Your cart is currently empty!
VS/OC
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE
à :
– SCP SOREL & ASSOCIES
– Me Geoffrey TONDU
LE : 06 AVRIL 2023
COUR D’APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 06 AVRIL 2023
N° 167 – 8 Pages
N° RG 22/00486 – N° Portalis DBVD-V-B7G-DONX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal judiciaire de BOURGES en date du 10 Mars 2022
Jugement du tribunal judiciaire de BOURGES en date du 07 Octobre 2022
PARTIES EN CAUSE :
I – S.C.P. STEPHANE PATRY NOTAIRE (S.C.P. PATRY) nouvellement dénommée SPN VIERZON (société par action simplifiée) agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social:
[Adresse 5]
[Localité 3]
N° SIRET : 302 790 654
Plaidant par la SCP SOREL & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
APPELANTE suivant déclaration du 06/05/2022
II – M. [X] [C]
né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 6]
[Localité 4]
– Mme [F] [O] épouse [C]
née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 6]
[Localité 4]
– S.C.I. DIFFUSION ESPACE BESNARD
[Adresse 6]
[Localité 4]
N° SIRET : 350 938 981
Représentée par Me Geoffrey TONDU, avocat au barreau de BOURGES
Plaidant par Me David GUYON, avocat au barreau de MONTPELLIER
timbre fiscal acquitté
INTIMÉS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Février 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CIABRINI, Conseillère chargée du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CLEMENT Présidente de Chambre
M. PERINETTI Conseiller
Mme CIABRINI Conseillère
***************
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT
***************
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
**************
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte notarié du 15 mars 1999 reçu par Maître Barbes, M. et Mme [C] ont acquis de M. [L] un bien immobilier situé à [Adresse 14], cadastré section [Cadastre 11].
Par acte du 26 juillet 2002 reçu par Maître Rivollier, le bien a été cédé à la SCI Diffusion Espace Besnard dont M. et Mme [C] sont les gérants associés.
Suivant acte du 7 février 2020 reçu par Maître Patry, notaire à Vierzon, est intervenue la vente de la parcelle voisine sise [Adresse 13], cadastrée [Cadastre 9], entre Mme [W], vendeur et M. [J], acquéreur.
Faisant valoir que cet acte ne mentionnait pas l’existence d’une servitude de passage au profit de la parcelle [Cadastre 10], M. et Mme [C] et la SCI Diffusion Espace Besnard ont fait assigner la SCP Stéphane Patry – [S] [M] en responsabilité et en rectification de l’acte notarié du 7 février 2020.
Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bourges, auquel le juge de la mise en état avait renvoyé l’incident soulevé par la SCP Patry, notaire, fondé sur le défaut de droit à agir des époux [C] au motif que ces derniers n’étaient pas propriétaires de droits sur la parcelle [Cadastre 10], a :
– Dit que la SCI Diffusion Espace Besnard et les époux [C] rapportent la
preuve de leur droit et de leur intérêt à agir,
– Débouté la SCP Patry Notaire de son incident,
– Dit régulière l’assignation délivrée le 8 décembre 2020 par la SCI Diffusion Espace
[C] et par les époux [C],
– Débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de
procédure civile.
Par jugement du 10 mars 2022, le tribunal judiciaire de Bourges a :
– Dit irrecevable la SC PATRY [M] à discuter la recevabilité de l’assignation
délivrée par les époux [C] ;
– Dit que Me Patry et la SCP Patry Monot ont engagé leur responsabilité extra
contractuelle à l’égard des époux [C] et de la SCI DIFFUSION [C] en omettant de mentionner dans l’acte de vente établi le 7 février 2020 les servitudes supportées par l’immeuble vendu cadastré [Cadastre 12] sur la commune de [Adresse 13] (18) au profit de l’immeuble voisin [Cadastre 10] ;
– Ordonné à Me Patry et à la SCP Patry Monot d’insérer à l’acte notarié de vente du
bien immobilier cadastré [Cadastre 9] sur la commune de [Adresse 13], établi le 7 février 2020,
un paragraphe mentionnant les servitudes de passage bénéficiant à la parcelle [Cadastre 10] à savoir :
« Couloir commun avec les propriétaires de la parcelle voisine [Cadastre 10] et entrées communes sur la route de [Localité 15] et la cour ” et ” passage commun avec les propriétaires de la parcelle voisine [Cadastre 10] dans la cour de ce dernier pour aller de la porte cochère à I ‘escalier conduisant au couloir commun »,
et ce dans le délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision;
– Dit que Maître PATRY et la SCP PATRY MONOT devront faire leur affaire de la
notification de cette modification imposée par le présent tribunal aux acquéreurs de la
parcelle [Cadastre 9] et de la délivrance à ceux-ci, à leurs frais, d’un acte authentique rectifié;
– Dit n’y avoir lieu à prononcer une astreinte ;
– Condamné solidairement Me Patry et la SCP Patry Monot à payer à chacun des
époux
[C] une indemnité de 1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du
préjudice subi ;
– Déboute les parties de toutes autres demandes ;
– Condamné solidairement Maître Patry et la SCP Patry Monot aux dépens ;
– Condamné solidairement Maître Patry et la SCP Patry Monot à payer à M et Mme
[C] une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de
procédure civile ;
– Dit que le jugement sera publié au Bureau des Hypothèques de Bourges aux frais de la SCP Patry Monot. »
