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Vidéosurveillance : 30 janvier 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/03871

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Vidéosurveillance : 30 janvier 2024 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/03871

ARRET

N°95

CPAM [Localité 7] [Localité 3]

C/

[L] [L]

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 30 JANVIER 2024

*************************************************************

N° RG 22/03871 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IRBD – N° registre 1ère instance : 22/00637

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (POLE SOCIAL) EN DATE DU 11 juillet 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

CPAM [Localité 7] [Localité 3]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée et plaidant par Mme [B] [N], munie d’un pouvoir régulier

ET :

INTIME

Monsieur [C] [L] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant

DEBATS :

A l’audience publique du 26 octobre 2023 devant M. Renaud Deloffre, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Audrey Vanhuse

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. Renaud Deloffre en a rendu compte à la cour composée en outre de :

M. Philippe Mélin, président,

Mme Graziella Hauduin, président,

et M. Renaud Deloffre, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 30 janvier 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, M. Philippe Mélin, président a signé la minute avec Mme Diane Videcoq-Tyran, greffier.

*

* *

DECISION

La caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] (la CPAM) a été destinataire d’une déclaration d’accident du travail établie le 20 septembre 2021 par la société [6] (la société [6]) relative à un sinistre survenu le 31 août 2021 au préjudice de M. [C] [L] [L], agent de sécurité qualifié.

Aux termes de cette déclaration d’accident du travail, l’employeur indique que « le salarié déclare avoir subi un préjudice moral lors de l’audit effectué par une société mandatée par notre client ».

Le certificat médical initial du 2 septembre 2021, joint à cette déclaration, constate un « traumatisme psychologique suite à un échange verbal – angoisse, anxiété, syndrome dépressif ».

Après avoir diligenté une enquête, la caisse primaire d’assurance maladie a notifié le 21 décembre 2021 sa décision de refus de prendre en charge l’accident déclaré en estimant que les faits invoqués le 31 août 2021 ne constituent pas un accident au sens de la législation professionnelle en raison de l’absence de preuve d’un fait accidentel inhabituel et anormal ».

M. [L] [L] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM, laquelle a rejeté son recours par décision du 1er avril 2022, puis le pôle social du tribunal judiciaire de Lille d’abord d’un recours contre la décision implicite de rejet de la commission puis d’un recours contre la décision expresse de rejet rendue par cette dernière.

Par jugement du 11 juillet 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille a :

– ordonné la jonction des deux procédures 22/00637 et 22/00810.

– dit que la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] doit prendre en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels l’accident du travail dont a été victime M. [C] [L] [L] le 31 août aout 2021 à 14 heures 45 ainsi que les soins et arrêts prescrits consécutivement à celui-ci ;

– ordonné l’exécution provisoire de la décision ;

– condamné la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] aux dépens de l’instance.

Le jugement retient que la comparaison des questionnaires assuré et employeur vient corroborer la position de M. [C] [L] [L] selon laquelle il a fait l’objet d’un contrôle inopiné de la part d’un agent d’audit mandaté par la société [5], auprès de qui il avait été mis à disposition par son employeur et que le certificat médical initial établi le 2 septembre 2021, deux jours après l’accident déclaré, faisant état d’un « traumatisme psychologique suite à un échange verbal [illisible] syndrome dépressif » corroborait la survenance d’une lésion psychologique dans un temps proche de l’accident, et conclut qu’il s’en déduisait qu’un choc psychologique était survenu au temps et au lieu du travail à M. [L] [L] justifiant l’application de la présomption à laquelle la caisse n’apportait pas de preuve contraire.

Un appel de cette décision a été interjeté par la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] par courrier avec accusé de réception du 25 juillet 2022.

Par conclusions enregistrées au greffe le 17 janvier 2023 et soutenues oralement, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] demande à la cour de :

– la recevoir dans ses conclusions ;

– débouter M. [L] [L] de ses demandes, fins et conclusions ;

– infirmer, en toutes ses dispositions, la décision rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Lille en date du 11 juillet 2022 ;

– confirmer le refus de prise en charge de l’accident du 31 août 2021 au titre de la législation professionnelle ;

– condamner M. [L] [L] aux éventuels frais et dépens.

