Exception d’inexécution : 4 septembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04938

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Exception d’inexécution : 4 septembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/04938

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 4 SEPTEMBRE 2023

N° RG 20/04938 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-L2M4

S.A.S. BOUYGUES BATIMENT CENTRE SUD OUEST

c/

Société CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED

S.A.S. GROUPEMENT INTERACTIF DES METIERS DE NETTOYAGE ET DE SERVICES REGION

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 novembre 2020 (R.G. 2019F00967) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 10 décembre 2020

APPELANTE :

S.A.S. BOUYGUES BATIMENT CENTRE SUD OUEST, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2]

représentée par Maître Fabrice DELAVOYE de la SELARL DGD AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

Société CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 3]

représentée par Maître Claire LE BARAZER de la SELARL AUSONE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Pascale GADELLE de la SCP RAFFIN, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. GROUPEMENT INTERACTIF DES METIERS DE NETTOYAGE ET DE SERVICES REGION, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]

représentée par Maître Eric VISSERON de la SELARL VISSERON, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Isabelle VIALA, substituant Maître Anne LEPARGNEUR, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 mai 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

La société Bouygues Bâtiment Centre Sud Ouest (ci-après Bouygues) s’est vue confier en qualité d’entreprise générale la construction de la salle de spectacle dénommée Bordeaux Métropole ARENA située à [Localité 4].

Elle a sous-traité à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région ( ci-après GIMN’S Région) assurée auprès de la société la CHUBB European Limited, le nettoyage des locaux d’une partie du lot n°10 du site selon commande de prestation de services du 10 mai 2017 et avenant du 18 décembre 2017 pour un montant de 72 556,55 euros HT. Les parties ont convenu ensuite de la réalisation de travaux supplémentaires portant le montant total des prestations à la somme de 101.354,63 euros HT. Ces travaux devaient être réalisés avant la réception de l’ouvrage.

La première intervention de nettoyage de la société GIMN’S Région a eu lieu les 6 et 8 novembre 2017.

Le 9 novembre 2017, la société GIMN’S Région et la société Bouygues ont dressé un procès-verbal contradictoire des rayures figurant sur les vitres nettoyées par la société GIMN’S Région.

La société GIMN’S Région a repris sa mission fin novembre 2017. Un second constat contradictoire listant la liste des rayures affectant les vitrages nouvellement nettoyés a été dressé le 29 novembre 2017.

Le 30 novembre 2017, la société Bouygues a écrit à la société GIMN’S Région pour lui indiquer qu’elle considérait que les rayures affectant les vitrages lui étaient imputables et lui a demandé de faire une déclaration de sinistre auprès de son assureur, ce que cette dernière a fait.

L’assureur de la société GIMN’S Région a fait diligenter une expertise amiable. L’expert commis a déposé son rapport le 16 mars 2018 dans lequel il indique que ‘au vu des premiers éléments d’analyse développés plus haut, la prétendue relation causale entre la prestation de nettoyage confiée à GYMNS et les rayures de certains vitrages de façade ne saurait être évidente et apparaît pouvoir être contestée’. L’expert concluait en outre qu’il appartenait à la société Bouygues de saisir le cas échéant son assureur aux fins d’organisation d’une expertise en présence de tous les acteurs susceptibles d’être concernés.

Le 23 mai 2018, la société Bouygues a mandaté une entreprise tierce, la société Eurecla, pour traiter les rayures par vitrogommage pour la somme de 51 194,40 euros. Elle a au préalable mandaté un huissier de justice qui, par constat du 15 mai 2018, a décrit les rayures affectant les vitrages.

Par mail du 28 mai 2018, la société GIMN’S Région a demandé à la société Bouygues de bien vouloir lui indiquer l’évolution des procédures d’assurances et de lui donner une date de paiement de ses factures.

