de cuisine à la fin de chaque mois, et que M. [T] a été amené à faire la plonge et à s’occuper de la réalisation des desserts lors des absences des employés chargés de ces fonctions ;

– Des tableaux des jours où le salarié allègue avoir dû, en plus de son travail de chef de partie affecté à la confection des entrées, s’occuper de la plonge d’une part, et des desserts d’autre part ;

– La liste des jours où le restaurant a réalisé un nombre de couverts plus importants qu’à l’accoutumée, en raison d’événements particuliers (mariages, groupes, etc.).

Ces éléments précis et détaillés suffisent à engager le débat pour permettre à l’employeur, chargé de contrôler les horaires de travail de ses salariés, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En réponse, la SARL [Adresse 3] verse aux débats :

– Des fiches sous forme de tableaux (« Fiche horaire mensuelle par salarié ») remplies informatiquement pour les mois d’avril à août 2019 pour lesquelles il doit être constaté que la première des fiches est celle produite par le salarié et portant la mention « Le 09/05/19 Bon pour accord » ainsi qu’une signature du chef de cuisine, les autres ne portant aucune signature ;

– Des plannings prévisionnels de l’ensemble des salariés de l’établissement, dont M. [T], pour les mois de mai à août 2019 faisant apparaître les horaires d’arrivée et de départ pour le matin et le soir, le nombre d’heures réalisées dans la journée, et le nombre d’heures réalisées au cours de la semaine ;

– Une attestation de M. [B], directeur d’exploitation, qui indique qu’il a accepté les heures supplémentaires faites par M. [T] pour le mois d’avril 2019, en raison de la mise en place d’une nouvelle organisation, malgré le nombre de couverts inférieur de 20 % par rapport aux prévisions, que les heures revendiquées pour les mois suivants n’ont pas été réalisées compte tenu du faible nombre de couverts durant ces mois ; il ajoute qu’il a été demandé à M. [T] de ne pas arriver avant l’heure indiquée sur son planning, ce qui lui a été rappelé par le chef de cuisine après les « écarts » du mois d’avril, et qu’il lui a été également demandé à plusieurs reprises de prendre ses pauses repas avec le reste de l’équipe, et de ne pas manger en cuisine comme le salarié l’aurait fait à plusieurs reprises ;

– Une attestation de M. [P], assistant directeur polyvalent, dans laquelle celui-ci indique qu’au cours des mois de mai à juillet 2019, « l’activité a été normale, avec une certaine sous-fréquentation du restaurant par rapport aux prévisions », que l’effectif du restaurant était au complet et n’a eu aucun mal à répondre à cette activité, que tous les salariés ont toujours eu le temps de prendre leur pause repas (de 11h30 à 12h00 et de 18h30 à 19h00), qu’enfin les salariés travaillaient selon leur planning défini à l’avance et qu’il ne leur était pas demandé de venir en avance par rapport à leurs horaires définis dans le planning, même durant les périodes de forte activité ;

– Une attestation de M. [N], chef de cuisine pendant la période d’embauche de M. [T], qui indique qu’il a donné son « bon pour accord » pour les heures supplémentaires que le salarié avait noté sur sa feuille d’horaires du mois d’avril 2019 car il ne s’était pas aperçu que M. [T] venait aussi tôt, qu’il lui a demandé au début du mois de mai 2019 de respecter les horaires prévus par le planning et de ne pas réaliser de son propre chef des heures supplémentaires, ce que le salarié se serait engagé à faire et ce qui ressort des feuilles horaires du salarié pour les mois de mai et suivant ; M. [N] ajoute qu’il a demandé à plusieurs reprises au salarié de prendre sa pause repas à 11h30 et à 18h30 avec les autres salariés ; enfin, il indique que le nombre de couverts par jour n’entraînait aucune surcharge de travail au regard du nombre de personnes en cuisine et qu’il a remplacé M. [T] et M. [H] après leurs départs sans rencontrer de difficultés d’organisation particulières ;

– Des tableaux d’activité des années 2018 et 2019.

Ces éléments ne permettent pas de démontrer que le salarié aurait effectué les horaires de travail mentionnés sur les tableaux établis informatiquement, à partir desquels l’employeur a calculé la rémunération versée au salarié chaque mois.