À l’audience, la caisse primaire d’assurance maladie expose ne pas avoir eu communication des pièces produites par M. [L] [L] et demande à la cour de les écarter.

Elle expose que M. [L] [L] ne rapporte pas la preuve d’un fait accidentel soudain, daté et précis survenu le 31 août 2021 en faisant observer que le fait d’être questionné par un auditeur ne suffit pas à caractériser ce fait accidentel puisqu’il s’agit du simple usage par l’employeur de son pouvoir de direction dans des conditions normales et peu important le ressenti du salarié à cet égard.

Elle fait valoir que M. [L] [L] a poursuivi normalement son activité jusqu’à 20h15 alors que les faits seraient survenus à 14h45, qu’il a informé son employeur 17 jours après les faits soit très tardivement et que le certificat médical initial a été établi deux jours après les faits.

En dernier lieu, la CPAM indique que la situation décrite par M. [L] [L] s’inscrit davantage dans une situation de dégradation des relations de travail relevant d’un contexte global correspondant à une série d’évènements ayant évolué lentement et sans qu’on puisse leur donner une origine ou une date certaine.

M. [L] [L] a adressé ses conclusions au greffe qui les a enregistrées le 23 octobre 2023 et il les a soutenues oralement à l’audience.

Le dispositif de ses conclusions est le suivant :

« M. [L] [C] demande aux juges de se prononcer sur l’irrégularité du contrôle du 31 août 2021 par le supposé cabinet d’audit Transparence et la réparation du préjudice résultant de l’accident du travail dont il a été victime ;

M. [L] [C] demande aux juges de se prononcer favorablement à sa demande de requalification de son absence à la convocation à l’entretien préalable du 17 février 2022 comme une démission et de la qualifier en prise d’acte ;

Demande aux juges de se prononcer sur les griefs invoqués à l’appui de sa prise d’acte ;

Demande un recours contre l’attestation de suivi médical du docteur [W], médecin du travail ;

Débouter la CPAM de [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Confirmer la décision du pôle social du tribunal judiciaire de Lille du 11 juillet 2021 ;

Condamner la société [4] pour le manquement à l’obligation de sécurité pour « évaluation non objective source de préjudice pour sa santé mentale » et à verser la somme de 10 000 euros à M. [L] ;

Condamner pour des faits de violence volontaires la société [4] mandataire du cabinet d’audit Transparence pour avoir séquestré M. [L] et verser 5 000 euros à M. [L] [C] ;

Condamner la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] qui a fait appel à la police pour les faits de violence sur personne 1 000 euros ;

Verser à M. [L] l’indemnité temporaire d’inaptitude qu’il n’a pas perçu jusqu’à ce jour, soit 1 500 euros ;

Condamner la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] pour les faits de faux et usage de faux et allouer à M. [L] à titre des dommages et intérêts la somme de 2 500 euros ;

Condamner solidairement la CPAM de [Localité 3] et Mme [X] pour abus de faiblesse à et verser à M. [L] [C] une somme de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts ;

Dire le licenciement de M. [L] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Subsidiairement,

Condamner en conséquence la société [4] à verser l’indemnité compensatrice pour le préavis non exécuté ; (du 21 février au 21 avril 2021 donc 1 606,25×2 = 3 212,5 euros et les congés payés y afférent ;

Infiniment subsidiairement,

Indemnité compensatrice de préavis légal complémentaire de 1 mois = 1 606,25 euros

Une indemnité spéciale de licenciement qui est égale au double de l’indemnité légale de licenciement prévue par l’article L. 1234-9 du code du travail

Condamner la société [4] à réparer l’intégrale des préjudices subis et non indemnisés par la rente (souffrances physiques et morales, etc’ articles L. 1235-1 à L. 1235-6 et L. 1235-10 à L. 1235-17 du code du travail) et article 1382 du code civil

Condamner la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] à verser à M. [L] [L] la somme de 2 000 euros pour les frais répétibles (impression, rédaction, courrier, connexion, internet, conseils, transport’) ;

Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Condamner la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] aux dépens de l’instance ».

