COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 22 JUIN 2023
N° 2023/ 440
Rôle N° RG 22/03987 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJCEY
[N] [W]
C/
[U] [Z]
[I] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Samira KEITA
Me Maxime PLANTARD
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de proximité d’AIX EN PROVENCE en date du 08 février 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 12-21-001265.
APPELANT
Monsieur [N] [W]
né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 5], demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Samira KEITA de l’ASSOCIATION KEITA J.L. – KEITA S., avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Stéphanie KEITA, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Madame [U] [O] épouse [Z]
née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 5], demeurant [Adresse 4]
Monsieur [I] [Z]
né le [Date naissance 3] 1961 à [Localité 6], demeurant [Adresse 4]
représentés par Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE – PLANTARD – ROCHAS & VIRY, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Catherine OUVREL, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Catherine OUVREL, Présidente
Mme Angélique NETO, Conseillère
Madame Myriam GINOUX, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023
Signé par Mme Catherine OUVREL, Présidente et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon bail sous seing privé du 18 janvier 2019, madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] ont donné en location à monsieur [N] [W] un logement situé [Adresse 4], moyennant un loyer mensuel de 760 € outre 40 € de provision sur charges.
Madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] ont fait délivrer un commandement de payer daté du 9 juillet 2021 visant la clause résolutoire du bail et ont mis en demeure monsieur [N] [W] de leur régler la somme de 7 062,40 €.
Par ordonnance réputée contradictoire de référé en date du 8 février 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire, pôle de proximité, d’Aix-en-Provence a :
écarté des débats le courrier de monsieur [N] [W] reçu au greffe le 14 janvier 2022,
constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties à la date du 9 septembre 2021,
‘ ordonné, à défaut de départ volontaire et de meilleur accord entre les parties, l’expulsion de monsieur [N] [W] et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L 412-1 et suivants, R 411-1 et suivants, R 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
‘ dit que le sort des meubles sera réglé conformément aux articles L433-1 et suivants et R 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
‘ condamné monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] à titre provisionnel en derniers et quittances une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et charges qui auraient été payés en cas de non résiliation, à compter du 11 janvier 2022 et jusqu’à libération effective des lieux et remise des clefs,
‘ condamné monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] la somme de 11 700 € à titre de provision à valoir sur les loyers, indemnités d’occupation et charges impayés selon décompte arrêté au 10 janvier 2022,avec intérêts au taux légal à compter de l’ordonnance,
‘ condamné monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] la somme de 400 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ rejeté les autres demandes de madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z],
‘ condamné monsieur [N] [W] aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de la dénonce à la CCAPEX.
Selon déclaration reçue au greffe le 17 mars 2022, monsieur [N] [W] a interjeté appel de cette décision, l’appel portant sur toutes les dispositions de l’ordonnance déférée dûment reprises.
En exécution de l’ordonnance entreprise, le locataire a été expulsé du logement le 29 août 2022.
Par ordonnance sur incident du 8 septembre 2022, la demande de caducité de la déclaration d’appel a été rejetée.
Par décision du 21 novembre 2022, le Premier Président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a rejeté la demande de suspension de l’exécution provisoire présentée par monsieur [N] [W].
Par dernières conclusions transmises le 25 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [N] [W] demande à la cour de :
À titre principal :
réformer l’ordonnance entreprise,
juger le bail non conforme aux prescriptions de la loi du 6 juillet 1989 et du décret applicable,
prononcer la résolution du bail pour non respect et manquement aux obligations nées de la loi du 6 juillet 1989 et du décret applicable,
condamner le bailleur à la restitution des loyers perçus, soit 13 600 €,
À titre subsidiaire :
réduire le loyer mensuel à la somme de 300 € hors charges rétractivement à compter du 18 janvier 2019,
juger qu’il est fondé à soulever l’exception d’inexécution du paiement du loyer à compter de juin 2022,
En tout état de cause :
condamner le bailleur à lui payer la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au regard des agissements malveillants et répréhensibles du bailleur,
condamner en outre le bailleur au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Par dernières conclusions transmises le 28 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] sollicitent de la cour qu’elle :
À titre principal :
juge irrecevables car nouvelles en cause d’appel les demandes formées par monsieur [N] [W],
À titre subsidiaire :
déboute monsieur [N] [W] de ses demandes,
condamne monsieur [N] [W] à leur payer la somme de 3 272,55 € générée par les frais d’expulsion,
confirme l’ordonnance entreprise sauf sur le montant de la condamnation au titre de la dette locative,
actualise le montant de la dette locative à la somme de 17 300 € arrêtée au 29 août 2022,
condamne monsieur [N] [W] à leur payer la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 2 mai 2023.