En effet, premièrement, la SARL [Adresse 3] n’apporte aucune explication sur la manière dont ces tableaux ont été remplis informatiquement, alors que le salarié conteste qu’il puisse correspondre aux fiches horaires qu’il a remises à la fin de chaque mois.

Au contraire, il ressort de l’attestation précise du chef de cuisine, de celle de M. [J], ainsi que des fiches horaires remplies manuscritement par ce salarié, que l’ensemble des salariés travaillant en cuisine remettaient à la fin de chaque mois des feuilles horaires signées, sur la base desquelles étaient établies les fiches horaires renseignées informatiquement par l’employeur, tel qu’il a été procédé pour le mois d’avril 2019.

Il s’en déduit que les fiches horaires produites par le salarié pour les mois de juin, juillet et août 2019, et portant sa signature, sont celles remises par le salarié au chef de cuisine, alors que les fiches horaires produites par l’employeur ont été renseignées informatiquement par ce dernier.

Or il apparaît que les fiches renseignées informatiquement ne reprennent pas exactement les horaires déclarés par le salarié.

Deuxièmement, il apparaît que l’employeur a décompté systématiquement une pause repas d’une demi-heure par demi-journée travaillée, alors que le salarié n’a déclaré aucune pause repas sur ces fiches et conteste avoir pu les prendre.

La SARL [Adresse 3], sur laquelle repose la charge de la preuve s’agissant des pauses, échoue à démontrer que le salarié a bénéficié de telles pauses.

Au contraire, il ressort des attestations produites par la SARL [Adresse 3] qu’aussi bien le chef de cuisine que le gérant confirment avoir demandé au salarié de prendre ses pauses repas avec le reste de l’équipe et de ne pas déjeuner en cuisine, ce dont il se déduit que le salarié ne prenait pas habituellement de pause repas.

Et l’employeur ne verse aux débats aucun élément objectif donnant l’ordre à M. [T] de prendre ses pauses repas, ni ne produit d’attestation concernant les prises de pauses des salariés travaillant en cuisine.

A l’inverse, il ressort des attestations de salariés travaillant en cuisine pendant la période d’emploi de M. [T], que celui-ci verse aux débats, que le travail à réaliser pour les repas du midi et du soir était tel qu’ils ne leur étaient pas possible de prendre leur pause repas.

En considération de ces éléments, l’employeur manque d’établir que le salarié a pris les pauses qu’il a porté en déduction de son temps de travail.

Troisièmement, s’agissant des horaires de prise de poste le matin et l’après-midi, il est suffisamment établi par M. [T] que celui-ci n’arrivait pas à l’horaire qu’il a lui-même indiqué sur les fiches horaires qu’il remettait au chef de cuisine à compter du mois de mai 2019, mais plus tôt.

En effet, les attestations d’autres salariés travaillant en cuisine produites par M. [T] sont suffisamment précises pour retenir que la charge de travail était telle qu’il n’était pas possible de réaliser le travail demandé en arrivant à l’horaire mentionné sur les plannings prévisionnels, les éléments produits par la SARL [Adresse 3] restant insuffisants pour renverser la force probante de ces affirmations concordantes.

En effet l’attestation du chef de cuisine reste d’une force probante limitée s’agissant du salarié chargé du contrôle du temps de travail de ses subordonnés, et responsable vis-à-vis de son employeur.

Aussi, les tableaux d’activité ne peuvent suffire à établir une absence de surcharge de travail, d’autant qu’il ressort des circonstances de l’espèce que le chef de cuisine, qui était nouveau, souhaitait mettre en place une nouvelle carte.

Enfin, l’employeur ne justifie d’aucun rappel adressé au salarié lui donnant l’ordre de respecter les horaires prévus au planning alors qu’il est établi qu’au mois d’avril 2019 le salarié avait régulièrement pris son poste avant l’horaire mentionné sur le planning.

Eu égard à l’ensemble de ces constatations, il y a lieu de retenir que M. [T] prenait son poste de travail avant l’heure indiquée sur les plannings en raison de la charge de travail lui incombant et avant l’horaire qu’il a lui-même indiqué sur les fiches horaires qu’il a remises au chef de cuisine à la fin de chaque mois.

Enfin le salarié produit des calculs des heures supplémentaires revendiquées, qui ne sont pas utilement contestés par l’employeur.

Il ressort du reçu pour solde de tout compte que la SARL [Adresse 3] a payé à M. [T] la somme de 113,39 euros brut au titre des heures supplémentaires.

