ARRET
N°
[Y]
[P]
C/
[V]
PM/SGS/VB
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU VINGT HUIT SEPTEMBRE
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/05446 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IUCS
Décision déférée à la cour : ORDONNANCE DU PRESIDENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU UN DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [F] [R], [E] [Y]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [K] [H], [M] [P] épouse [Y]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d’AMIENS
Ayant pour avocat plaidant Me Annabelle PONTIER, avocat au barreau de BEAUVAIS
APPELANTS
ET
Monsieur [T], [A], [J] [V] entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne ‘EGB RENOV & CONSTRUCTION’
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Christophe WACQUET de la SELARL WACQUET ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d’AMIENS
INTIME
DEBATS :
A l’audience publique du 22 juin 2023, l’affaire est venue devant M. Pascal MAIMONE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l’article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 21 septembre 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Madame Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L’ARRET :
Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 28 septembre 2023 par sa mise à disposition au greffe.
Le 28 septembre 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.
*
* *
DECISION :
Suivant exploit délivré le 15 septembre 2022, M. [T] [V] a fait assigner Mme [K] [P] épouse [Y] et M. [F] [Y] devant le juge des référés aux fins de les voir condamner à lui payer la somme provisionnelle de 58 529,74 euros au titre d’une facture impayée outres les intérêts légaux et une indemnité de procédure.
Par ordonnance du 1er décembre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Beauvais a :
– dit que la pièce n° 41 produite par M. [V] ne sera pas écartée des débats,
– condamné les consorts [Y] à payer à M. [V] la somme de 54 329,74 euros à titre de provision à valoir sur le règlement d’une facture pour travaux en date du 8 décembre 2021,
– déclaré le juge des référés incompétent pour connaître de la demande provisionnelle formée par les consorts [Y] au profit de celui du tribunal de commerce de Beauvais,
– ordonné une expertise confiée à M. [Z] avec pour mission d’examiner les désordres malfaçons et non conformités allégués dans l’avis de M. [L] et donner tous éléments sur leurs causes et origines ainsi que sur les responsabilités encourues,
– fixé à 2 000 euros le montant de la consignation à valoir sur les honoraires de l’expert que les consorts [Y] devront consigner avant le 6 janvier 2023,
– condamné les consorts [Y] aux dépens et à payer la somme de 1 500 euros à M. [V] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 14 décembre 2022, les consorts [Y] ont interjeté appel de cette décision.
Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 3 février 2023, ils demandent à la cour de :
– infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle les a condamnés à payer la somme de 54 329,74 euros à M.[V] à titre de provision sur sa facture du 8 décembre 2021, déclaré le juge des référés du tribunal judiciaire de Beauvais incompétent pour connaître de la demande provisionnelle formée par les époux [Y] au profit du tribunal de commerce de Beauvais, et débouté les époux [Y] de toutes leurs demandes, et les a condamnés aux dépens et à payer 2 000 euros à M. [V] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirmer la décision entreprise pour le surplus,
– statuant à nouveau :
– à titre principal :
– déclarer le juge des référés compétent pour connaître des demandes de provision réciproques entre des particuliers et un artisan,
– condamner M. [V], exerçant sous l’enseigne EGB RENOV’, à leur verser la somme de 62 565,43 euros à titre de provision sur les dommages et intérêts qu’il devra leur verser après expertise judiciaire, et 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– à titre subsidiaire :
– ordonner qu’il soit fait droit à l’exception d’inexécution invoquée par les époux [Y],
– débouter M. [V] de sa demande de provision, d’article 700 et au titre des dépens,
– à titre très subsidiaire :
– ordonner la compensation entre la créance provisoire des époux [Y] d’un montant de 62 565,43 euros et la créance provisoire de 54 329,74 euros de M. [V],
– condamner M. [V] à payer le surplus entre ces deux sommes aux époux [Y], à titre de provision à valoir sur leurs préjudices définitifs,
– le condamner à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance et 3 000 euros à nouveau en appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction est requise au profit de Me Guyot.
Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 3 mars 2023, M. [V] demande à la cour de :
– déclarer les époux [Y] mal fondés en leur appel,
– en conséquence les en débouter,
– confirmer en l’ensemble de ses dispositions l’ordonnance de référé entreprise,
– condamner solidairement les époux [Y] à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’appel.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures de l’appelant pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de ses prétentions.
L’affaire a été clôturée le 8 juin 2023 et plaidée à l’audience du 22 juin suivant.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Les parties ne remettent pas en cause l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a dit que la pièce n° 41 produite par M. [V] ne sera pas écartée des débats ni en ce qu’elle a ordonné une expertise judiciaire.
– sur la demande de provision de M. [V]
L’article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que dans tous les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
En l’espèce il ressort des pièces versées aux débats que les époux [Y] ont signé un devis daté du 13 février 2021 émanant de M. [V] relatif à des travaux de réfection de la partie habitation de leur immeuble qui avait subi un sinistre pour un montant total de 175 648,66 euros. Les travaux ont commencé après le règlement par les époux [Y] d’un acompte de 70 259,46 euros.
M. [V] a adressé aux époux [Y] une nouvelle facture datée du 16 juin 2021 pour le versement d’un 2ème acompte en milieu de chantier d’un montant de 70 259,46 euros.
Les époux [Y] ne lui ont versé que la somme de 40 259,76 euros et soutiennent que la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses en raison notamment du fait qu’une partie des travaux commandés n’a pas été réalisée et qu’ils sont affectés de malfaçons. Ils produisent pour attester leurs affirmations les avis d’un technicien rédigés après une visite non contradictoire de l’immeuble.
Il n’est pas contesté que les travaux prévus au devis signé par les époux [Y] n’ont pas été intégralement réalisés.
M. [V] indique que la provision de 58 529,74 euros qu’il réclame aux époux [Y] correspond aux seuls travaux effectivement réalisés et qu’il a déduit la somme de 6 600 euros TTC afférente aux prestations non effectuées.
Les avis du technicien sollicité par les époux [Y] font, quant à eux, état de travaux initialement prévus au devis et restant à terminer pour un montant de 13 000 euros. Le technicien indique par ailleurs que le coût de la reprise des malfaçons est selon lui de 19 000 euros. Il n’a pas remis en cause les autres prestations réalisées par M. [V] ni leur facturation.
Aucun autre élément n’est produit permettant au juge des référés, juge de l’évidence, de considérer que les époux [Y] sont fondés à invoquer une exception d’inexécution pour le reste des travaux.
Il en résulte que la demande de provision formulée par M. [V] n’apparaît sérieusement contestable qu’à hauteur de la somme de 25 400 euros [(13 000 – 6 600) + 19 000 ]. Il y a donc lieu, infirmant l’ordonnance de ce chef, de condamner les époux [Y] à payer à M. [V] la somme de 33 129,74 euros (58 529,74 – 25 400) à titre provisionnel outre les intérêts légaux à compter du 1er décembre 2022.
– sur la demande de provision des époux [Y]
Les époux [Y] sollicitent l’infirmation de la décision entreprise en ce qu’elle a déclaré le juge des référés incompétent pour connaître de la demande provisionnelle formée par les consorts [Y] au profit de celui du tribunal de commerce de Beauvais. Ils réclament à titre reconventionnel la condamnation de M. [V] à leur verser la somme provisionnelle de 62 565,43 euros et font valoir que cette somme correspond à leur créance détenue en vertu des travaux réalisés par M. [V] dans leur local professionnel. Ils précisent que la provision réclamée recouvre une indemnité contractuelle de retard, l’indemnisation provisionnelle des malfaçons et non façons ainsi que l’indemnisation de leur préjudice de jouissance.
La question de la compétence du juge des référés du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce est sans intérêt dès lors que la présente cour est juridiction d’appel des deux juridiction de première instance et qu’elle est saisie du litige par l’effet dévolutif de l’appel.
Force est de constater que les époux [Y] ne produisent aucune pièce permettant de justifier avec l’évidence requise en référé du bien fondé de leur demande de provision de sorte qu’il existe manifestement des contestations sérieuses quant à son bien fondé qui relèvent d’un débat au fond et que le juge des référés n’a pas le pouvoir de trancher de sorte qu’il y a lieu de dire n’y avoir lieu à référé sur ce point.
Par voie de conséquence la demande de compensation des époux [Y] devient sans objet.
– sur les frais de procédure et les dépens
Le sens du présent arrêt justifie que les époux [Y] soient condamnés in solidum aux dépens d’appel et à payer à M. [V] une indemnité de procédure de 1 500 euros pour la procédure d’appel.
Enfin l’ordonnance est confirmée s’agissant de ses dispositions relatives à la somme allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme l’ordonnance sauf en ce qu’elle a condamné les consorts [Y] à payer à M. [V] la somme de 54 329,74 euros à titre de provision à valoir sur le règlement d’une facture pour travaux en date du 8 décembre 2021 ;
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ;
Condamne Mme [K] [P] épouse [Y] et M. [F] [Y] à payer à M. [T] [V] à titre de provision la somme de 33 129,74 euros outre les intérêts légaux à compter du 1er décembre 2022 au titre de la facture pour travaux en date du 8 décembre 2021 ;
Dit n’y avoir lieu à référé s’agissant de la demande reconventionnelle de provision des époux [Y] ;
Rejette la demande de compensation des époux [Y] ;
Condamne in solidum les époux [Y] à payer à M. [V] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum les époux [Y] aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE