Hygiène et sécurité des salariés : 7 décembre 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/02435

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Hygiène et sécurité des salariés : 7 décembre 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/02435

7 décembre 2023
Cour d’appel de Nancy
RG n°
22/02435

ARRÊT N° /2023

PH

DU 07 DECEMBRE 2023

N° RG 22/02435 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FCDL

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANCY

F20/00496

30 septembre 2022

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE – SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [W] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Bruno ZILLIG de la SCP LAGRANGE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S.U. VIR BY JP représentée par son président domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Alain CHARDON, avocat au barreau de NANCY substitué par Me CROCHET , avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 14 Septembre 2023 ;

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 30 Novembre 2023 ; par mise à disposition au greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 07 Décembre 2023.

Le 07 Décembre 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

M. [W] [Y] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société S.A.S.U Véhicules Intervention Rapide, devenue VIR BY JP, à compter du 05 juillet 2011, en qualité de chauffeur, livreur, monteur de meubles.

La convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport s’applique au contrat de travail.

Par courrier du 23 juillet 2020, M. [W] [Y] s’est vu notifier un avertissement.

Par courrier du 31 juillet 2020, M. [W] [Y] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 11 août 2020, avec notification de sa mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 14 août 2020, M. [W] [Y] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 09 décembre 2020, M. [W] [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Nancy, aux fins :

– de dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

– d’annuler l’avertissement notifié le 23 juillet 2020,

– de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP à lui payer les sommes de:

– 879,27 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 87,92 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire,

– 4 496,96 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 449,69 euros à titre d’indemnité de congés payés sur préavis,

– 5 105,92 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 20 236,32 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral causé par l’avertissement injustifié du 23 juillet 2020,

– 1 500,00 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le manquement de l’employeur à ses obligations en matière d’hygiène et de sécurité compte tenu des conditions imposées aux salariés en période de forte chaleur et de l’absence de fourniture d’eau conformément aux dispositions du code du travail,

– 2 000,00 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral causé par la mise en ‘uvre d’une surveillance illégale et l’atteinte au droit à l’image,

– 2 500,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

– d’ordonner l’exécution provisoire en application de l’article 515 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Nancy rendu le 21 octobre 2022 qui a:

– dit et jugé que le licenciement de M. [W] [Y] est un licenciement pour faute grave et que son avertissement du 23 juillet 2020 est justifié,

– condamné la société S.A.S.U VIR BY JP à verser à M. [W] [Y] la somme de 1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice résultant de l’atteinte à son droit à l’image,

– débouté M. [W] [Y] de l’ensemble de ses autres demandes financières,

– condamné la société S.A.S.U VIR BY JP à verser à M. [W] [Y] la somme de 1 200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la société S.A.S.U VIR BY JP de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société S.A.S.U VIR BY JP aux entiers dépens.

Vu l’appel formé par M. [W] [Y] le 21 octobre 2022,

Vu l’appel incident formé par la société S.A.S.U VIR BY JP le 21 mars 2023,

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de M. [W] [Y] déposées sur le RPVA le 23 décembre 2022, et celles de la société S.A.S.U VIR BY JP déposées sur le RPVA le 21 mars 2023,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 05 juillet 2023,

M. [W] [Y] demande à la cour:

– de le déclarer recevable et fondé en son appel partiel du jugement du conseil de prud’hommes de Nancy rendu le 30 septembre 2022,

– de réformer le jugement entrepris,

*

Statuant à nouveau dans les limites de l’appel interjeté :

– de dire que le licenciement prononcé le 14 août 2020 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– en conséquence, de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP à lui verser les sommes de:

– 879,27 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

– 87,92 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire,

– 4 496,96 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 449,69 euros à titre d’indemnité de congés payés sur préavis,

– 5 105,92 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 20 236,32 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– de dire que l’avertissement prononcé le 23 juillet 2020 n’est pas justifié,

– en conséquence, de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP à lui verser la somme de 1 000,00 euros de dommages-intérêts, en raison du préjudice moral qu’il lui a causé,

– de dire que l’employeur a manqué à ses obligations en matière d’hygiène et de sécurité,

– en conséquence, de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP à lui verser la somme de 1 500,00 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé, compte tenu des conditions de travail imposées en période de forte chaleur, et de l’absence de fourniture d’eau conformément aux dispositions du code du travail,

– de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP à lui verser une indemnité de 2 500,00 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles en appel,

– de condamner la société S.A.S.U VIR BY JP aux entiers dépens,

*

En cas d’appel incident de la société S.A.S.U VIR BY JP sur ces points,

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société S.A.S.U VIR BY JP à lui verser les sommes de:

– 1 500,00 euros de dommages intérêts pour le préjudice moral causé par la mise en ‘uvre d’une surveillance illégale et l’atteinte au droit à l’image,

– 1 200,00 euros d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société S.A.S.U VIR BY JP demande à la cour:

– de la recevoir en ses demandes, fins et conclusions,

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– dit et jugé que le licenciement de M. [W] [Y] est un licenciement pour faute grave et que son avertissement du 23 juillet 2020 est justifié,

– débouté M. [W] [Y] de l’ensemble de ses autres demandes financières,

– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– l’a condamnée à verser à M. [W] [Y] la somme de 1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice résultant de l’atteinte à son droit à l’image,

– l’a condamnée à verser à M. [W] [Y] la somme de 1 200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’a condamnée aux entiers dépens,

*

Statuant à nouveau :

– de débouter M. [W] [Y] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– de condamner M. [W] [Y] à lui payer la somme de 2 500,00 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile,

– de condamner M. [W] [Y] aux entiers dépens de l’instance.

SUR CE, LA COUR ;

Pour un plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de M. [W] [Y] déposées sur le RPVA le 23 décembre 2022, et celles de la société S.A.S.U VIR BY JP déposées sur le RPVA le 21 mars 2023.

– Sur la demande d’annulation de l’avertissement et de dommages et intérêts pour préjudice moral :

M. [W] [Y] s’est vu notifier un avertissement par courrier du 23 juillet 2020, rédigé en ces termes (Pièce n°3 de la partie appelante) :

« Nous venons vous exposer les motifs portés à votre encontre : non-respect des consignes de sécurité.

Nous constatons régulièrement, que les matins aux chargement des tournées, vous ne portez pas vos chaussures de sécurité, ni le masque au sein de l’entrepôt. A plusieurs reprises, Madame [T] [J], responsable d’exploitation, et Madame [Z] [C], directrice d’agencé, vous ont demandé de les porter pour des raisons de sécurité. Or, vous trouvez toujours une excuse pour ne pas respecter les consignes de sécurité […]

Par ailleurs, l’entreprise met à votre disposition des masques pour que l’ensemble des salariés puissent respecter les gestes barrières. Le fait ne pas porter le masque au sein de l’entrepôt peut avoir des conséquences sur la santé de vos collègues car nous vous rappelons que nous avons traversé une crise sanitaire sans précédent ».

L’employeur reproche au salarié de ne pas se conformer aux consignes de sécurité tenant au port des équipements de protection individuelle et du masque dans l’entrepôt de l’entreprise, lorsqu’il se présentait le matin à sa prise de poste pour le chargement des tournées, ce malgré les demandes répétées de ses supérieurs hiérarchiques ; il apporte au dossier les attestations établies par Mme [C] [Z], directrice, et par M. [R] [P], Chauffeur livreur (pièces n° 10 et 11 de son dossier).

Le salarié indique qu’en raison des conditions climatiques dues aux fortes chaleurs, il ne portait pas les équipements de protection individuelles et le masque chirurgical. Aussi, il relève que l’avertissement n’est pas suffisamment précis car il ne comporte aucune date.

– Motivation :

La lettre notifiant l’avertissement évoque des faits précis et vérifiables qui peuvent être débattus devant le juge ; le grief d’imprécision soulevé par M. [Y] sera donc rejeté.

Il ressort de l’attestation établie par M. [D] [U], chauffeur livreur (pièce n°11 du dossier de M. [Y]) que M. [W] [Y] ‘mettait tout le temps sa tenue’, ‘avait toujours son masque…au dépôt’ , et de l’attestation établie par M. [M] [F], chauffeur monteur (pièce n° l2 id) que M. [Y] ‘a toujours porté…son masque…en ma présence’ ;

L’attestation établie par M. [R] [P], chauffeur livreur (pièce n° 11 du dossier de la société) indique que M. [Y] ‘ se présente en tenue pour sa prise de poste et puis se change dans le camion’ ; toutefois, cette attestation ne démontre pas que M. [W] [Y] ne portait pas sa tenue de travail et le masque à l’intérieur du dépôt de l’entreprise.

Dès lors, il convient de constater que le grief n’est pas établi, et en conséquence l’avertissement décérné le 23 juillet 2020 sera annulé, et la décision entreprise infirmée sur ce point..

Le fait de se voir infliger une sanction disciplinaire injustifiée a causé à M. [W] [Y] un préjudice moral qu’il convient d’indemniser ; il sera fait droit à la demande à hauteur de 1000 euros.

– Sur le licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. C’est à l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier d’en rapporter la preuve.

Aux termes de l’article L.1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement fixe les limites du litige. La lettre de licenciement de M. [W] [Y], datée du 14 août 2020, est rédigée en ces termes (Pièce n°5 de la partie appelante) :

« […] nous vous notifions votre licenciement pour faute grave. Nous vous rappelons les griefs portés à votre encontre : non-respect des consignes de sécurité et non-respect des process VIR.

En effet, le 30 juillet 2020, après de multiples rappels verbaux et un avertissement qui vous a été notifié le 23 juillet 2020, alors que vous aviez enfin commencé à porter vos équipements de protection individuels (chaussures de sécurité, pantalon renforcé, masque chirurgical) ainsi que votre tenue de travail VIR, vous avez été vu chez un client en débardeur, pantalon retroussé aux genoux, baskets et sans masque.

Votre collègue de travail, M. [P] [R], a attesté que vous vous présentiez effectivement en tenue de travail lors de la prise de poste puis, que vous vous changiez dans le camion dès que vous quittiez le dépôt.

Dès lors, vous effectuiez les livraisons chez les consommateurs sans chaussures de sécurité, ni masque, ni même tenue de travail VIR.

M. [P] [R] nous a d’ailleurs indiqué que plusieurs clients l’avaient interpellé à ce sujet pour se plaindre.

Votre comportement est inadmissible :

– d’une part, s’agissant des pantalons, chaussures de sécurité et tee-shirts, nous ne transigerons jamais avec la sécurité de nos collaborateurs.

En effet, VIR s’est inscrite depuis déjà de nombreux mois dans une démarche de prévention des risques et d’analyse des accidents de travail de sorte à améliorer les conditions de travail des salariés.

Nous ne pouvons pas accepter que quiconque prenne le moindre risque en travaillant au sein de notre entreprise.

En outre, en tant qu’employeur, nous sommes tenus à une obligation de sécurité de résultat. Cela renforce notre intransigeance sur le sujet de la sécurité.

– d’autre part, s’agissant du masque chirurgical, nous vous rappelons que nous sommes depuis début 2020 dans une crise sanitaire sans précédent qui a déjà fait plus de 20 millions de morts. A ce titre, VIR a mis en place des protocoles, des gestes barrières et distribue quotidiennement des masques à son personnel. Ainsi, l’objectif est de limiter la propagation du virus. Dès lors, en refusant de porter le masque, vous mettez en danger votre propre personne, tous vos collègues ainsi que tous les clients que vous livrez et toutes les personnes que vous croisez.

