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Vidéosurveillance : 7 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/15459

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Vidéosurveillance : 7 décembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/15459

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 07 DECEMBRE 2023

N° 2023/805

Rôle N° RG 22/15459 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKLNW

[T] [R]

C/

[W] [MN]

[Z] [F]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Rachel COURT-MENIGOZ

Me Franck GINEZ

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de GRASSE en date du 03 novembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n°22/01041.

APPELANT

Monsieur [T] [R]

né le 30 avril 1979 à [Localité 36], demeurant [Adresse 28]

représenté par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SELARL CABINET FRANCOIS & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et assisté de Me Samuel PROTON DE LA CHAPELLE, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMES

Madame [W] [MN]

née le 15 novembre 1961 à [Localité 34], demeurant [Adresse 26]

Monsieur [Z] [F]

né le 26 décembre 1956 à [Localité 35], demeurant [Adresse 26]

représentés par Me Franck GINEZ de la SCP GINEZ, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Madame [D] [Y] épouse [R]

née le 15 Novembre 1961 à [Localité 33]

demeurant [Adresse 28]

représentée par Me Rachel COURT-MENIGOZ de la SELARL CABINET FRANCOIS & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et assistée de Me Samuel PROTON DE LA CHAPELLE, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 31 octobre 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Mme LEYDIER, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère rapporteur

Mme Angélique NETO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 décembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 décembre 2023,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Caroline VAN-HULST, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte en date du 15 mars 2011, Monsieur [T] [R] et son épouse Madame [D] [Y] ont acquis une maison à usage d’habitation située au [Adresse 27] à [Localité 39] (06), cadastrée D [Cadastre 3], l’acte mentionnant que l’accès au bien se fait par un chemin privé desservant plusieurs propriétés, ce chemin traversant la forêt n’ayant jamais fait l’objet de servitude.

Suivant délibération du conseil municipal du 9 octobre 2018, la voie privée desservant le [Adresse 37], située dans le prolongement du [Adresse 29], jusqu’à la parcelle cadastrée D [Cadastre 3], a été renommée [Adresse 32].

L’adresse actuelle de la propriété des époux [R] est désormais la suivante : [Adresse 28] à [Localité 39].

Pour accéder à leur propriété, les époux [R] empruntaient depuis 2011 deux chemins, d’abord celui des [Adresse 29] puis celui du [Adresse 32].

Suite au décès de son père M. [X] [L] [MN], survenu le 5 mars 2012, Madame [W] [MN], agricultrice et oléicultrice, est devenue propriétaire des parcelles en nature de bois et d’oliviers, cadastrées

D [Cadastre 2], D [Cadastre 6], D [Cadastre 7], D [Cadastre 8], D [Cadastre 9], D [Cadastre 10], D [Cadastre 11], D[Cadastre 16],

D [Cadastre 23] et D [Cadastre 24] (ces deux dernières ayant été renumérotées[Cadastre 25]).

Mme [MN] est domiciliée avec son compagnon, M.[Z] [F] dans la maison d’habitation située sur la parcelle, actuellement cadastrée D[Cadastre 25], au [Adresse 26] à [Localité 39].

Se plaignant de ce que leurs voisins, Mme [MN] et M. [F] avaient bloqué, depuis octobre 2021, le [Adresse 32], de manière à les empêcher d’accéder à leur propriété par ce chemin, ce qui les contraignaient à emprunter une voie secondaire étroite et dangereuse, et de l’installation de caméras de vidéo-surveillance et d’un système de piège photographique jusque devant leur propriété pour les surveiller, M. [R] les a fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice, par acte en date du 04 juillet 2022, principalement afin d’obtenir leur condamnation, sous astreinte, à libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29], à retirer toutes les caméras ou dispositifs de surveillance donnant lieu sur leurs parcelles ou sur le chemin servant à leur passage régulier, ainsi que leur condamnation au paiement d’une somme de 800 euros par infraction constatée.

Les consorts [MN] [F] ont conclu au rejet de l’intégralité des demandes et formé des demandes reconventionnelles tendant principalement à:

– faire défense à M. [R], ainsi qu’à tout véhicule et toute personne de son chef, d’emprunter le chemin privé passant sur les parcelles appartenant à Mme [MN],

– voir condamner M. [T] [R] au paiement de la somme de 150 euros par infraction constatée,

– voir condamner M. [T] [R] à déplacer son élevage de poules et coqs, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

– voir condamner M. [T] [R] à retirer son dispositif de vidéosurveillance filmant leur propriété, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.