Le 22 mai 2019, la société GIMN’S Région a mis en demeure la société Bouygues de lui régler la somme de 111 528,18 euros au titre du solde de son marché. La société Bouygues lui a alors réglé la somme de 60 733,75 euros correspondant au solde du marché, sous déduction de la facture de la société Eurecla.

La société GIMN’S Région a assigné le 12 août 2019 la société Bouygues devant le tribunal de commerce de Bordeaux afin de la voir condamner à titre principal au paiement du solde de son marché, et, à titre subsidiaire, de voir dire que la société CHUBB EUROPEEN Group devra la garantir de toute condamnation.

Par jugement en date du 9 novembre 2020, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 51 514,40 euros, montant de la demande,

– débouté la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 1000 euros au titre de l’indemnité de recouvrement,

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé entre les 31 décembre 2017 et le 4 juin 2020pourles factures n°171020346,171020348,171020349,171020350,171020351,171020352,171020353,

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé entre les 31 janvier 2018 et le 4 juin 2020 pour les factures 171120388 à 171120395,

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé à partir de la date d’échéance des factures 171120396, 180120030 à 180120038, et jusqu’à la date du présent jugement

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné la société Bouygues Bâtiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– condamné la société Bouygues Bâtiment Centre Sud Ouest à payer à la société CHUBB European Group SE la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest aux dépens.

Pour statuer comme ils l’ont fait les premiers juges ont constaté que la société Bouygues ne démontrait pas que sa cocontractante avait failli dans l’exécution de ses obligations. Ils l’ont ainsi condamnée au règlement du solde de sa facture et l’ont déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

La société Bouygues a relevé appel de cette décision le 10 décembre 2020 intimant la société GIMN’S Région et la société Chubb European Group Limited.

L’affaire a été clôturée le 2 mai 2023 et a été fixée à l’audience du 15 mai 2023, date à laquelle elle a été plaidée et mise en délibéré au 26 juin 2023. Le délibéré a été prorogé au 4 septembre 2023.

PRETENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 avril 2023, la société Bouygues demande à la cour de :

Vu l’article 1217 du Code civil ;Vu l’article 1 de l’Ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers ;

Vu les articles 1103 et suivants du Code civil ;Vu l’article 1231 du Code civil ;

Vu l’article 4 du Code de Procédure civile ;Vu l’article 56 du Code de Procédure civile ;

Vu l’article 1369 du Code civil ;Vu l’article 1371 du Code civil ;

A titre principal ;

– Déclarer la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest recevable et bien fondée en son appel.

Y faisant droit,

– Infirmer totalement le jugement rendu par la 5ème chambre civile du tribunal de commerce de Bordeaux du 9 novembre 2020 (n° RG 2019F00967) en ce qu’il a :

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 51.194,40 euros, montant de la demande,

– Débouté la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest de l’ensemble de ses demandes,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 1.000 euros pour l’indemnité forfaitaire de recouvrement,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts de retard au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé entre le 31 décembre 2017 et le 4 juin 2020 pour les factures n°171020346,171020348,171020349,171020350,171020351,171020352, 171020353,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts de retard au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé entre le 31 janvier 2018 et le 4 juin 2020 pour les factures pour les factures 171120388 à 171120395,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région les intérêts de retard au taux de 3 fois le taux d’intérêt légal calculé à partie de la date d’échéance des factures 171120396, 180120030 à 180120038 jusqu’à la date du présent jugement,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société Groupement interactif des métiers de nettoyage et de service Région la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest à payer à la société CHUBB European Group SE la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamné la société Bouygues Batiment Centre Sud Ouest aux dépens.

statuant à nouveau,

– Déclarer irrecevable l’action en paiement de la société GIMN’S Région en ce qu’elle est infondée.

– Déclarer irrecevable l’action en paiement de la société GIMN’S Région en ce qu’elle est forclose.

– Débouter la société GIMN’S Région de toutes ses demandes, fins et prétentions.

– Débouter la société CHUBB European Group SE de toutes ses demandes, fins et prétentions.

Subsidiairement ;

– Dire et juger que la société BB CSO est parfaitement fondée à opposer à la société GIMN’S Région une exception d’inexécution.

En conséquence :

-Ordonner la compensation entre le paiement réalisé par la société BB CSO d’un montant de 60.7333,74 euros à l’égard de la société GIMN’S Région et le montant des frais de vitro gommage de 42.662 euros HT sur le montant total des prestations de la société GIMN’S Région de 101.354,63 euros HT.

– Condamner la société GIMN’S Région au paiement de la somme de 42.662 euros HT au titre des dommages et intérêts.

– Débouter la société CHUBB European Group SE de toutes ses demandes, fins et prétentions.

A titre encore plus subsidiaire ;

– Dire et juger que la responsabilité civile contractuelle de la société GIMN’S Région est engagée.

En conséquence ;

– Condamner la société GIMN’S Région au paiement de la somme de 42.662 euros HT au titre des dommages et intérêts.

En tous les cas ;

– Condamner in solidum la société GIMN’S Région et la société CHUBB European Group SE au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de Procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens.

– ordonner le report de la clôture à l’audience de plaidoirie du 15 mai 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 octobre 2020, la société GIMN’S Région demande à la cour de :

Rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et infondées.

Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et infondées,

-confirmer le jugement entrepris, s’agissant des chefs de jugements critiqués par la société Bouygues,

– juger recevable l’appel incident de la société GIMN’S Région s’agissant du chef de jugement l’ayant débouté de sa demande de dommages et intérêts,

– réformer le jugement de ce chef et,

Statuant à nouveau,

– condamner la société Bouygues à verser à la société GIMN’S Région la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– condamner la société Bouygues, ou tout succombant, à verser à la société GIMN’S Région la somme de 3.500,00 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– Condamner la société Bouygues aux entiers frais et dépens de la procédure

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 juin 2021, la société CHUBB European Group LIMITED demande à la cour de :

Vu le jugement du Tribunal de Commerce de Bordeaux le 9 novembre 2020,Vu l’article L110-4 du Code de commerce,Vu les articles 1104, 1194 et 1231-1 du Code civil,

A titre principal :

– Confirmer le jugement rendu le 9 novembre 2020 par le Tribunal de Commerce de Bordeaux (RG 2019F00967)

A titre subsidiaire :

Si par extraordinaire la Cour décidait de réformer le jugement entrepris et de statuer à nouveau,

– Rejeter les demandes de la société Bouygues

– Juger les demandes de la société GIMN’S formées à l’encontre de la société Bouygues recevables.

– Juger que les désordres allégués par la société Bouygues ne résultent nullement d’un défaut d’exécution imputable à la société GIMN’S dans le cadre de sa mission.

En conséquence,

– Condamner la société Bouygues à verser à la société GIMN’S la somme de 51.194,40 euros augmentée des intérêts de retard fixés contractuellement à trois fois le taux d’intérêts légal, à compter de la mise en demeure en date du 22 mai 2019.

– Débouter la société Bouygues de ses demandes fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société GIMN’S.

– Débouter la société GIMN’S de son appel en garantie formé à l’encontre de son assureur la société CHUBB.

A titre très subsidiaire,

Si par extraordinaire, la Cour entrait en voie de condamnation à l’encontre de la société CHUBB:

-faire application de la franchise contractuelle d’un montant de 2.500 euros contenue dans la police CHUBB souscrite par la société GIMN’S.