Lors de l’entretien, vous avez reconnu les griefs qui étaient portés à votre encontre, tout en indiquant que vous n’aviez pas pris en compte les conséquences de votre attitude.

Vous avez également tenté de justifier votre refus de porter vos chaussures de sécurité en invoquant des supposés problèmes de pied. A ce titre, vous avez fourni :

– une attestation d’un médecin généraliste datée du 05 août dernier, qui n’avance en rien, tout en précisant qu’il « ne connaît pas bien les divers types de chaussures de sécurité, ni leur indication respective selon les professions ».

– une attestation de la médecine du travail datée du 07 août dernier, vous déclarant ape tout en nous demandant de vous « fournir un modèle de chaussures de sécurité plus légères et suffisamment souples, adaptées à la morphologie des pieds ».

Nous sommes très surpris par cet argument de problèmes de chaussures car vous ne nous avez jamais parlé de vos problèmes de pied :

– ni au moment de votre embauche le 05 juillet 2011,

– ni à aucun moment de ces 9 dernières années d’activité professionnelle,

– ni à aucune de vos visites médicales du travail, ni d’embauche, ni de suivi,

– ni lorsqu’on vous a remis votre dernière paire de chaussures de sécurité début juillet 2020,

– ni lorsque vous avez signé les consignes générales de sécurité le 31 juillet 2020,

– ni pendant ces dernières semaines au cours desquelles Madame [Z] [C], directrice d’agence, n’a cessé de vous rappeler quasiment quotidiennement l’obligation du port des chaussures de sécurité.

Le fait est que ces documents ne peuvent être retenus comme justificatifs et ce, pour deux raisons :

– d’une part, parce qu’ils ne vous dispensent en rien, ni ne justifient votre refus, de porter vos chaussures de sécurité,

– d’autre part, parce qu’ils sont datés de 4 et 6 jours avant l’entretien préalable et apparaissent donc bien comme une tentative désespérée de justifier votre comportement,

– enfin, quand bien même vous auriez un justificatif valable (ce qui n’est pas le cas) quant au fait de refuser de porter des chaussures de sécurité, rien ne justifie de refuser de porter la tenue VIR, et encore moins le masque chirurgical.

En outre, malgré les nombreuses relances verbales et écrites de la part de votre directrice d’agence, Madame [Z] [C], vous continuez à refuser de lui remettre votre Livret de Conduite Individuel (LIC), également appelé Carnet Rouge.

Pourtant, vous savez que ces données nous sont indispensables pour établir les paies.

Lors de l’entretien, vous avez reconnu que vous ne respectiez pas les consignes et que vous ne répondiez pas systématiquement aux demandes de votre direction.

Le jour même, vous êtes allé récupérer le LIC dans vitre véhicule afin de la remettre à Madame [Z] [C]. Votre attitude est contraire à vos engagements contractuels (extrait de votre contrat de travail du 05 juillet 2011) :

Article 6 ‘ Hygiène et sécurité

Le salarié reconnaît avoir pris connaissance de la procédure Livret Individuel de Contrôle et annexé au présent contrat. En cas de perte ou d’oubli du Livret Individuel de Contrôle, le salarié doit enregistrer ses heures de travail sur un support approprié (papier libre, fiche prévue etc.), il en est de même s’il n’y a plus de feuillet vierge dans le livret en cours.

Le salarié sera tenu de se conformer aux règles de sécurité édictées par les protocoles de sécurité, par les notes de service qui lui seront remises et de participer à tout stage de formation à la sécurité que l’entreprise jugera utile de lui faire suivre.

Le salarié sera tenu de porter les vêtements de travail (blouson, pantalon, tee-shirts, sweat-shirts) et de sécurité (chaussures, gants) qui lui seront fournis. Il lui appartiendra de les entretenir et de les restituer nettoyés en cas de départ de l’entreprise. Sa présentation physique et vestimentaire sera toujours impeccable (rasage, coiffure, tenues etc.).