Par ordonnance de référé contradictoire en date du 03 novembre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice a :

– dit n’y avoir lieu à référé en ce qui concerne la demande de M. [R] tendant à voir ordonner à M. [F] et Mme [MN] de libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29], et retirer tous obstacles (passant par les parcelles [Cadastre 11], [Cadastre 18], [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 13], [Cadastre 12], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 10], [Cadastre 6], [Cadastre 5], [Cadastre 3],) sous astreinte,

– fait défense à M. [T] [R], ainsi qu’à tout véhicule et toute personne de son chef, d’emprunter le chemin privé passant sur les propriétés de Mme [MN], à savoir sur les parcelles cadastrées [Cadastre 2], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 23], [Cadastre 24] (ces deux dernières ayant été renumérotées [Cadastre 25]) de la commune de [Localité 39], sous astreinte de 150 euros par infraction constatée,

– ordonné à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 5 et 6 du constat du 8 février 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours suivant la signification de la décision,

– ordonné à M. [T] [R] de déplacer son élevage de poules et coqs situé sur la parcelle [Cadastre 5], afin qu’il y ait une distance d’au moins 50 mètres en tous points vis-à-vis du périmètre de la parcelle [Cadastre 25], sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

– ordonné à M. [T] [R] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 25 à 27 du constat du 2 mars 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai 8 jours suivant la signification de la décision,

– condamné M. [T] [R] à payer à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN], pris ensemble, la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [T] [R] aux dépens,

– rejeté toutes autres demandes.

Le premier juge a notamment considéré :

– qu’aucun élément ne permettait de retenir que Mme [Y] intervenait volontairement à la procédure et que seul M. [R] développait des prétentions,

– que les consorts [R] n’avaient pas produit leur titre de propriété, et qu’ils n’étaient pas en mesure de justifier d’un droit ou d’un titre leur permettant d’utiliser ce chemin,

– qu’au vu des explications des parties, et à partir du [Adresse 32] il existait une bifurcation, avec deux chemins permettant d’accéder à la propriété des époux [R], l’un dit ‘[Adresse 30]’ traversant les parcelles appartenant à Mme [MN], et l’autre dit ‘[Adresse 31]’ décrit comme étant plus étroit et plus dangereux par les époux [R],

– que Mme [MN] justifiait être propriétaire des parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 10] et [Cadastre 9], la partie finale du chemin litigieux ayant pour assiette la propriété de celle-ci,

– qu’il résultait des propres écritures des consorts [R] qu’ils avaient un autre accès à leur propriété par le [Adresse 32], suivi jusqu’à son terme, dont ils ne démontraient pas qu’il soit dangereux ou impraticable comme allégué, ou qu’il ne permettrait pas un passage suffisant, notamment pour des véhicules nécessaires à leur exploitation agricole,

– qu’au vu de l’ensemble de ces éléments, aucun trouble manifestement illicite n’était établi,

– que les griefs concernant les caméras étaient justifiés par chacune des parties,

– que les griefs concernant les nuisances (troubles de voisinage) pour les poulaillers étaient établis pour un seul des deux poulaillers visés.

Par déclaration reçue au greffe le 22 novembre 2022, M. [T] [R] a interjeté appel de tous les chefs de l’ordonnance entreprise le concernant.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 17 octobre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il demande à la cour :

– de juger recevable l’intervention volontaire de Mme [D] [Y] épouse [R],

– de déclarer recevables leurs dernières conclusions en réplique et celles notifiées le 3 octobre 2023 en application de l’article 910-4 alinéa 2,

– de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a ordonné à M.

[Z] [F] et Mme [W] [MN] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 5 et 6 du constat du 08 février 2022, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours suivant la signification de la décision,

– d’infirmer l’ordonnance entreprise pour le surplus, et, statuant à nouveau:

* d’ordonner à M. [F] et Mme [MN] de libérer l’accès au  chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29] (dit [Adresse 30]) et retirer tous obstacles passant par les parcelles [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 10] et [Cadastre 25], sous astreinte de 500 euros par jour de retard,

* de condamner M. [F] et Mme [MN] à leur verser une somme de 800 euros par infraction constatée,

* d’ordonner à M. [F] et Mme [MN] de retirer toutes les caméras, dispositifs de surveillance donnant sur les parcelles possédées, exploitées par les consorts [R] ou sur le chemin de leur passage régulier, sous les mêmes astreintes, et visées en pages 10 et 11 du procès-verbal de constat de maître [O] du 12 décembre 2022, ainsi que la caméra figurant sur la pièce 46 produite par eux,

* de débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes,

* de condamner M. [F] et Mme [MN] à leur verser une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 16 octobre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [MN] et M. [F] demandent à la cour :

– de juger l’intervention de Mme [R] irrecevable, celle-ci ayant été partie en première instance,

– de débouter Mme [R] de l’intégralité de ses demandes comme étant nouvelles en appel, sur le fondement des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile,

– de déclarer d’office irrecevables les conclusions sur appel incident notifiées hors délai, soit le 3 octobre 2023, en réplique aux conclusions portant appel incident du 2 février 2023, sur le fondement des dispositions de l’article 910 du code de procédure civile,

– de confirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a :

