Accord de confidentialité : 29 novembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/05493

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Accord de confidentialité : 29 novembre 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/05493
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AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/05493 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NFUW

Société MADEMOISELLE SCARLETT

C/

[C]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 10 Septembre 2020

RG : F 18/02518

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2023

APPELANTE :

Société MADEMOISELLE SCARLETT venant aux droits de la société MAKHEIA AFFINITY

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Denis ROUANET de la SELARL BENOIT – LALLIARD – ROUANET, avocat au barreau de LYON substitué par Me Anne-sophie MARTIN, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[O] [C]

née le 02 Juillet 1982 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Georges MEYER de la SELARL DELGADO & MEYER, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 26 Septembre 2023

Présidée par Catherine MAILHES, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Catherine MAILHES, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Anne BRUNNER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Novembre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [C] (la salariée) a été engagée le 8 avril 2008 par la société Mediagerance (la société) par contrat à durée indéterminée en qualité de chef de projets juniors, au statut cadre, coefficient 115, position 2.1 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil (SYNTEC).

Au dernier état de la relation contractuelle, la salariée occupait le poste de directrice commerciale, de statut cadre, niveau 3.1, coefficient 170.

La société a modifié sa dénomination pour devenir Makehia affinity.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.

Mme [C] est partie en congé maternité du 4 avril 2016 au 21 octobre 2016 et a repris son poste le 2 novembre 2016.

Le 3 janvier 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 11 janvier 2018 et la société lui a notifié à cette occasion une mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 11 janvier 2018, la société a confirmé à la salariée la mise à pied à titre conservatoire et lui a demandé de plus se présenter au travail jusqu’à la notification de sa décision.

Par lettre du 12 janvier 2018, la société lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le 22 août 2018, Mme [C], contestant son licenciement, a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon aux fins de voir la société condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour traitement discriminatoire en raison de la maternité et de la grossesse (9 000 euros), des dommages et intérêts pour licenciement nul (54 000 euros), subsidiairement à lui verser des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (54 000 euros) et voir la société en tout état de cause condamnée à lui verser un rappel de salaire relatif à la rémunération variable et l’indemnité de congés payés afférente (9 958 euros au total) et congés payés afférents, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile (2 000 euros), de voir condamnée la société aux entiers dépens.

La société Makehia affinity a été convoquée devant le bureau de conciliation et d’orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 27 août 2018.

La société s’est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celle-ci au versement de la somme de 3 000 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 10 septembre 2020, le conseil de prud’hommes de Lyon a :

condamné la SASU Makheia affinity à payer à Mme [C] la somme de 4 500 euros à titre de dommages et intérêts pour traitement discriminatoire en raison de la maternité et de la grossesse ;

dit que le licenciement de Mme [C] est nul en raison de son caractère discriminatoire ;

condamné la SASU Makheia affinity à payer à Mme [O] [C] la somme de 42 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

condamné la SASU Makheia affinity à payer à Mme [C] à titre de rappel de salaire relatif à la rémunération variable, 1 000 euros au titre de l’exercice 2016, outre 100 euros au titre des congés payés afférents ;

débouté Mme [C] de son rappel de salaire variable pour les années 2017 et 2018 ;

ordonné d’office en application de l’article L. 1235-4 du code du trava’l le remboursement aux orgaismes concernés des indemnités de chômage perçues par la salariée licenciée dans la limite de 3 mois ;

condamné la SASU Makheia affinity à payer à Mme [C] la somme de 1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

débouté la SASU Makheia affinity de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

dit ne pas ordonner l’exécution provisoire au-delà de celle de droit ;

rappelé qu’aux termes des dispositions de l’article R.1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire, les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l’employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail…) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l’article R.1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités ;

fixé le salaire moyen de référence à 4 621,50 euros bruts ;

rappelé que les intérêts courent de plein droit aux taux légal à compter de la mise en demeure de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;

débouté les parties de l’ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires ;

condamné la société Makheia affinity aux entiers dépens de l’instance.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 9 octobre 2020, la société Makheia affinity a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins d’infirmation en ce que le jugement l’a condamnée à payer à Mme [C] des dommages et intérêts pour traitement discriminatoire en raison de la maternité et de la grossesse (4 500 euros), en ce qu’il a déclaré nul le licenciement de Mme [C] en raison de son caractère discriminatoire, en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [C] des dommages et intérêts pour licenciement nul (42 000 euros), en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [C] un rappel de salaire relatif à la rémunération variable, (1 000 euros au titre de l’exercice 2016, outre 100 euros au titre des congés payés y afférents), en ce qu’il a ordonné d’office en application de l’article L. 1235-4 du code du travail le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par la salariée licenciée dans la limite de 3 mois, en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [C] un somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile (1 700 euros) et l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce qu’il a fixé le salaire moyen de référence à 4 621,50 euros bruts, l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes plus amples ou contraires et l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 20 mai 2021, la société Mademoiselle scarlett venant aux droits de la société Makheia affinity demande à la cour de :

infirmer le jugement rendu par la section encadrement du conseil de prud’hommes de Lyon le 10 septembre 2020 en ce qu’il :

– l’a condamnée à payer à Mme [C] la somme de 4.500 euros à titre de

dommages et intérêts pour traitement discriminatoire en raison de la maternité et de la grossesse ;

– dit que le licenciement de Mme [C] était nul en raison de son caractère discriminatoire ;

– l’a condamnée à payer à Mme [C] la somme de 42 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

