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2ème Chambre
ARRÊT N°589
N° RG 21/02851
N° Portalis DBVL-V-B7F-RTT3
(3)
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
C/
Mme [F] [I] épouse [C]
M. [B] [C]
S.E.L.A.R.L. ATHENA
S.A.S. EXPERT SOLUTION ENERGIE
Infirme la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 22 DECEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Pierre DANTON, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 Octobre 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 22 Décembre 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE exerçant sous enseigne CETELEM,
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP HUGO CASTRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉS :
Madame [F] [I] épouse [C]
née le 11 Février 1973 à [Localité 9] (ALLEMAGNE)
[Adresse 2]
[Localité 5]/FRANCE
Monsieur [B] [C]
né le 10 Septembre 1973 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 5]/FRANCE
Tous deux représentés par Me Raphaëlle BRIAND, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST
S.A.S. EXPERT SOLUTION ENERGIE
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTERVENANTE :
S.E.L.A.R.L. ATHENA représentée par Maître [D] [K], es qualité de liquidateur judiciaire de la société EXPERT SOLUTION ENERGIE
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
* * *
EXPOSE DU LITIGE :
A la suite d’un démarchage à domicile, Mme [F] [C] née [I] a, selon bon de commande du 27 septembre 2016, commandé à la société Expert Solution Energie (la société ESE) la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque, d’un ballon thermodynamique et d’un pack d’ampoules Led, moyennant le prix total de 37 900 TTC.
En vue de financer cette opération, la société BNP Paribas Personal Finance (la BNP PPF) exerçant sous la dénomination commerciale ‘Cetelem’ a, selon offre acceptée le même jour, consenti à Mme [C] un prêt de 37 900 euros au taux de 3,83 % l’an, remboursable en une mensualité de 274,79 euros et 179 mensualités de 286,72 euros, hors assurance emprunteur, après un différé d’amortissement de 12 mois.
Les fonds ont été versés à la société ESE au vu d’une attestation de fin de travaux et d’une demande de déblocage des fonds du 18 novembre 2016.
Prétendant que les échéances de remboursement n’ont pas été honorées à compter de novembre 2017 en dépit d’une lettre recommandée de mise en demeure de régulariser l’arriéré sous 10 jours en date du 10 avril 2018, la BNP PPF s’est, par un second courrier recommandé avec accusé de réception du 14 mai 2018, prévalu de la déchéance du terme.
Puis, elle a, par acte du 8 juillet 2019, fait assigner Mme [C] devant le tribunal d’instance, devenu le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Brest, en paiement de la somme de 42 640,39 euros avec intérêts au taux contractuel à compter de la décision à intervenir.
Toutefois, prétendant de leur côté que le bon de commande était irrégulier, Mme [C] et M. [B] [C] son époux ont, par acte du 24 septembre 2019, fait assigner en intervention forcée la société ESE.
Les deux procédures ont été jointes.
Par jugement du 16 mars 2021, le premier juge a :
déclaré la BNP PPF, venant aux droits de la société Cetelem, recevable en son action,
prononcé la nullité du bon de commande en date du 27 décembre 2016 conclu entre ‘M. [B] [C]’, Mme [F] [C] et la société ESE,
prononcé la nullité du contrat en date du 27 décembre 2016 conclu entre ‘M. [B] [C]’, Mme [F] [C] et la BNP PPF,
condamné la BNP PPF à restituer à ‘M.’ et Mme [C] les sommes déjà versées au titre du remboursement du prêt,
débouté la BNP PPF de sa demande de garantie à l’encontre de la société ESE,
ordonné le retrait de l’installation des panneaux photovoltaïques,
condamné la société ESE à procéder au retrait de l’installation de panneaux photovoltaïques sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification de la présente décision,
condamné in solidum la société ESE et la BNP PPF à verser à M. et Mme [C] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La BNP PPF a relevé appel de cette décision le 10 mai 2021.
Le tribunal de commerce d’Angers ayant, par jugement du 7 juillet 2021, prononcé la liquidation judiciaire de la société ESE, la BNP PPF a, par acte du 13 septembre 2021, fait assigner en intervention forcée devant la cour son liquidateur, la SELARL Athena prise en la personne de Mme [D] [K].