Le salarié devra signaler à l’entreprise toute évolution de son état physique susceptible d’entrainer une déficience préjudiciable à la réalisation en toute sécurité des tâches qui lui incombent. La consommation de stupéfiants et d’alcool est strictement interdite pendant les heures de travail et dans l’enceinte des établissements du groupe VIR. Pour des raisons de sécurité routière, la conduite en état d’ivresse ou sous emprise de stupéfiants reste également prohibée. Le cas échéant, lors d’un contrôle des forces de l’ordre, les salariés sont entièrement responsables du non-respect des règles.

[…]

Article 13 ‘ Obligation de discipline, de loyauté et de discrétion

Le salarié devra respecter la discipline intérieure de l’établissement dont certaines modalités ont pu être définies dans le règlement intérieur de l’entreprise.

Votre comportement est également contraire aux dispositions du règlement intérieur de l’entreprise que nous vous rappelons ci-après :

II. Consignes générales

Article 8 ‘ Utilisation du matériel et des installations

Le personnel doit utiliser les installations, le matériel roulant et fixe, les carburants et lubrifiants, les vêtements, le matériel de bureau et les documents mis à sa disposition et dont il est responsable, conformément aux instructions qu’il reçoit et avec autant de soin que s’ils étaient sa propriété.

III. Discipline générale

Article 11 ‘ Directives

Le personnel est tenu de se conformer à toutes les directives et instructions communiquées soit par note de service, soit par voie d’affichage, soit par le présent règlement intérieur.

Article 12 ‘ Infractions au règlement

Sont considérées comme infractions au règlement intérieur tous faits et comportements de nature à troubler l’ordre, la discipline et la sécurité dans l’entreprise.

[…]

– Non-respect des consignes d’hygiène et de sécurité

[…]

Article 13 ‘ Echelle des sanctions

En fonction de la gravité et/ou de la répétition des comportements fautifs, les sanctions suivantes sont susceptibles d’être appliquées :

[…]

– Licenciement

[…]

IV. Hygiène et sécurité

Article 15 ‘ Vêtements de travail

Des vêtements de travail, des gants de sécurité et des chaussures de sécurité sont mis à la disposition du personnel de conduite et de manutention, leur port est obligatoire sauf avis contraire du médecin du travail.

Article 23 ‘ Exécution du contrat de travail

Dans l’exécution des tâches qui leur sont confiées, les salariés doivent se conformer aux directives qui leur sont données par leurs supérieurs hiérarchiques. Les salariés doivent se consacrer exclusivement à leur activité professionnelle pendant leurs horaires de travail. Ainsi, l’utilisation du téléphone portable personnel à des fins personnelles ou de tout autre équipement personnel est interdite pendant les horaires de travail sauf en cas d’urgence ou de nécessité impérieuse.

En outre, votre conduite met en cause la bonne marche de l’entreprise et empêche toute organisation du site auquel vous êtes affecté.

Votre licenciement prend donc effet immédiatement et votre solde de tout compte sera arrêté à la date de première présentation de cette lettre sans indemnité de préavis ni de licenciement […] »

Aux termes de la lettre de licenciement, la société VIR BY JP reproche à M. [W] [Y] :

– un non-respect des consignes de sécurité ;

– un non-respect des process d’entreprise.

– Sur le non-respect des consignes de sécurité :

L’employeur reproche au salarié un non-port des équipements de protection individuelle et du masque chirurgical. Il indique qu’il a été constaté le 30 juillet 2020 que le salarié s’est présenté chez un client vêtu d’un débardeur et de baskets, pantalon renforcé retroussé et sans masque chirurgical. A ce titre, l’employeur produit l’attestation de M. [P], salarié de l’entreprise, qui atteste que, le 30 juillet 2020, M. [W] [Y], ne portait pas ses chaussures de sécurité, ni le tee-shirt de l’entreprise, ni son masque chirurgical. Il ajoute qu’il se présente à son poste en tenue complète pour ensuite se changer dans le camion de livraison (Pièce n°10 de la partie intimée).

L’employeur précise que le salarié est tenu de porter, dans le cadre de l’exercice de sa fonction, les équipements de protection individuelle, à savoir pantalon renforcé et chaussures de sécurité, outre la tenue de l’entreprise, à savoir un tee-shirt siglé du logo VIR en été, en application de l’article 6 du contrat de travail du salarié (Pièce n°1 de la partie intimée) et de l’article 15 du règlement intérieur de l’entreprise (Pièce n°9 de la partie intimée). En outre, il précise que le salarié était tenu de porter un masque chirurgical du fait de l’épidémie liée au COVID-19 et des règlementations gouvernementales applicables, mis à disposition par l’entreprise.

L’employeur ajoute que plusieurs affichages sont présents au sein de l’entrepôt de l’entreprise afin de rappeler au salariés leurs obligations de sécurité concernant le port des chaussures de sécurité (Pièce n°16 de la partie intimée), tandis que le salarié a signé le 31 juillet 2020 un document intitulé « consignes générales de sécurité » rappelant l’obligation du port du masque chirurgical et des chaussures de sécurité (Pièce n°14 de la partie intimée).

L’employeur indique que le salarié n’a pas informé sa responsable de service quant aux difficultés qu’ils pouvaient rencontrer pour le port des chaussures de sécurité au cours de l’exécution de son contrat de travail.

Enfin, l’employeur rappelle que le salarié a fait l’objet d’un avertissement en date du 23 juillet 2020 pour cette même raison, en outre d’un avertissement le 22 février 2019 pour utilisation des données personnelles téléphoniques d’une cliente à des fins personnelles (Pièce n°6 de la partie intimée), et d’une mise à pied le 28 mars 2019 pour avoir sollicité auprès d’une cliente, en situation de grossesse, un chèque sans ordre en règlement des frais de livraison qu’elle avait déjà payé (Pièce n°7 de la partie intimée).

Le salarié indique que l’employeur lui reproche un non-port des équipements de protection individuelle et du masque chirurgical durant son temps de travail le 30 juillet 2020.

Il reconnait ne pas avoir porté à certaines occasions sa tenue de travail, mais en raison des conditions climatiques dues aux fortes chaleurs, la tenue de travail n’était pas adaptée du fait de sa tâche de travail qui s’avère physique tenant à la livraison et au montage de meubles chez des clients. Il produit à ce titre un relevé climatique pour cette journée (Pièce n°15 de la partie appelante), en outre des attestations de Messieurs [O] [A], [F] et [L], anciens collègues, qui attestent que M. [W] [Y] ne portait pas la tenue de travail complète uniquement lorsque les conditions climatiques étaient trop chaudes, ce qui est également leur cas et celui de la majorité des salariés (Pièces n°11, 12 et 13 de la partie appelante).

Enfin, le salarié indique ne pas supporter le port des chaussures de sécurité si bien qu’il était amené à changer de chaussures du fait de cet inconfort. Il produit un courrier de son médecin traitant daté du 05 août 2020 renvoyant le salarié vers la médecine du travail pour une prise en charge dans le cadre d’un problème de pied (Pièce n°8 de la partie appelante), ainsi qu’une attestation de suivi individuelle du médecin du travail et une proposition de mesures individuelles d’aménagement datées du 07 août 2020 exposant la nécessité de proposer au salarié des chaussures de sécurité plus souples adaptées à la morphologie de ses pieds (Pièces n°9 et 10 de la partie appelante).

Motivation.

Il ressort de l’attestation établie par M. [R] [P] (pièce n° 11 du dossier de la société) que, le 30 juillet 2020, M. [W] [Y] ne portait ni masque de protection ni chaussures de sécurité ni tenue de travail VIR pendant les livraisons, et que des clients l’ont interpellé à ce sujet ;

Il ressort par ailleurs de l’attestation de M. [N] [H], salarié de l’entreprise qui a assisté M. [Y] lors de l’entretien préalable (pièce n° 12 id) , que le salarié a reconnu les faits qui lui étaient reprochés.

