COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 21 SEPTEMBRE 2023
N° 2023/ 284
Rôle N° RG 21/18024 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BISNY
[Y], [I], [S] [A]
[P] [T]
C/
[N] [U]
[M] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Paloma LOCATELLI
Me Sébastien ORTH
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d’Instance de nice en date du 11 Octobre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 1119003158.
APPELANTS
Madame [Y], [I], [S] [A]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021-14008 du 21/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
née le [Date naissance 4] 1980 à [Localité 8], demeurant [Adresse 5] – [Localité 1]
représentée par Me Paloma LOCATELLI, avocat au barreau de NICE
Monsieur [P] [T]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021-14007 du 21/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5] – [Localité 1]
représenté par Me Paloma LOCATELLI, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Monsieur [N] [U], demeurant [Adresse 9] – [Localité 3]
représenté par Me Sébastien ORTH, avocat au barreau de NICE substitué par Me Marianne BALESI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame [M] [Z], demeurant [Adresse 9] – [Localité 3]
représentée par Me Sébastien ORTH, avocat au barreau de NICE substitué par Me Marianne BALESI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 14 Juin 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère,
Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Septembre 2023,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 17 août 2017 à effet à la même date, Madame [M] [Z] et Monsieur [N] [U] ont donné à bail à Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T] un bien situé à [Localité 7] (06) moyennant un loyer mensuel révisable de 850 euros.
Par avenant du 06 septembre 2017, les parties convenaient d’une baisse de loyer de 100 euros ‘justifiée par les travaux que les locataires se sont engagés à entreprendre à leur charges (…) pour rénover la maison’.
A la suite du départ des locataires, les bailleurs ont mandaté un huissier de justice afin de procéder à un état des lieux de sortie le 16 janvier 2019.
Par acte d’huissier du 29 août 2019, les bailleurs ont fait assigner leurs locataires aux fins de les voir condamner à diverses sommes au titre d’arriérés locatifs, de dégradations locatives, d’une annulation rétroactive d’une baisse de loyers, de frais d’état de lieux de sortie et de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.
Par jugement contradictoire du 11 octobre 2021, le juge des contentieux de la protection de Nice a statué de la manière suivante :
– condamné solidairement [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à [M] [Z]
et [N] [U] la somme de 4 150 euros au titre des arriérés de loyers, des intérêts au taux légal à compter de l’assignation ;
– débouté Mme [M] [Z] et Monsieur [N] [U] de leur demande visant à condamner Mme [Y] [A] et M. [P] [T] à leur payer la somme de 420 euros au titre des consommations d’électricité
– condamné solidairement Mme [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à Mme [M] [Z] et M. [N] [U] la somme de 128 euros au titre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères 2018, assortie des intérêts an taux légal à compter de l’assignation ;
– condamné solidairement [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à [M] [Z]
et M. [N] [U] la somme de 2 806,45 euros au titre de leur préjudice matériel résultant
de l’inexécution des travaux prévus en contrepartie d’une baisse de loyer ;
– condamné solidairement [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à [M] [Z]
et M. [N] [U] la somme de 633 euros [en réalité 3633 euros] au titre des dégradations locatives ;
– débouté Mme [M] [Z] et M. [N] [U] de leur demande visant à condamner Mme [Y] [A] et M. [P] [T] à leur payer la somme de 69,33 euros au titre des
frais de réinstallation .du compteur d’eau ;
– condamné solidairement Mme [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à Mme [M] [Z] et M. [N] [U] la somme de 113,72 euros correspondent à la moitié du coût d’établissement de l’état des lieux de sortie ;
– débouté Mme [M] [Z] et M. [N] [U] de leur demandes de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral ;
– condamné Mme [Y] [A] et M. [P] [T] à payer à Mme [M] [Z] et M. [N] [U] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné Mme [Y] [A] et M. [P] [T] aux dépens
– ordonné l’exécution provisoire’.
Le premier juge a rejeté l’exception d’inexécution soulevée par Monsieur [T] et Madame [A] au motif qu’ils ne rapportaient pas la preuve du caractère inhabitable du logement.
Il a estimé que les locataires étaient tenus de verser les loyers pendant la durée de préavis de trois mois. Il a souligné que le congé ne précisait les motifs pour lesquels le délai de préavis pouvait être réduit à un mois.