Suivant déclaration d’appel du 6 mai 2022, la SCP Stéphane PATRY, notaire, a relevé appel des jugements des 7 octobre 2021 et 10 mars 2022 en l’ensemble de leurs dispositions, les chefs de décisions critiqués étant expressément repris et détaillés dans une annexe à la déclaration d’appel.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 23 décembre 2022, auxquelles il est reporté pour plus ample exposé en application de l’article 455 du code de procédure civile, la SPN VIERZON ( anciennement SCP Stéphane Patry, notaire) demande à la cour de :
– Iinfirmer les jugements rendus par le tribunal judiciaire de Bourges les 7 octobre 2021 et 10 mars 2022,
– Déclarer irrecevables les demandes formées par M [X] [C] et Mme [F] [C] et les en débouter,
– Dire et juger irrecevables ou à tout le moins non fondées les prétentions de la SCI DIFFUSION ESPACE BESNARD et l’ en débouter,
– Condamner in solidum M et Mme [X] [C] et la SCI DIFFUSION ESPACE BESNARD à payer à la SAS SPN une somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700,
– Condamner in solidum M et Mme [X] [C] et la SCI DIFFUSION ESPACE BESNARD à payer à la SAS SPN VIERZON une somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– Condamner in solidum M et Mme [X] [C] et la SCI DIFFUSION ESPACE BESNARD aux entiers dépens de procédure.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 23 septembre 2022, auxquelles il est reporté pour plus ample exposé en application de l’article 455 du code de procédure civile, M et Mme [C] et la SCI Diffusion Espace Besnard présentent les demandes suivantes :
Vu le code civil et notamment, l’article 1240 et suivants, l’article 1369 et suivants,
Vu la loi du 25 ventôse an XI,
Vu le décret n°71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires,
– Déclarer l’appel caduc ;
– Confirmer le jugement du 10 mars 2022 dans toutes ses dispositions ;
– Confirmer le jugement du 7 octobre 2021 dans toutes ses dispositions ;
Rejugeant l’affaire ;
– Rejuger que la responsabilité délictuelle de Maître PATRY et de la SCP PATRY [M] est engagée ;
– Enjoindre à Maître PATRY notaire associé de la SCP PATRY [M] de procéder à la rectification de l’acte notarié du 7 février 2020 afin d’y mentionner les servitudes de passage bénéficiant à la parcelle cadastrale numéro [Cadastre 10] sur le territoire de la Commune de [Adresse 13] dont sont propriétaires les époux [C] ;
– Assortir l’injonction de la somme de 150 € par jour de retard passer le délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
– Condamner solidairement Maître PATRY ainsi que la SCP PATRY [M] au paiement
de la somme de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Réserver les dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2023.
MOTIFS
Sur la caducité de l’appel pour absence de signification de l’annexe en même temps que la déclaration d’appel :
Au soutien de leur demande de caducité de la déclaration d’appel, les intimés font valoir que l’annexe n’aurait pas été jointe à la signification de la déclaration d’appel qui leur a été délivrée par acte d’huissier du 5 juillet 2022.
L’appelant réplique que ce ne serait pas la caducité de la déclaration d’appel qui serait encourue mais sa nullité (Cass civ 2ème 5 déc 2019 n° 18-17.967), de sorte qu’il reviendrait aux intimés de prouver un grief. Or les intimés ayant reçu signification en même temps que la déclaration d’appel, des conclusions d’appelant, ils ont eu connaissance de l’objet et de la portée de l’appel.
Aux termes de l’article 914 du code de procédure civile, « les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation jusqu’à l’ordonnance de clôture, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant à :
– prononcer la caducité de l’appel ;
– déclarer l’appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question relative à la
recevabilité de l’appel ; ( ‘) »
Il appartenait donc aux intimés de saisir le conseiller de la mise en état par des conclusions spécialement adressées à ce dernier, tendant à la caducité de l’appel
En raison de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état à cet égard, la cour excéderait ses pouvoirs en examinant la demande des intimés.
Il s’en suit que la cour est saisie régulièrement de l’appel des deux jugements critiqués.
Sur la qualité à agir de M. et Mme [C]
Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bourges saisi par le juge de la mise en état en application de l’article 789 du code de procédure civile, a retenu le droit et l’intérêt à agir des époux [C].
Ce jugement était susceptible d’appel dans les 15 jours de sa signification. A défaut de signification, l’appel de ce jugement reste recevable, notamment en même temps que de celui rendu sur le fond le 10 mars 2022.
Une partie ne peut agir en justice que si elle a qualité à cette fin.
L’appelant fait valoir que M.et Mme [C] ont vendu le bien immobilier cadastré [Cadastre 10] à la SCI Espace Diffusion Besnard par acte notarié du 26 juillet 2002 et qu’ils ne sont donc plus titulaires de droits sur ledit bien, que l’associé d’une société n’est pas recevable à exercer une action en responsabilité au nom de la société, qu’en outre les époux [C] ne justifient d’aucun préjudice personnel distinct de celui de la société.