Cette attestation n’est pas contradictoire avec celles établies par MM. [O] [A] et [F], celles-ci ne démontrant pas qu’ils se trouvaient avec M. [Y] le jour des faits reprochés.

S’agissant du masque chirurgical, il est établi que son port sur le lieu de travail constituait une obligation instituée au niveau national par les directives gouvernementales dans le cadre de la lutte contre l’épidémie du COVID-19 à compter de la sortie du confinement national en mai 2020. Dès lors, le salarié ne saurait se prémunir des conditions climatiques pour venir justifier l’absence du port du masque chirurgical.

Les conditions climatiques ne permettent pas de déroger aux règles de sécurité tenant au port des équipements de protection individuelle, établies pour garantir la santé et la sécurité des salariés dans le cadre de l’exercice de leur activité professionnelle et qui constituent une obligation pour l’employeur ; si M. [W] [Y] apporte au dossier un relevé émanant d’Infoclimat faisant apparaître que, le 30 juillet 2020, la température ambiante à [Localité 5] avait atteint 32,7 ° à 15 h 08, il ne démontre pas en quoi le port de la tenue imposée par le réglement intérieur pour des raisons de sécurité, et dont il ne décrit pas la nature, était impossible, alors même que M. [R] [P], qui travaillait ce jour avec lui, ne fait pas état de cette situation dans son attestation précédemment citée.

De plus, M. [W] [Y] ne justifie ni même n’allègue avoir fait valoir son droit de retrait.

Le grief est donc caractérisé.

– Sur le non-respect des process d’entreprise :

L’employeur reproche au salarié une non remise du Livret de Conduite Individuelle (LIC), malgré les nombreuses relances verbales et écrites de la part de la directrice d’agence, Madame [C] [Z], caractérisant un non-respect de ses obligations contractuelles et des demandes de sa hiérarchie.

L’employeur indique qu’à la suite de l’entretien préalable, le salarié est allé récupérer le livret pour le remettre à sa responsable.

Le salarié ne conclut pas sur ce grief.

Motivation.

Le salarié ne contestant pas les écritures adverses sur ce grief, et alors qu’il est établi que la remise du LIC est une obligation énumérée par le contrat de travail du salarié et le règlement intérieur de l’entreprise, le grief est caractérisé.

Les griefs retenus à l’égard du salarié sont caractérisés et constituent une faute rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise eu égard notamment au passif disciplinaire de l’intéressé.

M. [W] [Y] sera débouté de sa demande de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera confirmé sur ce point.

– Sur les demandes indemnitaires afférentes :

Le licenciement pour faute grave du salarié étant confirmé et sa demande de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse rejetée, le salarié sera débouté de ses demandes indemnitaires afférentes, à savoir sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité légale de licenciement, de rappel de salaire sur mise à pied à titre conservatoire et congés payés afférents, et d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, outre de dommages et intérêts pour le manquement de l’employeur à son obligation en matière d’hygiène et de sécurité.

– Sur la demande relative à la demande d’indemnisation pour atteinte au droit à l’image.

M. [W] [Y] indique que l’employeur a cherché à capter son image par la prise de photos par des tierces personnes, salariés de l’entreprise, afin de pouvoir constater la tenue qu’il portait. Il produit à ce titre les attestations de collègues qui déclarent que leur responsable leur a demandé de prendre en photo le salarié dès qu’il serait vu en l’absence de ses équipements de protection individuelle et sa tenue de travail (Pièces n°11, 12,13 susmentionnées) ; il sollicite la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il lui attribue la somme de 1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts.

La S.A.S.U VIR BY JP indique que la société n’a mis en place aucune surveillance des salariés, tandis qu’il n’a été porté aucune atteinte à l’image du salarié, qui n’a pas été diffusée.

