Responsabilité du Notaire : 20 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05259

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Responsabilité du Notaire : 20 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05259
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 13

ARRET DU 20 JUIN 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05259 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBVKH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2020 -Tribunal Judiciaire de SENS – RG n° 17/01091

APPELANT :

Maître [B] [L]

[Adresse 3]

[Localité 11]

Ayant pour avocat postulant Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

Ayant pour avocat plaidant Me Catherine ROCK-KUHN, avocat au barreau de Paris

INTIMES :

Madame [F] [R]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Rudy FARIA, avocat au barreau de SENS

Monsieur [T] [G]

Chez Madame [V] [Adresse 4]

[Localité 5]

Défaillant

S.A. CAPELLE INVESTISSEMENTS

[Adresse 10]

[Localité 7]

Représentée par Me Bernard SERVET, avocat au barreau de MELUN, toque : M59

PARTIES INTERVENANTES :

MMA I.A.R.D ASSURANCES MUTUELLES

[Adresse 1]

[Localité 8]

Ayant pour avocat postulant Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

Ayant pour avocat plaidant Me Catherine ROCK-KUHN, avocat au barreau de Paris

MMA I.A.R.D

[Adresse 1]

[Localité 8]

Ayant pour avocat postulant Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

Ayant pour avocat plaidant Me Catherine ROCK-KUHN, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, et devant Mme Estelle MOREAU, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d’ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

– par défaut

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 20 juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et parVictoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Par jugement du 27 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Sens a prononcé le divorce par consentement mutuel de Mme [F] [R] et de M. [T] [G], qui s’étaient mariés le [Date mariage 2] 2000 sous le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts.

Ce jugement a homologué l’acte de liquidation et partage de la communauté préalablement reçu entre les époux par M. [B] [L], notaire à [Localité 11] (89), le 23 janvier 2015.

Aux termes de cet acte, le bien immobilier commun situé [Adresse 6] à [Localité 9] (89) a été attribué à Mme [R], à charge pour elle de supporter seule le remboursement du solde qu’il restait alors dû des emprunts contractés par le couple pour financer l’acquisition du bien, soit la somme de 203 370,83 euros, la jouissance divise étant fixée rétroactivement au 29 août 2010.

La Sa Capelle Investissements ayant déposé une plainte pénale pour abus de confiance à l’encontre de son salarié M. [G] et se prévalant d’une créance de 86 856,44 euros à ce titre, a inscrit le 4 juin 2014, sur autorisation par ordonnance du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Chartres du 23 mai 2014, une hypothèque judiciaire provisoire d’un montant de 75 000 euros sur le bien immobilier commun, lequel acte a été dénoncé à M. [G] le 11 juin 2014.

Se prévalant d’un jugement sur intérêts civils rendu le 20 mars 2015 par le tribunal correctionnel de Fontainebleau, condamnant M. [G] à lui payer la somme au principal de 86 856,44 euros à titre de dommages et intérêts, outre 500 euros pour frais irrépétibles, la Sa Capelle Investissements a, le 29 avril 2015, fait inscrire à son profit une hypothèque judiciaire sur le bien immobilier. Par lettre du 16 mai 2017, elle a mis Mme [R] en demeure de lui payer le montant des condamnations prononcées à l’encontre de son ex-époux, chiffrant sa créance à cette date à la somme de 94 807,87 euros, intérêts compris.

C’est dans ces circonstances que par actes des 12, 24 et 27 octobre 2017, Mme [R] a fait assigner la Sa Capelle Investissements, M. [L] et M. [G] devant le tribunal judiciaire de Sens à l’effet de contester le caractère commun de la dette, d’obtenir la main-levée de l’hypothèque judiciaire inscrite de ce chef sur le bien immobilier litigieux et de voir engager la responsabilité professionnelle du notaire.