L’action introduite par les époux [C] et la SCI Diffusion Espace Besnard est une action en responsabilité dirigée à l’encontre d’un notaire pour avoir omis de mentionner l’existence d’une servitude dans l’acte de vente concernant la parcelle voisine de celle appartenant à la SCI Diffusion Espace Besnard.
La vente d’un bien immobilier transfère de plein droit à l’acquéreur les droits et actions appartenant au vendeur et attachés à l’immeuble cédé.
Par conséquent, seul le propriétaire du fonds qui se prévaut de l’omission d’une servitude au bénéfice de son fonds, a qualité à agir afin de voir respecter les droits attachés à son fonds.
C’est donc par des motifs inopérants que le premier juge a énoncé que les époux [C], occupant les lieux, démontraient « avoir un intérêt personnel et direct à la reconnaissance d’un droit de passage qui leur profiterait nécessairement et qu’en outre en leur qualité d’associés au sein de la SCI, ils auraient avantage à ce que ce droit soit acté, confortant ainsi la valeur du patrimoine de la SCI ».
La cour infirmant le jugement, constate le défaut de qualité à agir de M. et Mme [C] et les déclare irrecevables en leur action.
La responsabilité du notaire
Le tribunal a considéré que le fait pour le notaire de ne pas avoir consulté la Conservation des Hypothèques est une négligence fautive et que la résistance a corriger sa faute est elle-même fautive.
La SPN Vierzon soutient qu’il ne peut être apporté aucune rectification à un acte notarié de vente auquel les époux [C] et la SCI Diffusion Espace Besnard ne sont pas parties, hors la présence des parties audit acte, c’est à dire sans le consentement de toutes les parties à l’acte.
Le notaire indique également qu’il n’avait pas à vérifier au-delà de 30 ans propriété
l’existence de ces servitudes et que n’étant pas rédacteur de l’acte de des intimés il ne pouvait qu’ignorer l’existence de ces servitudes.
Il allègue l’absence de mention des servitudes dans l’ acte de 2016 pour dénier toute responsabilité.
Aux fins de voir reconnaître la responsabilité du notaire, les intimés font valoir : que ce dernier reconnaît lui-même l’existence de la servitude, qu’il ne produit que partiellement l’acte de 2016 puisque manquent les pages 19 et 20, qu’il aurait dû procéder à la rectification de l’acte litigieux, qu’il lui incombait de « se reporter au Bureau des hypothèques de [Localité 7] sur lesquelles sont mentionnées ces servitudes ».
Il est constaté, ainsi que le soulève la SPN Vierzon, que la SCI Diffusion Espace Besnard demande la rectification d’un acte notarié auquel elle n’est pas partie et qu’elle n’est donc pas en capacité de produire, et qu’au surplus, elle n’a pas appelé à la cause le propriétaire du fonds voisin, acquéreur du fonds selon elle servant, alors qu’il est au premier chef concerné par la rectification de son titre de propriété.
Par conséquent, toute demande dirigée contre le notaire tendant à rectifier un acte, et partant, à modifier les droits d’une partie, ne saurait aboutir, en l’absence à la cause de cette dernière, partie à l’acte litigieux.
En application de l’article 14 du code de procédure civile, la demande de la SCI Diffusion Espace Besnard sera dès lors déclarée irrecevable.
Il appartiendra en tant que de besoin à la SCI Diffusion Espace Besnard de mieux se pourvoir.
Le jugement est par conséquent infirmé en toutes ses dispositions.
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il est constant que le droit d’agir ou de se défendre en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.
En l’espèce, nul abus de droit n’est caractérisé à l’encontre de M et Mme [C] et de la SCI Diffusion Espace Besnard dans le cadre de la présente instance.
La demande indemnitaire formée à ce titre par l’appelante sera en conséquence rejetée.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
M et Mme [C] et la SCI Diffusion Espace Besnard, qui succombent, sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel et à verser à la SPN Vierzon une somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
INFIRME le jugement du 7 octobre 2021,
Statuant à nouveau,
DECLARE M et Mme [C] irrecevables à agir pour défaut de qualité à agir ;
INFIRME le jugement du 10 mars 2022 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau :
DIT que seul le conseiller de la mise en état était compétent pour statuer sur l’ incident tendant à voir déclarer la caducité d’appel ;
DECLARE la SCI Diffusion Espace Besnard irrecevable à agir contre la SPN Vierzon en l’absence à la cause du propriétaire de la parcelle sise [Adresse 13], cadastrée [Cadastre 8] à la cause, directement concerné par la demande de rectification de son titre de propriété ;
DEBOUTE la SPN Vierzon de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNE la SCI Diffusion Espace Besnard et M et Mme [C] à verser à la SPN Vierzon une somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SCI Diffusion Espace Besnard et M et Mme [C] aux dépens de première instance et d’appel.
L’arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
S.MAGIS O. CLEMENT