En toute hypothèse,

– Condamner la société Bouygues ou tout succombant à verser à la société CHUBB la somme de 3.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fin de non recevoir tirée de la forclusion de l’action de paiement :

1- La société Bouygues soutient que la société GIMN’S Région est forclose à agir par application de l’article des conditions spécifiques de la commande intitulé ‘Réclamations du prestataire’ qui impose à ce dernier d’informer l’entreprise par LRAR de tout événement de nature à justifier une réclamation de sa part, ou un cas d’exonération de responsabilité, dans un délai de 5 jours à compter de sa survenance. Elle soutient que ‘la contestation du refus de déduction des sommes engagées pour le vitrogommage desdites vitres du montant du marché contracté’ relève de cet article et que la société GIMN’S n’ayant pas formulé de réclamation à son encontre tenant à l’exception d’inexécution qui lui était imposé dans le délai contractuel de cinq jours ne peut plus agir à son encontre.

2- Les intimés soutiennent que cette clause n’est pas applicable à l’action en paiement de la société GIMN’S Région.

3- La clause litigieuse est ainsi libellée: ‘RECLAMATION DU PRESTATAIRE : Lorsque le prestataire estime qu’un événement, un fait ou un acte, est de nature à justifier une réclamation de sa part, ou un cas d’exonération de sa responsabilité, il doit dans un délai de cinq jours calendaires de sa survenance en informer l’Entreprise par lettre recommandée avec avis de réception. A défaut, il est réputé avoir définitivement renoncé à toute demande relative à cet événement.’

4-En l’espèce, la société GIMN’S Région ne forme aucune réclamation mais sollicite simplement le paiement de ses factures. Elle n’argue pas plus d’un cas d’exonération de sa responsabilité puisqu’elle n’a jamais reconnu que celle-ci puisse être engagée au titre des rayures affectant les vitrages. La clause susvisée n’est donc pas applicable. La société GIMN’S Région n’est donc pas forclose à agir.

5- La décision de première instance sera confirmée.

Sur la demande en paiement du solde des travaux :

6- Aux termes de l’article 1217 du code civil dans sa version applicable à ce litige, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;

– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;

– solliciter une réduction du prix ;

– provoquer la résolution du contrat ;

– demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

7- L’appelante soutient que l’intimée n’a pas correctement exécuté la prestation qui lui a été confiée car celle-ci est selon elle à l’origine des rayures sur le vitrage, ce dont elle affirme apporter la preuve. Elle fait notamment valoir que la société GIMN’S Région est la seule à être intervenue sur les vitrages rayés et que ‘le lieu et la chronologie ‘ correspondent avec l’intervention de celle-ci.

8-L’intimée rétorque que les constats dressés ne font que recenser les rayures mais sans en identifier l’origine . Elle affirme qu’elle n’a jamais reconnu sa responsabilité aux termes des deux constats produits aux débats et que la société Bouygues ne verse aucune pièce probante établissant sa responsabilité dans l’apparition des rayures. Elle fait valoir que certaines des vitres qu’elle a nettoyées ne sont pas rayées et que d’autres, nettoyées par une autre société, le sont, ce que l’appelante conteste. Elle ajoute que la société Bouygues aurait dû solliciter une expertise au lieu de faire 29 août 2023disparaître les désordres.

Sur ce :

9- Il appartient à la société Bouygues d’établir que la société GIMN’S Région a causé un désordre aux vitrages en exécutant sa mission de nettoyage.

10- Il ressort des photographies produites que les vitres étaient très sales après la réalisation du chantier et que les parties n’ont pas dressé un constat contradictoire de leur état avant le début de la prestation de nettoyage.

11- Par mail du 8 novembre 2017, la société Bouygues a écrit à la société GIMN’S Région que les vitrages du mur rideau du hall RDC étaient très rayés suite au nettoyage des vitres et lui a demandé d’arrêter l’équipe de nettoyage aux fins de constater que les vitrages qui n’ont pas encore été nettoyés ne sont pas rayés.

11- La société GIMN’S Région et la société Bouygues ont ainsi établi le 9 novembre 2017 un constat contradictoire des rayures sur le mur rideau. La cour relève qu’aucun élément de ce constat ne permet d’accréditer la thèse de l’appelante selon laquelle la société GIMN’S Région aurait entendu reconnaître sa responsabilité dans la survenue de ces rayures. Par ailleurs, contrairement à ce qui avait été prévu, il n’a pas été fait d’état des lieux des vitrages non nettoyés par la société GIMN’S Région. Un second constat a ensuite été dressé entre les parties après une nouvelle intervention de la société GIMN’S Région qui ne permet pas plus d’établir que les rayures n’étaient pas présentes sur le support avant le nettoyage de celui-ci.

12- La société Bouygues a ensuite fait dresser un procès-verbal de constat par un huissier, qui, s’il fait bien preuve de l’existence des rayures qu’il a constatées, n’établit nullement l’origine de celles-ci, et notamment ne permet pas de dater leur apparition. Il sera enfin ajouté que le fait que la société GIMN’S Région ait proposé de transmettre des devis réparatoires à son assureur ne vaut pas reconnaissance de responsabilité.

13- Dès lors, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la valeur probatoire de l’expertise amiable établie à la demande de l’assureur de l’intimée, il sera jugé que l’appelante ne justifie pas que l’intimée est à l’origine des désordres affectant le vitrage en l’absence de tout élément permettant d’établir leur état avant les opérations de nettoyage, et alors qu’il n’est ni établi ni même allégué que ceux-ci, posés avant l’achèvement du chantier, ont été correctement protégés et que la seule chronologie des évènements n’apporte pas la preuve, contrairement à ce que soutient l’appelante de la faute commise par l’intimée dans les opérations de nettoyage.

14- La décision de première instance sera dès lors confirmée.

Sur les demandes subsidiaires formées par la société Bouygues :

15- A titre subsidiaire, la société Bouygues argue tout d’abord d’une exception d’inexécution, et à titre plus subsidiaire d’un manquement de la société GIMN’S Région à ses obligations contractuelles.

16- A défaut pour elle cependant d’établir que la société GIMN’S Région est à l’origine des désordres affectant les vitrages, elle sera déboutée de ses demandes. La décision de première instance sera confirmée.

Sur la demande indemnitaire à hauteur de 50 000 euros formée par la société GIMN’S Région dans le cadre d’un appel incident :

17- La société GIMN’S Région expose que la société Bouygues a retenu la somme de 93 273,49 euros pendant plus de deux ans et la somme de 51 194,40 euros pendant plus de trois ans, alors que les sommes dues correspondaient à 34% de son chiffre d’affaires annuel. Elle fait valoir qu’elle a dû immédiatement remboursé à l’Etat la TVA sur une facture impayée. Enfin, la société Bouygues a porté selon elle atteinte à son image.

18- La société Bouygues conclut au rejet de la demande faisant notamment état de sa bonne foi et du fait que l’intimée n’établit pas que l’absence de paiement de ses factures a eu un impact sur sa pérennité.

19- La société GIMN’S Région, qui ne produit qu’une seule pièce au soutien de sa demande qui ne démontre pas la réalité du préjudice subi n’établit ni la mauvaise foi de sa cocontractante ni avoir subi un préjudice distinct de celui qui est déjà réparé par l’octroi d’intérêts sur les sommes dues.

20- La décision de première instance sera confirmée en ce qu’elle l’a déboutée de ce chef de demande.

Sur les demandes accessoires :

21- La société Bouygues qui succombe sera condamnée aux dépens d’appel.

22- Elle sera condamnée à verser la somme de 3500 euros à la société GIMN’S Région et la somme de 3500 euros à la société Chubb European Group Limited au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Confirme la décision rendue le 9 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Bordeaux,

y ajoutant,

Condamne la société Bouygues Bâtiment Centre Sud Ouest aux dépens d’appel,

Condamne la société Bouygues Bâtiment Centre Sud Ouest à verser à verser la somme de 3500 euros à la société GIMN’S Région et la somme de 3500 euros à la société Chubb European Group Limited au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme GOUMILLOUX, pour le Président empêché , et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire

 


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