Clause de médiation : 10 novembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 21/00424

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Clause de médiation : 10 novembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 21/00424
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2ème Chambre

ARRÊT N°503

N° RG 21/00424 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RIXV

(1)

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

M. [D] [S]

Mme [C] [I] épouse [S]

M. [L] [B]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me CASTRES

– Me LE BERRE BOIVIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Ludivine BABIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 12 Septembre 2023

ARRÊT :

Rendu par défaut, prononcé publiquement le 10 Novembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de SYGMA BANQUE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP HUGO CASTRES,postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Laure REINHARD du CABINET RD AVOCATS, plaidant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉS :

Monsieur [D] [S]

né le 11 Juin 1960 à [Localité 8] (17)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Madame [C] [I] épouse [S]

née le 10 Juillet 1964 à [Localité 7] (29)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Tous deux représentés par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, postulant, avocat au barreau de RENNES

Tous deux représentés par Me Samuel HABIB, plaidant, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [L] [B] es qualité de mandataire ad hoc de la société SUNGOLD exerçant sous enseigne INSTITUT DES NOUVELLES ENERGIES

[Adresse 2]

[Localité 6]

Assigné par acte d’huissier en date du 13/04/2021, délivré à étude, n’ayant pas constitué

EXPOSÉ DU LITIGE

À la suite d’un démarchage à domicile, M. [D] [S] a, selon bon de commande du 2 mars 2015, commandé à la société Sungold, exerçant son activité sous la dénomination commerciale ‘Institut des nouvelles énergies’, la fourniture et l’installation de panneaux photovoltaïques et d’un ballon thermodynamique, moyennant le prix de 23 900 euros TTC.

En vue de financer cette opération, la société Sygma Banque (la société Sygma) a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [S] et Mme [C] [I] (les époux [S]) un prêt de 23 900 euros au taux de 5,76 % l’an, remboursable en 120 mensualités de 277,25 euros hors assurance emprunteur, après un différé de remboursement de 12 mois.

Le prêteur a versé les fonds au fournisseur au vu d’un certificat de livraison de bien ou de fourniture de service du 11 avril 2015, les emprunteurs ayant conclu avec EDF un contrat de rachat de l’électricité produite le 10 janvier 2016 puis remboursé la totalité du prêt par anticipation le 9 février 2016.

Par jugements des 6 septembre 2016 et 28 juin 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sungold puis la clôture de la procédure pour insuffisance d’actifs.

Prétendant que le bon de commande était irrégulier et que l’installation n’avait pas les performances promises, les époux [S] ont, par acte 28 février 2020, fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes la société BNP Paribas Personal Finance (la BNP PPF), comme étant venue aux droits de la société Sygma, ainsi que M. [L] [B], ès qualités de mandataire ad hoc de la société Sungold, en annulation ou résolution des contrats de vente et de prêt, et en remboursement des sommes versées au prêteur.

Estimant que, comme le soutenait les demandeurs, le bon de commande était irrégulier, et appliquant par surcroît d’office une déchéance du droit du prêteur aux intérêts, le premier juge a, par jugement du 17 décembre 2020 :

prononcé l’annulation du contrat de vente conclu le 2 mars 2015 entre les époux [S] et la société Sungold,

prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu le 2 mars 2015 entre les époux [S] et la société Sygma,

dit que la BNP PPF, venant aux droits de la société Sygma, est privée en partie de sa créance de restitution et ne pourra conserver l’intégralité du bénéfice du capital prêté et des intérêts, remboursés par anticipation par les emprunteurs,

condamné la BNP PPF à rembourser aux époux [S] la somme totale de 18 156,99 euros,

rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires,

condamné la BNP PPF à payer aux époux [S] la somme de 2 200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la BNP PPF aux dépens,

déclaré la décision opposable à M. [B], ès qualités de mandataire ad hoc de la société Sungold.

La BNP PPF a relevé appel de cette décision le 20 janvier 2021, pour demander la cour de :

annuler la décision entreprise,

à tout le moins la reformer,

juger n’y avoir lieu à annulation des contrats de vente et de crédit,

juger n’y avoir lieu à déchéance du droit du prêteur aux intérêts,

par conséquent, débouter les époux [S] de leurs demandes,

subsidiairement, en cas d’annulation des contrats, juger que la société Sygma n’a commis aucune faute et que les époux [S] ne justifient pas de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité à l’encontre du prêteur,

par conséquent, débouter les époux [S] de leur demande visant à voir le prêteur privé de son droit au capital prêté,

en toute hypothèse, condamner solidairement les époux [S] au paiement d’une indemnité de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Ayant formé appel incident, les époux [S] demandent quant à eux à la cour de :

réformer le jugement attaqué en ce qu’il a limité à la somme de 18 156, 99 euros le remboursement dû par la BNP PPF et rejeté leur demande d’indemnisation au titre de leurs préjudices financier et économique, de leur trouble de jouissance et de leur préjudice moral,

statuant a nouveau de ces chefs, ordonner le remboursement par la BNP PPF de l’intégralité des sommes qui lui ont été versées, soit 25 286,19 euros, en deniers et quittances,

à titre subsidiaire, condamner la BNP PPF au paiement de somme de 25 300 euros, sauf à parfaire, à titre de dommage -intérêts, au titre du préjudice né de la négligence fautive de la banque,

en tout état de cause, condamner la BNP PPF au paiement des sommes de 4 554 euros au titre du préjudice financier, de 3 000 euros au titre du préjudice économique et du trouble de jouissance, et de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral,

condamner la BNP PPF au paiement d’une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

rejeter toutes demandes autres ou contraires.

M. [B], intimé devant la cour ès qualités de mandataire ad hoc de la société Sungold, n’a pas constitué avocat, la BNP PPF et les époux [S] lui ayant respectivement signifié leurs conclusions les 13 avril 2021 et 6 juillet 2021.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la BNP PPF le 2 juin 2023 et pour les époux [S] le 31 mai 2023, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 8 juin 2023.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la nullité du jugement

Au soutien de sa demande d’annulation du jugement attaqué, la BNP PPF, qui fait grief au premier juge de l’avoir d’office déchue de son droit aux intérêts après avoir relevé que le prêteur avait manqué à son obligation de consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), prétend que, si celui-ci pouvait relever d’office toutes les dispositions du code de la consommation, il lui appartenait néanmoins de respecter le principe du contradictoire en recueillant les observations des parties, et qu’il appartenait en toute hypothèse aux emprunteurs de démontrer l’existence de ce manquement.

Il est cependant de principe qu’en matière de procédure orale sans représentation obligatoire, comme c’était le cas en l’espèce, les moyens soulevés d’office par le juge sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l’audience.

D’autre part, l’obligation, à peine de déchéance du droit du prêteur aux intérêts, de consultation du FICP au plus tard au moment de la conclusion du contrat de prêt résulte de l’article L. 311-9 devenu L. 312-16 du code de la consommation, texte que le juge peut, en application de l’article L. 141-4 devenu R. 632-1 du même code, relever d’office pour l’appliquer au litige.

Enfin, la question de savoir si le juge des contentieux de la protection a mal jugé ou inversé la charge de la preuve en constatant que la BNP PPF ne justifiait pas avoir consulté le FICP relève du contentieux de la réformation et ne saurait fonder une annulation de la décision attaquée.

Sur la nullité du contrat principal

Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,

le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,

les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,

son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,

les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,

le prix du bien ou du service,

les modalités de paiement,

en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,

s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,

la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,

lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation.

Pour annuler le contrat principal, le premier juge a relevé un manquement à l’obligation du fournisseur de préciser les caractéristiques essentielles du bien ou du service, dès lors que ni le poids, ni la taille des panneaux photovoltaïques, ni le modèle et la puissance de l’onduleur, ni le prix de chacun des biens livrés ne sont mentionnés, que le bon de commande n’est pas signé par le vendeur et que les conditions générales de vente sont rédigées dans une taille de caractère ne répondant pas aux exigences légales de lisibilité.

Il ajoute que la facture établie après réception des biens n’indique pas la capacité et le modèle du ballon thermodynamique et révèle que l’onduleur facturé n’est pas conforme à celui prévue au bon de commande, et que l’installation n’a été mise en service que le 22 septembre 2015, en méconnaissance du délai de trois mois que le fournisseur s’était engagé à respecter.

Les époux [S] ajoutent en cause d’appel que le modèle, les références et l’aspect des panneaux ne sont pas mentionnés, que le modèle, les références et les performances de l’onduleur et des autres matériels livrés ne le sont pas davantage, que les panneaux posés ne pourraient être de la marque ‘Thomson’ prévue dans le bon de commande, que ne sont joints à ce dernier ni fiche technique des panneaux, ni plan de réalisation, que le nombre et le montant des échéances du prêt, le taux d’intérêts et le coût total du crédit ne sont pas précisés, et que le nom du démarcheur est illisible.

