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CIV. 3
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 juillet 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 505 F-D
Pourvoi n° X 21-20.620
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 JUILLET 2023
La société Versantis, société de droit Luxembourgeois, dont le siège est [Adresse 10], (Luxembourg), a formé le pourvoi n° X 21-20.620 contre l’arrêt rendu le 20 avril 2021 par la cour d’appel d’Orléans (chambre civile), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à Mme [D] [I],
3°/ à Mme [E] [I],
toutes deux domiciliées [Adresse 2], venant aux droits de M. [P] [I],
4°/ à Mme [S] [I], domiciliée [Adresse 11], venant aux droits de M. [P] [I] et prise en qualité de liquidateur de la SCP [P] [I],
5°/ à M. [G] [J],
6°/ à Mme [B] [O], épouse [J],
tous deux domiciliés [Adresse 5],
7°/ à la société BNP Paribas personal finance, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
8°/ à la société Atelier l’échelle, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7],
9°/ à M. [V] [Y], domicilié [Adresse 9], pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Les Gaudinelles,
10°/ à la société Les Gaudinelles, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 4],
11°/ à la Mutuelle des architectes français (MAF), société d’assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 6],
12°/ à la société JSA Gauthier Sohm, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Touraine actions développement,
défendeurs à la cassation.
La société MMA IARD, Mmes [D], [E] et [S] [I], agissant en leur qualité d’ayants droit de [P] [I], Mme [S] [I], agissant en sa qualité de liquidateur de la société civile professionnelle [P] [I] ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, un moyen de cassation ;
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l’appui de leur recours, trois moyens de cassation ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Versantis, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société MMA IARD, de Mmes [D] et [E] [I] et de Mme [S] [I], ès qualités, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. et Mme [J], après débats en l’audience publique du 31 mai 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Delbano, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Versantis du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre les sociétés BNP Paribas personal finance, Atelier l’échelle, Mutuelle des architectes français et JSA Gauthier Sohm, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Touraine actions développement.
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Orléans, 20 avril 2021, RG n° 18/01325), suivant acte authentique reçu le 12 février 2007 par [P] [I] (le notaire), la société civile immobilière Les Gaudinelles (le vendeur) a vendu, en l’état futur d’achèvement, un bien immobilier dépendant d’une résidence de tourisme à M. [J] et Mme [O] (les acquéreurs). Pour financer cette acquisition, ceux-ci ont contracté un emprunt auprès de la BNP Paribas invest immo, devenue la société BNP Paribas personal finance.
3. Le chantier a été abandonné et le bien n’a pas été livré.
4. Les acquéreurs ont assigné le vendeur, placé ensuite en liquidation judiciaire, ses associés, dont la société Versantis, titulaire des parts sociales à hauteur de 13 %, les mandataires judiciaires et la banque, en annulation de la vente et du prêt accessoire, ainsi que le notaire et son assureur, la société MMA IARD (l’assureur), en responsabilité et en indemnisation.
5. Le notaire étant décédé en cours d’instance, ses héritières, Mmes [S], [D] et [E] [I], sont intervenues à l’instance, Mme [S] [I] intervenant également en qualité de liquidateur amiable de la société civile professionnelle [P] [I] (les consorts [I]).
6. La nullité des contrats de vente et de prêt a été prononcée et la responsabilité du notaire retenue au titre de divers manquements.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi incident
7. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
8. La société Versantis fait grief à l’arrêt de la condamner à payer aux acquéreurs la somme de 9 369,02 euros au titre de la restitution du prix de vente, avec capitalisation des intérêts, et à payer à chacun d’eux la somme de 1 300 euros au titre du préjudice moral, alors :
« 1°/ qu’ en application de l’article 1857 du code civil, à l’égard des tiers, les associés d’une société civile répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l’exigibilité ou au jour de la cessation des paiements ; que par dérogation à ce texte, l’article L 211-2 du code de la construction et de l’habitation prévoit que les associés d’une société civile de construction-vente (SCCV) d’un immeuble sont tenus du passif social sur tous leurs biens à proportion de leurs droits sociaux ; les associés d’une SCCV sont tenus des dettes sociales à proportion de la participation qu’ils détenaient à la naissance de la dette sociale, indépendamment de la date d’exigibilité de celle-ci ; qu’en l’espèce, la société Les Gaudinelles est une société civile de construction-vente ; que la cour d’appel a jugé que c’est « à bon droit que la société Versantis fait valoir que les associés d’une société de construction-vente y sont tenus à proportion de la participation qu’ils détenaient à la naissance de la dette sociale, indépendamment de la date d’exigibilité » et qu’« il ressort des éléments de la procédure que la société de droit luxembourgeois Versantis n’a pris la qualité d’associé de la SCI Les Gaudinelles que le 15 février 2010 alors que la créance de réparation est née, comme elle le soutient, à la date de réalisation du dommage, les causes de nullité de la vente et les fautes imputables au notaire étant antérieures à sa prise de participation » ; qu’il en résultait que la société Versantis n’était pas tenue de la dette de restitution du prix de vente de la SCCV Les Gaudinelles née avant le 15 février 2010 ; qu’en condamnant néanmoins la société Versantis, en tant qu’associée tenue indéfiniment des dettes sociales de la SCCV Les Gaudinelles à hauteur de sa participation de 13 %, à payer aux acquéreurs la somme de 9 369,02 euros au titre de la restitution du prix de vente, tandis que cette dette était née avant le février 2010, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article L 211-2 du code de la construction et de l’habitation ;
2°/ que, subsidiairement, à supposer que l’on considère que la cour d’appel n’a pas retenu que la dette ci-dessus était née avant le 15 février 2010, il lui appartenait de motiver sa décision sur la date de naissance de la créance invoquée ; qu’en condamnant cependant la société Versantis, en tant qu’associée tenue indéfiniment des dettes sociales de la SCCV Les Gaudinelles à hauteur de sa participation de 13 %, à payer aux acquéreurs la somme de 9 369,02 euros au titre de la restitution du prix de vente, sans constater que la dette était née après le 15 février 2010, date à laquelle elle est devenue associée de la SCCV Les Gaudinelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 211-2 du code de la construction et de l’habitation ;
3°/ que les associés d’une SCCV sont tenus des dettes sociales à proportion de la participation qu’ils détenaient à la naissance de la dette sociale ; qu’une dette de réparation d’un dommage naît à la date à laquelle cette dette est au moins en germe ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que « les divers tracas et contraintes financières subis durant de longues années de procédure, tels qu’exposés et justifiés par des attestations, constituent un préjudice distinct de celui réparé par l’annulation du contrat de vente » ; que la cour d’appel a constaté qu’il existait dès 2008 des « difficultés d’avancement du chantier compte tenu des retards de paiement » de la SCCV Les Gaudinelles ; que pour condamner la société Versantis à payer la somme de 1 300 euros à chacun des époux [J] au titre de leur préjudice moral, la cour d’appel a jugé que « la créance de réparation est née de la réalisation du dommage, soit le 24 juillet 2011, date de constat de l’inachèvement de l’immeuble et de l’insuffisance de la garantie intrinsèque d’achèvement » ; qu’en statuant ainsi, tandis que la dette de réparation était née dès le dépassement du délai de livraison prévu (troisième trimestre 2007), à savoir à compter du 1er octobre 2007, la cour d’appel a violé l’article L 211-2 du code de la construction et de l’habitation. »