Exception d’inexécution : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/17418

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Exception d’inexécution : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/17418

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRÊT DU 05 JUILLET 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/17418 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGQZH

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Avril 2022 -Tribunal de proximité de SAINT DENIS – RG n° 12-22-0021

APPELANT

M. [W] [X]

[Adresse 2]

– [Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Jeanne-céline MBENOUN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB247

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/023011 du 14/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

S.A. CLESENCE agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Isabelle PRUD’HOMME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0510 assistée à l’audience par Me Christophe SOURAM CIBIM, avocat au barreau de Versailles

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 30 Mai 2023, en audience publique, rapport ayant été fait par Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre conformément aux articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre

Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre

Patricia LEFEVRE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

Par acte sous seing privé du 25 février 2015, la société La maison du CIL, aujourd’hui dénommée Clesence, a donné à bail à M. [X] un appartement de deux pièces situé [Adresse 2] à [Localité 4].

Le 19 juillet 2021, la société Clesence a fait délivrer au locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme de 1 390,71 euros au titre des loyers impayés au 13 juillet 2021, terme de juin inclus.

Par acte d’huissier du 29 décembre 2021, la société Clesence a fait assigner en référé M. [X] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny siégeant au tribunal de proximité de Saint-Denis en lui demandant notamment de constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail et d’ordonner l’expulsion du locataire ; de condamner le locataire à lui payer une provision de 3 245,16 euros ainsi qu’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges.

Par ordonnance de référé réputée contradictoire du 19 avril 2022, rectifiée par ordonnance du 11 octobre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny siégeant au tribunal de proximité de Saint-Denis a :

condamné M. [X] à payer à la société Clesence à titre provisionnel la somme de 4 169,23 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation jusqu’à février 2021 inclus ;

rappelé que le solde du dépôt de garantie s’il y en a un sera restitué ou déduit après l’état des lieux de sortie ;

constaté l’acquisition de la clause résolutoire ;

ordonné l’expulsion de M. [X] et de tout occupant de son chef du local situé à [Adresse 2] à [Localité 4] (93) avec le concours de la force publique si nécessaire ;

fixé l’indemnité d’occupation au montant du loyer augmenté de l’avance sur charge, applicable au moment de la résiliation, assortie des augmentations de droit ultérieures, et condamné M. [X] à son paiement ;

condamné M. [X] aux dépens qui comprendront les frais de commandement outre une indemnité de 250 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 10 octobre 2022, M. [X] a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle :

l’a condamné à payer à la société Clesence à titre provisionnel la somme de 4 169,23 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation jusqu’à février 2021 inclus ;

constaté l’acquisition de la clause résolutoire ;

ordonné l’expulsion de M. [X] et de tout occupant de son chef du logement ;

condamné M. [X] aux dépens qui comprendront les frais de commandement outre une indemnité de 250 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 15 février 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, il demande à la cour de :

le recevoir et le déclarer bien-fondé en ses conclusions ;

Y faisant droit,

le recevoir en ses demandes nouvelles, non-comparant devant le premier juge ;

débouter la société Clesence de toutes ses demandes ;

A titre principal,

déclarer qu’en l’espèce il existe une contestation sérieuse tirée de la non-conformité du logement ;

A titre subsidiaire,

infirmer la décision entreprise ;

Statuant à nouveau,

ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire ;

enjoindre le bailleur à effectuer les démarches auprès de la CAF en vue du versement de l’APL, unique constituante de la dette locative ;

assortir cette injonction d’une astreinte de 100 euros par jour de retard, un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

déclarer que les frais de procédure réclamés par le bailleur en sus de la dette locative resteront à sa seule charge ;

A titre infiniment subsidiaire,

accorder à M. [X] les plus larges délais pour quitter le logement ;

En tout état de cause sur la demande relative à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a condamné M. [X] au paiement de la somme de 250 euros ainsi qu’aux dépens comprenant les frais de commandement de payer ;

débouter l’intimée de sa demande de condamnation de M. [X] au paiement de la somme de 2 000 euros ainsi qu’à sa condamnation aux entiers dépens ;

condamner le bailleur aux entiers dépens.

La société Clesence, aux termes de ses dernières conclusions en date du 22 mars 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :

déclarer l’appel de M. [X] recevable mais entièrement mal fondé ;

rejeté l’ensemble de ses demandes ;

confirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a :

constaté à la date du 19 septembre 2021 l’acquisition de la clause résolutoire prévue au bail liant les parties,

ordonné à défaut de libération volontaire des locaux l’expulsion de M. [X] et celle de tous occupants de son chef avec le concours de la force publique,

condamné M. [X] à payer une indemnité d’occupation égale au loyer augmenté des charges, à compter de la date de résiliation du bail et jusqu’à libération entière et définitive des lieux,

condamné M. [X] au paiement de la somme de 250 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

la réformant pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

condamner M. [X] à payer à la société Clesence la somme de 8 472,05 euros au titre des loyers charges et indemnités d’occupation dus à la date du 12 janvier 2023 (terme de décembre 2022 inclus) ;

le condamner à payer à la société Clesence la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

condamner l’appelant aux dépens de première instance et d’appel incluant le coût du commandement de payer du 19 juillet 2021, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 mai 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

En vertu de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

En vertu de l’article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement de payer contient, notamment, à peine de nullité un décompte de la dette.

En vertu de ces textes, il est possible, dans le cadre d’une procédure en référé, de constater la résiliation de plein droit d’un contrat de location en application d’une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en ‘uvre conformément aux dispositions d’ordre public de la loi applicable en matière de baux d’habitation.

En l’espèce, M. [X] ne remet pas en cause la régularité du commandement de payer du 5 mai 2020, et ne conteste pas que les causes de celui-ci n’ont pas été payées dans les deux mois de sa date. Il se borne à évoquer l’existence de problèmes récurrents d’isolation, qui ne sont attestés que par ses propres courriers au bailleur de 2020. Tout en admettant que le bailleur a fait exécuter des travaux (menuiseries, changement de fenêtre) en 2020 et 2021, il affirme qu’un diagnostic de performance réalisé le 8 février 2023 atteste que les portes et fenêtres n’offrent qu’une isolation moyenne, et que l’isolation des murs présente une isolation insuffisante.

A supposer même que ces circonstances soient avérées, M. [X] ne démontre pas avoir été dans l’impossibilité totale d’habiter les lieux dans lesquels il se maintient jusqu’à aujourd’hui, il invoque donc vainement une exception d’inexécution ou une contestation sérieuse qui empêcherait l’acquisition de la clause résolutoire.

En vertu du V de l’article 24 précité, le juge peut accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. En vertu du VII du même article, pendant le cours de ces délais, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus ; si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, M. [X] explique que ses difficultés sont causées par l’attitude vindicative du bailleur qui a refusé de signer le plan d’apurement notifié par la CAF le 1er décembre 2020 pour continuer de verser l’APL. Il fait valoir que par courrier du 20 janvier 2021, la CAF a relancé le bailleur concernant le plan d’apurement en évoquant l’interruption du versement de l’APL en cas de non-communication par le bailleur de ces informations avant le 25 mars 2021. Le bailleur n’a pas plus réagi à cette demande insistante de la CAF, provoquant à dessein l’interruption du versement de l’APL et la mise en difficulté du locataire. Cependant, il résulte des décomptes de paiement produit par le bailleur, que M. [X] ‘ qui n’établit pas s’être libéré de cette dette ‘ n’avait pas respecté le plan d’apurement de trois mois concédé par le bailleur. Ce dernier n’était donc pas tenu d’informer la CAF d’un respect effectif du plan.

En outre, M. [X] ne fournit aucune explication sur sa situation personnelle, ni ne fournit aucune pièce à cet égard, notamment quant à sa situation d’emploi, à ses revenus et à ses charges.

Dans ces conditions, il conviendra de rejeter les demandes tendant à la suspension des effets de la clause résolutoire, à l’obligation du bailleur de régulariser la situation auprès de la CAF pour le versement de l’APL, et aux délais pour quitter le logement.

Par ailleurs, en vertu du 2e alinéa de l’article 835 précité, le juge des référés peut seulement accorder une provision. Excède donc ses pouvoirs, la demande de la société Clesence tendant à la condamnation de M. [X] à lui payer la somme de 8 472,05 euros au titre des loyers charges et indemnités d’occupation dus à la date du 12 janvier 2023 (terme de décembre 2022 inclus). Il n’y a donc pas lieu de retrancher les frais de procédure comme le réclame l’appelant.

L’ordonnance entreprise sera infirmée quant à la charge des frais irrépétibles, mais confirmée quant à celle des dépens. En cause d’appel, les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées et M. [X] sera tenu aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Infirme l’ordonnance entreprise dans sa disposition concernant l’article 700 du code de procédure civile ;

La confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur la disposition infirmée,

Déboute la société Clesence de sa demande ;

Y ajoutant,

Déboute M. [X] de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de paiement de la société [X] ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne M. [X] aux dépens d’appel, qui seront recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridictionnelle.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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