Cependant, l’examen du bon de commande révèle que celui-ci indique le nombre, la puissance et la marque des panneaux, ainsi que la marque et la capacité du ballon thermodynamique.

Rien ne démontre que le poids, la taille, l’aspect des panneaux photovoltaïques, le modèle, la puissance et les performances de l’onduleur, ou la référence de chacun des éléments de l’installation seraient entrés dans le champ contractuels et constitueraient des caractéristiques essentielles des produits fournis.

Le texte précité n’impose par ailleurs pas de remettre aux consommateurs, à peine de nullité du contrat, une fiche technique des produits livrés et des plans de pose, et il n’exige que la seule mention du prix global à payer, et non des prix détaillés de chacun des équipements ou de la main d’oeuvre.

En outre, il est pallié au défaut de précision du bon de commande relativement aux caractéristiques du prêt par les mentions de l’offre de crédit régularisée au cours de la même opération de démarchage.

D’autre part, à rebours de ce que le premier juge a estimé, la cour observe que les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande sont parfaitement lisibles et répondent ainsi aux exigences de l’article L. 111-1 du code de la consommation.

Il est de même indifférent que le bon ne soit pas signé et que le nom du démarcheur soit illisible, la société Sungold n’ayant jamais contesté être engagée par ce contrat et les dispositions de l’ancien article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur antérieurement au 14 juin 2014, exigeant la mention du nom du démarcheur n’étant plus applicable au moment de la conclusion du contrat litigieux du 2 mars 2015.

Enfin, les circonstances que la marque des panneaux fournis ne serait pas celle prévue au bon de commande, que les caractéristiques de l’onduleur figurant sur la facture seraient différentes de celles mentionnées sur le bon de commande, et que la mise en service de l’installation aurait été effectuée après expiration du délai convenu constituent, à les supposer avérées, des inexécutions contractuelles, et non des vices de la formation du contrat, de sorte qu’elles ne sauraient fonder une annulation de celui-ci, seule demande dont la cour est saisie en cause d’appel.

En revanche, les époux [S] relèvent avec raison que le bon de commande ne mentionne pas de délai d’exécution du contrat.

En effet, s’il est mentionné une ‘livraison dans un délai de trois mois maximum’, l’absence d’indication du délai d’exécution de la prestation accessoire de pose ne satisfait pas au texte précité, le délai butoir de 200 jours stipulé aux conditions générales étant trop vague et ne portant, là encore, que sur la livraison du matériel, et non sur la pose et la mise en service de l’installation.

De surcroît, les informations relatives aux conditions et modalités d’exercice du droit de rétractation sont erronées.

En effet, les conditions générales du contrat ne reproduisent pas les dispositions du code de la consommation applicables à la cause relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, mais celles des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation, abrogées au moment de la conclusion du contrat du 2 mars 2015, prévoyant un délai de rétractation de sept jours à compter de la commande.

D’autre part, le bordereau de rétractation vise également les mêmes dispositions légales abrogées au moment de la conclusion du contrat et, s’il mentionne bien, conformément à la loi nouvelle, un délai de rétractation de 14 jours, il fait courir ce délai ‘à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant’.

Or, aux termes de l’article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat litigieux conclu le 2 mars 2015, le consommateur disposait, pour exercer son droit de rétractation, d’un délai de quatorze jours commençant à courir à compter du jour de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens, le consommateur pouvant, pour les contrats conclus hors établissement, exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Il en résulte que, si les époux [S] pouvaient en l’espèce exercer leur droit de rétractation dès la conclusion du contrat conclu à leur domicile à la suite d’une opération de démarchage, le délai de quatorze jours ne commençait néanmoins à courir qu’à compter de la livraison des panneaux, et non à compter du jour de la commande.

En outre, il résulte de l’article L. 121-18-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, que, lorsque les informations relatives à l’exercice du droit de rétractation mentionnées à l’article L. 121-17, I , 2° dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue, de sorte que, contrairement à ce que la BNP PPF prétend, une telle sanction peut être invoquée par le souscripteur du contrat, au même titre que la prolongation du délai de rétractation prévu par l’article L. 121-21-1 du même code.

La BNP PPF soutient néanmoins que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que les acquéreurs auraient renoncé à invoquer, en laissant les travaux de pose du matériel livré s’exécuter et en signant l’attestation de fin de travaux caractérisant leur volonté de les recevoir.

Cependant, si ces constatations permettent en effet de caractériser une exécution volontaire du contrat irrégulier, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la connaissance du vice affectant l’obligation et à l’intention de le réparer.

À cet égard, la reproduction dans les conditions générales de vente de l’ancien article L. 121-21 du code de la consommation, qui comportait déjà en substance l’indication que le délai de livraison des biens et d’exécution des prestations de service devait être mentionné dans le contrat à peine de nullité de celui-ci, révèle que les époux [S] ont laissé les travaux s’exécuter et signé le certificat de livraison en parfaite connaissance de la nullité relative à l’imprécision du délai d’exécution, de sorte que cette cause de nullité du contrat est couverte.

En revanche, les mentions des conditions générales de vente concernant la faculté de rétractation étaient, ainsi que précédemment relevé, erronées, de sorte que rien ne démontre que les époux [S] ont eu connaissance, au moment où ils ont exécuté le contrat, de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation relativement à leur droit de rétractation.

Il convient donc, pour cette cause de nullité, d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, sans qu’il y ait en conséquence lieu de statuer sur le dol également invoqué, de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 2 mars 2015 avec la société Sungold.

Sur la nullité du contrat de prêt

Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la BNP PPF est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Sungold emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la BNP PPF.

Comme le rappelle à juste titre la BNP PPF, la nullité du prêt a en principe pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.

S’agissant la restitution du capital au prêteur, les époux [S] demandent cependant à la cour d’infirmer le jugement attaqué en ce qu’il ne les a que partiellement dispensés de restituer les fonds empruntés, en retenant que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds au vu d’un bon de commande irrégulier et d’un certificat de livraison laconique établi sur un formulaire type, alors que l’installation n’était pas achevée et le raccordement au réseau pas encore effectué.

La BNP PPF soutient de son côté qu’il n’appartenait pas au prêteur de juger de la régularité du bon de commande et de contrôler l’exécution totale de la prestation du fournisseur, alors qu’elle s’est dessaisie du capital prêté au vu d’un certificat de livraison par lequel les époux [S] reconnaissaient que le contrat principal avait été exécuté et lui donnaient l’ordre de débloquer les fonds.

Le prêteur, qui n’a pas à assister les emprunteurs lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.

Or, en l’occurrence, le ‘certificat de livraison de bien et de fourniture de services’ signé ‘sans réserve’ par M. ou Mme [S] le 11 avril 2015 faisait ressortir sans ambiguïté que ‘la livraison des biens et la fournitures de la prestation de services’ portant sur un ‘kit photovoltaïque + ballon thermodynamique’ avaient été ‘pleinement effectuées conformément au contrat principal’, les emprunteur demandant en outre expressément au prêteur de procéder à la mise à disposition des fonds entre les mains de la société Sungold.

La société Sygma, qui n’est pas un professionnel de la pose des panneaux et ne disposait pas de moyens techniques pour évaluer le temps nécessaire à la réalisation de l’ensemble des prestations accessoires, pouvait donc légitimement en déduire que l’ensemble des biens commandés avaient été livrés et que l’intégralité des prestations accessoires de pose, de raccordement au réseau public d’électricité et de mise en service de l’installation, fût-elle, comme l’a considéré le premier juge, complexe et sophistiquée, avaient été réalisées.

En outre, contrairement à ce que le premier juge a retenu, le prêteur, en droit de se fier aux déclarations figurant dans un certificat de livraison non équivoque établi par l’emprunteur sous sa responsabilité, n’avait pas à attendre l’émission de la facture pour se dessaisir des fonds afin de pouvoir confronter celle-ci avec les énonciations du bon de commande.

Cependant, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Sungold, par l’intermédiaire de laquelle la BNP PPF faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes relativement aux modalités d’exercice de la faculté de rétractation, qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté faisant distribuer ses crédits à l’occasion d’opérations de démarchage à domicile, à ne pas libérer les fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [S] qu’ils entendaient confirmer l’acte irrégulier.

Le prêteur n’avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la BNP PPF a commis une faute la privant du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.

Toutefois, la BNP PPF fait valoir à juste titre que la dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l’emprunteur de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

Or, les époux [S] ne caractérisent nullement l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.

En effet, l’installation a été raccordée au réseau, mise en service et a produit de l’électricité revendue à EDF en vertu d’un contrat d’achat d’énergie dûment régularisé.

Les époux [S] croient pouvoir caractériser leur préjudice en invoquant leur obligation de rembourser le prêt à un ‘taux exorbitant’, mais, quoiqu’il en soit de ce taux, l’annulation des contrats de vente et de crédit a pourtant rétroactivement anéanti l’obligation de payer des intérêts au prêteur.

