Chauffeur de Car : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 20/00195

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Chauffeur de Car : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 20/00195
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DLP/CH

Société [6]

C/

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Ain (CPAM)

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00195 – N° Portalis DBVF-V-B7E-FOU6

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Pôle social du Tribunal Judiciaire de MACON, décision attaquée en date du 19 Mars 2020, enregistrée sous le n° 19/00371

APPELANTE :

Société [6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Guy DE FORESTA de la SELAS DE FORESTA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Ain (CPAM)

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Mme Stéphanie BERTHOUT (Chargée d’audience) en vertu d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Novembre 2022 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller chargé d’instruire l’affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, Président,

Olivier MANSION, Président de chambre,

Katherine DIJOUX-GONTHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Par courrier du 7 mai 2013, la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain (la CPAM) a notifié à la SARL [6] ([6]) le taux d’incapacité permanente de M. [E] fixé à 11 %, dont 2 % pour le taux professionnel, à compter du 4 janvier 2013, au motif de la présence de séquelles avec impotence fonctionnelle alléguées à type de lombo-sciatalgies bilatérales avec signe de lasègue allégué à 45°.

Par requête du 25 juillet 2019, la société [6] a saisi le tribunal judiciaire lequel, par jugement du 19 mars 2020, l’a déclarée irrecevable en son recours.

Par déclaration enregistrée le 3 avril 2020, la société [6] a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions reçues au greffe le 18 mars 2022 et reprises à l’audience sans ajout ni retrait au cours des débats, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

A titre liminaire,

– déclarer son recours recevable,

Au fond,

A titre principal,

– juger que le taux d’incapacité attribué à M. [E] doit être ramené à 5% dans les rapports entre l’employeur et la CPAM,

A titre subsidiaire,

– ordonner une expertise médicale ou une consultation médicale afin de se prononcer sur le taux d’IPP attribué à M. [E] en suite de son accident du travail du 23 janvier 2012,

En tout état de cause,

– renvoyer l’affaire à une audience ultérieure pour qu’il soit débattu sur le taux d’IPP,

– réduire à de plus justes proportions le taux d’IPP attribué à M. [E] en suite de son accident du travail du 23 janvier 2012.

Par ses dernières écritures reçues au greffe le 15 septembre 2022 et reprises à l’audience sans ajout ni retrait au cours des débats, la CPAM demande à la cour de :

– déclarer l’appel irrecevable,

Au fond,

– confirmer la décision de la caisse ayant fixé le taux d’IPP à 11%.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE

La CPAM conclut à l’irrecevabilité de la demande formée par la société [6] au motif que le recours introduit devant le tribunal l’a été après le délai de deux mois suivant la notification de la décision contestée.

L’appelante réplique que la notification comportait la désignation d’une juridiction territorialement incompétente, à savoir le TCI du Rhône, alors que seul celui du lieu du siège de la société [6], soit [Localité 5], était territorialement compétent de sorte que le délai pour agir n’a pu courir à son égard.

Il résulte des articles R. 143-3 et R. 143-31 du code de la sécurité sociale que la forclusion ne peut être opposée aux intéressés que si la notification de la décision contre laquelle ils forment ou interjettent appel porte mention du délai de forclusion avec indication de l’organisme compétent pour recevoir la requête et que le tribunal du contentieux de l’incapacité compétent est celui du lieu où demeure le demandeur, qui, pour une société commerciale, est le siège social fixé par ses statuts.

Il s’ensuit que la notification d’une décision attributive de rente par la caisse au lieu de l’établissement d’attache permanent de la victime, faisant mention du tribunal territorialement compétent pour ce lien d’établissement, est irrégulière et ne saurait faire courir le délai de forclusion lorsque le tribunal compétent pour le siège social de la société ne correspond pas à celui mentionné sur la notification (2e Civ., 24 janvier 2019, pourvoi nº 17-27.486).

En l’espèce, la décision contestée par la société [6] lui a été notifiée par fax du 7 mai 2013, reçu le même jour. Cette notification porte bien mention des délais (2 mois à compter de la notification) et voies de recours. Elle vise cependant comme juridiction compétente le TCI sis à [Localité 7] alors que le siège social de l’affiliée est situé en Saône-et-Loire.