Aux termes de ses dernières conclusions du 8 septembre 2023, la BNP PPF demande à la cour de :
réformer le jugement attaqué,
condamner Mme [F] [C] à lui verser la somme de 42 640,39 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 3,83 % sur la somme de 39 608,39 euros et aux taux légal pour le surplus,
subsidiairement, condamner Mme [F] [C] à lui verser la somme de 37 900 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
en tout cas, débouter les époux [C] de toutes demandes, fins et conclusions,
dire irrecevable, et en tout cas mal fondée, la demande subsidiaire présentée par conclusions du 11 mars 2022 tendant à voir condamner la SELARL Athena, mandataire de la société ESE, à restituer la somme de 37 900 euros en lieu et place des époux [C],
condamner les mêmes in solidum ou les uns à défaut des autres au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
En l’état de leurs dernières conclusions du 20 juin 2023, M. et Mme [C] demandent quant à eux à la cour de :
déclarer la SELARL Athena non fondée en son appel incident, et l’en débouter,
confirmer le jugement attaqué,
débouter la BNP PPF de toutes ses demandes, fins et conclusions,
subsidiairement, condamner la SELARL Athena, mandataire de la société ESE, à restituer la somme de 37 900 euros en lieu et place des époux [C],
en tout état de cause, condamner la BNP PPF à leur verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les sommes accordées en première instance, ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.
Enfin, aux termes de ses dernières conclusions du 30 mars 2022, la SELARL Athena, ès-qualités de liquidateur de la société ESE, demande à la cour de :
la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,
infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a :
prononcé la nullité du bon de commande en date du 27 septembre 2016 conclu entre ‘M. [C]’, Mme [C] et la société ESE,
prononcé la nullité du contrat conclu le 27 septembre 2016 entre ‘M. [C]’, Mme [C] et la BNP PPF,
ordonné le retrait de l’installation photovoltaïque,
condamné la société ESE à procéder au retrait de l’installation photovoltaïque sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification de la présente décision,
condamné in solidum la société ESE et la BNP PPF à verser aux époux [C] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
débouter les époux [C] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
débouter la BNP PPF de ses demandes formulées à l’égard de la société ESE,
en tout état de cause, condamner les époux [C] au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 14 septembre 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Les dispositions pertinentes du jugement attaqué ayant déclaré recevable l’action en paiement de la banque introduite le 8 juillet 2019, alors que le premier incident de paiement est survenu le 20 novembre 2017, exemptes de critiques devant la cour, seront confirmées.
D’autre part, ainsi que l’a rappelé à juste titre le prêteur, Mme [F] [C] est la seule signataire du bon de commande et du contrat de crédit, M. [C] n’ayant aucune qualité ou intérêt à agir.
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
Pour annuler le contrat de vente régularisé le 27 septembre 2016, le premier juge a retenu que le bon de commande était irrégulier en ce qu’il ne mentionnait pas le prix unitaire de chaque élément de l’installation photovoltaïque, et qu’il a donné une information erronée sur un crédit d’impôt figurant dans une simulation de projet établi par la société ESE.
Mme [C] argue en outre de ce qu’elle pensait avoir été sélectionnée dans le cadre d’un programme écologique et qu’elle se serait placée dans l’attente d’une validation de sa sélection par EDF, ce qui l’aurait privée de la possibilité de se rétracter, et qu’elle n’aurait ainsi pas bénéficié des informations précontractuelles prescrites par l’article L. 221-5 du code de la consommation.
Elle ajoute que, s’agissant du prix, elle n’aurait aucunement été informée du prix unitaire de chaque élément que sont l’installation photovoltaïque, le ballon thermodynamique ou encore la batterie, seul le prix global étant indiqué.
Cependant, la mention ‘bon de commande’ sur le document qu’elle a régularisé le 27 septembre 2016, ne pouvait laisser à Mme [C] le moindre doute sur la réalité de son engagement.
D’autre part, rien ne démontre que la société ESE ait fourni des informations mensongères sur la réalité de cet engagement, Mme [C] n’invoquant du reste pas le dol qui aurait été commis par le fournisseur, se contentant d’alléguer par des pures conjectures, et sans en rapporter la preuve, que le représentant de la société ESE lui aurait indiqué qu’elle serait contactée par EDF afin de lui confirmer, ou non, la sélection de son logement dans le cadre d’un programme d’installation de panneaux photovoltaïques.