Ils semblent aussi invoquer l’insuffisance de performance de l’installation, une panne du ballon thermodynamique trois ans après son achat, voire la destruction de l’installation par incendie au cours de la procédure d’appel, mais ces circonstances, apparues postérieurement à la libération des fonds entre les mains du fournisseur, sont sans lien causal avec la faute du prêteur qui n’a pas su déceler à ce moment là des irrégularités du bon de commande relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation.

Il n’y a dès lors pas lieu de dispenser les époux [S] de rembourser le capital emprunté, ni même de déduire de celui-ci, comme l’a fait le premier juge, le manque à gagner procédant d’une insuffisance de performance de l’installation, cette circonstance étant en effet sans lien causal avec la faute de la société Sygma qui n’avait pas à assister les emprunteurs lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles.

Étant rappelé que le prêt a déjà été remboursé par anticipation, les époux [S] seront par conséquent déboutés de leur demande de restitution du capital prêté de 23 900 euros, la BNP PPF étant seulement condamnée à restituer les intérêts et accessoires perçus en exécution du prêt, soit, selon les propres éléments de calcul fournis par les époux [S], la somme de 1 386,19 euros (25 286,19 – 23 900).

Le jugement attaqué sera réformé en ce sens.

Sur la déchéance du droit du prêteur aux intérêts

L’annulation du contrat de prêt rend, à supposer même cette mesure recevable et bien fondée, la déchéance du droit du prêteur aux intérêts inopérante, puisque ces derniers doivent être remboursés aux époux [S] au titre des restitutions de part et d’autre.

Sur les dommages-intérêts

Les époux [S] demandent subsidiairement à la cour, dans le cas où ils ne seraient pas dispensés de restituer le capital emprunté, de condamner la BNP PPF au paiement de dommages-intérêts d’un montant de 25 300 euros au titre de leur préjudice financier.

Cependant, il vient d’être observé que, si le prêteur a effectivement commis une faute lors de la libération des fonds entre les mains du fournisseur, il n’en est résulté aucun préjudice en lien causal avec celle-ci.

Dès lors, même présentée sous la forme d’une demande en paiement de dommages-intérêts, cette prétention n’est pas fondée.

Ils réclament en outre le paiement des sommes de 4 554 euros au titre des frais de désinstallation du matériel, de 3 000 euros au titre de leur préjudice économique et de leur trouble de jouissance résultant de l’insuffisance de rentabilité de l’opération et de la panne du ballon, et de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral.

S’agissant du coût des travaux de dépose des panneaux et de remise en état de la toiture, il doit être observé que le prêteur, tiers au contrat principal, ne saurait se voir imputer les conséquences dommageables des restitutions de part et d’autre consécutives à l’annulation de ce contrat.

Le préjudice économique et le trouble de jouissance allégués sont quant à eux sans lien causal avec la faute de la société Sygma, et les intimés n’apportent enfin pas de preuve de l’existence du préjudice moral qu’ils allèguent.

Ces demandes ont donc été à juste titre rejetées par le premier juge.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement attaqué a, par d’exactes considérations d’équité, pertinemment alloué une indemnité de 2 200 euros au époux [S] en application de l’article 700 du code de procédure civile et condamné aux dépens de première instance la BNP PPF, partie, à ce stade de la procédure ayant abouti à l’annulation des contrats, principalement succombante.

En revanche, il n’y a pas matière à en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel au bénéfice de quiconque.

Et, principalement succombant en cause d’appel sur leur demande substantielle de remboursement du capital emprunté, les époux [S] supporteront les dépens exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Rejette la demande d’annulation du jugement rendu le 17 décembre 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes ;

Infirme le jugement attaqué en ce qu’il a dit que la BNP Paribas Personal Finance était privée en partie de sa créance de restitution, prononcé la déchéance du droit du prêteur aux intérêts et condamné celle-ci à rembourser aux époux [S] la somme de 18 156,99 euros ;

Condamne la BNP Paribas Personal Finance à rembourser à M. [D] [S] et à Mme [C] [I] épouse [S] la somme de 1 386,19 euros au titre des restitutions de part et d’autre après annulation du contrat de crédit, le surplus des demandes de restitution étant rejetées ;

Dit n’y avoir matière à déchéance du droit du prêteur aux intérêts ;

Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d’appel ;

Condamne M. [D] [S] et Mme [C] [I] épouse [S] aux dépens d’appel ;

Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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