Par soit-transmis du 9 juin 2023, la cour a soulevé d’office le moyen tiré du caractère non provisionnel de la demande indemnitaire formée par monsieur [N] [W] aux termes de ses dernières conclusions. Elle a donc demandé aux parties de lui faire retour de leurs observations par le truchement d’une note en délibéré déposée avant le 16 juin 2023 minuit.
Par note en délibéré déposée par le conseil de l’appelant le 15 juin 2023, monsieur [N] [W] a mis en avant une erreur matérielle pour expliquer le fait que sa demande indemnitaire n’ait pas été formée à titre provisionnel. Les intimés n’ont déposé aucune note en délibéré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes de monsieur [N] [W] tendant à la nullité, la résolution du bail et la restitution des loyers
En vertu de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Par application de l’article 566 du code de procédure civile, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
L’article 567 du code de procédure civile prévoit que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Les demandes présentées pour la première fois en appel par le défendeur en première instance alors non comparant, devenu depuis appelant, ne sont recevables que si elles correspondent à l’une des exceptions prévues par les textes sus-visés.
En l’occurrence, indépendamment des circonstances ayant conduit à la non comparution de monsieur [N] [W] devant le premier juge, aucune sanction n’étant formée à l’encontre de l’ordonnance rendue à ce titre, il y a lieu de constater que ce dernier, absent et non représenté, était non comparant, de sorte que l’ordonnance rendue le 8 février 2022 était réputée contradictoire. Or, le premier juge était saisi par les bailleurs de la mise en oeuvre de la clause résolutoire stipulée au bail et de ses conséquences, outre d’une demande en paiement provisionnel de la dette locative.
Désormais, monsieur [N] [W] sollicite, de manière assez confuse, à la fois la nullité et la résolution du bail pour non respect par les bailleurs des obligations nées de la loi du 6 juillet 1989, et plus précisément de l’article 3-3 de cette loi outre de l’article 125-5 II du code de l’environnement pour défaut de délivrance du diagnostic de performance énergétique, document obligatoire. Cette demande ne répond à l’évidence aucunement aux critères de l’article 564 du code de procédure civile, n’opposant en rien compensation, ne tendant pas à écarter les prétentions adverses, ni n’étant liée à l’intervention d’un tiers ou à la révélation d’un fait nouveau.
De même, la cause d’une telle prétention est totalement distincte de celle tendant à la mise en oeuvre de la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers, de sorte qu’il ne peut s’agir d’une demande accessoire, conséquente ou complémentaire à celle présentée par les intimés.
Enfin, à supposer qu’elle puisse être qualifiée de demande reconventionnelle, elle ne peut se rattacher au litige par un lien suffisant, les fondements des prétentions étant trop éloignés.
Aussi, ces prétentions émises par monsieur [N] [W], comprenant à la foi la nullité ou résolution du bail, ainsi que la restitution des loyers, doivent être déclarées irrecevables.
Tel n’est en revanche pas le cas de ses prétentions en termes d’exception d’inexécution conduisant à la suspension totale et rétroactive du loyer dû, ainsi que de celles afférent à la réduction rétroactive du loyer dû, demandes motivées par l’indécence du logement, puisque ces demandes tendent à obtenir une compensation et s’appuient sur un moyen de défense recevable.
Sur l’indécence du logement, l’acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences
En application des articles 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.
En application des articles 1728, 1741 du code civil et 15 I de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a pour obligation principale le paiement du loyer. Un manquement grave et répété à cette obligation justifie la résiliation du contrat ou la délivrance d’un congé pour ce motif à l’initiative du bailleur.
L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à l’espèce, tendant à améliorer les rapports locatifs dispose : I.-Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.(…)
III.-A peine d’irrecevabilité de la demande, l’assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence de l’huissier de justice au représentant de l’Etat dans le département au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévue à l’article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du système d’information prévu au dernier alinéa de l’article 7-2 de la même loi. La saisine de l’organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s’effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L’organisme saisi réalise un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l’audience, ainsi qu’à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic.
