Accord de confidentialité : 31 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/10013

·

·

Accord de confidentialité : 31 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/10013
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 31 MAI 2023

(n° 107 , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/10013 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYEU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2020025038

APPELANTE

S.A.R.L. JB2F agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de ROUEN sous le numéro 820 085 751

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Emmanuele REDLER, avocat au barreau de PARIS, toque E1103, avocat postulant.

Assistée de Me Yannick ENAULT de la SELARL ENAULT LECLERC, avocat au barreau de ROUEN, avocat plaidant

INTIMES

Monsieur [Z] [B] [O]

Né le 15 Décembre 1967 à [Localité 7] (62)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté et assistée de Me Pierre GRENIER, avocat au barreau de PARIS, toque C1812

LA SELARL DE MANDATAIRES JUDICIAIRES RM’A agissant par Me [M] [G] en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ETS [O], fonctions

auxquelles il a été désigné par jugement du Tribunal de commerce de BOULOGNE SUR MER en date du 15 mars 2018

immatriculée au RCS de BOULOGNE SUR MER sous le numéro 843 262 429

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Yves BOURGAIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant

Assistée de MeTania NORMAND de la SCP ARTIGAS-NORMAND-VASSEUR, avocat au barreau de BOULOGNE SUR MER, substitué par Me Amaury MADELIN, avocat au barreau de PARIS, toque G465, avocats plaidants

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sophie Depelley,Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Laure Dallery, présidente de la chambre 5.4

Madame Sophie Depelley, conseillère

Monsieur Julien Richaud, conseiller

Greffière, lors des débats : Madame Claudia Christophe

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Laure Dallery, et par Monsieur Martinez, Greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

La société Etablissements [O], dirigée par M. [Z] [B] [O], avait pour activité le négoce de chaussures, d’articles de sport et de bonneterie, au sein de plusieurs établissements situés dans le nord de la France, sous l’enseigne MiLLiM.

Le 16 mai 2016, la société Etablissements [O] a cédé à la société JB2F, l’un de ses fonds de commerce de vente de chaussures au détail situé à [Localité 6], avec un crédit-vendeur. La cession était accompagnée de la conclusion d’un contrat de franchise-commission, pour l’exploitation de l’enseigne MiLLim, pour une durée de 7 ans. Ce contrat de franchise fixait une commission à revenir au franchiseur à 60% des recettes réalisées par le franchisé.

Par jugement du 28 septembre 2016, le tribunal de commerce de Boulogne sur Mer a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Etablissements [O] et fixant une date de cessation des paiements au 1er juillet 2016. Par jugement du 15 mars 2018, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire, M. [G] ayant été désigné en qualité de liquidateur.

Dans le cadre des opérations de recouvrement des actifs de la procédure de liquidation judiciaire de la société Etablissements [O], M. [G] a réclamé à la société JB2F le paiement des sommes suivantes :

– 76 547,77 euros TTC au titre de factures de fournitures de marchandises,

– 37 333,32 euros TTC au titre de solde de prix de cession du fonds de commerce de [Localité 6],

C’est dans ce contexte que, par acte du 23 août 2018, la société JB2F a assigné la société Etablissements [O] devant le tribunal de commerce de Rouen pour obtenir le prononcé de la nullité du contrat de franchise, le paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts et la condamnation solidaire de M. [Z] [B] [O], ancien représentant de la société, pour faute personnelle détachable de ses fonctions et/ou fraude.

Par jugement du 6 janvier 2020, le tribunal de Rouen s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 12 mai 2021 le tribunal de commerce de Paris a :

Débouté la société JB2F de ses demandes de prononcer la nullité du contrat de franchise, et de constater que M. [O] a commis une faute personnelle détachable de ses fonctions’;

Condamné la société JB2F à verser à la SELARL de Mandataires Judiciaires RM&A, agissant par Maître [M] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Etablissements [O] la somme de 105 214,38 euros, correspondant à 28 666,61 euros au titre des échéances impayées du crédit vendeur et 76 547,77 euros en règlement du solde de factures de livraison de marchandises, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement ;

Condamné la société JB2F à payer à chacun des défendeurs M. [O] et la SELARL de Mandataires Judiciaires RM&A, agissant par Maître [M] [G], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Etablissements [O], la somme de 2500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonné l’exécution provisoire ;

Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Condamne la société JB2F aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 95,13 euros dont 15,64 euros de TVA.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 27 mai 2021, la société JB2F a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 28 février 2022, la société JB2F, demande à la Cour de’:

Déclarer recevable et bien fondée la société JB2F en son appel du jugement rendu le 12 mai 2021 par le Tribunal de Commerce de Paris et y faisant droit :

Vu la loi du n°89-1008 du 31/12/1989 et son décret d’application du 04 avril 1991,

Vu les articles L330-3 et R330-1 du code de commerce

Vu les dispositions des articles 1104, 1112-1, 1128, 1130, 1131, 1132, 1134, 1137, 1231-1, 1231-2, 1231-3, 1231-4, 1240 et 1184 du code civil,

Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Vu les articles L 223-22 et suivants du code de commerce

Vu le contrat de franchise du 16 mai 2016

Vu la cession de fonds de commerce du 16 mai 2016

Recevoir la société JB2F en ses demandes,

Y faisant droit :

Constater que Monsieur [V] [O] a commis une faute personnelle détachable de ses fonctions et en tout état de cause une fraude aux droits de la société JB2F,

Prononcer la nullité du contrat de franchise du 16 mai 2016,

En conséquence,

– Condamner in solidum Monsieur [V] [O] et Me [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société ETABLISSEMENT [O] à payer à la société JB2F la somme de 737.237,04 € au titre de la remise en état consécutive à la nullité du contrat de franchise signé entre les parties le 16 mai 2016 ;

– Condamner in solidum Monsieur [V] [O] et Me [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société ETABLISSEMENT [O] à payer à la société JB2F la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêt contractuels ;

– Condamner in solidum Monsieur [V] [O] et Me [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société ETABLISSEMENT [O] à payer à la société JB2F la somme de 50.000 € à titre de dommages intérêts délictuels en raison du préjudice d’image de la société JB2F ;

– Condamner in solidum Monsieur [V] [O] et Me [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société ETABLISSEMENT [O] à payer à la société JB2F la somme de 150.000 € à titre de dommages et intérêts contractuels compte tenu de la mauvaise foi des ETABLISSEMENTS [O] dans le cadre de la signature le 16 mai 2016 de la cession du fonds de commerce ;

– Débouter la SELARL RM&A es-qualité de toutes ses demandes en paiement,

A défaut, limiter la créance de la société [O] représentée par son liquidateur, à 52.868,25 € ;

En tout état de cause,

– Condamner in solidum Monsieur [V] [O] et Me [G] es qualité de mandataire liquidateur de la société ETABLISSEMENT [O] à payer à la société JB2F la somme de 15.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 25 novembre 2021, la société de Mandataires Judiciaires RM&A, agissant par M. [G] en qualité de Liquidateur judiciaire de la société Etablissements [O], demande à la Cour de :

Vu les articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce,

Vu les articles 1108 et suivants, et 1134, anciens du code civil,

Vu les articles L 622-21 et L 643-1 du code de commerce,

Vu les pièces produites aux débats,

Confirmer le jugement rendu le 12 mai 2021 par le Tribunal de commerce de PARIS en ce qu’il a :

– Débouté la SARL JB2F de l’ensemble de ses demandes,

– Condamné la société JB2F à verser à la SELARL RM&A ès qualité de liquidateur judiciaire

de la SAS ETABLISSEMENTS [O] la somme de 105.214, 38 €, correspondant à 26.666, 61 € au titre des échéances impayées du crédit vendeur telles qu’arrêtées au jour du

jugement, et 76.547, 77 € en règlement du solde de factures de livraison de marchandises, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement,

– Condamné la société JB2F à payer à chacun des défendeurs la somme de 2.500 € par

application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Ordonné l’exécution provisoire

– Condamné la société JB2F aux dépens.

Y ajoutant,

Dire et juger que le montant de la condamnation prononcée par le Tribunal de commerce de PARIS au titre des échéances du crédit-vendeur impayées sera à parfaire de la somme des échéances impayées entre le prononcé du jugement et l’arrêt à intervenir, étant précisé que le montant global des échéances impayées au jour de la rédaction des conclusions de l’intimée, soit au 25 novembre 2021, s’élève à la somme de 33.333, 33 €,

Condamner la SARL JB2F à payer à la SELARL DE MANDATAIRES JUDICIAIRES RM&A, agissant par Maître [M] [G] et en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ETABLISSEMENTS [O] la somme de 4.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SARL JB2F en tous les frais et dépens d’appel.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 9 mars 2022, M. [O], demande à la Cour de :

Vu le DIP et la liste de ses annexes ;

Vu le contrat de Franchise-Commission ;

Vu la loi du n°89-1008 du 31/12/1989 et son décret d’application du 04 avril 1991 ;

Vu les articles L 223-22 et suivants, L330-3 et R330-1 du code de commerce ;

Vu les dispositions des articles 1104, 1112-1, 1128, 1130, 1131, 1132, 1134, 1137, 1231-1, 1231-2, 1231-3, 1231-4, 1240 et 1184 du code civil ;

Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

De débouter JB2F de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Et, les déclarant infondées,

Confirmer le jugement entrepris et y ajoutant Condamner JB2F à payer à M [O] 9.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Lui laisser la charge des entiers dépens .

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2023.

MOTIVATION

Sur la demande de la société JB2F de voir prononcer nullité du contrat de franchise

Exposé des moyens des parties

La société JB2F fait principalement valoir au soutien de sa demande de nullité que son consentement a été vicié par la remise, au cours des négociations, d’un document d’information précontractuel (DIP) incomplet et non conforme à la loi Doubin. Elle relève que ce DIP ne contenait pas les informations relatives à l’état du marché local, ni les comptes prévisionnels, ni l’état du réseau, des magasins, des ouvertures et fermetures et des raisons qui on pu pousser les magasins à déposer l’enseigne. Elle soutient que si elle avait eu connaissance des informations précontractuelles manquantes, elle aurait pu appréhender les défauts du concept et du modèle économique et anticiper le placement en liquidation judiciaire du franchiseur au point de ne pas conclure ledit contrat. La société JB2F ajoute que le franchiseur ne l’a pas informée avant la signature du contrat d’une durée de 7 années de l’imminence de son redressement judiciaire aboutissant à sa liquidation judiciaire. Elle précise que le franchiseur lui a communiqué des résultats comptables et des analyses financières laissant apparaître des résultats positifs dépourvus d’une dette structurelle susceptible de mettre en cause la pérennité de l’entreprise et en déduit que de telles manoeuvres dolosives n’avaient pour seul but d’obtenir de son prospect des redevances et de percevoir un droit d’entrée afin de rétablir son bilan.

M. [G] ès-qualités et M. [O] répliquent que le tribunal a justement retenu que la société JB2F ne démontrait pas le vice de consentement qu’elle invoquait, étant souligné que :

– la société JB2F a bénéficié de plus d’une année pour préparer son projet d’acquisition de l’activité, préexistante, et de quatre mois entre la réception du DIP et la signature du contrat de franchise-commission,

– la société JB2F avait une parfaite connaissance de l’activité reprise (historique de chiffre d’affaires, résultat d’exploitation sur plusieurs années) par la cession du fonds de commerce dont la validité n’était pas contestée,

– la société Ets [O] n’était pas tenue de fournir une étude de marché local avec de données prévisionnelles,

– le dossier donné pour exemple ne constituait pas une prévision des résultats , la société JB2F conservant la responsabilité de développer ses prévisions;

– la société JB2F n’indique pas quelles auraient été les informations « précises » du ressort du franchiseur dont elle aurait été privée et qui ‘ si elle les avait eues ‘ auraient modifié sa décision.

S’agissant du dol, la société JB2F ne démontre pas une tentative de tromperie’:

– la société Ets [O] a communiqué ses résultats sur les exercices clos avant la signature du contrat,

– le contrat avait été exécuté pendant 28 mois sans soulever de reproche,

– la société JB2F a profité d’un crédit vendeur de 40 000 € remboursable sur 60 mois sans intérêts avec une année de franchise de remboursement dans le cadre de la cession du fonds ce qui ne manifestait ni une volonté de tromperie ni d’abandon de JB2F à son sort.

Réponse de la Cour,

Par des motifs détaillés et pertinents, qui ne sont pas utilement contredits à hauteur d’appel et que la Cour adopte, le tribunal pour débouter la société JB2F de sa demande de voir prononcer la nullité du contrat de franchise a retenu qu’il n’était démontré par celle-ci ni un défaut d’information précontractuelle de nature à vicier son consentement à la signature du contrat de franchise, ni un comportement de la société Etablissements [O] visant à tromper son cocontractant.

La Cour ajoute que si la société JB2F invoque ne pas avoir reçu l’information précontractuelle nécessaire à son parfait consentement, elle ne précise pas, comme devant les premiers juges, quelle information dont elle a été privée a été de nature à l’induire en erreur pour la signature du contrat de franchise, se bornant à multiplier dans ses écritures des considérations d’ordre général sur les informations devant figurer dans le document d’information précontractuelle en application des articles L 330-3 et R 330-1 du code de commerce.

Outre le fait que la société JB2F disposait des informations sur le chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation sur les trois exercices précédant le rachat du fonds de commerce et pour l’exploitation duquel a été signé un contrat de franchise, M. [G] ès-qualités et M. [O] justifient que la société JB2F a bénéficié des informations précontracutelles suivantes :

– dans le cadre d’un accord de confidentialité signé le 15 juin 2015 (pièce [O] n° 1) les données relatives au franchiseur, son organisation, son groupe, son réseau, marques, produits, fournisseurs, clients, domiciliations bancaires, dépens et investissements spécifiques à l’enseigne ou à la marque passés ou envisagés,

– le document d’information précontractuelle (DIP), reçu le 29 février 2016 (pièces [O] n°3 et 4), dans lequel figurait un historique du franchiseur et du concept, la liste des points de vente, le dossier économique d’un magasin du réseau et de l’état général du marché de la chaussure, les extraits des deux dernières liasses fiscales du franchiseur, le grand livre général analytique 2013-2014/2014-2015 et un aperçu des clauses du contrat de franchise,

S’il est constant que parmi ces informations ne figurait pas une étude locale du marché de la chaussure et que le document économique produit concernait un autre magasin, la société JB2F n’explique pas comment en l’état des informations reçues son consentement a été vicié pour la signature du contrat de franchise et quel élément lui aurait permis d’anticiper le redressement judiciaire du franchiseur intervenu quelques mois après la signature du contrat de franchise.

Par ailleurs, il n’est pas contesté qu’à la date de signature du contrat de franchise en mai 2016, les comptes 2016 de la société Etablissements [O] faisant état de sa situation déficitaire n’étaient pas encore établis pour un exercice clôturé au 30 juin 2016. Il n’est pas davantage démontré de pression particulière de la part du franchiseur tout au long de la période de négociation initiée dès 2014 pour conclure le contrat de franchise, ni que des éléments d’information comptables disponibles ont été sciemment occultés par le franchiseur lors de la période précontractuelle. La société JB2F n’apporte par ailleurs aucun élément d’analyse permettant d’évaluer l’impact de l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire le 28 septembre 2016 du franchiseur sur l’activité de son fonds de commerce, étant observé que la poursuite de l’activité était sérieusement envisagée par le dirigeant de la société Etablissements [O] ayant multiplié les mesures de réorganisation avant de se résoudre à la cession du fonds intervenue par jugement15 janvier 2018 (pièces [O] n°8 et 10 ; pièces M. [G] n° 1 à 3).

Dès lors le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société JB2F de sa demande de voir prononcer la nullité du contrat de franchise.

Sur les demandes de condamnation en paiement de diverses sommes formulées par la société JB2F à l’encontre de M. [G] ès-qualités

L’action de la société JB2F, introduite le 23 août 2018 soit postérieurement au jugement d’ouverture du redressement judiciaire de la société Etablissements [O] du 28 septembre 2016 et du jugement de liquidation judiciaire du 15 mars 2018, vise à obtenir la condamnation de M. [G] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Etablissements [O] à lui payer d’une part une somme de 737 237,04 euros au titre de la remise en état consécutive à la demande en nullité du contrat de franchise et d’autre part les sommes de 100 000 euros et 150 000 euros à titre de dommages-intérêts contractuels et la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice d’image résultant de la liquidation judiciaire du franchiseur et l’obligation de déposer l’enseigne avant la fin du contrat de franchise.

M. [G] ès-qualités soutient que la société JB2Fn’a pas déclaré ses créances au passif de la procédure collective de la société Etablissements [O] et que ses demandes en paiement sont de ce fait irrecevables.

Outre le fait qu’elle ne justifie pas de déclaration de créances, la société JB2F n’a pas répondu à ce moyen soulevé par le liquidateur judiciaire depuis la première instance.

Or, en application des articles L 641-3 et L 622-7 du code de commerce, le jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes. Il emporte également, de plein droit, interdiction de payer toute créance née après le jugement d’ouverture non mentionnée au I de l’article L 622-17 qui dispose que les créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation, ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance. Les créances non visées sont soumises à déclaration de créance au sens de l’article L 622-24 du code de commerce auquel renvoient pour le redressement et la liquidation judiciaire les articles L 631-14 et L 641-3, le défaut de déclaration emportant privation du droit d’être admis aux répartitions et aux dividendes

De plus, aux termes de l’article L 624-2 du code de commerce seul le juge commissaire a le pouvoir de se prononcer sur l’admission ou le rejet des créances ou de constater que soit une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence, en sorte que ni le tribunal ni la Cour n’ont le pouvoir juridictionnel pour trancher ces questions (en ce sens : Com. 19 juin 2012, n° 11-18.282).

Et, conformément aux articles L 641-3 et L 622-21 1° du code de commerce, le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent.

Affectant le droit d’agir, ce moyen est une fin de non-recevoir que le juge a l’obligation de soulever d’office s’agissant d’une règle d’ordre public au sens de l’article 125 du code de procédure civile (en ce sens, Com. 12 janvier 2010, n° 08-19645).

En conséquence, l’action en paiement de diverses sommes au titre de restitution ou de dommages-intérêts introduite par la société JB2F à l’encontre de M. [G] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Etablissements [O] postérieurement au jugement d’ouverture de la procédure collective et qui plus est sans déclarations de créances, est irrecevable.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté la société JB2F de ses demandes en condamnation de M. [G] ès-qualités à lui payer diverses sommes au titre des restitutions consécutives à la nullité du contrat de franchise et à titre de dommages-intérêts.

Sur les demandes de condamnation en paiement de diverses sommes formulées par la société JB2F à l’encontre de M. [O]

La société JB2F soutient que M. [O] l’a volontairement trompée et que ce comportement inadmissible constitue une faute détachable de ses fonctions de dirigeant et justifie sa condamnation au visa de l’article L.223-22 et suivants du code de commerce à supporter in solidum avec le liquidateur judiciaire ès-qualités l’intégralité des conséquences financières résultant de la nullité du contrat de franchise et des dommages-intérêts contractuels. Elle fait notamment valoir que M. [O], dirigeant de la société [O], a fait en sorte de minimiser la santé financière de l’enseigne et a modifié fin 2016 les conditions des remises et opérations commerciales pour en faire porter le coût sur les franchisés.

M. [O] réplique qu’il n’est nullement démontré à son égard une faute intentionnelle ou d’une particulière gravité de nature à tromper la société JB2F pour la conclusion du contrat de franchise ou à l’origine d’un quelconque manquement au sens des dispositions de l’article L.223-22 du code de commerce. Il allègue que son attrait dans la procédure est le fruit d’une rancoeur et a pour but d’éviter de régler les sommes dues dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Etablissements [O].

Sur ce,

Il résulte de l’article L. 223-22, alinéa 1er du code de commerce que le gérant d’une société à responsabilité limitée est personnellement responsable envers les tiers des fautes commises dans sa gestion, lorsqu’elles sont séparables de ses fonctions ; qu’engage sa responsabilité à ce titre le gérant qui commet intentionnellement une faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions.

D’une part, les pièces versées aux débats par la société JB2F, à savoir notamment le courrier du 4 octobre 2016 et les courriels des 23 décembre 2016 et 28 mars 2017 outre les pièces n°10 à 25, sont manifestement insuffisantes à établir une faute de gestion intentionnelle ou d’une particulière gravité de la part de M. [O] dans sa relation avec la société JB2F, ni de fraude à son égard.

D’autre part, il ressort de l’extrait KBIS de la société SAS Etablissements [O] et des jugements de la procédure collective versés aux débats , que M. [O] est le président de la société CONJOS Services qui préside la société SAS Etablissements [O].

Dès lors, les conditions d’application de l’article L.223-33 du code de commerce n’étant pas remplies à l’égard de M. [O] ni aucune fraude aux droits de la société JB2F n’étant démontrée, les demandes de la société JB2F de condamnation in solidum de ce dernier avec le liquidateur de la société Etablissements [O] en paiement de sommes à titre de restitution ou de dommages-intérêts contractuels ou d’image ne sont pas fondées.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société JB2F de l’ensemble de ses demandes à l’égard de M. [O].

Sur les demandes de M. [G] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Etablissements [O]

Sur les échéances du crédit vendeur

M. [G] ès-qualités demande la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société JB2F au paiement de la somme de 28 666,61 euros au titre des échéances impayées du crédit vendeur telle qu’arrêtée au jour du jugement. Il est précisé que la société JB2F n’a pas contesté la cession du fonds de commerce et que depuis le jugement elle ne s’est acquittée d’aucun arriéré ni de mensualités échues, soit une somme à parfaire étant précisé qu’au 1er mai 2022 la somme de 37 333,32 est échue.

La société JB2F réplique que la somme de 28 666,61 euros n’est pas due sur le fondement de la nullité du contrat de franchise et les conventions subséquentes.

Sur ce,

La cession du fonds de commerce et le crédit-vendeur conclu entre les parties ne sont pas contestés par la société JB2F qui succombe dans ses prétentions relatives à la nullité du contrat de franchise. Il n’est justifié d’aucun paiement des mensualités échues du crédit-vendeur.

Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société JB2F à payer à la liquidation judiciaire de la société Etablissements [O] le montant des échéances échues à la date du jugement soit la somme de 28 666,61 euros, y sera ajouté les 13 échéances échues à la date de l’arrêt soit la somme de 8 666,71 euros.

Sur les factures

M. [G] ès-qualités demande la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société JB2F au paiement de la somme de 75 547,77 euros correspondant aux factures de marchandises impayées de janvier 2017 à janvier 2018.

La société JB2F, tout en faisant état du vice de consentement de par les agissements de M. [O] et du changement de la politique commerciale courant 2016, soutient qu’elle a versé la somme de 23 679,52 euros et que la créance alléguée ne peut être supérieure à 52 868,25 euros.

Sur ce,

La société JB2F ne conteste pas le principe des factures impayées autrement que par des moyens qui n’ont pas été retenus dans les motifs qui précèdent. En outre, les pièces versées aux débats et en particulier la pièce n°10 ne permettent pas d’établir à suffisance les paiements partiels allégués des factures objet du litige.

Dès lors le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société JB2F au paiement de la somme de 76 547,77 euros en règlement du solde de factures de livraison de marchandises, avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société JB2F aux dépens de première instance et à payer à M. [O] et la société de Mandataires Judiciaires RM&A chacun la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société JB2F, succombant en son appel, sera condamnée aux dépens.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, la société JB2F sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société Mandataires Judiciaires RM&A prise en la personne de M. [G] ès-qualités la somme de 4000 euros et à M. [O] la somme de 6 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la Cour sauf en ce qu’il a débouté la société JB2F de l’ensemble de ses demandes de condamnation en paiement des sommes à titre de restitution et de dommages-intérêts formulées à l’encontre de M. [G] ès-qualités ;

Statuant de nouveau du chef infirmé,

DÉCLARE irrecevable l’action de la société JB2F tendant à la condamnation de M. [G] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Etablissements [O] au paiement des sommes de 737 237, 04 euros au titre de restitutions, de 100 000 euros et 150 000 euros à titre de dommages-intérêts contractuels, 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice d’image ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société JB2F à payer à la société Mandataires Judiciaires RM&A prise en la personne de M. [G] ès-qualités la somme de 8 666,71 euros, représentant les mensualités échues depuis le jugement, avec intérêt au taux légal à compter de la présent décision ;

CONDAMNE la société JB2F aux dépens d’appel ;

CONDAMNE la société JB2F à payer à M. [V] [O] la somme de 6 500 euros et à la société Mandataires Judiciaires RM&A prise en la personne de M. [G] ès-qualités la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x