Informations confidentielles : 4 octobre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03367

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Informations confidentielles : 4 octobre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/03367
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5ème Chambre

ARRÊT N°-281

N° RG 20/03367 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QZAF

Mme [R] [O]

C/

Société GROUPAMA GAN VIE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 OCTOBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 14 Juin 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Octobre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [R] [O]

née le 15 Décembre 1969 à [Localité 10] ([Localité 10])

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Pierre GENDRONNEAU de la SCP ESTUAIRE AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

INTIMÉE :

Société GROUPAMA GAN VIE

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Vincent CHUPIN de la SELARL PUBLI-JURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

Mme [R] [O] a souscrit le 23 novembre 2000, un contrat d’assurance-vie ‘modulation’, n° 4RMS601946500050, géré par la société Groupama Gan Vie, par l’intermédiaire de son agence Groupama à [Localité 6].

Le 23 janvier 2018, Mme [R] [O] a été informée par son agence locale d’opérations de retrait effectuées sur le contrat les 25 octobre 2017 et 4 décembre 2017, portant sur des sommes de 8 000 euros et 3 200 euros dont elle n’était pas à l’origine.

Victime d’une escroquerie, Mme [R] [O] a déposé une plainte le 24 janvier 2018 auprès de la brigade de gendarmerie d'[Localité 5].

Après avoir sollicité en vain par courrier du 21 mars 2018 auprès de Groupama Loire Bretagne Pôle Vie, la réparation de son préjudice, Mme [R] [O] a, par acte d’huissier délivré le 4 juillet 2018, fait assigner la société Groupama Gan Vie aux fins d’être indemnisée.

Par jugement en date du 3 juin 2020, le tribunal judiciaire de Nantes a :

– débouté Mme [R] [O] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté Mme [R] [O] et la société Groupama Gan Vie de leurs demandes formulées au titre l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [R] [O] aux dépens qui seront recouvrés par maître Vincent Chupin conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.

Le 24 juillet 2020, Mme [R] [O] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 22 octobre 2020, elle demande à la cour de :

– réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes le 3 juin 2020,

Statuant à nouveau, il conviendra de :

– dire et juger que la société Groupama Gan Vie a engagé sa responsabilité à son égard en procédant à des retraits partiels au cours du second semestre de l’année 2017 pour 8 000 euros et 3 200 euros sur le contrat d’assurance-vie dont elle avait la gestion,

– condamner la société Groupama Gan Vie au paiement de la somme de 11 200 euros outre intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation le 4 juillet 2018,

– ordonner la capitalisation des intérêts par année entière,

– condamner la société Groupama Gan Vie au paiement de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte des intérêts sur le contrat d’assurance-vie et de son préjudice moral,

– à titre subsidiaire, constater qu’elle n’a pas donné son consentement aux opérations de rachat partiels de 8 000 euros et 3 200 euros et enjoindre la société Groupama Gan Vie d’avoir à recréditer lesdits montants sur le contrat d’assurance-vie n°4RMS601946500050 ou sur un contrat de même nature,

– condamner la société Groupama Gan Vie au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Estuaire Avocats.

Par dernières conclusions notifiées le 19 janvier 2021, la société Groupama Gan Vie demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu le tribunal judiciaire de Nantes le 3 juin 2020 en ce qu’il a :

* débouté Mme [R] [O] de l’ensemble de ses demandes,

* condamné Mme [R] [O] aux dépens de première instance,

Y additant,

– condamner Mme [R] [O] à régler à la société Groupama Gan Vie la somme de 2 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais non répétibles d’appel.

– condamner Mme [R] [O] aux entiers dépens d’appel qui seront recouvrés par maître Vincent Chupin, avocat aux offres de droit, qui bénéficiera des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

– débouter Mme [R] [O] de l’intégralité de ses demandes, écrits, fins et conclusions plus amples ou contraires.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 11 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Mme [O] soutient que la société Groupama Gan Vie a commis une faute à son obligation de vérification et contrôle de nature à engager sa responsabilité au visa de l’article 1937 du code civil et L.132 et suivants du code des assurances. Elle indique qu’elle a été victime d’une escroquerie de la part d’une personne qui a usurpé son identité pour obtenir des versements de 11 200 euros qui ont quasiment vidé son contrat d’assurance-vie. Elle considère que les documents adressés par l’escroc sont des faux grossiers et manifestes que la société Groupama Gan Vie aurait dû remarquer. Elle ajoute qu’il appartient à cette dernière de veiller à la formation de ses préposés et de prévoir un encadrement suffisant permettant en cas de difficultés de procéder à des vérifications.

A titre subsidiaire, elle demande de constater qu’elle n’a jamais donné son accord aux opérations de rachat partiel et de recréditer les montants sur son contrat d’assurance-vie ou sur un contrat de même nature.

La société Groupama Gan Vie rappelle qu’en matière d’assurance-vie, l’adhérent est totalement libre de disposer de son placement comme il l’entend et doit juste justifier, avec sa demande, du motif de ce rachat et ce dans le cadre de l’obligation légale de vigilance à laquelle elle est astreinte dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le terrorisme. Elle fait valoir que les demandes de rachat présentées au nom de Mme [O] n’étaient pas de nature à alarmer l’assureur ni à lui faire procéder à des vérifications supplémentaires. Elle avance que Mme [O] a dû mettre en place un véritable travail de recherches pour établir qu’au-delà des apparences, elle a été victime d’escroqueries. Elle ajoute que si Mme [O] avait su garder ses documents d’identité et informations confidentielles, elle n’aurait pu être escroquée. Enfin, elle expose qu’il ne peut lui être reproché un manque de formation de son personnel dans la mesure où aucun incohérence n’apparaissait dans les demandes de rachat ni dans les documents joints de sorte qu’elle n’avait pas à se livrer à de plus amples vérifications.

Aux termes des dispositions de l’article 1937 du code civil, le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu’à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom duquel le dépôt a été fait ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir.

Aux termes des dispositions de l’article L.132-21 du code des assurances, l’adhérent dispose d’une faculté de rachat qui lui permet d’interrompre son contrat avant le terme initialement prévu et d’obtenir le versement de la provision constituée au jour dudit rachat. Cette demande de rachat doit, en pratique, être effectuée par un écrit signé de l’adhérent.

Il est constant que le dépositaire n’est exonéré de son obligation de restitution que s’il démontre n’avoir commis aucune faute ou négligence de sa part.

En l’espèce, la première demande de rachat partiel pour un montant de

8 000 euros est datée du 18 octobre 2017 et a été reçue par la société Groupama Gan Vie le 20 octobre 2017. Trois pièces justifcatives sont jointes à cette demande :

– la copie de la carte d’identité de Mme [O],

– la copie d’un relevé d’identité bancaire au nom de Mme [O],

– un extrait de jugement mentionnant un montant dû de 8 000 euros.

La demande de rachat porte la même signature que celle figurant sur la carte d’identité au nom de Mme [O]. La copie de la carte d’identité produite ne comporte pas d’anomalie apparente, elle porte la même date et le même lieu de naissance de Mme [O] ainsi que la même adresse que celle figurant sur la déclaration d’appel. Il convient de relever qu’aucune des parties n’a produit le contrat d’assurance-vie pour vérifier la signature de Mme [O].

La demande de rachat remplie au nom de Mme [O] mentionne une autre adresse à [Localité 7] mais la modification d’adresse sur le territoire national n’est pas nature à alerter les services de la société Groupama Gan Vie. Le dispositif du jugement d’un tribunal de grande de Floirac fait état d’une saisie-attribution au détriment de Mme [O]. Le fait qu’il n’existe pas de tribunal de grande instance à Floirac et que le dispositif mentionne des dépenses au lieu des dépens nécessitent des connaissances juridiques certaines et sont insuffisantes à caractériser des anomalies de nature à alerter les services de la société Groupama Gan et à l’engager à procéder à des vérifications plus importantes.

La deuxième demande de rachat partiel pour un montant de 3 200 euros est datée du 20 novembre 2017 et a été reçue par la société Groupama Gan Vie le 29 novembre 2017. Trois pièces justificatives sont jointes à cette demande :

– la copie de la carte d’identité de Mme [O],

– la copie d’un relevé d’identité bancaire au nom de Mme [O],

– une facture de pompes funèbres d’un montant de 5 000 euros.

La demande de rachat porte également la même signature que la copie de la carte d’identité produite qui est d’ailleurs la même que celle produite lors de la première demande de rachat. La demande de rachat mentionne la même adresse à [Localité 7] que celle figurant sur la première demande. Il est joint un RIB auprès d’une autre banque, Carrefour Banque mais toujours au nom de Mme [O]. La facture des pompes funèbres au nom de Mme [O] mentionne une adresse différente à [Localité 11] mais l’établissement des pompes funèbres est situé à [Localité 11] et l’objet de la facture indique ‘obsèques de Mme [I] [O]’ décédée à [Localité 9] soit dans le Gard de sorte que l’adresse de Mme [O] à [Localité 11] n’est pas de nature à alerter les services de l’assurance. Il en est de même de l’adresse mail utilisée pour joindre les pièces à savoir ‘[Courriel 8]’, le nom de [D] étant son nom d’épouse figurant sur sa carte d’identité.

La seule anomalie présente sur cette facture apparaît en deuxième page à la rubrique ‘inhumation/exhumation’ qui mentionne ‘gravure additionnelle sur stèle : [S] [K] née [U] 1920-2015″. Comme l’a relevé à juste titre le jugement entrepris, cette mention figure à un endroit peu visible et est insuffisant, à lui seul, à alerter les services de la société Groupama Gan Vie alors que les autres documents fournis ne présentaient pas d’anomalie manifeste et apparente mais lui permettaient de croire que les demandes de rachat émanaient bien de Mme [O]. De plus, les premiers juges rappellent justement que la liste des documents sollicités pour le rachat d’assurance-vie a pour objectif de s’assurer que les fonds ne font pas l’objet de blanchiment ou de financement du terrorisme. Il n’appartient pas à l’assureur, en l’absence de constat d’anomalie, de procéder à des vérifications plus importantes en vérifiant les motifs du rachat.

Par ailleurs, ces deux demandes de rachat partiel ont été réalisées à un mois d’intervalle plus de 17 ans après la souscription du contrat d’assurance-vie. Mme [O] indique que le montant global des sommes détournées correspond à des économies réalisées depuis 17 ans mais si le montant n’est pas négligeable, elle ne justifie pas du montant de son contrat d’assurance-vie avant ces demandes de rachat de sorte que la cour ne peut apprécier l’importance des demandes de rachat sur le montant global dudit contrat.

Dans ces conditions, la société Groupama Gan Vie démontre qu’elle a agi conformément à ce qu’elle croyait être la volonté de la déposante de sorte qu’il ne peut lui être reproché un manquement à l’obligation d’information de ses préposés ou un quelconque manquement.

Il ne peut, dès lors, lui être reprochée d’avoir commis une faute dans le cadre de ses obligations de vérification et de contrôle dans le traitement des demandes de rachat. Le jugement qui a débouté Mme [O] de toutes ses demandes sera confirmé. Il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande présentée à titre subsidiaire de considérer qu’elle n’a jamais donné son consentement aux opérations de rachat partiel du contrat d’assurance-vie en ce qu’il a été précédemment démontré que la société Groupama Gan Vie a pu croire que ces demandes émanaient de sa déposante. Elle sera déboutée de cette demande.

Succombant en son appel, Mme [O] sera condamnée à verser la somme de 1 500 euros à la société Groupama Gan Vie et aux entiers dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [R] [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamne Mme [R] [O] à payer à la société Groupama Gan Vie la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en cause d’appel ;

Condamne Mme [R] [O] aux entiers dépens en cause d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,

 


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