En vertu de l’article 6 de loi n°89-462 du 6 juillet 1989 modifié par la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
Par ailleurs, selon le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 les caractéristiques du logement décent sont les suivantes :
« Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires :
1. Il assure le clos et le couvert. Le gros ‘uvre du logement et de ses accès est en bon état d’entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d’eau dans l’habitation. Pour les logements situés dans les départements d’outre-mer, il peut être tenu compte, pour l’appréciation des conditions relatives à la protection contre les infiltrations d’eau, des conditions climatiques spécifiques à ces départements ;
2. Il est protégé contre les infiltrations d’air parasites. Les portes et fenêtres du logement ainsi que les murs et parois de ce logement donnant sur l’extérieur ou des locaux non chauffés présentent une étanchéité à l’air suffisante. Les ouvertures des pièces donnant sur des locaux annexes non chauffés sont munies de portes ou de fenêtres. Les cheminées doivent être munies de trappes. Ces dispositions ne sont pas applicables dans les départements situés outre-mer ;
3. Les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, sont dans un état conforme à leur usage ;
4. La nature et l’état de conservation et d’entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ;
5. Les réseaux et branchements d’électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d’eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d’usage et de fonctionnement ;
6. Le logement permet une aération suffisante. Les dispositifs d’ouverture et les éventuels dispositifs de ventilation des logements sont en bon état et permettent un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité adaptés aux besoins d’une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements (…)».
L’article 1719 du code civil dispose que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière (…) de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant.
Par application de l’article 20-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, si le logement loué ne satisfait pas aux dispositions des premier et deuxième alinéas de l’article 6, le locataire peut demander au propriétaire sa mise en conformité sans qu’il soit porté atteinte à la validité du contrat en cours. (…) Le juge saisi par l’une ou l’autre des parties détermine, le cas échéant, la nature des travaux à réaliser et le délai de leur exécution. Il peut réduire le montant du loyer ou suspendre, avec ou sans consignation, son paiement et la durée du bail jusqu’à l’exécution de ces travaux.
En l’occurrence, il résulte des pièces communiquées que les parties sont liées par un bail écrit en date du 18 janvier 2019 dans lequel est insérée une clause résolutoire applicable de plein droit en cas de non-paiement des loyers et charges dans le délai de deux mois à compter de la délivrance d’un commandement de payer.
Par acte délivré le 9 juillet 2021, madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] ont fait commandement à monsieur [N] [W] de payer la somme de 6 900 € en principal au titre des loyers non réglés en mai et juin 2020, outre de janvier à juillet 2021. Ils ont ainsi manifesté leur intention de se prévaloir de la clause résolutoire précitée.
Il résulte du dernier décompte produit et il n’est pas contesté que les causes du commandement n’ont pas été réglées dans les deux mois de sa délivrance. Il est acquis également que le locataire a quitté les lieux le 29 août 2022.
Toutefois, monsieur [N] [W] invoque l’indécence du logement loué, et sollicite, pour s’opposer au constat de la clause résolutoire du bail, à titre principal, l’application d’une exception d’inexécution, et, à titre subsidiaire, une réduction rétroactive du loyer.
Aux termes du bail, le logement loué est un T3 de 70 m² avec terrasse. L’état des lieux d’entrée, paraphé et signé par l’ensemble des parties, dont monsieur [N] [W], fait état d’un logement et d’équipement en bon état, voire très bon état pour l’ensemble des équipements et pièces intérieurs. De même, pour chacune des deux chambres, il est expressément indiqué qu’il s’agit de pièces sans fenêtre, tout comme il a été précise que le WC n’était pas équipé d’un broyeur tout en étant en bon état de fonctionnement.
Monsieur [N] [W] justifie d’un courrier recommandé adressé à ses bailleurs le 9 décembre 2021, soit 5 mois après la délivrance du commandement de payer. Il a saisi les services de la mairie d'[Localité 5] qui ont diligenté une enquête le 8 décembre 2021 et qui relèvent les infractions suivantes :
– très mauvaise isolation des murs et plafonds,
– absence de réglette d’aération sur les fenêtres,
– deux pièces à usage de chambres sans fenêtres,
– dysfonctionnements du chauffage dans les chambres,
– absence d’eau chaude suite à la mise à l’arrêt du cumulus.
La mauvaise isolation du bien est confirmée par le diagnostic de performance que l’appelant a fait réaliser le 26 octobre 2022. De même, le procès-verbal de constat par commissaire de justice du 26 octobre 2022 confirme les points relevés par la mairie.
Des pièces produites, il n’est en rien démontré que la coupure du cumulus soit imputable aux bailleurs. Les échanges de SMS produits au dossier attestent de la mésentente et du peu de courtoisie réciproque entre les parties, mais ne sont pas probants quant à la décence ou non du logement.
Au vu des éléments sus-visés, il appert, principalement à raison de l’absence de fenêtre dans deux chambres pour un T3, ainsi que des défauts d’isolation et de chauffage, que le logement loué ne peut être considéré comme décent.
Pour autant, il n’en est pas moins habitable, de sorte que l’exception d’inexécution conduisant à une suspension complète du paiement du loyer n’est pas justifiée.
En outre, l’appelant sollicite la réduction rétroactive du loyer sans fonder juridiquement sa demande. En vertu de l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 ci-dessus repris, il ne peut être fait droit à une telle prétention, en dehors de toute demande de travaux, elle-même sans objet depuis le départ du locataire.
En définitive, monsieur [N] [W] doit donc être reconnu redevable de l’intégralité du loyer sur la période de mai et juin 2020, puis de janvier 2021 au 29 août 2022, cette créance apparaissant non sérieusement contestable.
Ainsi, l’ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et en ce qu’elle a ordonné l’expulsion de monsieur [N] [W], depuis exécutée. De même, la confirmation de l’ordonnance s’impose quant à la condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation provisionnelle mensuelle.
S’agissant de la provision au titre des dettes de loyers, indemnités d’occupation et charges, monsieur [N] [W] ne justifie d’aucun paiement depuis la délivrance du commandement, seuls des versements d’allocations sociales ayant été accordés de novembre 2021 à avril 2022, pour un total de 1632 €, ainsi que le reconnaissent les bailleurs, somme qui doit donc être déduite. En l’état de ces éléments, la dette non sérieusement contestable de monsieur [N] [W] envers les intimés, arrêtée au 29 août 2022 s’élève à 15 668 €, somme au paiement de laquelle il convient de le condamner.
Sur la demande de monsieur [N] [W] tendant à l’indemnisation de son préjudice
En l’occurrence, monsieur [N] [W] invoque des actes malveillants (coupures d’eau et d’électricité) de la part de ses bailleurs, outre l’indécence du logement pour solliciter la réparation de préjudices en découlant subis par lui. Cette prétention se rapporte donc à l’indemnisation d’un préjudice de jouissance que l’appelant chiffre à 8 000 €.
Or, cette demande telle que formulée dans le dispositif des conclusions de monsieur [N] [W], qui saisissent la cour au sens de l’article 954 du code de procédure civile, n’est pas formée à titre provisionnelle, comme elle ne l’est au demeurant pas davantage dans les motifs de ces écritures. Il ne peut s’agir d’une simple erreur matérielle alors que la fixation d’une créance définitive et la condamnation à ce titre excèdent les pouvoirs du juge des référés ici saisi. Dès lors, cette prétention ne peut aboutir, sans même qu’il y ait lieu d’en apprécier la teneur plus avant, et il n’y a pas lieu à référé sur la demande de condamnation en paiement au titre de la réparation des préjudices dénoncés par monsieur [N] [W].
Sur la demande en paiement des frais d’expulsion
Les époux [Z] sollicitent également le paiement d’une somme de 3 272,55 €, là encore sans former de demande provisionnelle, au titre des frais d’expulsion. Or, la facture qu’il produise recouvre de nombreux frais dont nombre d’entre eux relèvent des dépens, au paiement desquels monsieur [N] [W] a déjà été condamné en première instance et le sera en appel.
Il n’y a donc pas lieu de faire droit à cette demande.
Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens
Monsieur [N] [W] qui succombe au litige, supportera les dépens de première instance et d’appel. En outre, l’indemnité à laquelle elle a été condamnée en première instance au titre des frais irrépétibles sera confirmée, et, une indemnité supplémentaire de 1 500 € sera mise à sa charge au bénéfice de madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] ensemble, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en considération de l’équité et de la situation économique respectives des parties.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] la somme de 11 700 € à titre de provision à valoir sur les loyers, indemnités d’occupation et charges impayés selon décompte arrêté au 10 janvier 2022,avec intérêts au taux légal à compter de l’ordonnance,
Confirme l’ordonnance entreprise en l’ensemble de ses autres dispositions non contraires,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Déclare irrecevables les prétentions émises par monsieur [N] [W], portant sur la nullité et/ou résolution du bail, ainsi que sur sa demande en restitution des loyers à hauteur de 13 600 €,
Déclare recevables les prétentions de monsieur [N] [W] en termes d’exception d’inexécution conduisant à la suspension totale et rétroactive du loyer dû, ainsi que celles afférent à la réduction rétroactive du loyer dû, pour indécence du logement,
Condamne monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] à titre provisionnel la somme de 15 668 € au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation impayés selon décompte arrêté au 29 août 2022,
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de monsieur [N] [W] tendant au paiement par madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] de la somme de 8 000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
Dit n’y avoir lieu de condamner monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] la somme de 3 272,55 € au titre de frais d’expulsion,
Condamne monsieur [N] [W] à payer à madame [U] [O] épouse [Z] et monsieur [I] [Z] la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute monsieur [N] [W] de sa demande sur ce même fondement,
Condamne monsieur [N] [W] au paiement des dépens.
La Greffière La Présidente