* dit n’y avoir lieu à référé en ce qui concerne la demande de M. [R] tendant à voir ordonner à M. [F] et Mme [MN] de libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29], et retirer tous obstacles (passant par les parcelles [Cadastre 11], [Cadastre 18], [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 13], [Cadastre 12], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 10], [Cadastre 6], [Cadastre 5] et [Cadastre 3]) sous astreinte,

* fait défense à M. [T] [R], ainsi qu’à tout véhicule et toute personne de son chef, d’emprunter le chemin privé passant sur les propriétés de Mme [MN], à savoir sur les parcelles cadastrées [Cadastre 2], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 23], [Cadastre 24] (ces deux dernières ayant été renumérotées [Cadastre 25]) de la commune de [Localité 39], sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, * ordonné à M. [T] [R] de déplacer son élevage de poule et coqs situé sur la parcelle [Cadastre 5], afin qu’il y ait une distance d’au moins 50 mètres en tous points vis-à-vis du périmètre de la parcelle [Cadastre 25], sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

* ordonné à M. [T] [R] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 25 à 27 du constat du 2 mars 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai 8 jours suivant la signification de la décision,

* condamné M. [T] [R] à payer à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN], pris ensemble, la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné M. [T] [R] aux dépens.

– d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :

* ordonné à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 5 et 6 du constat du 8 février 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai 8 jours suivant la signification de la décision,

* rejeté toutes autres demandes,

et, statuant à nouveau, ils demandent à la cour :

– de condamner M. [R] à déplacer son élevage de poules et coqs situé sur la parcelle cadastrée D [Cadastre 3], dont il est propriétaire, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, celui-ci étant constitutif d’un trouble anormal du voisinage par les chants incessants des coqs, propriété de M. [R],

– de condamner M. [R] à retirer son dispositif de vidéosurveillance filmant leur propriété, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

– de condamner in solidum M. [R] et Mme [Y] épouse [R] à leur payer la somme de 3 600 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner in solidum M. [R] et Mme [Y] épouse [R] au paiement des entiers dépens de l’instance au bénéfice de Mme [MN] et M. [F], dont distraction au profit de maître Ginez Franck, avocat postulant aux offres de droit, avec droit de recouvrement direct selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 17 octobre 2023.

MOTIFS:

Sur la demande de révocation de la clôture

Les intimés ont conclu le 16 octobre 2023, soit la veille de l’ordonnance de clôture.

Les appelants ont répliqué le 17 octobre suivant à 8H50, en communiquant une nouvelle pièce numéro 20, et sollicité le rabat de l’ordonnance de clôture notifiée aux parties le même jour à 8H34.

A l’audience, avant le déroulement des débats, le conseil des intimés a informé la cour qu’il ne s’opposait pas à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture formée par les appelants.

Ainsi, de l’accord de toutes les parties, l’ordonnance de clôture rendue le 17 octobre 2020 a été révoquée et la procédure à nouveau clôturée, avant l’ouverture des débats.

Sur l’intervention volontaire de Mme [R] et la recevabilité de ses demandes

En vertu de l’article 554 du code de procédure civile : ‘peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité’.

L’article 564 du même code dispose que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait’.

Et, l’article 566 du même code dispose que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l’espèce, contrairement à ce que soutiennent les intimés, Mme [D] [Y] épouse [R] n’a pas été considérée comme une partie en première instance, puisque l’ordonnance déférée mentionne exclusivement M. [T] [R] en qualité de demandeur, ce dernier ayant fait délivrer en son seul nom l’assignation en référé.

Le premier juge a retenu que seul M. [R] formulait des prétentions dans ses dernières conclusions, que les défendeurs avaient relevé l’absence dans la cause de Mme [Y], et qu’il ne pouvait être déduit, même implicitement, des dernières écritures notifiées par les époux [R], que Mme [R] avait la qualité d’intervenante volontaire à l’instance.

L’intervention volontaire en cause d’appel de Mme [D] [Y] épouse [R] est donc parfaitement recevable.

Et, dans la mesure où Mme [D] [Y] épouse [R] formule en appel les mêmes demandes que son mari, elle ne fait que s’associer à celles-ci, de sorte que ses demandes apparaissent recevables en ce qu’elles peuvent être considérées comme des demandes complémentaires nécessaires au sens de l’article 566 susvisé.

En conséquence, l’intervention volontaire en cause d’appel de Mme [D] [Y] épouse [R] et les demandes qu’elle formule seront déclarées recevables.

Sur les troubles manifestement illicite

Aux termes de l’article 835 alinéa 1 du code de procédure civile : ‘le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite’.

Le trouble manifestement illicite visé par ce texte désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. Il doit être constaté lorsque, même en l’absence de servitude établie, il est fait obstacle à l’utilisation paisible et prolongée d’un passage. Peu importe alors la nature juridique de ce dernier dont l’appréciation relève de la compétence exclusive du juge du fond.

Le trouble manifestement illicite peut également résulter d’une voie de fait, entendue comme un comportement s’écartant si ouvertement des règles légales et usages communs, qu’il justifie de la part de celui qui en est victime le recours immédiat à une procèdure d’urgence afin de le faire cesser. Tel est le cas lorsque, par l’édification soudaine d’un obstacle, le propriétaire d’un fonds perturbe de manière unilatérale un passage faisant jusqu’alors l’objet d’un usage paisible et continu.

L’existence de contestations, fussent-elles sérieuses, n’empêche pas le juge de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Enfin, pour apprécier la réalité de ce dernier, la cour d’appel, statuant en référé, doit se placer au jour où le premier juge a rendu sa décision et non au jour où elle statue.

En l’espèce, les parties se prévalent de différents troubles qualifiés de manifestement illicites auxquels elles demandent qu’il soit mis fin.

S’agissant de l’accès à la propriété des époux [R]

Il résulte des pièces régulièrement versées aux débats et des explications des parties :

– que par ordonnance de référé du 27 novembre 1974, un expert géomètre a été désigné suite à l’assignation délivrée par M. [C] [U] (père de Mme [V] [U] et de M. [E] [U], vendeurs du bien aux époux [R]), à l’encontre de Messieurs [K] et [MN] (père de Mme [W] [MN]), M. [U] se plaignant de l’enclavement de sa parcelle, et avait précisé :

* que l’acte d’acquisition de M. [MN] du 13 juin 1959 ne mentionnait pas le chemin qui traverse sa propriété,

* que l’acte d’acquisition de M. [U] du 11 avril 1973 n’indiquait pas l’existence d’un chemin le long de la limite Ouest de la parcelle [Cadastre 3] et qu’il en était de même du déplacement du chemin le long de la limite Nord de la parcelle [Cadastre 25],

* avoir constaté de sérieuses différences entre le plan cadastral et le terrain, et établi un plan de situation des parcelles en traçant un chemin de 2 mètres de largeur, le long de la limite existante au Nord de la propriété de M.[MN], en notant qu’il s’agissait d’un chemin au sujet duquel Messieurs [MN] et [K] étaient d’accord,

* que ‘M. [U] n’aura donc pas à indemniser Messieurs [MN] et [K], car il ne s’agit pas d’une création de servitude de passage (elle existait au bénéfice des parcelles [Cadastre 3] et [Cadastre 4]) mais du déplacement de cette servitude confirmée par l’accord de 1961″, seul l’élargissement à 3,50 mètres au lieu de 2 mètres donnant lieu à indemnisation sur une bande de 1,50 mètre, soit un total de 54 m2 réparti à hauteur de 41m2 pour M. [K] (soit 410 francs) et 13m2 pour M. [MN] (soit 130 francs),

* que dans l’accord de 1961 signé par M. [X] [L] [MN], M. [H] [K] et M. [L] [P], chacun donnait l’autorisation d’élargir le chemin communal traversant leurs parcelles jusqu’à un maximum de deux mètres, soit la parcelle [Cadastre 9] pour M. [MN], la parcelle [Cadastre 5] pour M. [K] et la parcelle [Cadastre 3] pour M. [P],

– que suite au courrier du 15 mai 1976, dans lequel M. [U] indiquait à M. [MN] qu’il avait obtenu l’accord de M. [K] pour passer sur le chemin traversant sa propriété afin d’accéder à son terrain, et sollicitait le sien, M. [MN] lui répondait ‘accepter sa demande et lui accorder le droit de passage, sans rémunération pour les 13 m2 dont il avait besoin car il désirait vivre en bonne intelligence avec ses voisins’,

– que dans une ‘attestation afin de rétablir la liberté de circuler sur le chemin en terre de [Adresse 32]’ en date du 28 août 2022, Mme [V] [U], indique avoir toujours utilisé le haut du chemin en terre qui prolonge le [Adresse 29] lors de ses déplacements en voiture, qu’il s’agissait de la portion de chemin la moins abrupte située à droite en montant vers la propriété; que ses parents, qui y habitaient auparavant, y avaient circulé dans les mêmes conditions depuis les années 1970 et avaient naturellement participé à son entretien, l’accès via ce chemin étant l’une des conditions du permis de construire de leur villa,

– que dans une attestation sur l’honneur en date du 9 juin 2022, M. [M] [A], ancien brigadier de police municipale en retraite, indique qu’il utilisait depuis 1994 le chemin litigieux, dans le cadre de son entraînement sportif, et majoritairement avec son véhicule, jusqu’à son entrave par obstacles, chaînes et autres barbelés par Mme [MN] en 2022, précisant que ce chemin passant côté Nord était moins dangereux pour accéder à la propriété des époux [R], dont il connaissait les difficultés avec leurs voisins,

– que dans une attestation sur l’honneur en date du 7 janvier 2022, Mme [J] [I] déclare ‘s’être régulièrement promenée avec des amis, depuis plus de trente ans, au Nord du [Adresse 38] et notamment sur l’ensemble de la boucle de promenade portant maintenant le nom de [Adresse 32] et qu’il lui semble anormal que ce chemin soit, en tout ou en partie, fermé ou obstrué, et, semble-t-il surveillé depuis plusieurs mois de façon arbitraire’,

– que dans une attestation sur l’honneur en date du 7 janvier 2022, M. [G] [N] déclare ‘utiliser les chemins de promenade en bout de la piste du [Adresse 29] depuis 1990. Vérification faite, ceci concerne en particulier la boucle de chemin apparaissant au cadastre et qui traverse, entre autres, les parcelles [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 21]” et ‘apporter son soutien à la famille [R], qui (lui) semble vivre une période difficile causée par leurs voisins immédiats, à savoir le couple [MN] et [F], eû notamment égard à la revendication de ces derniers à l’usage exclusif d’une partie de ce chemin (qu’il) connait pourtant depuis toujours’.

S’il est exact que l’acte d’acquisition des époux [R] ne comporte aucune précision sur la désignation et la localisation précise du chemin permettant d’accéder à leur propriété, puisqu’il indique seulement ‘l’accès à la propriété se fait par un chemin privé desservant plusieurs propriétés, ce chemin traverse la forêt mais n’a jamais fait l’objet de servitude’, il résulte clairement du plan cadastral versé aux débats par les appelants, dont le contenu n’est pas contesté, qu’après avoir emprunté le [Adresse 32], il existe une bifurcation, avec deux chemins en terre permettant d’accéder à la propriété des époux [R] :

1/ l’un dit ‘[Adresse 30]’ traversant les parcelles [Cadastre 21], [Cadastre 20], [Cadastre 18], [Cadastre 16], [Cadastre 15],[Cadastre 14], [Cadastre 13], [Cadastre 10],[Cadastre 9], [Cadastre 7] et [Cadastre 6] dont les parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 1] [Cadastre 10] [Cadastre 14] [Cadastre 15] [Cadastre 16] appartiennent à Mme [MN],

2/ l’autre dit ‘[Adresse 31]’ traversant les parcelles [Cadastre 21], [Cadastre 20], [Cadastre 19], [Cadastre 16], [Cadastre 17],[Cadastre 22], et [Cadastre 7] dont les parcelles [Cadastre 16] et [Cadastre 7] appartiennent à Mme [MN],

ces deux chemins se rejoignant à l’extrémité de la parcelle [Cadastre 25] sur laquelle est édifiée la maison de Mme [MN] (angle aigü se trouvant en haut à droite de cette parcelle telle que figurant sur l’extrait du plan cadastral), étant précisé qu’il est ensuite nécessaire de longer la limite existante au Nord de la propriété de Mme [MN] (parcelle désormais numérotée [Cadastre 25]).

Comme le font exactement valoir les appelants, l’ordonnance entreprise, en leur interdisant d’emprunter le chemin privé passant sur les propriétés de Mme [MN], à savoir sur les parcelles cadastrées [Cadastre 2], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 23], [Cadastre 24] (ces deux dernières ayant été renumérotées [Cadastre 25]) de la commune de [Localité 39], les empêche en réalité d’accéder à leur propriété, que ce soit par le [Adresse 30] ou par le [Adresse 31] susvisés, alors que même que le premier juge a considéré qu’ils avaient un accès suffisant en poursuivant le [Adresse 32] jusqu’à son terme et en passant par le [Adresse 31].

Or, que l’on emprunte le [Adresse 30] ou le [Adresse 31], il faut ensuite longer et pénétrer sur la parcelle [Cadastre 25] sur laquelle est édifiée la maison de Mme [MN], pour accéder à la parcelle des époux [R], dont l’auteur était M. [U], lequel avait obtenu l’autorisation de M. [MN] (père de Mme [MN]) pour passer sur sa propriété, étant observé que l’expertise diligentée en exécution de l’ordonnance de référé du 27 novembre 1974 était consécutive à une opposition entre M. [MN] (propriétaire de la parcelle renumérotée [Cadastre 25]) et M. [K] (propriétaire de la parcelle numérotée [Cadastre 5] située au Nord de la propriété [MN] et longeant la parcelle [Cadastre 3] (devenue propriété des époux [R]) pour permettre à M. [U] d’accéder à celle-ci, aucun litige n’étant à l’époque mentionné concernant les deux chemins du haut ou du bas traversant de nombreuses parcelles appartenant à plusieurs propriétaires à partir de la bifurquation du [Adresse 32], lesquels étaient manifestement utilisés pour leur permettre d’accéder à leurs propriétés, dont l’accès à la parcelle [Cadastre 3].

Au vu des explications des parties, il n’est pas contesté que du vivant de M. [MN], les consorts [U], puis les époux [R] à partir de leur installation en mars 2011, ont toujours utilisé le [Adresse 30] à partir de cette bifurquation pour rejoindre leur propriété, et ce jusqu’en 2022, période à laquelle les époux [R] et Mme [MN] se sont opposés.

Mme [MN] et son compagnon M. [F], faisant valoir qu’ils ont subi de multiples nuisances de la part des époux [R], soutiennent avoir été amenés à condamner l’accès à leur chemin privé en leur interdisant le passage (page 3 de leurs écritures).

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments, que l’utilisation par les époux [R] du [Adresse 30] à partir de la bifurquation pour accéder à leur propriété, notamment avec leurs véhicules, est ancienne.

S’il est exact que les attestations susvisées n’ont pas été établies dans le respect des dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, il convient de rappeler que celles-ci ne sont pas prescrites à peine de nullité, et qu’il revient au juge d’apprécier souverainement leur portée.

Or, en l’espèce, les attestations de Mme [V] [U] (venderesse du bien acquis par les époux [R]) et de M. [M] [A] (ancien brigadier de police municipale en retraite), compte tenu de la personnalité de leurs auteurs et des éléments du dossier, apparaissent cohérentes et sincères, d’autant qu’elles corroborent l’utilisation constante, paisible et ancienne de ce passage par les appelants, au moins jusqu’en 2021, soit pendant dix années après l’acquisition des époux [R], et plus de 30 ans après l’installation de M. [U] qui les avait précédé.

Contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, en condamnant l’accès à ce [Adresse 30] passant sur leur propriété, dans le but avoué d’empêcher les époux [R] d’accéder à leur propriété, comme ils le faisaient auparavant, notamment avec leurs véhicules, et d’empêcher tout visiteur d’y accéder, Mme [MN] et M. [F] ont perturbé de manière unilatérale et soudaine, un passage faisant jusqu’alors l’objet d’un usage continu depuis de nombreuses années, ce qui constitue un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser, et ce, indépendamment de tout débat relatif à la nature du chemin litigieux, et à l’absence d’une servitude de passage insérée dans l’acte d’acquisition de la propriété des époux [R].

En outre, contrairement à ce que soutiennent les intimés, et indépendamment de la largeur du [Adresse 31], il résulte du procès-verbal de constat établi par maître [B], huissier de justice à [Localité 34], le 12 décembre 2022, que ce chemin n’est manifestement pas praticable facilement en voiture, du fait de l’existence d’énormes nids de poules, de sa largeur variant sur l’ensemble de son tracé entre 2,03 mètres et 2,88 mètres et de sa sinuosité, ainsi que du devers visible sur les photographies figurant en pages 6 et 7, étant précisé qu’il existe un fossé du côté gauche du chemin, lequel est bordé de part et d’autre d’une végétation abondante.

Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, il ne peut être raisonnablement considéré que les époux [R] ne démontrent pas que le [Adresse 31] est dangereux ou serait insuffisant.

En conséquence, l’ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu’elle a :

– dit n’y avoir lieu à référé en ce qui concerne la demande de M. [R] tendant à voir ordonner à M. [F] et Mme [MN] de libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29], et retirer tous obstacles (passant par les parcelles [Cadastre 11], [Cadastre 18], [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 13], [Cadastre 12], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 10], [Cadastre 6], [Cadastre 5], [Cadastre 3],) sous astreinte,

– fait défense à M. [T] [R], ainsi qu’à tout véhicule et toute personne de son chef, d’emprunter le chemin privé passant sur les propriétés de Mme [MN], à savoir sur les parcelles cadastrées [Cadastre 2], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 23], [Cadastre 24] (ces deux dernières ayant été renumérotées [Cadastre 25]) de la commune de [Localité 39], sous astreinte de 150 euros par infraction constatée,

et, statuant à nouveau, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite susvisé, il convient :

– d’ordonner à M. [F] et Mme [MN] de libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29] (dit [Adresse 30]) et retirer tous obstacles passant par les parcelles [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 10] et [Cadastre 25], sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de 3 mois,

– de condamner M. [F] et Mme [MN] à verser aux époux [R], pris ensemble, une somme de 300 euros par infraction constatée, soit en cas d’installation ou de maintien d’un ou plusieurs obstacles empêchant de circuler sur le tracé du chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29] (dit [Adresse 30]) passant sur les parcelles [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 10] et [Cadastre 25], à compter de la signification du présent arrêt.

S’agissant de la violation de l’intimité et de la vie privée par l’installation de caméras et appareils photographiques

Les demandes des époux [R]

Comme l’a exactement relevé le premier juge, il résulte du constat d’huissier du 8 février 2022, pages 5 et 6 qu’un dispositif intitulé ‘Victure’ a été installé sur un arbre situé juste à côté du portail à l’intérieur de la propriété de Mme [MN], qui est une camera, positionnée en direction de la voie en terre et du terrain appartenant aux époux [R], de sorte que ces derniers peuvent être filmés lorsqu’ils se rendent à leur propriété en passant par ce chemin, ce qui constitue une atteinte à leur vie privée.

En revanche, il n’est pas démontré que la caméra installée à gauche d’une fenêtre située juste en dessous de la toiture de la maison de Mme [MN] est susceptible de capter des images à l’extérieur de sa propriété, et notamment à l’entrée de la propriété des époux [R].

Il s’ensuit que l’ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu’elle fait partiellement droit à la demande des époux [R] en :

– ordonnant à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 5 et 6 du constat du 8 février 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

– rejetant les autres demandes des époux [R] concernant les caméras.

Les époux [R] demandent en outre à la cour d’ordonner à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer toutes les caméras, dispositifs de surveillance donnant sur les parcelles possédées, exploitées par eux ou sur le chemin de leur passage régulier, sous astreinte, visées en page 10 et 11 du procès-verbal de constat de maître [O] du 12 décembre 2022, ainsi que la caméra figurant sur la photographie produite en pièce 46 par leurs soins.

Il résulte du procès-verbal de constat du 7 décembre 2022 établi par maître [S], commissaire de justice, à la demande de Mme [MN], qu’une caméra orange a été installée en hauteur sur un pylone en bois supportant un câble électrique, devant l’entrée de la propriété de Mme [MN] (parcelle D [Cadastre 25]), dos au portail, aux fins de pouvoir filmer tout véhicule et toute personne susceptible d’emprunter le chemin utilisé par les époux [R] jusqu’en 2022, qu’ils ont eu interdiction d’emprunter suite à la décision entreprise, une photographie numéro 8 permettant de visualiser la présence du véhicule utilisé par les époux [R] ayant été annexée au procès-verbal après visionnage du film enregistré sur la journée du 7 décembre 2022.

Compte tenu de l’infirmation de l’ordonnance entreprise sur ce point et du rétablissement du droit de passage au bénéfice des époux [R], sur la propriété de Mme [MN] par le [Adresse 30], la présence de cette caméra (visée en pages 10 et 11 du procès-verbal du 12 décembre 2022 établi par maître [O] qui est la même que celle qui figure en pages 6 et 8 du procès-verbal de constat du 7 décembre 2022 établi par maître [S]), filmant les allées et venues des époux [R] et de tout visiteur rejoignant leur domicile, leur cause une atteinte manifeste à leur vie privée, et constitue un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser, de sorte qu’il sera fait droit à leur demande tendant à la voir supprimer, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 3 mois.

En revanche, la présence d’autres caméras, ou dispositifs de surveillance susceptibles de porter une atteinte manifeste à la vie privée des époux [R] n’est pas démontrée, étant observé que la pièce 46 visée par les appelants est une photocopie d’une photographie qui ne permet pas de déterminer que l’élément fixé au mur est une caméra en état de fonctionnement susceptible de filmer les allées et venues des époux [R] sur le chemin emprûnté par eux.

Il s’ensuit que la demande plus générale des époux [R] tendant à voir

‘ordonner à M. [F] et à Mme [MN] de retirer toutes les caméras, dispositifs de surveillance donnant sur les parcelles possédées, exploitées par eux ou sur le chemin de leur passage régulier sous les mêmes astreintes, ainsi que la caméra figurant sur leur pièce 46″, sera rejetée.

De même, il n’est nullement établi, avec l’évidence requise en référé, que la caméra blanche se trouvant ‘sur la façade de la maison de Mme [MN], sous la toiture’ dont l’objectif est fixe et tourné vers le sol, est susceptible de capter les allées et venues des époux [R] à l’entrée ou à l’intérieur de leur propriété (page 11), étant observé qu’aucun mouvement de ces deux caméras n’a été constaté par l’huissier requis par les époux [R] lors de ses constatations.

En conséquence, cette demande sera également rejetée.

La demande de Mme [MN] et de M. [F]

Contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, il ne résulte pas du procès-verbal de constat du 2 mars 2022 produit par les consorts [MN] [F] que la caméra noire se trouvant ‘sur un poteau électrique implanté en bordure du chemin d’accès menant au portail d’entrée de la parcelle [Cadastre 3]”, dont l’huissier a précisé que l’objectif était tourné vers le sol, est susceptible de porter atteinte à l’intimité de leur vie privée, en l’absence d’éléments recueillis par l’huissier au cours de ses constatations qui ne font que reprendre les déclarations de M. [F] selon lesquelles ‘en temps normal, la caméra est orientée vers la propriété de Mme [MN]’.

Il s’ensuit que l’ordonnance entreprise doit être infirmée en ce qu’elle a

ordonné à M. [T] [R] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 25 à 27 du constat du 2 mars 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai 8 jours suivant la signification de la décision, et la demande formée par les intimés tendant à obtenir la condamnation de M. [R] à retirer son dispositif de vidéosurveillance filmant leur propriété, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir sera également rejetée.

S’agissant des poulaillers

Si l’huissier indique en page 3 du procès-verbal de constat d’huissier du 2 mars 2022, produit par les consorts [MN] [F], qu’il a relevé des chants de coqs incessants, à 8 heures du matin, les photographies annexées en pages 4, 5 et 6 ne permettent pas d’identifier un poulailler, ni de déterminer où se trouve précisément les éléments hétéroclites visés par le premier juge par rapport à la propriété des intimés, étant observé qu’il n’est pas possible de distinguer la présence de coqs sur les photographies annexées en page 5.

Contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, il ne résulte pas, avec l’évidence requise en référé, que le ‘premier poulailler’ installé sur la parcelle D [Cadastre 5] n’appartenant pas à M. [R], mais utilisée par lui pour élever des poules, leur causerait un trouble anormal de voisinage, étant observé que les propriétés des époux [R] et des consorts [MN] [F] se trouvent en campagne et en forêt, ce qui pose la question de l’anormalité de troubles consécutifs aux cris d’animaux habituellement présents en ces lieux, dont l’appréciation incombe au juge du fond.

Il s’ensuit que l’ordonnance entreprise doit être infirmée en ce qu’elle a

ordonné à M. [T] [R] de déplacer son élevage de poules et coqs situé sur la parcelle [Cadastre 5], afin qu’il y ait une distance d’au moins 50 mètres en tous points vis-à-vis du périmètre de la parcelle [Cadastre 25], sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, et la demande des intimés à ce titre sera rejetée.

En revanche, elle sera confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes des consorts [MN] [F] s’agissant du deuxième poulailler situé sur la propriété de M. [R] (pages 22 et suivantes du constat d’huissier précité), le premier juge ayant exactement relevé qu’il ne ressortait pas des constatations de l’huissier qu’il serait à l’origine de nuisances susceptibles de caractériser un trouble anormal de voisinage.

Au surplus, il résulte d’un courrier du service santé protection animales de la direction départementale de la protection des populations en date du 17 novembre 2022, qu’une inspection menée sur la propriété de M. [R] a permis de constater l’absence de bâtiment et de poules pondeuses sur le site visité à cette date.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, il convient d’infirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a condamné M. [T] [R] à payer aux consorts [MN] [F], pris ensemble, une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens

Succombant principalement, M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] seront condamnés à payer à M. [T] [R] et à Mme [D] [Y] épouse [R] une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et seront déboutés de leur demande à ce titre.

Ils seront également condamnés aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Constate que l’ordonnance de clôture a été révoquée à l’audience et que l’affaire, à nouveau clôturée avant l’ouverture des débats, est en état d’être jugée,

Confirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :

– ordonné à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer les caméras ou dispositifs de surveillance apparaissant pages 5 et 6 du constat du 8 février 2022, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

– rejeté les autres demandes des époux [R] concernant les caméras,

– rejeté les demandes des consorts [MN] [F] s’agissant du deuxième poulailler situé sur la propriété de M. [R] (pages 22 et suivantes du constat d’huissier précité),

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau, et, y ajoutant :

Ordonne à M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] de libérer l’accès au chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29] (dit [Adresse 30]) et retirer tous obstacles présents sur les parcelles [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 10] et [Cadastre 25], sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de 3 mois,

Condamne M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] à verser à M. [T] [R] et à Mme [D] [Y] épouse [R], pris ensemble, une somme de 300 euros par infraction constatée, en cas d’installation ou de maintien d’un ou plusieurs obstacles empêchant de circuler sur le tracé du chemin cadastré faisant continuité avec le [Adresse 29] (dit [Adresse 30]) passant sur les parcelles [Cadastre 16], [Cadastre 15], [Cadastre 14], [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 6], [Cadastre 10] et [Cadastre 25], et ce, à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] à retirer la caméra orange se trouvant en hauteur sur un pylone en bois supportant un câble électrique (visée en pages 10 et 11 du procès-verbal du 12 décembre 2022 établi par maître [O] et en pages 6 et 8 du procès-verbal de constat du 7 décembre 2022 établi par maître [S]) devant l’entrée de la propriété de Mme [MN] (parcelle D [Cadastre 25]), sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant une durée de 3 mois,

Rejette la demande tendant à voir ordonner à M. [Z] [F] et à Mme [W] [MN] de retirer toutes les caméras, dispositifs de surveillance donnant sur les parcelles possédées, exploitées par eux ou sur le chemin de leur passage régulier, ainsi que la caméra figurant sur la photographie produite en pièce 46, sous les mêmes astreintes,

Rejette les demandes formées par M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] tendant à voir ordonner à M. [T] [R] de déplacer son élevage de poules et coqs situé sur la parcelle [Cadastre 5], et sur sa parcelle [Cadastre 3], sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

Condamne M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] à payer à M. [T] [R] et à Mme [D] [Y] épouse [R] une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] de leur demande formulée sur le même fondement,

Condamne M. [Z] [F] et Mme [W] [MN] aux entiers dépens de première instance et d’appel, et dit qu’ils seront recouvrés en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La greffière Le président

 


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