En considération de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que M. [T] a effectué des heures supplémentaires impayées pour un montant de 3 123,52 euros brut, la SARL [Adresse 3] étant condamnée à lui payer cette somme, outre 312,35 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande au titre du travail dissimulé :

Il résulte des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L’article L. 8223-1 du code du travail dispose qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Pour allouer une indemnité pour travail dissimulé, les juges du fond doivent rechercher le caractère intentionnel de la dissimulation. Mais ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Cette indemnité forfaitaire n’est exigible qu’en cas de rupture de la relation de travail. Elle est due quelle que soit la qualification de la rupture, y compris en cas de rupture d’un commun accord.

Cette indemnité est cumulable avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture du contrat de travail, y compris l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou l’indemnité de mise à la retraite.

En l’espèce l’élément matériel du travail dissimulé ayant consisté à ne pas indiquer sur les bulletins de paie le nombre d’heures supplémentaires effectivement réalisées est établi.

La SARL [Adresse 3] ne peut prétendre ne pas avoir eu connaissance de la réalisation par M. [T] d’heures supplémentaires, alors que le salarié lui remettait à la fin de chaque mois une fiche horaires faisant apparaître un nombre d’heures de travail réalisées supérieur à la durée du travail prévue au contrat, soit 169 heures.

Or, il ressort des fiches horaires et des bulletins de paie produits que l’employeur n’a pas rémunéré la totalité des heures déclarées par le salarié, sans pour autant soutenir ni a fortiori démontrer, avoir demandé au salarié des explications sur les horaires de travail qu’il déclarait.

Enfin, il a été retenu précédemment que l’employeur n’ignorait pas que le salarié ne bénéficiait pas des pauses repas portées en déduction de son temps de travail.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le salarié démontre l’élément intentionnel du travail dissimulé, de sorte qu’il est bien fondé à solliciter l’indemnité prévue par l’article L. 8223-1 du code du travail.

Le salarié a procédé à un calcul sur la base d’un salaire brut mensuel de référence de 2 359 euros qu’il convient de retenir au regard de la moyenne des trois derniers mois de salaire, le salaire moyen calculé par l’employeur sur les mois d’avril à août 2019 devant être écarté, dès lors qu’il inclut la rémunération du mois de la rupture de la relation de travail.

Par infirmation du jugement entrepris, la SARL [Adresse 3] est condamnée à payer à M. [T] la somme de 14 155 euros net à titre d’indemnité pour travail dissimulé, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur le remboursement des avantages en nature prélevées à tort sur son salaire :

Moyens des parties,

M. [T] fait valoir que :

– Dans le secteur de l’hôtellerie, l’employeur a l’obligation nourrir ses salariés en leur fournissant deux repas par jour s’ils travaillent plus de cinq heures par jour,

– L’employeur a comptabilisé sur ses fiches de paie un avantage en nature correspondant à deux repas par jour,

– Il n’a pas été en mesure de prendre ses repas en raison de la surcharge de travail,

– Il a ainsi été lésé de la somme qui lui a été prélevée à ce titre,

– N’ayant pas pu bénéficier des repas, il aurait dû percevoir une indemnité pour repas non pris.

La SARL [Adresse 3] fait valoir pour sa part que :

– Le salarié, auquel incombe la charge de la preuve, ne verse aux débats aucun élément suffisamment probant permettant de démontrer qu’il n’avait pas le temps de prendre ses repas,

– Le salarié ne s’est jamais plaint de ce fait et n’a jamais sollicité aucune régularisation à ce titre,

– Les temps de pause figurent sur les feuilles horaires qu’elle verse aux débats,

– Elle produit des attestations de nature à justifier que les salariés, dont M. [T], étaient bien en mesure de prendre leurs repas,

– Dans tous les cas, les calculs produits par le salarié ne sont pas corrects.

Sur ce,

Les employeurs dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration ont l’obligation de nourrir leur personnel ou, à défaut, de leurs verser une indemnité compensatrice pour les repas non fournis, à la double condition que l’établissement soit ouvert à la clientèle au moment des repas et que le salarié soit présent au moment desdits repas (arrêt dit « Parodi » du 22 février 1946).

Il ressort des bulletins de paie du salarié que l’employeur a mentionné un avantage en nature pour un montant mensuel brut de 159,28 euros et il n’est pas contesté par l’employeur que cet avantage en nature correspond aux repas fournis au salarié sur son lieu de travail les jours où il a travaillé à raison d’un repas par demi-journée de travail, la valeur d’un repas s’établissant ainsi à 3,62 euros brut.

Il a été retenu précédemment que l’employeur échoue à démontrer que le M. [T] a bénéficié de temps de pauses au moment des repas.

Dès lors, c’est à bon droit que M. [T] sollicite à la fois que la somme déduite de son salaire brut au titre de l’avantage en nature perçu lui soit remboursée, et le paiement de l’indemnité compensatrice correspondant aux repas qu’il n’a pas pu prendre sur son lieu de travail.

M. [T] verse aux débats un calcul des sommes revendiquées dont le montant ne fait l’objet d’aucune critique utile par l’employeur, soit pour 144 repas, un montant total de 520,44 euros.

Il n’est pas contestable que des cotisations ont déjà été payées sur cette somme qui a été intégrée dans le salaire de base de M. [T] en tant qu’avantage en nature. 

Toutefois, cette somme ayant la nature d’un rappel de salaire, elle ne peut être exprimée qu’en brut.

En conséquence, la SARL [Adresse 3] est condamnée à payer à M. [T] la somme de 520,44 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de l’avantage en nature mentionné sur ses bulletins de paie alors qu’il n’en a pas été bénéficiaire, le salarié étant toutefois débouté de sa demande visant à ce que cette somme soit exprimée en net.

En outre, la SARL [Adresse 3] est condamnée à payer à M. [T] la somme de 520,44 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de l’indemnité compensatrice qu’il aurait dû percevoir dès lors qu’il était dans l’impossibilité de prendre les repas qui lui étaient dus sur son lieu de travail.

Le jugement entrepris est infirmé de ces chefs.

Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail :

Moyens des parties,

M. [T] fait valoir que :

– La prise d’acte de la rupture de son contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de manquements commis par son employeur,

– Il a effectué de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,

– En raison de la surcharge de travail, il était dans l’impossibilité de prendre sur son lieu de travail un repas, alors que l’employeur déduisait un avantage en nature de sa rémunération,

– Il a été contraint de travailler dans de mauvaises conditions : toilettes extrêmement sales, micro-ondes défectueux, surcharge de travail et mauvaise ambiance,

– Ces manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail,

– La prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La SARL [Adresse 3] fait valoir pour sa part que :

– Les manquements qu’il invoque ne sont pas établis,

– Dans tous les cas, ils ne sont pas suffisamment graves et ne rendaient pas impossible la poursuite du contrat de travail

– Le salarié n’a jamais fait état d’aucun reproche ni d’aucune difficulté à ses supérieurs hiérarchiques au cours de la relation de travail,

– Les éléments produits par le salarié sont insuffisants pour démontrer ses allégations s’agissant de l’état des toilettes et des cuisines,

– Dans tous les cas, en tant que chef de partie, il était lui-même tenu de veiller au respect des règles d’hygiène, et de l’état de l’équipement et du matériel mis à sa disposition,

– Le micro-ondes a bien été remplacé, selon les demandes du salarié,

– Elle a investi une somme importante dans l’achat de nouveaux matériels de cuisine au cours de la période d’emploi du salarié, afin de garantir les bonnes conditions de travail des salariés,

– Sa prise d’acte de la rupture de son contrat de travail doit s’analyser comme une démission.

Sur ce,

La prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu’il reproche à son employeur.

Elle n’est soumise à aucun formalisme en particulier mais doit être adressée directement à l’employeur.

Elle met de manière immédiate un terme au contrat de travail

Lorsque le salarié justifie de manquements suffisamment graves de la part de l’employeur pour empêcher la poursuite du contrat de travail, la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans le cas contraire, elle produit les effets d’une démission.

L’écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d’examiner les manquements de l’employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.

En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l’employeur, il incombe au salarié d’établir les faits allégués à l’encontre de l’employeur.

Il a été retenu précédemment que la SARL [Adresse 3] avait manqué à ses obligations à l’égard de M. [T] en omettant de lui payer les heures supplémentaires qu’il a effectuées, et en ne prenant pas les mesures nécessaires pour lui permettre de prendre un temps de pauses au moement des repas, tout en déclarant un avantage en nature au titre des repas sur ses bulletins de paie.

S’agissant de ses conditions de travail, les photographies de toilettes produites, dont la cour d’appel relève qu’elles ne sont pas datées, sont insuffisantes pour établir l’existence d’un défaut récurrent d’entretien des sanitaires mis à la disposition du personnel au cours de la période d’emploi de M. [T] par la SARL [Adresse 3].

Enfin, il ressort de l’attestation de M. [N], chef de cuisine, versé aux débats par l’employeur, que celui-ci reconnaît, d’une part, que le salarié s’était plaint du micro-ondes qu’il considérait comme défectueux et qu’il avait demandé à ce qu’il soit remplacé et d’autre part que ce micro-ondes était défectueux puisqu’il indique s’être lui-même chargé de le transporter à la déchèterie.

Or la SARL [Adresse 3] échoue à démontrer avoir remplacé le micro-ondes défectueux au cours de la période d’emploi du salarié.

M. [T] établit ainsi l’existence d’un manquement de la SARL [Adresse 3] à son obligation de sécurité à l’égard de M. [T].

Pris ensemble, ces manquements de la SARL [Adresse 3] sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

Il en résulte que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. [T] est dès lors bien fondé à prétendre au paiement de l’indemnité compensatrice de préavis et à l’indemnité de licenciement.

La SARL [Adresse 3] est ainsi condamnée à payer à M. [T] la somme de 781,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, cette somme étant calculée sur la base d’un salaire de référence fixé à 2 359 euros, conformément à la demande du salarié, outre 78,17 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

L’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; et, si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux que cet article prévoit.

Il doit être relevé que M. [T] ne justifie pas de sa situation professionnelle actuelle, mais verse aux débats un relevé de la caisse d’allocation familiale, duquel il ressort qu’il a perçu le revenu de solidarité active jusqu’en avril 2019, puis de nouveau à compter du mois d’août 2019.

En considération de ces éléments, de l’ancienneté du salarié (moins d’un an), de sa rémunération mensuelle moyenne, il convient de lui allouer, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, la somme de 2 359 euros brut à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement entrepris de ce chef, l’indemnité versée au salarié à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse s’exprimant en brut et non en net.

Sur les demandes accessoires :

La SARL [Adresse 3] est condamnée à remettre à M. [T] un bulletin de salaire portant mention des heures supplémentaires et des rappels de salaire au titre des repas non pris, ainsi qu’une attestation à destination de Pôle emploi, devenu France Travail, rectifiée, conformes à la présente décision.

Les circonstances de l’espèce ne justifient pas d’assortir cette condamnation d’une astreinte. Le salarié est débouté de sa demande formulée à ce titre.

Le jugement entrepris est infirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.

Au titre de la première instance, il y a lieu de condamner la SARL [Adresse 3] aux dépens, et à payer à Maître Leclerc-Mayet la somme de 1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, à charge pour celui-ci de renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle accordé à l’intimé.

En cause d’appel, il y a lieu de condamner la SARL [Adresse 3] aux dépens et à payer à Maître Leclerc-Mayet la somme de 1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, à charge pour celui-ci de renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle accordé à l’intimé.

La SARL [Adresse 3] est déboutée de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, dans les limites de l’appel, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

JUGE que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de M. [C] [T] produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL [Adresse 3] à payer à M. [C] [T] les sommes suivantes :

3 123,52 euros brut à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, outre 312,35 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

14 155 euros brut à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

520,44 euros brut au titre de l’avantage en nature mentionné à tort sur ses bulletins de paie,

520,44 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice due en raison de l’absence de repas pris sur son lieu de travail,

781,70 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 78,17 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

2 359 euros brut à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL [Adresse 3] à remettre à M. [C] [T] un bulletin de salaire rectifié et une attestation employeur à destination de Pôle emploi, devenue France Travail, conformes à la présente décision,

DIT qu’il n’y a pas lieu d’assortir cette condamnation d’une astreinte,

CONDAMNE la SARL [Adresse 3] à payer à Maître Leclerc-Mayet, conseil de M. [C] [T], les sommes suivantes :

1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, à charge pour Maître Leclerc-Mayet de renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle accordée à l’intimé au titre de la première instance,

1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, à charge pour Maître Leclerc-Mayet de renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle accordée à l’intimé, en cause d’appel,

DEBOUTE la SARL [Adresse 3] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL [Adresse 3] aux dépens de première instance et d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Hélène Blondeau-Patissier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,

 


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