Il a rejeté la demande de Madame [Z] et Monsieur [U] au titre d’un arriéré de consommation électrique qui ne pouvait être sollicitée et qui n’était pas démontrée, ainsi qu’au titre de la taxe d’enlèvement sur les ordures ménagères de l’année 2017.
Il a condamné Madame [A] et Monsieur [T] à un arriéré locatif, à un remboursement de réduction de loyers, en l’absence de démonstration du respect des travaux à réaliser par les locataires, à une somme au titre de dégradations locatives (3633 euros) et à la moitié de l’état des lieux de sortie.
Le 21 décembre 2021, Monsieur [T] et Madame [A] ont relevé appel des chefs de cette décision qui les condamnent au paiement de diverses sommes.
Madame [Z] et Monsieur [U] ont constitué avocat.
Par conclusions notifiées le 17 mai 2023 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [A] et Monsieur [T] demandent à la cour :
– d’infirmer tous les chefs du jugement déféré qui les condamnent au versement de diverses sommes
– de juger valable le congé qu’ils ont délivré
– de juger indécent le logement
– de débouter Madame [Z] et Monsieur [U] de leurs demandes
*subsidiairement:
– de limiter le délai de préavis à un mois et de valider le congé délivré le 10 décembre 2018
*subsidiairement :
– de déduire de leur condamnation le montant du dépôt de garantie
– de déduire de leur condamnation la somme de 128 euros acquittée au titre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères
– d’ordonner la compensation entre leurs préjudices de jouissance et les condamnations mises à leur charge
*en tout état de cause :
– de leur accorder les plus larges délais de paiement sur 36 mois ou, à défaut, sur 24 mois
– de débouter Madame [Z] et Monsieur [U] de leurs demandes
-de condamner Madame [Z] et Monsieur [U] à leur verser la somme de 3000 euros e n application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle, outre les dépens distraits au profit de Maître Paloma LOCATELLI.
Ils soutiennent que le logement loué est indécent et insalubre si bien qu’ils pouvaient quitter le logement sans être tenu à un délai de préavis. Ils font état d’infiltrations survenues depuis l’hiver 2017, de la vétusté de l’installation électrique présentant un risque pour les occupants, de tuiles cassées sur la toiture, d’une mauvaise isolation et d’une chaudière hors service. Ils expliquent que les désordres électriques ont été constatés par l’agence régionale de la santé. Ils soulèvent ainsi une exception d’inexécution en relevant que le logement était impropre à l’habitation.
Subsidiairement, ils demandent la limitation du délai de préavis et la validation du congé délivré le 10 décembre 2018, réceptionné le 17 décembre 2018. Il relèvent que leurs bailleurs ne leur ont jamais adressé un courrier contestant le délai de préavis. Ils notent avoir respecté le formalisme du congé. Ils ajoutent que Madame [A] est bénéficiaire de l’allocation adulte handicapée, situation connue des bailleurs, si bien que le délai du préavis est d’un mois.
Ils affirment avoir respecté leurs obligations contractuelles, contrairement aux bailleurs.
Ils relèvent avoir subi un préjudice lié à l’état de l’appartement. Ils demandent la compensation de la réparation de ce préjudice avec les sommes auxquelles ils seraient éventuellement condamnés.
Ils déclarent s’être acquittés de la taxe d’enlèvement sur les ordures ménagères et s’opposent au versement des autres taxes à raison de l’exception d’inexécution.
Ils soutiennent avoir respecté la clause de travaux prévue au bail pour un montant correspondant à neuf mois de réduction du loyer.
Ils contestent avoir commis des dégradations locatives. Ils indiquent que le bien n’était pas en bon état lors de la prise de possession des lieux. Ils soulignent avoir refusé de signer l’état des lieux d’entrée car le bailleur n’a pas accepté de mentionner l’existence de malfaçons. Ils exposent que les désordres ne leur sont pas imputables mais relèvent de la vétusté, de malfaçons, d’un sinistre dont ils ne sont pas responsables, d’un cas fortuit et de la force majeure. Ils notent n’avoir pas eu la jouissance exclusive du jardin et de la cave.
Ils s’opposent au versement de la moitié du coût de l’établissement de l’état des lieux de sortie en indiquant que leurs bailleurs ne démontrent pas que l’état des lieux de sortie n’aurait pu être établi de façon amiable. Ils soutiennent que le procès-verbal d’huissier n’est pas probant.
Par conclusions notifiées le 15 juin 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se reporter, Monsieur [U] et Madame [Z] demandent à la cour :
– de confirmer le jugement déféré,
– de condamner solidairement Monsieur [T] et Madame [A] à leur verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens
– de prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Ils contestent toute indécence des locaux loués et s’opposent à l’exception d’inexécution soulevée par Monsieur [T] et Madame [A]. Ils relèvent que l’agence régionale de la santé a rendu un avis sans leur permettre de faire valoir leurs observations et font état de la saisine du tribunal administratif.
Ils font état d’un arriéré locatif, de la violation par leurs locataires du délai de préavis de trois mois, de l’existence de dégradations locatives et de la violation par leurs locataires de la clause de travaux prévue au bail, moyennant une réduction de loyer dont ils demandent le remboursement.
Ils soulignent que Monsieur [T] et Madame [A], en procédant à certains travaux, ont dégradé les lieux loués.
Ils notent que les locataires, qui ont quitté les lieux sans respecter le délai de préavis, les ont obligés à mandater un huissier de justice; ils demandent le remboursement par moitié du procè-verbal de ce professionnel.
MOTIVATION
A titre préliminaire, il convient de relever que le premier juge avait condamné Monsieur [T] et Madame [A] au versement de la somme de 3633 euros au titre des dégradations locatives (comme expliqué et détaillé dans le corps de son jugement et non à la somme de 633 euros, comme mentionné dans le dispositif du jugement déféré, somme qui est une erreur de plume).
En application des articles 1719 du code civil et 6 de la loi du 06 juillet 1989, le bailleur est obligé pendant la durée du bail de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, répondant à un critère de performance énergétique minimale (…) et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
Selon l’article 6 de la loi du 06 juillet 1989, le bailleur doit délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées.
Une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux critères de la décence.
Ainsi, la clause de travaux ne peut porter sur des travaux de mise aux normes de décence.
Le bailleur est également tenu d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement.
Le décret du 30 janvier 2002 fixe les caractéristiques d’un logement décent qui peuvent être regroupées autour de trois catégories :
– le logement doit permettre d’assurer la santé et la sécurité physique des occupants
– certains éléments d’équipements et de confort doivent être présents
– des critères liés à la surface et au volume du logement sont nécessaires.
Selon l’article 1731 du code civil, s’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire.
Les locataires n’ont pas signé l’état des lieux d’entrée et relèvent que certains dysfonctionnements n’étaient pas notés. Ils n’en justifient pas.
L’état des lieux d’entrée produit au débat par les bailleurs ne mentionne pas un bien en bon état général de réparations locatives. Il convient a minima de tenir compte des difficultés qui y sont évoquées, non contestées par les locataires.
Le contrat de bail mentionne qu’en contrepartie d’une baisse de loyer à 850 euros (initialement fixé à 900 euros (…), le locataire prendra à sa charge les rénovations et entretiens suivants :
– boiseries (réfection peinture porte d’entrée et lasurage volets)
– réfection peinture/enduit des pièces intérieures qui le nécessitent
– réfection d’étanchéité au niveau de la jonction du boisseau de la cheminée et du toit à l’origine d’une petite infiltration d’eau dans le placard de la chambre sud-est à l’étage (produit d’étanchéité fourni).
Il n’est pas prévu au contrat de bail la durée de l’imputation de la baisse sur le loyer initial.
Par avenant du 06 septembre 2017 non contesté par les appelants, les parties convenaient d’une baisse de loyers de 100 euros ‘justifiée par les travaux que les locataires se sont engagés à entreprendre à leur charges (…) pour rénover la maison’. Il n’était visé aucuns travaux particuliers, en tout cas différents de ce qui était convenu dans le contrat de bail initial ni aucune durée de l’imputation de la baisse sur le loyer initial. La baisse prenait effet à compter du mois de septembre 2017 (le loyer était donc fixé à la somme de 750 euros par mois).
Le 22 novembre 2018, était rendu un arrêté du préfet des Alpes Maritimes faisant injonction à Monsieur [U] et Madame [Z] d’avoir à sécuriser le logement en raison du risque électrique, à faire réaliser un état des installations électriques et à faire réaliser les travaux selon diverses normes, tout en fournissant une attestation cerfa (N° 12506) dans un délai de trente jours.
Cet arrêté évoquait un rapport établi par l’ARS des Alpes Maritimes qui faisait état de la vétusté du disjoncteur situé au sous-sol de la maison, de l’absence de prises électriques dans la salle de bains, de fils apparents pour alimenter le plafonnier du salon, d’un manque de prises électriques nécessitant l’utilisation de très nombreuses rallonges électriques installées en séries, ce qui présentait un risque de surchauffe des circuits et donc d’incendie.