Par jugement rendu le 5 février 2020, le tribunal judiciaire de Sens a :

– dit que la dette de M. [G] à l’égard de la société fondée sur le jugement sur intérêts civils du 20 mars 2015 est commune aux ex-époux [G]-[R],

– débouté Mme [R] de sa demande aux fins de mainlevée de l’hypothèque judiciaire inscrite par la société sur le bien sis [Adresse 6] à [Localité 9],

– condamné Mme [R] à payer à la société Capelle Investissements la somme de 94 155,94 euros,

– condamné M. [L] à garantir à Mme [R] de toutes les condamnations prononcées à son encontre du chef de la dette de M. [G] à l’égard de la société Capelle Investissements,

– condamné M. [G] à garantir Mme [R] de toutes les condamnations prononcées à son encontre du chef de la dette que lui-même a à l’égard de la société Capelle Investissements,

– débouté les parties de toutes les demandes plus amples ou contraires,

– condamné Mme [R], M. [L] et M. [G] aux dépens, chacun pour un tiers, par application de l’article 696 du code de procédure civile,

– condamné Mme [R], M. [L] et M. [G] à payer chacun à la société Capelle Investissements la somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [L] et M. [G] à payer chacun à Mme [R] la somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 13 mars 2023, M. [L] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 20 avril 2022, M. [B] [L], la société d’assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles et la société anonyme MMA Iard demandent à la cour de :

– déclarer l’appel de M. [L] recevable et bien fondé,

– infirmer la décision entreprise en ce qu’elle l’a condamné à garantir Mme [R] des condamnations prononcées à son encontre,

– débouter Mme [R] de toutes ses demandes à son encontre,

– déclarer recevables en leur intervention volontaire les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard,

– ordonner, en conséquence, la restitution aux sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard de la somme de 94 660,27 euros payée en l’acquit de Mme [R] en application du jugement assorti de l’exécution provisoire,

– condamner Mme [R] en tous les dépens dont distraction au profit de Me Thierry-Philippe Kuhn, membre de la Scp Kuhn.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 20 août 2020, Mme [F] [R] divorcée [G] demande à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris,

y ajoutant,

– condamner in solidum M. [L] et les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 2 septembre 2020, la société anonyme Capelle Investissements demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement,

y faisant droit,

– déclarer les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard, intervenantes volontaires à la procédure d’appel, irrecevables dans leur demande et, en tout état de cause, mal fondées,

en conséquence,

– débouter les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

– condamner in solidum M. [L], les sociétés MMA Iard assurances mutuelles et MMA Iard à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– les condamner aux dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 mars 2023.

La cour ayant mis en débat la question de la perte de chance s’agissant de la mise en oeuvre de la responsabilité du notaire et invité les parties à formuler leurs observations, les appelants et Mme [R] ont chacun déposé une note en délibéré dans les délais impartis.

SUR CE :

Sur la responsabilité du notaire et la garantie de Mme [R] :

Le tribunal a jugé que :

– la créance en principal de 86 356,44 euros dont se prévaut la société Capelle Investissments au titre de la condamnation de M. [G] par jugement rendu sur intérêts civils par le tribunal correctionnel de Fontainebleau le 20 mars 2015 ayant trait à des faits commis en cours d’union, la dette qui en est résultée revêt, en application des articles 1413 et 1409 du code civil, un caractère commun obligeant tant Mme [R] que M. [G] dans les rapports avec la société créancière,

– l’état liquidatif de la communauté étant devenu opposable aux tiers à compter du 4 janvier 2016, l’hypothèque judiciaire inscrite le 29 avril 2015 par la société Capelle Investissements n’était pas inopérante et sa mainlevée ou la limitation de ses effets aux seuls droits de M. [G] ne peut avoir lieu, en sorte que la société Capelle Investissements est fondée en sa demande formée à l’encontre de Mme [R],

– en application des règles relatives à l’obligation à la dette applicables entre la créancière et les ex-époux, des règles relatives à la contribution de la dette et des articles 1417 et 1485 du code civil, la dette litigieuse doit être supportée à titre définitif par M. [G].