La notification de la décision litigieuse désigne donc une juridiction incompétente pour connaître de la contestation, de sorte qu’elle n’a pas pu faire courir le délai de recours. Il convient, en conséquence, de réformer le jugement entrepris et de déclarer recevable le recours formé par l’employeur.

SUR LE TAUX D’INCAPACITÉ PERMANENTE

La société [6] soutient que le taux d’IPP de M. [E] doit être fixé à 5% comme l’a conclu son médecin-conseil, le docteur [P], et qu’à défaut, une expertise médicale doit être ordonnée.

En réponse, la CPAM se prévaut du rapport rédigé par son médecin-conseil et du barème 3.2 applicable pour considérer que tant le taux médical de 9% que le taux socio-professionnel (TSP) de 2% sont justifiés.

Aux termes de l’article L. 434-2 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.

L’article L. 434-32 du même code dispose que la caisse primaire se prononce sur la base de barèmes indicatifs d’invalidité retenus pour la détermination du taux d’incapacité permanente en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d’invalidité en matière d’accident du travail.

Le taux d’incapacité s’apprécie au regard des séquelles imputables à l’accident du travail constatées à la date de la consolidation.

Il appartient au juge, saisi par l’employeur d’une contestation relative à l’état d’incapacité permanente de travail de la victime, de fixer le taux d’incapacité permanente à partir des éléments médicaux et médico-sociaux produits aux débats, dans la limite du taux initialement retenu par la caisse et régulièrement notifié à l’employeur.

En l’espèce, le médecin-conseil de la CPAM a retenu un taux médical de 9% et un taux socio-professionnel de 2%. Son rapport contient tous les éléments médicaux relatifs à l’évaluation des séquelles de la victime et comporte un avis motivé. Le médecin-conseil a ainsi relevé que M. [E] présentait des séquelles douloureuses avec impotence fonctionnelle à type lombo-sciatalgies bilatérales avec signe de Lasègue allégué à 45°. Il a, à juste titre, fait application du barème paragraphe 3.2 qui préconise un taux de 5 à 15%. Le taux de 9% qui tient compte de la persistance de douleurs et de la gêne fonctionnelle précitée justifient, au vu des éléments contenus dans le rapport, un taux médical de 9%.

S’agissant du taux socio-professionnel (TSP), il convient de relever que M. [E] a été licencié pour inaptitude professionnelle en suite de son accident. Il a ainsi perdu son emploi et s’est vu opposer une contre-indication à la conduite de véhicules (voiture ou car), ce qui impacte nécessairement et de manière importante ses facultés à trouver un nouvel emploi ou à se reconvertir professionnellement, étant rappelé qu’il occupait un poste de conducteur de car. Dès lors, le taux de 2% retenu par le médecin-conseil n’apparaît pas excessif mais au contraire conforme à la situation de l’intéressé.

Pour s’opposer, l’employeur se prévaut du rapport de son médecin-conseil, le docteur [P], en date du 11 février 2020 qui ramène le taux d’incapacité à 5% en retenant la « dolorisation d’un état dégénératif antérieur, sans limitation fonctionnelle objective ».

Or, en fondant son appel sur le seul avis non documenté de son médecin-conseil, la société [6] ne rapporte aucun élément nouveau et pertinent susceptible de contredire l’avis du médecin-conseil de la caisse et de justifier la mise en place d’une expertise médicale ou d’une consultation. Cet avis n’est, en effet, pas de nature à remettre en cause la décision de fixation du taux d’incapacité à 11% qui est étayée et motivée. Il n’est pas démontré l’existence d’un état dégénératif antérieur de nature à minorer ce taux d’incapacité. L’employeur ne verse aux débats aucun élément médical contemporain à la date de consolidation de nature à contredire l’avis du médecin conseil.

En conséquence, les demandes de l’appelante seront rejetées.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

La décision sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens.

Les dépens d’appel seront supportés par la société [6] qui succombe.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare le recours de la société [6] recevable,

Rejette ses demandes,

Condamne la société [6] aux dépens d’appel.

Le greffier Le président

Frédérique FLORENTIN Delphine LAVERGNE-PILLOT

 


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