Il est établi par l’état des lieux d’entrée et la clause de travaux qu’il existait un problème d’étanchéité au niveau de la jonction du boisseau de la cheminée et du toit à l’origine d’une petite infiltration d’eau dans le placard de la chambre.
Selon le décret du 31 janvier 2002, le logement doit assurer le clos et le couvert. Le gros oeuvre du logement et de ses accès est en bon état d’entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d’eau dans l’habitation. Ainsi, s’agissant des critères de la décence, il n’appartenait pas aux locataires de se charger du problème d’étanchéité affectant le logement.
Le procès-verbal valant état des lieux de sortie du 16 janvier 2019 note que la fuite dans la chambre, qui devait être réparée par les locataires, ne l’a pas été ‘puisque le plafond comporte un décollement de plâtrerie avec auréoles jaunâtres d’humidité et qu’un récipient est rempli d’eau à l’aplomb de cette zone sur les étagères supérieures’. Il est ainsi établi la réalité de l’infiltration initiale, qui aurait due être réparée par le bailleur et non le locataire. Le rapport d’expertise amiable du 21 novembre 2018 mentionne des traces d’infiltrations dans trois pièces à l’étage, difficultés déjà évoquées dans l’état des lieux d’entrée qui fait état, outre de l’infiltration précédemment évoquée dans la chambre, de traces de moisissures dans l’angle du plafond et des murs de la salle de bains de l’étage.
Ce même décret énonce que les réseaux et branchements d’électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d’eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d’usage et de fonctionnement. Or, l’arrêté préfectoral, qui s’appuie sur les constatations de l’agence régionale de la santé, fait état d’une installation électrique qui présente des risques pour la santé et la sécurité des occupants.
L’état des lieux d’entrée mentionne que les fenêtres sont en simple vitrage et qu’il n’existe pas de gouttières. Il est mentionné, au paragraphe isolation ‘bon’, ‘sauf les fenêtres qui sont en simple vitrage’. Cette mention conforte l’expertise amiable de l’assureur des locataires du 21 novembre 2018 qui note que de l’air passe en grande quantité par les huisseries fermées. Ainsi, il est établi que le bailleur a manqué à son obligation de réparations locatives en ne fournissant pas de fenêtres en bon état de réparation locatives. Il ne s’agissait par ailleurs pas d’un problème devant être résolu par le locataire en application de la clause de travaux.
Il est démontré par les locataires que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance d’un logement décent s’agissant de l’installation électrique et des problèmes d’infiltrations d’eau. Toutefois, ces difficultés n’ont pas rendu le logement inhabitable et les manquements du bailleur ne sont pas suffisamment graves pour permettre aux locataires de soulever une exception d’inexécution.
Le bail fait état, dans les conditions financières, d’un loyer contractuel de 850 euros.
Il a été indiqué qu’il n’appartenait pas aux locataires de régler le problème d’étanchéité.
Il leur appartenait en revanche de lasurer les volets, de remettre en peinture la porte d’entrée intérieure et de procéder à la réfection des peintures et de l’enduit des pièces intérieures qui le nécessitaient.
Le procès-verbal d’état des lieux de sortie permet de constater que les travaux de remise en peinture n’ont pas été effectués. Les locataires ne peuvent donc prétendre à la baisse de loyer et ils sont redevables de la somme de 100 euros par mois à compter du mois de septembre 2017 (850 euros -750 euros).
Selon l’article 15 de la loi du 06 juillet 1989, le délai de préavis applicable au congé délivré par le locataire est de trois mois. Le délai de préavis est toutefois d’un mois :
1° Sur les territoires mentionnés au premier alinéa du I de l’article 17 (…)
4° Pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active ou de l’allocation adulte handicapé (…)
Le locataire souhaitant bénéficier des délais réduits de préavis mentionnés aux 1° à 5° précise le motif invoqué et le justifie au moment de l’envoi de la lettre de congé. A défaut, le délai de préavis applicable à ce congé est de trois mois.
Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, signifié par acte d’huissier ou remis en main propre contre récépissé ou émargement. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée, de la signification de l’acte d’huissier ou de la remise en main propre.
Pendant le délai de préavis, le locataire n’est redevable du loyer et des charges que pour le temps où il a occupé réellement les lieux si le congé a été notifié par le bailleur. Il est redevable du loyer et des charges concernant tout le délai de préavis si c’est lui qui a notifié le congé, sauf si le logement se trouve occupé avant la fin du préavis par un autre locataire en accord avec le bailleur(..).
Le congé délivré par les locataires par lettre recommandée avec avis de réception, réceptionnée par les bailleurs le 17 décembre 2018, ne mentionne aucun motif permettant de voir réduire à un mois le délai de préavis.
En conséquence, Monsieur [T] et Madame [A] sont redevables de leurs loyers et charges jusqu’au 17 mars 2019.
Selon l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Il ressort du décompte produit au débat que Monsieur [T] et Madame [A] étaient redevables jusqu’en mars 2019 de la somme de 4150 euros. Le jugement déféré qui les a condamnés solidairement à verser à Madame [Z] et Monsieur [U] cette somme avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation sera confirmé.
Sur la taxe d’enlèvement sur les ordures ménagères
Selon le décret 87-713 du 26 août 1987, la taxe ou redevance d’enlèvement des ordures ménagères fait partie des charges récupérables.
Monsieur [T] et Madame [A] démontre avoir effectué un ordre de virement d’un montant de 128 euros correspondant au montant de la taxe d’enlèvement sur les ordures ménagères de l’année 2018 sollicité par les bailleurs. Ils ne justifient pas de la réalité du paiement de celle-ci, le seul ordre de virement étant insuffisant.
Le jugement déféré qui les a condamnés solidairement au versement de cette somme sera confirmé.
Sur le remboursement de la diminution de loyer
Il a été indiqué précédemment que les locataires ne démontraient pas avoir effectué les travaux pouvant être mis à leur charge et faisant partie de la clause énoncée au bail.
Le montant contractuel du loyer s’élevait à 850 euros. A compter du mois de septembre 2017, une baisse de 100 euros a été mise en oeuvre.
Monsieur [T] et Madame [A], qui ne démontrent pas l’exécution de leurs obligations contractuelles, seront condamnés à rembourser à Monsieur [U] et Madame [Z] la somme de 1854,83 euros ([18×100] + [100×17/31]). Le jugement déféré sera infirmé sur le quantum de la somme à rembourser.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre des manquements du bailleur à ses obligations
Il a été indiqué précédemment que le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance d’un logement en bon état de réparations locatives et de décence. Le logement n’est pourtant pas inhabitable. Il n’en demeure pas moins que les manquements du bailleur liés à la défaillance de l’installation électrique, à l’existence d’infiltrations et de mauvaise étanchéité et à la vétusté des fenêtres qui laissent passer l’air, a créé un préjudice au détriment des locataires consistant en un trouble de jouissance intégralement réparé par la somme de 4500 euros, les défaillances existant depuis le début du bail.
Sur l’entretien locatif et les dégradations locatives
Selon l’article 7 de la loi du 06 juillet 1989, le locataire est obligé (…)
– de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement ;
– de prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure (…).
Il convient de retenir de l’état des lieux d’entrée, non signé par les locataires, les éléments de défaillance qui y sont mentionnés et qu’ils ne contestent pas.
Cet état des lieux permet de constater que le bien n’était pas globalement en bon état de réparations locatives.
Sont ainsi décrits en état moyen:
– les murs, le sol et la porte de l’entrée
– les fenêtres, le plafond, les murs le sol, les prises électriques et les interrupteurs du salon, avec des peintures murales ‘un peu jaunies’
– les fenêtres, les peintures des murs et du plafonds (décrites comme jaunies) et le sol de la chambre du rez-de-chaussée
– le plafond, les plinthes, les murs et le rangement d’un petit bureau de l’étage, avec des peintures jaunies et des impacts
– les fenêtres d’une des chambres à l’étage
– les fenêtres d’une autre chambre à l’étage avec une infiltration dans le placard
– le plafond, le sol et les murs de la salle de bains du rez-de-chaussée, avec des peintures jaunies
– le plafond et le murs de la salle de bains à l’étage des peintures jaunies et quelques moisissures au dessus-de la baignoire
– la cave, sauf en ce qui concerne le sol, décrit en bon état.
– le plafond, le sol, les plinthes, les murs de la cuisine au rez-de-chaussée, ainsi que les éléments de cuisine (évier, plaque de cuisson, plan de travail, évacuation d’eau).
Le constat d’huissier, même non contradictoirement dressé, vaut à titre de preuve dès lors que, régulièrement communiqué, il est soumis à la libre discussion des parties, et que l’huissier relate dans ce procès-verbal, des constatations personnelles. Ainsi, les constatations réalisées par l’huissier de justice, dans son procès-verbal du 16 janvier 2019, font foi jusqu’à preuve contraire.
Cet acte décrit un logement en mauvais état général, laissés dans un état de saleté important. Ainsi, il est noté que les murs et plafonds présentent de nombreux trous de cheville non rebouchés et que divers meubles et objets ont été laissés sur place. Il est relevé que les abords extérieurs de la maison sont encombrés par des effets personnels des locataires.
Les devis produits au débat par Madame [Z] et Monsieur [U], concernent la réfection de la maison, avec une remise en peintures intégrale, la finition des escaliers, la réfection de la porte d’entrée et l’étanchéité de la toiture.
L’état des lieux d’entrée démontre que les peintures étaient en état moyen, tout comme la porte d’entrée. Il est acquis qu’il existait des problèmes d’étanchéité, dont la résolution incombait aux bailleurs.
En conséquence, les bailleurs ne peuvent solliciter de leurs locataires la remise à neuf de leur bien qui n’était pas à l’origine en bon état d’entretien.
Ils peuvent uniquement solliciter le coût du nettoyage de la maison, du débarras des affaires laissés sur place , du rebouchage des trous les murs. Il convient en conséquence de retenir à ce titre la somme de 1933 euros (1500 euros au titre du nettoyage et du rebouchage des trous, 59 euros au titre de la location d’un camion pour le débarras et 74 euros au titre du ramonage). Le jugement sera infirmé sur le quantum des sommes dues par Monsieur [T] et Madame [A].
Il n’est pas démontré par Monsieur [T] et Madame [A] qu’ils se seraient acquittés d’un dépôt de garantie.
Sur le coût du procès-verbal d’huissier valant état des lieux de sortie
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge, faisant application de l’article 3-2 de la loi du 06 juillet 1989, a mis à la charge de Monsieur [T] et Madame [A] la moitié du procès-verbal d’huissier de justice valant état des lieux de sortie.
Sur les sommes dues
Après compensation entre les sommes dues par chaque partie, il convient de condamner solidairement Monsieur [T] et Madame [A] à verser à Madame [Z] et Monsieur [U] la somme de 3679,55 euros (soit [1854, 83 + 4150+ 113,72 + 1933 + 128 – 4500].
Sur la demande de délais de paiement
Monsieur [T] et Madame [A] ne peuvent solliciter un délai de trois ans qui ne s’applique que dans le cadre d’un impayé locatif avec suspension des effets de la clause résolutoire, lorsque le bailleur sollicite l’acquisition de la clause résolutoire.
Selon l’article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues (…).
Monsieur [T] et Madame [A] ne précisent pas à la cour leur situation financière exacte. En conséquence, ils seront déboutés de leur demande de délais de paiement.
Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile
Chaque partie est succombante. Il convient en conséquence de faire masse des dépens de première instance et de les partager par moitié entre les parties.
Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le jugement déféré qui a condamné solidairement Madame [A] et Monsieur [T] aux dépens et à verser la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sera infirmé.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe
CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a condamné solidairement Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T] à verser à Madame [M] [Z] et Monsieur [N] [U] :
– la somme de 4150 euros au titre des arriérés de loyers avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation
– la somme de 128 euros au titre de la taxe d’enlèvement sur le ordures ménagères
– la somme de 113, 72 euros au titre de la moitié du coût d’établissement de l’état des lieux de sortie,
INFIRME pour le surplus,
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
DIT Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T] sont redevables des sommes de 1854,83 euros au titre du remboursement de la baisse de loyer et de 1933 euros au titre des dégradations locatives et de l’entretien locatif,
DIT que Madame [M] [Z] et Monsieur [N] [U] sont redevables de la somme de 4500 euros au titre du trouble de jouissance subi par Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T],
CONDAMNE solidairement Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T], après compensation entre les sommes dues par chaque partie, à verser à Madame [M] [Z] et Monsieur [N] [U] la somme de 3679, 55 euros,
REJETTE la demande de délais de paiement formée par Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T],
REJETTE les demandes des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
FAIT MASSE des dépens de première instance et d’appel et CONDAMNE Madame [Y] [A] et Monsieur [P] [T] d’une part et Madame [M] [Z] et Monsieur [N] [U] d’autre part à les prendre en charge par moitié.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,