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Motifs de l’arrêt

Sur les dispositions du jugement relatives à la jonction des procédures portant les numéros de répertoire général 22/00637 et 22/00810.

Les procédures portant les numéros de répertoire général 22/00637 et 22/00810 étant relatives l’une à la contestation par M.[L] [L] de la décision implicite de la commission de recours amiable de la caisse, , l’autre à la contestation par lui de la décision expresse de rejet émanant de cette commission et ces procédures étant en conséquence étroitement connexes puisque tendant exactement aux mêmes fins, c’est à juste titre que les premiers juges en ont ordonné la jonction ce qui justifie la confirmation des dispositions du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande de la CPAM en rejet des débats des pièces produites par l’intimé

Il résulte des articles 15 et 135 du code de procédure civile que le juge peut écarter des débats des pièces qui n’ont pas été communiquées en temps utile.

La CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] fait valoir qu’elle n’a pas eu connaissance des pièces de M. [L] [L] et que ce dernier ne justifie aucunement les lui avoir communiquées en produisant un courrier d’envoi de ces pièces et son accusé de réception.

Il convient en conséquence d’écarter des débats l’intégralité des pièces de M. [L] [L].

Sur les fins de non-recevoir relevées d’office tirées du caractère nouveau des demandes de M. [L] [L] et de l’absence d’appel en cause de l’employeur de ce dernier.

Attendu qu’aux termes de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

M. [L] [L] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3] suite au rejet de sa demande de prise en charge de l’accident déclaré comme survenu le 31 août 2021.

Aux termes du jugement dont appel, lors de l’audience en première instance M. [L] [L] demandait au tribunal de dire que l’accident du travail déclaré le 20 septembre 2021 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

L’exposé des prétentions de M. [L] [L] devant le tribunal ne comporte aucune mention des autres griefs dont il fait état et qu’il n’en ressort pas qu’il soutenait devant les premiers juges d’autres demandes que celle de prise en charge de son accident au titre de la législation professionnelle.

En application du texte précité, il convient de relever d’office l’irrecevabilité de toutes les demandes de M. [L] [L] à hauteur d’appel tendant à d’autres fins que la seule reconnaissance de l’accident déclaré le 20 septembre 2021 en tant qu’accident du travail, qu’il s’agisse de ses demandes de réparation de divers préjudices et de versement de dommages et intérêts, d’indemnités compensatrices, d’une indemnité spéciale de licenciement, de condamnation de la CPAM et de Mme [O] [X] pour des faits de violences volontaires, violences sur personne, faux et usage de faux, abus de faiblesse, de déclaration de l’absence de cause réelle et sérieuse, de requalification de son absence à la convocation à un entretien préalable en prise d’acte, d’annulation du contrôle effectué par le cabinet d’audit, de recours contre l’attestation de suivi médical établie par le docteur [W].

Une partie des demandes étant en outre dirigée contre l’employeur de l’appelant, sans que ce dernier ait été appelé en cause, il convient de relever d’office leur irrecevabilité en application de l’article 14 du code de procédure civile aux termes duquel nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

Il y a lieu, pour assurer le respect du principe de la contradiction tiré de l’article 16 du code de procédure civile, d’ordonner la réouverture des débats sur ce point selon les modalités prévues au dispositif du présent arrêt.

Sur la matérialité de l’accident déclaré.

Il résulte de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d’événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l’occasion du travail, dont il a résulté une lésion corporelle ou d’ordre psychologique, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci.

Il résulte de ce texte que toute lésion survenue au temps et au lieu du travail doit être présumée comme un accident imputable au travail, sauf s’il est rapporté la preuve qu’elle a une origine totalement étrangère à celui-ci, et que dès lors que le salarié, ou la personne subrogée dans ses droits, rapporte la preuve que la lésion est survenue au temps et au lieu du travail, il n’a pas à établir la réalité du lien entre ce dernier et la lésion et donc l’existence d’un fait générateur particulier (en ce sens en dernier lieu : 2e Civ., 9 septembre 2021, pourvoi n° 19-25.418).