Le tribunal a accueilli la demande de garantie de Mme [R], formée à l’encontre du notaire, des condamnations mises à sa charge au profit de la société Capelle Investissements motifs pris que :

– le notaire a manqué à son obligation d’information et à son devoir de conseil à défaut d’avoir indiqué à Mme [R] l’existence d’une hypothèque provisoire sur le bien qui devait lui être attribué,

– le moyen allégué par M. [L] de ce que la société Capelle Investissements ne se prévaut pas de l’hypothèque non révélée à Mme [R] est inopérant dès lors que la requête présentée aux fins de son inscription visait à garantir les sommes qui allaient ensuite être mises à la charge de M. [G] dans l’instance correctionnelle devant le tribunal de Fontainebleau, et qui ont justifié la prise de l’hypothèque définitive du 29 avril 2015,

– le défaut d’information par le notaire a exposé Mme [R] à un risque financier dont elle aurait été préservée si l’existence de la sûreté discutée, qui présageait de l’éventualité pour elle de devoir prendre en charge la dette personnelle de son copartageant, lui avait été révélée en temps utile.

M. [L] ne conteste pas la faute et fait porter le débat sur l’absence de lien de causalité entre celle-ci et la condamnation de Mme [R] envers la société Capelle Investissements. Il soutient que Mme [R] n’aurait pu être préservée des risques de devoir prendre en charge la dette dès lors que :

– si l’état liquidatif litigieux n’avait pas été régularisé, la dette de M. [G] envers la société Capelle Investissements, dette commune ainsi que l’ont retenu les premiers juges, se serait ajoutée, en application de l’article 1413 du code civil, aux autre sdettes contractées solidairement par les époux auprès de la société LCL et auxquelles Mme [R] était tenue tant sur les biens de la communauté que sur ses biens propres, ramenant ainsi le passif à la somme de 203 400 euros, en sorte que Mme [R] n’aurait pu se voir attribuer le bien immobilier sur lequel portait l’inscription de la société Capelle Investissements et qui aurait dû être vendu judiciairement, et aurait eu une créance envers son mari, irrécouvrable,

– Mme [R] ne démontre pas que sa situation aurait été meilleure si l’état liquidatif litigieux n’avait pas été régularisé et ne justifie en conséquence d’aucune perte de chance de ne pas conclure l’état liquidatif partage,

– sa condamnation à garantir Mme [R] des condamnations prononcées à son encontre envers la société Capelle Investissements a pour effet de décharger totalement Mme [R] d’une dette commune,

– au surplus, Mme [R] ne rapporte pas la preuve d’un préjudice actuel et certain alors qu’un créancier doit être débouté de son action contre le notaire en l’absence de tout élément de nature à établir qu’il a perdu toute possibilité d’obtenir en tout ou partie le règlement de sa créance et qu’elle dispose d’un recours à l’encontre de son ex-époux.

Mme [R] soutient que le notaire, qui a commis une faute, doit garantir sa dette en ce que :

– le fait qu’elle ait exercé un recours contre son ex-époux, au demeurant illusoire, n’exonère pas le notaire de sa responsabilité qui ne revêt pas un caractère subsidiaire,

– si elle avait eu connaissance de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien commun qui produisait alors pleinement ses effets, et avisée des risques générés par celle-ci, elle n’aurait jamais accepté de signer l’acte de partage établi par le notaire et aux termes duquel elle s’est largement endettée, l’actif de la communauté étant déjà quasi nul, la masse passive devenant incertaine du fait de cette inscription d’hypothèque provisoire et bouleversant l’économie même de l’opération, ce d’autant plus qu’au moment de l’acte de liquidation-partage, la condamnation de M. [G] au titre des intérêts civils était sur le principe acquise,