– l’a condamnée à payer à Mme [C], à titre de rappel de salaire relatif à la rémunération variable, 1 000 euros au titre de l’exercice 2016, outre 100 euros au titre des congés payés y afférents ;

– a ordonné d’office en application de l’article L. 1235-4 du code du travail le remboursement par l’employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par la salariée licenciée dans la limite de 3 mois ;

– l’a condamnée à payer à Mme [C] la somme de 1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– a fixé le salaire moyen de référence a 4 621,50 euros bruts ;

– l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes plus amples ou contraires ;

– l’a condamnée aux entiers dépens de l’instance ;

en conséquence et statuant à nouveau,

dire Mme [C] irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes ;

débouter Mme [C] de toutes ses demandes ;

dire que le licenciement de Mme [C] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

dire que Mme [C] n’a fait l’objet d’aucune mesure discriminatoire ;

dire n’y avoir lieu à nullité du licenciement ;

dire que Mme [C] n’a pas atteint ses objectifs et ne saurait dès lors prétendre au versement d’une quelconque rémunération variable ;

en tout état de cause,

débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes ;

condamner Mme [C] à la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner Mme [C] aux entiers dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 11 mai 2023, la salariée qui a fait appel incident, demande à la cour de :

confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a :

– dit son licenciement est nul en raison de son caractère discriminatoire ;

– condamné la société Makheia affinity à lui verser la somme de 1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté la société Makheia affinity de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– fixé le salaire moyen de référence à 4 621,50 euros bruts ;

– rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la mise en demeure de la partie adverse devant le bureau de conciliation en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;

– condamné la société Makheia affinity aux entiers dépens de l’instance ;

l’infirmer pour le surplus ;

statuant à nouveau ;

condamner la société Mademoiselle scarlett, venant aux droits de la société Makheia affinity à lui payer la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts pour traitement discriminatoire en raison de la maternité et de la grossesse ;

condamner la société Mademoiselle scarlett, venant aux droits de la société Makheia affinity à lui payer la somme de 54 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

subsidiairement :

juger que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;

condamner la société Mademoiselle scarlett, venant aux droits de la société Makheia affinity à lui payer la somme de 46 215 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

en tout état de cause :

condamner la société Mademoiselle scarlett, venant aux droits de la société Makheia affinity à lui payer, à titre de rappel de salaire relatif à la rémunération variable :

– 3 500 euros au titre de l’exercice 2016 outre 350 euros au titre des congés payés afférents,

– 5 000 euros au titre de l’exercice 2017, outre 500 euros au titre des congés payés afférents,

– 1 458 euros prorata temporis au titre de 2018 outre 145,80 euros au titre des congés payés afférents ;

condamner la société Mademoiselle scarlett, venant aux droits de la société Makheia affinity à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner la même aux entiers dépens.

La clôture des débats a été ordonnée le 22 juin 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat de travail

1- Sur le rappel de primes et congés payés afférents

La société conteste le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée à verser un rappel au titre des primes et congés payés afférents en faisant valoir que :

– le contrat de travail de la salariée stipule que « toutes les primes ou gratifications pouvant être versés englobent par avance l’indemnité de congés payés due sur cette partie variable de la rémunération », de sorte qu’aucun rappel de salaire au titre des congés payés afférents ne saurait être dû ;

– le contrat de travail de la salariée prévoit le versement de la rémunération variable que sous forme de gratification de l’employeur, sous réserve de l’atteinte par le groupe Makheia d’un résultat positif, en sus d’un bonus équipe pour l’agence de [Localité 5] avec des objectifs propres instaurés en 2015 ; en 2016 les objectifs de [Localité 5] ont été quasiment atteints alors que le résultat du groupe était fortement déficitaire, de sorte qu’aucun bonus n’aurait dû être versé à l’équipe de [Localité 5], mais il a été décidé d’accorder 50% de cet objectif équipe et de suspendre tous les autres bonus ; en 2017 l’agence de [Localité 5] n’a pas atteint les objectifs fixés et les résultats du groupe étaient encore déficitaires, de même qu’en 2018.

Pour contester le jugement entrepris en ce qu’il a partiellement fait droit à ses demandes sur ce point, la salariée fait valoir que :

– elle a toujours bénéficié de la détermination d’une part variable, mais elle n’a pas perçu sa prime en intégralité au titre de l’année 2016 et ce sans que les indicateurs permettant de mesurer l’atteinte des objectifs n’aient été évalués ; l’appréciation de la société a constitué une pratique discriminatoire par la prise en compte de son absence pour maternité dans le paramétrage de ses objectifs ;

– la société n’a pas fixé d’objectifs pour les années 2017 et 2018 alors qu’elle y était contractuellement tenue, de sorte que faute de critères établis elle est en droit de percevoir l’intégralité de la part variable.

Le contrat de travail prévoit une rémunération mensuelle fixe de 2 300 euros brut outre une prime mensuelle variable, selon un mode de calcul à déterminer, englobant par avance l’indemnité de congés payés due outre la prime de vacances conventionnelle.

Lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, ce dernier peut les modifier dès lors qu’ils sont réalisables et qu’ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d’exercice.

Le versement intégral des primes sur objectifs est dû intégralement par l’employeur dans le cas où ce dernier n’a ni précisé au salarié les objectifs à réaliser, ni fixé les conditions de calcul vérifiables de cette rémunération, en l’absence de période de référence dans le contrat de travail. Sinon, en l’absence de fixation des objectifs, il appartient à la cour de déterminer le montant de la rémunération en fonction des critères visés au contrat et des accord conclus les années antérieures et à défaut, des données de la cause.

Pour l’année 2015, il avait été effectivement convenu une prime qualitative pouvant aller jusqu’à 5000 euros bruts selon l’appréciaiton des objectifs suivants :

– indicateur 1: atteinte par la BU Activation [Localité 5] d’une marge brute de 1 300 Keuros ;

– indicateur 2 : être impliquée dans le développement commercial de l’agence (cleints et compétitions new business) ;

– indicateur 3 : être engagée auprès des trois chefs de projets.

Le versement de cette prime interviendra en avril 2016 à l’issue de la clôture des compte groupe. Il était prévu que ce système n’était valable que pour l’année 2015, sous réserve que le résultat du groupe soit positif qu’il n’était pas tacitement reconductible.

Pour l’année 2016, le système de prime mis en place fonctionnait sur deux critères :

– l’atteinte par l’agence de [Localité 5] de l’objectif de MB de 1300 Keuros pemettant l’attribution automatique et sans condition d’une prime de 3 000 euros ;

– une prime qualitative pouvant aller jusqu’à 2 000 euros bruts attribuée par le manager sur la base de l’implication de la salariée dans le développement commercial de l’agence (clients et compétitions new business) et son engagement auprès des deux directrices de clientèle.

Il était prévu que le versement potentiel interviendrait en avril 2017, à l’issue de la clôture des comptes du groupe et l’évaluation des objectifs par le manager, étant précisé :

– une condition de présence (le collaborateur doit faire partie des effectifs au 31/12 de l’année N pour bénéficier du versement de la rémunération variable de l’année N) ;

– dans l’hypothèse où le résultat du groupe serait négatif, le système de rétribution ne serait plus applicable ;

– le système n’est valable que pour l’année 2016 et non tacitement reconductible.

Dès lors que le système de rémunération variable n’était valable que pour l’année considérée, la comparaison des deux systèmes pour en induire que la condition attachée au résultat positif du groupe portait sur l’ensemble de la rémunération variable n’est pas possible. Aussi, la stipulation selon laquelle l’atteinte par l’agence de [Localité 5] de l’objectif de MB de 1 300 Keuros permettant l’attribution automatique et sans condition d’une prime de 3 000 euros, s’entend comme une dérogation à la condition d’ordre général indiquée en fin de document.

Si le groupe Makheia a enregistré une perte comptable en 2016, l’agence de [Localité 5] avait atteint l’objectif de marge brut, en sorte que la salariée était en droit de bénéficier du versement de la prime de 3 000 euros. En revanche, compte tenu des résultats négatifs du groupe elle ne pouvait pas prétendre à l’objectif qualitatif, malgré l’évaluation mentionnant que l’atteinte des objectifs était difficile à apprécier en raison de son absence une partie de l’année. Aussi la prime devant revenir à la salariée est limitée à 3 000 euros. Elle a perçu une prime de quantitive de 1500 euros, en sorte que la société reste lui devoir la somme de 1 500 euros brut à ce titre comprenant l’indemnité de congés payés.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné la société au versement de la somme de 1 000 euros à ce titre outre 100 euros au titre de l’indemnité de congés payés.

Pour l’année 2017, le manager avait au sein de l’évaluation en fixé l’objectif quantitatif de développement ‘NB’ de 300Keuros de NB pour le périmètre de l’agence de [Localité 5], soit correspondant aux nouveaux clients et avait fixé deux objectifs qualitatifs liés à la simplification des échanges et des rapports avec la hiérarchie et le reste de l’équipe et de participer à la rentabilité de l’agence en vendant des prestations générant de la marge. La salariée ne saurait ainsi prétendre que seuls des objectifs quantitatifs avaient été fixés. Pour autant, en l’absence de détermination des modalités de répartition de la prime et du montant de celle-ci, l’employeur n’avait pas fixé les conditions de calcul vérifiables de cette rémunération. Aussi, le versement intégral des primes sur objectifs est dû intégralement, soit la somme de 5 000 euros comprenant l’indemnité de congés payés, au titre de l’exercice 2017 que la société sera condamnée à verser.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande de prime variable au titre de l’année 2017.

Pour l’année 2018, aucun objectif n’a été fixé et aucun montant ni modalité de répartition n’avait été déterminée, en sorte que c’est à bon droit que la salariée réclame le montant de la part variable au prorata temporis, soit la somme de 1 458 euros que la société sera condamnée à lui verser, s’agissant d’une somme comprenant l’indemnité de congés payés.

Le jugement entrepris sera également infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande de prime variable pour l’année 2018.

2- Sur la demande de dommages et intérêts pour discrimination

La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination liée à son absence pour maternité et à sa situation de grossesse, en faisant valoir qu’elle n’a pas retrouvé son emploi à l’issue de son congé de maternité et elle s’est vue imposer une modification de son contrat de travail alors même que la société ne justifie pas que le refus de l’affecter à son poste de directrice commerciale est dénué de toute discrimination. Elle expose ainsi que directrice commerciale depuis l’avenant du 1er juillet 2014, son contrat de travail a été suspendu pendant à compter du 4 avril 2016 en lien avec sa grossesse et qu’au retour de son congé maternité en novembre 2016, elle n’a pas retrouvé son poste de travail : aucun entretien professionnel de retour en application de l’article L.6315-1 du code du travail n’était formalisé avant l’entretien de mars 2017, au sein duquel le supérieur hiérarchique a reconnu qu’elle n’avait par retrouvé à l’identique son précédent emploi et l’encadrement de l’équipe ne lui était plus dévolu. Elle soutient ainsi que le poste de responsable de développement commercial qui lui a été imposé n’est pas un poste équivalent dès lors que le management de l’équipe constitué des deux directrices de clientèle, lui était retiré, modifiant ainsi le niveau de ses responsabilités et justifiant qu’elle ait exprimé son désaccord sur ce qu’elle considérait être une modification de son contrat de travail et qu’elle ait refusé de signer le compte rendu d’entretien de mars 2017. Elle indique qu’en définitive et après de multiples démarches de sa part, un avenant au contrat de travail du 27 juillet 2017 lui a été proposé en septembre 2017, comprenant la fiche de poste de responsable du développement. Par ailleurs, les modalités de calcul de la part variable de sa rémunération étaient modifiées, puisque le critère concernant le management devenait inopérant pour ne se voir assigner qu’un objectif quantitatif portant sur le chiffre d’affaires à atteindre sur les nouvelles affaires, et elle perdait également sa mission tenant à la participation à la définition de la stratégie commerciale.

La société soutient qu’à son retour de congé maternité, la salariée a été maintenue sur son emploi de directrice commerciale, celle-ci continuant à piloter et à animer l’équipe projet, sachant que du fait de leur évolution professionnelle, les deux directrices qu’elle avait sous son autorité, avaient acquis plus d’autonomie. Elle fait valoir que la salarié a reconnu que la stratégie commerciale et l’évolution de ses missions étaient justifiées par des éléments objectifs dans un courriel du 4 mai 2017, en sorte qu’elle ne saurait se prévaloir de discrimination.

Elle expose que :

– en réponse aux demandes de la salariée portant sur la clarification de ses fonctions et de sa rémunération, elle lui a même proposé de signer un avenant à son contrat de travail avec une fiche de poste mais que face au refus de la salariée, la directrice des ressources humaines lui a adressé un courriel le 15 octobre 2017 lui confirmant que conformément à son avenant du 1er juillet 2014 son poste au sein de l’agence était bien celui de directrice commerciale selon fiche de poste du 2 août 2014 ;

– la salariée a tenté de passer en force pour obtenir le départ négocié qu’elle n’avait pas pu obtenir directement en faisant intervenir son avocat, informant l’employeur de son intention de saisir le conseil de prud’homme d’une demande de résiliation judiciaire ;

– avant la reprise effective de son emploi, la salarié a échangé avec son manager et la direction des ressources humaines sur les modalités de son retour.

En application des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail, il appartient au salarié qui s’estime victime d’une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence. Il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Selon les dispositions de l’article L. 1225-25 du code du travail, à l’issue du congé maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.

L’emploi similaire est celui qui correspond à la classification de la salariée et qui n’entraîne pas de modification du contrat de travail.

Si au regard du courrier de la directrice des ressources humaines du 4 avril 2017, il ressort que des échanges téléphoniques se sont déroulés dès le début du mois d’octobre 2016 entre la salariée et son manager et la direction des ressources humaines quant aux modalités de son retour, que le 10 novembre 2016, la directrice des ressources humaines l’a reçue en entretien à l’occasion d’un déplacement à [Localité 5] le 10 novembre 2016, au cours duquel elle a fait part de ses interrogations sur sa capacité et sa volonté d’accompagner le directeur de l’agence dans sa stratégie de développement commercial ainsi que sur le rythme de travail et sa compatibilité avec sa disponibilité, qu’un échange téléphonique a été organisé le 7 décembre 2016 avec la direction des ressources humaines, au cours duquel elle a fait part de sa réflexion quant à un départ de l’entreprise, il n’en demeure pas moins, qu’ aucun entretien professionnel ayant donné lieu à la rédaction d’un document dont une copie a été remise à la salariée, ne lui a été proposé à l’issue de son congé maternité, comme le prévoient les dispositions de l’article L.6315-1 du code du travail. Les échanges informels sans rédaction d’un document ne peuvent pas en effet, être assimilés à la formalité prévue par ces dispositions.

C’est lors de l’entretien d’évaluation du mois de mars 2017, s’agissant de l’entretien professionnel annuel de l’année 2016, que la salariée, refusant de signer cette évaluation s’est plainte de ce qu’elle n’avait pas retrouvé le périmètre de son poste lors de son retour de congé maternité.

Le poste de directrice commerciale tel que résultant de la fiche de poste annexée à l’avenant de 2014, prévoyait au titre des missions et activités principales, outre de ‘élaborer et mettre en oeuvre les objectifs stratégiques de son périmètre d’activité dans le respect de la stratégie du Groupe’, de :

– fédérer les collaborateur autour du projet d’entreprise et des objectifs de son périmètre,

– piloter l’évolution des collaborateurs de son équipe,

– effectuer le reporting de son périmètre à son N°1 et assurer le reporting vers son équipe.

Aux termes du compte-rendu d’évaluation de mars 2017, le poste mentionné est celui de directrice commerciale. Il ressort des commentaires effectués par son manager, que ‘ l’évolution de l’agence, des (…’) sur cette période de congé maternité nous a conduit à repenser les orientations de la mission d'[O] en privilégiant le développement commercial dans la mesure où [M] et [H] tenaient les clients’.

Que ce soit dans le cadre de la proposition d’un avenant au contrat de travail en qualité de ‘responsable du développement’ qu’elle a refusée ou au sein du courrier de la directrice des ressources humaines du 15 octobre 2017, par lequel la société lui a en définitif confirmé que son poste au sein de l’agence était celui de directrice commerciale, selon les missions décrites dans la fiche de poste du 2 août 2014, l’animation d’une équipe était prévue.