Il en résulte que la preuve de la survenance de la lésion physique au temps et au lieu du travail est libre mais qu’elle ne peut être rapportée par les seules déclarations du salarié qui doivent être corroborées par des éléments objectifs ou par des présomptions graves, précises et concordantes (Civ.Soc., 8 octobre 1998, n° 9710914 précité ; Civ. 2ème, 28 janvier 2012, n° 11-18.308) qui peuvent résulter notamment d’un certificat médical confirmant la réalité des lésions établi le jour même ou très peu de temps après l’accident (Civ. 2ème, 22 janvier 2009, n° 07-21.726 ; Civ. 2ème, 8 janvier 2009, n° 07-20.506 ; Civ. 2ème, 12 juin 2007, n° 06-12.833) ou d’un témoignage (Civ. 2ème, 25 juin 2009, n° 08-17.155 ; Soc. 1er juillet 1999, n° 97-20.526).

En ce qui concerne la lésion de nature psychique, il résulte du texte précité qu’il convient de distinguer selon qu’il est soutenu par la victime qu’elle se serait manifestée au temps et au lieu du travail par des signes extérieurs révélateurs d’un choc ou d’un traumatisme émotionnel, tel qu’un malaise, des pleurs ou tout comportement de la victime de nature à laisser supposer une perturbation d’ordre psychique, , la victime devant alors établir pour bénéficier de la présomption d’imputabilité l’existence d’une manifestation extérieure suffisante à caractériser la lésion (en ce sens que caractérise une lésion l’endormissement du salarié sur son lieu de travail nécessitant son hospitalisation et dont il s’était ensuite avéré qu’il résultait d’une tentative de suicide Civ 2e 20 janvier 2012 n° 10-27.456 / en ce sens que le malaise provoqué sur le lieu de travail par la prise de médicaments pour calmer des angoisses est une lésion l’arrêt du 22 janvier 2015 pourvoi n° 14-10.180 / en ce sens que la victime ayant subi un malaise au temps et au lieu du travail à la suite d’un entretien avec son supérieur hiérarchique, l’accident litigieux était présumé revêtir un caractère professionnel, 2e Civ., 17 février 2022, pourvoi n° 20-16.286) ou selon qu’il n’est pas soutenu par la victime ou qu’il n’est pas démontré par elle l’existence d’un tel signe extérieur suffisant à établir la survenance de la lésion au temps et au lieu du travail auquel cas elle ne peut bénéficier de la présomption d’imputabilité mais doit rapporter la preuve d’un lien de causalité entre la lésion psychique qu’elle a fait constater en dehors du temps et du lieu du travail et son activité professionnelle (sur cette configuration l’arrêt de la 2e Civ du 1er juillet 2003 pourvoi n° 02-30576 publié au Bulletin 2003 II n° 218 p 182 dans une affaire dans laquelle la victime avait déclaré avoir été soudainement atteinte d’une dépression nerveuse deux jours après un entretien d’évaluation au cours duquel lui avait été notifié un changement d’affectation et elle soutenait que cette dépression était consécutive à cet entretien et la Cour de cassation retient que les juges du fond ont souverainement apprécié que l’accident était survenu par le fait ou à l’occasion du travail / Dans le même sens l’arrêt du 15 juin 2004 pourvoi n° 02-31194 au Bull Civ 2004 II n° 298 p 252 rejette-t-il le pourvoi contre un arrêt d’appel ayant retenu que le salarié avait été victime d’un accident du travail en relevant que ses troubles psychologiques étaient la conséquence d’un choc émotionnel provoqué par l’agression dont il avait été victime sur son lieu de travail. De même, l’arrêt du 28 mai 2009 n° de pourvoi 08-16.719 rejette le pourvoi dirigé contre un arrêt ayant retenu, aux termes de son pouvoir souverain d’appréciation, au vu d’expertises médicales judiciaires, que les troubles psychiatriques du salarié résultaient d’une intervention chirurgicale au coude elle-même rendue nécessaire par l’agression dont il avait été victime et qu’il existait donc un lien de causalité entre l’agression et les troubles en question/ Par contre, l’arrêt du 3 avril 2014 pourvoi n° 13-14.863 approuve-t-il les juges du fond d’avoir écarté l’existence d’un lien entre un état dépressif et le travail en relevant que les actes de discrimination imputés par le salarié à l’employeur comme étant à l’origine de sa dépression avaient cessé plus de deux ans et demi avant l’apparition de la dépression et que le lien entre cette dernière et l’activité professionnelle n’était pas établi. Et approuvant les juges du fond de ne pas avoir retenu l’existence d’un tel lien : Civ 24 janvier 2019 pourvoi n° 16-26957, deux arrêts du 2 avril 2015 pourvois n° 14-14437 et n° 14-11.512 ; Civ 4 juillet 2019 pourvoi n°16-15.520).

En l’espèce, M. [L] [L] relate, dans son questionnaire assuré, le déroulement de la journée du 31 août 2021 en ces termes : « Invité à quitter mon poste de travail de façon humiliante devant le personnel et les clients du magasin, l’auditeur m’a exigé de le suivre sans perdre du temps au PC de sécurité où il m’a remis une feuille de composition avec 10 questions et je me devais de répondre à ces questions en dix minutes. J’atteste que j’ai bien composé pendant dix minutes et que pour me rassurer de la fiabilité, les modalités et les enjeux de l’évaluation j’ai demandé à l’auditeur de faire appel à mon employeur pour l’informer de la démarche si elle était légale n’ayant pas été préalablement prévenu comme l’exige la loi. Les caméras de vidéosurveillance peuvent attester mes dires. Bien avant l’évaluation, je me suis fait filmé et humilié devant les clients et le personnel du magasin par l’auditeur. Ce dernier en collectant les informations personnelles me concernant n’a pas respecté la loi. J’ai gardé mon sang-froid et mon comportement irréprochable. Vous m’avez exposé à un risque identifié, sans prendre les mesures de prévention qui s’imposent. Pouvez-vous me dire si l’audit que vous avez commandé a le droit de me filmer et collecter les informations personnelles me concernant ‘ Mon collègue [K] [F] je me demande bien le pourquoi ce dernier qui n’était pas en poste fixe n’a pas été évalué ‘ Et le pourquoi ce dernier a rempli la main courante ne me laissant pas de marge parce que, je fais la fermeture et que ce dernier étant parti 30 minutes avant la fermeture du site ».

Il soutient dans ses écritures qu’il aurait subi un choc psychologique au temps et au lieu du travail et invoque à l’appui de cette affirmation le certificat médical initial établi le 2 septembre 2021 par le docteur [T] faisant état d’un traumatisme psychologique suite à un échange verbal, syndrome dépressif ».

Cependant, M. [L] [L] ne soutient à aucun moment avoir subi un malaise ni même un choc psychique ou émotionnel sur le lieu de travail, indiquant tout au plus avoir été humilié pendant son travail et contestant les méthodes de l’auditeur de la société cliente de l’employeur, et il caractérise et prouve encore moins la survenance chez lui au temps et au lieu du travail d’une quelconque manifestation physique de nature à révéler une lésion psychologique.

Il ne peut donc se prévaloir de la présomption d’imputabilité au travail de la lésion qu’il invoque, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges.

Se pose ensuite la question de savoir s’il établit l’existence d’un lien entre la lésion constatée le 2 septembre 2021 et un évènement qui serait survenu au travail le 31 août 2021.

Selon la lettre de réserves de l’employeur et de son questionnaire retourné à la caisse que le client de ce dernier, la société [5] a fait réaliser le 31 août 2021 un audit sécurité surveillance auquel ont été soumis les agents de l’employeur sur le site, qu’à l’occasion de cet audit il a été demandé aux agents et notamment à M. [L] [L] de répondre à un questionnaire et que ce dernier, après avoir commencé à y répondre, se serait ensuite ravisé puis aurait menacé la personne chargée de l’audit d’une plainte notamment pour harcèlement.

Il résulte clairement par présomptions graves précises et concordantes de la confrontation des déclarations du salarié et de l’employeur qu’il est bien survenu ce jour-là un incident entre M. [L] [L] et une personne chargée d’un audit pour le compte du client de l’employeur et que cet incident est survenu à la suite de la demande adressée au salarié par l’auditeur de remplir un questionnaire, cette demande et les circonstances dans lesquelles elle est intervenue semblant avoir été perçues à tort ou à raison par le salarié comme illégale, humiliante et constitutive de harcèlement moral.

Mais rien ne permet de dire que cet incident ait eu des répercussions particulières sur le psychisme de l’intéressé et en particulier qu’il y ait le moindre lien établi et cet incident entre le traumatisme psychologique à base d’angoisse, d’anxiété et d’un syndrome dépressif constaté par le médecin auteur du certificat médical, les constatations effectuées par ce dernier pouvant se rapporter à des faits de la vie personnelle ou résulter d’une dégradation sur le long terme des relations entre le salarié et l’employeur.

Cette dernière hypothèse est d’ailleurs accréditée par les propres écritures du salarié dans lesquels il se plaint d’agissements anormaux de l’employeur et de ses chefs de poste, faisant valoir qu’il subissait dans les mois ayant précédé le 31 août 2021 des insultes de ces derniers, des appels téléphoniques malveillants et réitérés, des interrogatoires, des pressions et des propos dévalorisants.

L’intimé ne prouvant aucunement ni qu’il ait subi une lésion psychique au temps et au lieu du travail le 31 août 2021 ni que la lésion psychique constatée par le médecin auteur du certificat médical initial ait un lien certain avec l’accomplissement par le salarié de son activité professionnelle à cette même date, il convient de réformer les dispositions du jugement déféré disant que la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] doit prendre en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels l’accident du travail dont a été victime M. [C] [L] [L] le 31 août 2021 à 14 heures 45 ainsi que les soins et arrêts prescrits consécutivement à celui-ci et, statuant à nouveau de ce chef, de dire que l’accident dont M. [L] [L] a déclaré avoir été victime le 31 août 2021 n’a pas le caractère d’un accident du travail et de dire en conséquence bien fondée la décision en ce sens de la caisse.

Sur la demande d’exécution provisoire

M. [L] [L] demandant à la cour d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à venir, cette demande est sans objet et doit être rejetée puisque le pourvoi en cassation n’est pas suspensif en matière civile et que les arrêts rendus par la cour sont de plein droit exécutoires.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La cour n’étant pas dessaisie de la cause, il convient de réserver le sort des dépens et de la demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile par M. [L] [L] jusqu’à la solution de la totalité des questions restant en litige.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Ordonne le rejet des débats de l’intégralité des pièces de M. [L] [L] ;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celles portant sur la jonction des procédures 22/00637,22/00810 qu’il convient de confirmer et à l’exception de celles portant sur les dépens dont il convient de réserver le sort jusqu’à la solution des questions restant en litige.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que l’accident déclaré par M. [L] [L] le 31 août 2021 n’a pas le caractère d’un accident du travail et dit bien fondée la décision de la caisse de refus de prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle.

Ordonne la réouverture des débats à l’audience du 9 septembre 2024 à 13 heures 30 à laquelle les parties sont invitées à faire connaître leur position sur la fin de non-recevoir relevée d’office du caractère nouveau en appel des demandes de M. [L] [L] non afférentes à la reconnaissance des faits du 31 août 2021 en tant qu’accident du travail et sur la fin de non-recevoir relevée d’office de l’irrecevabilité des demandes présentées par lui à l’encontre de son employeur sans que ce dernier soit appelé en cause.

Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l’audience de réouverture des débats.

Réserve les dépens.

Le greffier, Le président,

 


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