– Motivation :

Attendu que l’atteinte à l’image est caractérisée par la captation, la diffusion, la conservation ou la reproduction de l’image d’une personne sans son consentement.

Il est admis que le contrat du salarié comporte une mention autorisant l’employeur à capter l’image des salariés et leur diffusion dans le cadre de la communication liée à l’activité de l’entreprise.

Pour autant, il ressort des éléments du dossier que l’image de M. [W] [Y] a été captée par un collègue, M. [P], à la demande de la responsable de site sans que cela ne soit réalisé dans un but de communication liée à l’activité de l’entreprise, mais bien dans un cadre de surveillance par ses collègues. L’employeur fournit lui-même l’attestation de M. [P] qui indique la mention « voir photo » qu’il a manifestement prise (Pièce n°10 de la partie intimé). Le fait que l’image n’est pas été diffusée est sans importance en ce que la simple captation suffit à caractériser l’atteinte au droit à l’image.

Par conséquent, l’atteinte à l’image du salarié est caractérisée et cause à M. [W] sonmez un préjudice qui doit être indemnisé.

La S.A.S.U VIR BY JP devra verser à M. [W] [Y] la somme de 1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’atteinte à son droit à l’image.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

– Sur la demande relative au manquement de l’employeur à ses obligation en matière d’hygiène et de sécurité.

M. [W] [Y] reproche à l’employeur de n’avoir pas mis à disposition des salariés de l’eau dans le cadre de leur activité de livraison alors que les températures de la période ont été élevées.

La S.A.S.U VIR BY JP conteste ce grief, exposant qu’aucune disposition légale n’impose la mise à disposition d’eau au bénéficie des salariés, et ce alors que des fontaines étaient installées dans les locaux de l’entreprise.

Motivation.

Il ressort de ce qui a été exposé lors de l’examen de la demande relative à la contestation du licenciement que des fontaines à eau étaient installées dans les locaux de l’entreprise.

La demande ne peut donc concerner que la partie de l’activité du salarié exercée à l’extérieur de l’entreprise, notamment le transport et la livraison.

L’article R 4225-1 du code du travail dispose que, pour les postes de travail extérieur, ceux-ci sont aménagés de telles sorte que les salariés soient protégés contre les conditions atmosphériques ; cette protection s’entend de la fourniture d’eau pour les salariés notamment dans le cadre des activités de livraison et de transport.

La S.A.S.U VIR BY JP ne conteste pas ne pas avoir mis à disposition des salariés, sous la forme de récipients adaptés, de l’eau potable.

Dès lors, le manquement est établi.

Il sera fait droit à la demande à hauteur de 1500 euros, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

La S.A.S.U VIR BY JP qui succombe partiellement supportera les dépens d’appel.

Il apparait inéquitable de laisser à la charge de M. [W] [Y] l’intégralité des frais irrépétibles qu’il a exposés ; il sera fait droit à la demande à hauteur de 1500 euros.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 30 septembre 2022 par le conseil de prud’hommes de Nancy, en ses dispositions soumises à la cour, en ce qu’il a débouté M. [W] [Y] de ses demandes relatives à l’annulation de l’avertissement du 23 juillet 2020 et au manquement de l’employeur à ses obligation en matière d’hygiène et de sécurité ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU ;

ANNULE l’avertissement décérnéle 23 juillet 2020 ;

CONDAMNE la S.A.S.U VIR BY JP à payer à M. [W] [Y] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction disciplinaire injustifiée ;

CONDAMNE la S.A.S.U VIR BY JP à payer à M. [W] [Y] la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à ses obligation en matière d’hygiène et de sécurité ;

Y AJOUTANT

CONDAMNE la S.A.S.U VIR BY JP aux dépens d’appel ;

CONDAMNE la S.A.S.U VIR BY JP à verser à M. [W] [Y] la somme de 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël Weissmann, Président de Chambre et par Madame Laurène Rivory, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

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