Néanmoins, il ressort du courrier de la direction du 15 octobre 2017 qu’il avait été décidé de rattacher les chefs de projets aux directions de clientèle et ces dernières à la direction de l’agence, et non plus à la direction commerciale, l’agence de [Localité 5] dupliquant le modèle adopté à l’échelle du groupe. La salariée, qui avait souhaité avant tout une clarification sur ‘le périmètre de sa mission’ sur la rémunération variable associée et sur la notion de ‘new business’, avait précisé au cours des multiples échanges, que l’évolution de l’organisation lui faisait perdre la dimension managériale qui était la sienne au poste de directrice commerciale avant qu’elle parte en congé maternité.

Les deux collaboratrices Mme [B] (directrice de clientèle junior, depuis 2013) et Mme [F] (promue au poste de directrice clientèle junior fin mai 2016 pendant le congé maternité de la salariée) avaient acquis une certaine autonomie, comme le reconnaît l’employeur . Elles étaient depuis lors rattachées directement au directeur d’agence, alors même que dans le cadre des échanges, l’employeur n’a jamais contredit la salariée sur la perte de cette équipe ni précisé quels étaient les nouveaux membres de celle dont elle avait la responsabilité.

Le document ‘le nouveau Makheia- [Localité 5] 2017-2018 l’organisation client l’animation des team client’ fait apparaître Mme [C] seule sans équipe, responsable du ‘dev new Biz’ et d’ailleurs, l’employeur n’a jamais fait état de l’organigramme de juin 2017 qu’il verse aux débats, dont rien ne permet de considérer qu’il s’agissait de l’organisation effective de l’agence, ce d’autant que Mme [B] n’y apparaît pas.

Il est ainsi établi que la salariée avait, dans les faits, perdu son équipe et la dimension managériale de son poste de directrice commerciale, caractérisant la modification de ses fonctions et de sa qualification, constitutive d’une modification du contrat de travail.

En conséquence, lors de son retour de congé maternité, la salariée n’avait pas retrouvé un poste similaire à celui qu’elle avait précédemment en violation des dispositions de l’article L.1225-25 du code du travail.

Ce fait laisse présumer d’une discrimination à raison de l’état grossesse et de l’absence pendant le congé maternité.

Si la direction a toujours présenté la réorganisation de l’agence de [Localité 5] comme s’insérant dans le cadre du modèle d’organisation du groupe (cf courrier de la directrice des ressources humaines du 15 octobre 2017) et que la salariée dans son courriel du 4 mai 2017 (‘Je ne nie pas le fait que les évolutions au sein de la société et du groupe entraînent mécaniquement des besoins d’adaptation en termes d’organisation ou de fonctions. Comme il est naturellement acceptable de s’entendre dire que le groupe doit se réorganiser’) a reconnu l’existence d’une réorganisation, la perte de l’équipe est en contradiction avec la fiche de poste de directrice commerciale et avec celle de responsable de développement, en sorte que la décision de l’employeur n’est pas justifié par un élement objectif étranger à toute discrimination.

En conséquence, la salariée a été victime d’une discrimination à raison de sa maternité, lui causant un préjudice qui a été intégralement réparé par la somme de 4 500 euros à titre de dommages et intérêts allouée par les premiers juges.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ces chefs.

Sur la rupture du contrat de travail

La lettre de licenciement du 12 janvier 2018 qui fixe les limites du litige est énoncée dans les termes suivants :

« Nous avons été amenés à convoquer cet entretien préalable, et simultanément à vous notifier votre mise à pied conservatoire, des suites de votre échange du 3 janvier 2018 avec votre manager, en présence de Madame [L] [X], assistante de l’agence.

Alors qu’il était prévu que vous fassiez un point facturation sur les dossiers en cours, afin notamment de pouvoir valider les éléments à facturer sur le mois de décembre, les discussions ont fini par prendre une autre tournure au moment où il s’est agi d’un dépassement des achats

Google dans le dossier [Z].

Votre manager vous a demandé un certain nombre de précisions pour savoir qui avait piloté ce dossier, contrôlé les achats donc signé le contrat afférent. Vous n’avez pas répondu directement à ses questions, évoquant à la place un accord de confidentialité qu’il avait lui-même signé.

Votre manager vous a de nouveau demandé de répondre plus clairement, et vous lui avez alors demandé en retour de surveiller son attitude, alors même que le ton n’était pas monté et que la teneur de ses propos était demeurée correcte. Vous lui avez reproché de crier alors que tel n’était pas le cas. Lorsque votre manager a souhaité passer à autre chose pour aborder d’autres sujets ou clore cette discussion, vous avez quitté la salle en menaçant de ne pas en rester là, avez pris vos affaires et avez quitté l’agence.

Par la suite, nous avons été sans nouvelle de votre part entre le 3 janvier 11h50 et le 4 janvier 17h22, au travers d’un email que vous écriviez à la Direction des Ressources Humaines pour donner votre version des faits et communiquer un arrêt de travail .

Au-delà du fait qu’il eut été normal de prévenir votre management ou les Ressources humaines de votre absence, même si vous n’avez semblé pas le comprendre lors de l’entretien du 11 janvier, vous avez tenu dans votre email des propos inacceptables à l’encontre de votre manager.

Vous écrivez en effet que votre manager vous aurait raillé et se serait moqué de vous en vous imitant et qu’il aurait haussé le ton jusqu’à devenir agressif, brutal et injurieux. Or, votre version des faits n’est pas du tout confirmée par Madame [L] [X], assistante de l’agence, et nous nous permettons ici de le rappeler, membre de la délégation unique du personnel jusqu’en novembre dernier. Il va sans dire qu’écrire un tel message alors qu’il s’avère mensonger relève de la calomnie à l’encontre de votre manager et constitue une véritable faute professionnelle, ce que nous ne pouvons accepter.

Nous précisons ici que lors de votre entretien préalable, nous vous avons demandé de confirmer ou infirmer vos écrits. Vous les avez confirmés en leur intégralité, remettant ainsi en cause l’intégrité de votre manager et de son assistante.

Nous ne pouvons d’autant moins accepter ce qui s’est passé le 3 janvier dernier que cet incident s’inscrit dans une succession d’évènements de ce genre, témoignant tous de la difficulté pour votre manager d’entretenir avec vous des relations de travail sereines, cordiales et constructives.

Le 2 janvier, vous le menaciez effectivement d’évoquer votre situation personnelle avec les clients de l’agence, vraisemblablement parce que vous n’étiez pas parvenue à obtenir de nous ce que vous souhaitiez.

Le 18 décembre 2017, vous le menaciez de faire traîner les choses, de travailler à la petite semaine, de vous arrêter à votre gré, d’aller parler aux clients. Vous avez par ailleurs mis vos menaces à exécution dès le surlendemain.

Et il nous semble ici important de rappeler votre comportement tout au long de l’année 2017, en totale contradiction avec le poste de Directrice commerciale que vous occupez et de niveau de rémunération afférent :

– Des horaires effectifs qui ne concordent pas avec la charge de travail de l’agence et qui laissent perplexes l’ensemble de ses collaborateurs,

– Une gestion minimaliste de vos dossiers,

– Une attitude générant délibérément incompréhensions et tensions avec vos différents interlocuteurs, ce dont plusieurs de vos collègues se sont plaints auprès de la Direction des Ressources Humaines et du management.

C’est au regard de l’ensemble de ces éléments rappelés ci-dessus, et parce que vos explications ne nous ont pas satisfaits, que nous avons été amenés à prendre la décision de votre licenciement pour cause réelle et sérieuse, les difficultés relationnelles rencontrées devenant préjudiciables au bon déroulement de nos projets et à la cohésion de nos équipes. /’/ ».

La société conteste le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du licenciement, arguant de l’absence de discrimination. Au soutien de la cause réelle et sérieuse du licenciement opéré, elle fait valoir que :

– la salariée a adopté un comportement inadmissible à l’égard de son supérieur hiérarchique à l’occasion de la réunion du 3 janvier 2018, qui s’est traduit par un manque de respect flagrant envers ce dernier, en présence d’une autre salariée ; Mme [C] a fait preuve d’insubordination en ne donnant pas de réponses satisfaisantes à son supérieur au sujet du dossier [Z] tout en mettant fin à la réunion de sa propre initiative et sous la menace de ne pas en rester là et a manqué à son devoir d’exemplarité en sa qualité de directrice commerciale ;

– la salariée a quitté l’agence sans donner de nouvelles à partir du 3 janvier 2018 et pendant 24 heures et, même si elle a transmis son arrêt de travail dans le délai imparti, elle n’a pas informé la société dans le délai requis de 24 heures de son absence ; c’est en raison d’une mauvaise foi délibérée qu’elle n’a respecté ni les dispositions de la convention collective ni celles de son contrat de travail et il lui est seulement reproché de ne pas avoir informé de son absence dans les délais ;

– la salariée a délibérément travesti la réalité en rapportant de manière déloyale dans son mail de prétendues affirmations de son manager, dont elle ne rapporte pas la preuve par des éléments objectifs et qui s’opposent à la version relatée par sa collègue, que cette dernière a confirmée dans le cadre de la sommation interpellative à l’initiative de Mme [C] ;

– contestant l’état de choc allégué, la salariée s’est constituée une preuve à elle-même en alléguant celui-ci au sein du courriel du 4 janvier 2018 ; les certificats médicaux apportés par la salariée constituent des moyens de preuve inopérants, s’agissant manifestement de documents de complaisance puisque ne comportant pas un état descriptif et objectif ;

– plusieurs collaborateurs ont relevé qu’au cours de l’année 2017 la salariée avait adopté un comportement qui engendrait des difficultés au sein de l’agence, s’agissant d’un comportement non conforme à ce qu’un employeur est en droit d’attendre de la part d’un cadre, de surcroit une directrice commerciale ;

– la salariée n’a pas non plus hésité à dénigrer son employeur face aux clients et le menacer de ralentir son rythme de travail si il ne cédait pas à ses exigences financières ; elle a multiplié différentes actions pour tenter de faire plier la direction et obtenir un départ négocié dans les semaines précédant la réunion du 3 janvier 2018

La salariée conclut à la confirmation du jugement sur chef, en invoquant la discrimination qu’elle a subi à raison de la maternité et de la grossesse tout au long de l’année 2017 au cours de laquelle elle a résisté au passage en force de la société de façon posée et constructive et a refusé l’avenant au contrat de travail conduisant à une détérioration des relations de travail.

Elle soutient, subsidiairement, que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en avançant les arguments suivants :

– elle conteste les reproches qui lui sont faits concernant la réunion du 3 janvier 2018, son supérieur hiérarchique ayant au contraire été particulièrement agressif, tenant des propos déplacés à son égard ; il ressort de la sommation interpellative de sa collègue présente lors de cette réunion que le ton des échanges était tendu, son objet même démontre la mauvaise foi de M. [S], lequel a provoqué l’incident ;

– aucun fait fautif ne peut lui être reproché ou n’est de nature à caractériser un motif de licenciement ; l’événement a été monté en épingle pour mettre un terme à son contrat ;

– le témoignage de sa collègue doit être pris avec circonspection en raison des mauvaises relations qu’elles entretenaient, et la société ne produit aucun élément probant démontrant qu’elle aurait été la seule responsable de l’échange tendu et le comportement déplacé qui lui est reproché ;

– la société s’est placée sur le terrain disciplinaire et les faits concernant des précédents tout au long de l’année 2017, pour lesquels elle n’a pas été sanctionnée, sont prescrits ;

– les éléments produits par la société traduisent une situation relationnelle difficile, qui s’est détériorée au fil de l’année 2017, qui ne lui est pas imputable ;

– en sa qualité de cadre au forfait jour elle disposait d’une autonomie dans l’organisation de son temps de travail et l’absence qui lui est reprochée était la conséquence d’une visite à la médecine du travail qui s’est tenue pendant le temps de travail ; elle a vu son médecin traitant dès le lendemain et a averti son employeur de l’arrêt prescrit le jour même ;

– les certificats médicaux produits émanent de deux médecins différents en raison de leurs fonctions différentes ;

– elle n’a fait qu’exprimer, son opinion et perception d’une situation dans son courriel du 4 janvier 2018, ses écrits ne caractérisant que l’exercice de sa liberté d’expression ; elle conteste par ailleurs avoir menacé d’évoquer sa situation professionnelle avec des clients, entretenir de mauvaises relations au sein de l’équipe et avoir menacé quiconque de traîner dans l’exécution de son travail ;

– le licenciement trouve sa véritable cause dans le refus de sa part de signer l’avenant proposé qui a conduit à la détérioration des relations de travail.

***

Certes, lors du licenciement, la position de la salariée n’avait pas été rectifiée conformément au contrat de travail et celle-ci avait refusé la modification de son contrat de travail, expliquant la dégradation des relations. Néanmoins, aux termes de la lettre de licenciement, il n’apparaît pas d’élément permettant de considérer que cette mesure était prise à raison de sa grossesse ou de sa maternité. La question est donc de déterminer s’il constituait la prolongation de l’acte de discrimination initiale et il est alors nécessaire d’examiner la réalité et le sérieux des motifs invoqués.

Aux termes de l’article L. 1235-1 du code du travail, il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des griefs invoqués et de former sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties, le doute profitant au salarié.

La charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse n’incombe pas particulièrement à l’une ou l’autre partie.

A titre liminaire, il convient de rappeler que la règle selon laquelle nul ne peut se contituer de preuve à soi-même n’est pas applicable aux faits juridiques et que la cour appréciera la valeur probante de l’ensemble des éléments apportés par les parties.

S’agissant d’un licenciement disciplinaire, en application des dispositions de l’article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaire au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance.

* Sur les faits du 3 janvier 2018

Les attestations de M. [S] et de Mme [X] présente lors de la réunion du 3 janvier 2018 dans le bureau de de ce dernier, dont la valeur probante n’est pas utilement remise en cause par les éléments apportés par la salariée et qui sont en outre corroborées par les déclarations de Mme [X] à l’huissier de justice diligenté par la salariée dans le cadre de la sommation interpellative du 15 février 2018 établissent la réalité des faits énoncés au sein de la lettre de licenciement et qui se sont déroulés lors de la réunion du 3 janvier 2018.

La cour note que si effectivement un différend avait opposé la salariée à Mme [X], celui-ci datait de trois ans. En outre, la réponse donnée par cette dernière à l’huissier instrumentaire à la question 16) ‘D’après les éléments d’information qui m’ont été communiqués, il apparaîtrait que depuis deux ans vous êtes en froid avec Mme [C]. Si oui, pour quelles raisons”, à savoir : ‘Oui, car je lui ai dit de s’occuper de son travail au lieu de s’occuper du mien suite à une altercation entre nous. Elle a porté plainte contre moi auprès des ressources humaines en demandant à ce que je sois sanctionnée’, s’agissant d’une réponse objective et dénuée d’animosité, ne permet pas de discréditer son témoignage, dont la teneur a été réitérée dans le cadre de la sommation interpellative.

La réaction de la salariée qui a, en l’absence de tout ton ou propos déplacé utilisé par son directeur, lui a dit qu’il n’avait pas à lui parler sur ce ton et que cela suffisait qu’il lui parle mal, qu’elle allait partir et qu’il entendrait parler de son avocat parce qu’elle allait porter plainte contre lui, caractérise un comportement vindicatif et inadapté à l’encontre de son supérieur hiérarchique, sans lien avec la réalité de la situation, constitutif d’une faute.

* Sur l’absence de nouvelles entre le 3 janvier 11h50 et le 4 janvier 17h22

Il est constant que la salariée a quitté l’agence dans la suite de la réunion du 3 janvier et qu’elle a communiqué un certificat médical d’arrêt de travail le 4 janvier au soir.

Selon les disposition de l’article 42 de la convention collective nationale dite Syntec, le salarié doit avertir son employeur du motif et de la durée probable de son absence, dès que possible et au plus tard dans les 24 heures.

En l’occurrence, la salariée ne justifie pas avoir informé l’employeur de son absence avant la transmission du certificat d’arrêt de travail le 4 janvier 2018 à 17h22.

L’autonomie d’organisation dont elle dispose ne saurait justifier ce défaut d’information, la réalité de son absence n’étant pas contestée et d’ailleurs corroborée par le déroulement des faits. En outre, sa visite en cours de journée auprès de la médecine du travail, à sa demande et en urgence, n’est pas plus de nature à justifier le défaut d’information qui lui est reproché. Aussi le défaut d’information de l’employeur de son absence au plus tard dans les 24 heures est établi et caractérise un comportement fautif qui sera retenu par la cour.

* Sur la teneur du courriel du 4 janvier 2017

Les propos tenus au sein du courriel du 4 janvier 2017 par la salariée relatent sa version des faits de la veille mais sont contredits par les éléments ci-avant énoncés, en sorte que leur caractère mensonger est établi, étant précisé que la liberté d’expression n’est pas un droit absolu.

La mise en cause de son manager en lui faisant tenir des propos inexacts ( ‘j’en ai rien à foutre, ce n’est pas toi qui va me dire comment je dois te parler et si je dépasse les limites ou pas. Tu commence vraiment à me faire chier, j’en ai plein le cul de toi.’), de nature à engager sa responsabilité professionnelle de directeur général de l’agence auprès de la direction de la société, caractérise un comportement fautif qui sera retenu par la cour.

* Sur les faits d’avoir le 2 janvier 2018 menacé d’évoquer sa situation personnelle avec des clients de l’agence et d’avoir le 18 décembre 2017 menacé de faire traîner les choses, d’aller parler aux clients

Aux termes de son attestation dont la valeur probante n’est pas utilement remises en cause par les pièces versées par la salariée, M. [S], directeur de l’agence, indique que le 18 décembre 2017, Mme [C] l’a menacé de continuer à s’arrêter de travailler suivant ses envies et de se plaindre auprès de clients et que le 2 janvier 2018, elle a évoqué sa situation auprès de lui en faisant pression pour qu’il demande à la direction de la société de céder à ses demandes financières dans le cadre d’une rupture conventionnelle et qu’elle menaçait d’évoquer sa situation auprès de clients. Les faits reprochés sont donc établis et seront retenus par la cour au soutien du licenciement.

* Sur le comportement tout au long de l’année 2017

Les faits énoncés imprécis portant sur l’année 2017, alors même que l’employeur ne justifie pas du moment où il en a eu connaissance et que ceux antérieurs au 3 novembre 2017 sont donc prescrits, ne sauraient justifier la mesure de licenciement.

En définitive, les griefs retenus par la cour au soutien du licenciement caractérisent un comportement fautif imputable à la salariée, lequel n’est pas excusable malgré la discrimination consécutive au fait de ne pas avoir retrouvé son précédent emploi ou un emploi similaire, au regard des moyens de droit existant pour remédier à une telle situation.

D’ailleurs, le refus d’une rupture conventionnelle ne saurait être considéré comme fautif. Ce faisant, le comportement inadapté et menaçant de la salariée à l’égard de son supérieur hiérarchique caractérise un comportement fautif justifiant la cause réelle et sérieuse de la mesure de licenciement, sans qu’il soit établi qu’il trouve sa réelle cause dans le refus de la salariée de signer l’avenant au contrat de travail portant sur le poste de ‘responsable du développement’ six mois auparavant et sans qu’il constitue la prolongation de l’acte de discrimination initiale.

En conséquence, la salariée sera déboutée de ses demandes tendant à déclarer nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse le licenciement dont elle a fait l’objet, ainsi que de ses demandes indemnitaires subséquentes.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme [C] était nul en raison de son caractère discriminatoire et en ce qu’il a condamné la société au versement de la somme de 42 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

Sur l’article 700 du congés payés et les dépens

La société succombant essentiellement sera condamnée aux entiers dépens de l’appel et de première instance. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

Le jugement entrepris sera confirmé et il sera ajouté sur ces chefs portant sur la procédure en appel.

L’équité commande de faire bénéficier la salariée de ces mêmes dispositions et de condamner la société à lui verser une indemnité complémentaire de 1 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il sera ajouté au jugement à ce titre.

La cour rappelle que les sommes qu’elle alloue sont exprimées en brut.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme [C] est nul en raison de son caractère discriminatoire, en ce qu’il a condamné la société au paiement d’une somme de 42 000 euros pour licenciement nul, en ce qu’il a condamné la société Makheia affinity à payer à Mme [C] à titre de rappel de salaire relatif à la rémunération variable, 1 000 euros au titre de l’exercice 2016, outre 100 euros au titre des congés payés afférents, en ce qu’il a débouté Mme [C] de son rappel de salaire variable pour les années 2017 et 2018, en ce qu’il a ordonné d’office en application de l’article L.1235-4 du code du trava’l le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par la salariée licenciée dans la limite de 3 mois ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNE la société Mademoiselle scarlett venant aux droits de la société Makheia affinity à verser à Mme [C] les sommes suivantes :

1 500 euros brut comprenant l’indemnité de congés payés au titre du reliquat de prime variable 2016,

5 000 euros brut comprenant l’indemnité de congés payés au titre de la prime variable 2017,

1 458 euros brut comprenant l’indemnité de congés payés au titre de la prime variable 2018 ;

DÉCLARE que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Mme [C] de ses autres demandes ;

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail ;

CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Mademoiselle scarlett venant aux droits de la société Makheia affinity à verser à Mme [C] une indemnité complémentaire de 1 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que les sommes allouées par la cour son exprimées en brut ;

CONDAMNE la société Makheia affinity aux entiers dépens de l’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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