– à l’occasion des opérations liquidatives, elle aurait pu utilement faire valoir ses droits et opposer à son époux que la créance de la société Capelle Investissements devait être supportée définitivement par lui avec comme conséquence la nécessaire récompense due à la communauté au titre de la comptabilisation de cette dette dans la masse passive, étant relevé qu’à l’époque, M. [G] était solvable,

– elle est poursuivie pour la totalité de la créance de la société Capelle Investissements en application de l’article 1489 du code civil dans la mesure où elle s’est vu attribuer l’immeuble grevé, ce qu’elle aurait refusé en étant dûment informée par le notaire,

– elle n’aurait jamais accepté la prise en charge définitive par la communauté de ce nouveau passif et de manière générale les attributions telles qu’elles ont été opérées dans l’acte,

– son préjudice est pleinement consommé et le notaire doit en conséquence sa garantie pour l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre à charge pour lui de se retourner le cas échéant contre M. [G], qui est tenu de supporter seul le poids final de la dette.

Le notaire engage sa responsabilité délictuelle en qualité de rédacteur d’acte à charge pour celui qui l’invoque de démontrer une faute, un lien de causalité et un préjudice.

Le manquement au devoir de conseil du notaire qui n’a pas informé Mme [R] de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien comme dont elle souhaitait l’attribution n’a pu causer à Mme [R] qu’une perte de chance de ne pas conclure l’acte liquidatif de partage ou de le conclure dans des conditions différentes. Si une perte de chance même faible est indemnisable, la perte de chance doit être raisonnable et avoir un minimum de consistance. La réparation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée.

L’acte de liquidation et partage de la communauté entre les époux a été reçu le 23 janvier 2015 par le notaire, sans que Mme [R] ait été informée de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire d’un montant de 86 356,44 euros sur le bien immobilier commun par la société Capelle Investissements. Celle-ci, qui s’est seule constituée partie civile devant le tribunal correctionnel pour les mêmes faits que ceux invoqués devant le juge de l’exécution ayant autorisé l’inscription de l’hypothèque judiciaire provisoire, a obtenu la condamnation de M. [G] au paiement de la somme de 86 356,44 euros, laquelle créance a été jugée commune par le tribunal.

Aux termes de cet acte, le bien immobilier attribué à Mme [R] est évalué à 192 400 euros et compose l’essentiel de la masse active de la communauté, de 203 400 euros, comprenant également une indemnité d’occupation de Mme [R] de 11 000 euros, le total de la masse passive de la communauté, constituée des dettes d’emprunts immobiliers, étant de 203 370,83 euros. Mme [R] s’est vue attribuer ce bien moyennant la prise en charge de la totalité des dettes d’emprunt.

L’information de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire de 75 000 euros sur le bien immobilier était de nature à bouleverser l’économie de l’opération de liquidation-partage, en ce que la créance garantie était de nature à grever fortement l’actif net de la communauté s’élevant à 29,17 euros seulement. Nonobstant le caractère commun de cette dette alors provisoire, celle-ci ayant pour origine des faits délictuels reprochés à M. [G] aurait pu donner lieu à récompense de ce dernier envers la communauté, ce qui aurait eu pour effet d’accroître la masse active de la communauté. Mme [R] aurait alors pu, soit renoncer à l’attribution du bien immobilier, soit se le voir attribuer moyennant la prise en charge des prêts immobiliers déduction faite de la somme de 86 356,44 euros. Compte tenu de l’endettement personnel de Mme [R] qu’impliquait l’attribution du bien litigieux et du risque encouru d’être poursuivie par le créancier en paiement de la dette commune en sa qualité d’attributaire du bien grevé litigieux alors que M. [G] était sans emploi au moment de l’acte de liquidation partage, la perte de chance de Mme [R] de ne pas acquérir le bien immobilier, si elle avait été dûment informée de l’inscription de l’hypothèque provisoire, doit être évaluée à 90%.

Mme [R] a été condamnée au paiement de la totalité de la créance de la société Capelle Investissements en application des dispositions de l’article 1489 du code civil dont il résulte que, après la dissolution de la communauté, l’époux qui n’est pas personnellement débiteur s’il n’est tenu, en principe, que de la moitié de la dette, peut être poursuivi pour la totalité lorsque la dette est garantie par une hypothèque exercée sur un bien immobilier à lui échu en partage. Cette condamnation a donc été prononcée à son encontre en sa qualité d’attributaire de l’immeuble grevé.

Le manquement du notaire à son obligation d’information a donc exposé directement Mme [R] au paiement de cette créance à proportion de la chance perdue de ne pas acquérir le bien.

Le préjudice subi par un justiciable, privé, par la faute de son notaire, d’une chance de ne pas conclure l’acte, doit s’apprécier exclusivement au regard de cette probabilité.

Les appelants invoquent donc vainement que Mme [R] bénéficie d’une situation plus favorable que si elle n’avait pas régularisé l’acte de liquidation-partage puisqu’elle est propriétaire du bien grevé et que la garantie du notaire aurait pour effet de la décharger totalement d’une dette commune, le préjudice de Mme [R] en lien de causalité directe avec la faute du notaire étant constitué par la condamnation prononcée à son encontre en sa qualité de propriétaire du bien grevé qu’elle a perdu la chance de ne pas se voir attribuer.

La circonstance que Mme [R] disposerait d’un recours à l’encontre de son ex-époux est inopérante à exonérer le notaire de sa responsabilité, laquelle ne revêt pas un caractère subsidiaire.

Le notaire doit donc être condamné à relever et garantir Mme [R] à proportion de 90% des condamnations prononcées à son encontre.

Sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement assorti de l’exécution provisoire :

Les appelants sollicitent la restitution de la somme de 94 660,27 euros en l’acquit de Mme [R] en application du jugement assorti de l’exécution provisoire.

La société Capelle Investissements soulève l’irrecevabilité de cette demande aux motifs qu’elle n’est fondée sur aucun moyen de fait ou de droit et qu’elle est formée, dans le dispositif des écritures des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles au bénéfice des sociétés ‘MMA Iard’, en sorte qu’il est impossible d’identifier à laquelle de ces deux entités les fonds devraient être versés. Subsidiairement, elle fait valoir qu’il ne lui appartient pas de restituer les sommes dont Mme [R] a sollicité la garantie de paiement à ses risques et périls pour pouvoir régler la créance qu’elle détenait à son encontre.

La demande de restitution est formée au bénéfice des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, intervenantes volontaires à la procédure, et est donc recevable.

La restitution du trop versé en exécution du jugement assorti de l’exécution provisoire et partiellement infirmé étant de droit, il n’y a pas lieu d’ordonner une telle mesure.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile sont confirmées. Les appelants échouant en leurs prétentions sont condamnés aux dépens d’appel et à payer à Mme [R] et la société Capelle Investissements une indemnité de procédure de 4 000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions dans la limite de l’appel, sauf en ce qu’il a condamné M. [L] à garantir à Mme [R] de toutes les condamnations prononcées à son encontre du chef de la dette de M. [G] à l’égard de la société Capelle Investissements,

Statuant de nouveau,

Condamne M. [L] à garantir à Mme [R] à proportion de 90% des condamnations prononcées à son encontre du chef de la dette de M. [G] à l’égard de la société Capelle Investissements,

Dit recevable la demande formée par la société anonyme MMA Iard et la société d’assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles aux fins de restitution de la somme payée en l’acquit de Mme [R] en exécution du jugement assorti de l’exécution provisoire,

Dit n’y avoir lieu à ordonner cette mesure, qui est de droit à proportion des condamnations prononcées par la présente décision,

Condamne in solidum M. [B] [L], la société d’assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles et la société anonyme MMA Iard à payer à Mme [F] [R] et la société anonyme Capelle Investissements, chacune, une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [B] [L], la société d’assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles et la société anonyme MMA Iard aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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