Le bon de commande définit pourtant l’objet de la vente comme portant sur un pack ‘GSE 20 Air’System’ comprenant 20 panneaux photovoltaïques de marque Solarworld et de puissance de 280 Wc, un micro-onduleur de marque Enphase, un kit ‘GSE Intégration’, un boîtier AC, le câblage, l’installation, le raccordement et les démarches administratives.
Il était également précisé que l’offre comprenait un ballon thermodynamique d’une contenance de 250 litres et un pack d’ampoules Led.
Or, s’agissant d’une installation unique de production d’électricité et d’eau chaude sanitaire, les textes précités n’exigent nullement que le prix unitaire de chacun des éléments fournis soient mentionnés dans le contrat, seul l’indication du prix global à payer est requise.
Par ailleurs, les conditions générales de vente comportaient bien le rappel des dispositions légales en matière de faculté de rétractation, et notamment que le délai de rétractation de 14 jours courrait à compter du jour de la livraison des produits.
Il s’en évince que, conformément aux dispositions prévues à l’article L. 221-5 du code de la consommation, les informations relatives aux conditions, au délai et aux modalités d’exercice du droit de rétractation ont bien été délivrées.
Le bon de commande était par ailleurs doté d’un bordereau de rétractation conforme au formulaire type prévu par l’article R. 222-1.
Enfin, s’agissant du crédit d’impôt, il n’est nullement démontré que cet élément soit entré dans le champ contractuel, Mme [C] n’invoquant plus devant la cour la promesse d’un crédit d’impôt résultant d’une simulation de projet qui aurait été établie par la société ESE, non produite en appel.
Il convient donc d’infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat conclu le 27 septembre 2016 entre Mme [C] et la société ESE.
Sur le contrat de prêt
A défaut d’annulation du contrat de vente et de prestation accessoire de pose, la disposition du jugement attaqué ayant annulé le contrat de crédit affecté, qui n’en était que la conséquence de plein droit, ne pourra qu’être à son tour réformée.
Il s’en évince que Mme [C] qui n’a pas obtenu l’annulation du contrat de prêt sera tenue d’honorer ses obligations de remboursement du crédit, sachant au surplus, comme le fait observer à juste titre le prêteur, que Mme [C] ne caractérise nullement l’existence de son préjudice, l’installation ayant été raccordée au réseau et produisant de l’électricité, ainsi qu’il ressort de l’attestation de conformité délivrée par le Consuel le 18 novembre 2016.
A cet égard, il ressort de l’offre, du tableau d’amortissement, de l’historique du compte et du décompte de créance que Mme [C] restait devoir au jour de la déchéance du terme du 14 mai 2018 :
1 708,39 euros au titre des échéances échues impayées,
37 900 euros au titre du capital restant dû,
3 032 euros au titre de l’indemnité de défaillance égale à 8 % du capital restant dû,
soit, au total, 42 640,39 euros, avec intérêts au taux de 3,83 % sur le principal de 39 608,39 euros (1 708,39 + 37 900).
Mme [C] sera, après réformation du jugement attaquée, condamnée au paiement de cette somme.
Sur les autres demandes
Il n’y a par ailleurs pas lieu de statuer sur la demande subsidiaire de la BNP PPF en restitution du capital prêté, ni sur la demande subsidiaire de Mme [C] de condamnation de la société Athena, ès-qualités de liquidateur de la société ESE, en restitution de la somme de 37 900 euros en lieu et place de Mme [C], devenues sans objet.
M. et Mme [C] qui succombent, supporteront les dépens de première instance et d’appel.
Il n’y a enfin pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu’en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 16 mars 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Brest, sauf en ce qu’il a déclaré la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Cetelem, recevable en son action ;
Dit n’y avoir lieu à annulation des contrats de vente et de prêt ;
Condamne Mme [F] [C] née [I] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 42 640,39 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,83 % sur le principal de 39 608,39 euros ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. et Mme [C] aux dépens de première instance et d’appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT