Exception d’inexécution : 7 décembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/02491

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Exception d’inexécution : 7 décembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/02491

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56B

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 DECEMBRE 2023

N° RG 23/02491 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VZRN

AFFAIRE :

S.A.R.L. NEVEUX ROUYER PAYSAGISTES DPLG

C/

[D] [W]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 28 Mars 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VERSAILLES

N° RG : 22/01309

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 07.12.2023

à :

Me Thierry PICQUET, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Sophie RIVIERE-MARIETTE, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. NEVEUX ROUYER PAYSAGISTES DPLG

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Thierry PICQUET, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 710 – N° du dossier E000190S

Ayant pour avocat plaidant Me Corinne BLANC, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

Monsieur [D] [W]

né le 15 Juin 1952 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Sophie RIVIERE-MARIETTE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 275 – N° du dossier E00020SV

Ayant pour avocat plaidant Me Olivier BAULAC, du barreau de Paris

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Novembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marina IGELMAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Mme Florence SCHARRE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

Le 27 septembre 2021, la SARL Neveux Rouyer Paysagistes DPLG et M. [D] [W] ont conclu un contrat portant sur une proposition de mission pour un montant de 36 000 euros.

La proposition de mission comportait deux volets : un permis de construire pour 92 logements et une esquisse pour une [Adresse 6].

Le 20 décembre 2021, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG a établi une note d’honoraires à l’intention de M. [W] d’un montant de 12 000 euros, puis une nouvelle note d’honoraires, en date du 28 février 2022, d’un montant de 6 000 euros.

M. [W] n’a pas réglé les notes d’honoraires.

Les 13 avril et 10 mai 2022, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG a mis en demeure M. [W] de régler les notes d’honoraires.

M. [W] ne s’est acquitté que de la somme de 3 000 euros.

Par acte d’huissier de justice délivré le 21 octobre 2022, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG a fait assigner en référé M. [W] aux fins d’obtenir principalement sa condamnation au paiement de la somme de 33 000 euros et de celle de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire rendue le 28 mars 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :

– condamné M. [W] à payer à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme provisionnelle de 15 000 euros, au titre du contrat ‘proposition de mission ville de [Adresse 7]’ du 27 septembre 2021,

– condamné M. [W] à payer à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [W] aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 17 avril 2023, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de dispositions.

Dans ses dernières conclusions déposées le 26 juillet 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de :

‘- prendre acte de l’état civil exact de M. [D] [W] qui est né le 15 juin 1952 à [Localité 5],

– débouter M. [D] [W] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions

– déclarer la SARL Neveux Rouyer Paysagistes DPLG recevable et bien fondée en son appel à l’encontre de l’ordonnance de référé contradictoire et en premier ressort en date du 28 mars 2023, rendue par Mme la première vice-présidente du tribunal judiciaire de Versailles,

– infirmer l’ordonnance de référé contradictoire et en premier ressort en date du 28 mars 2023, rendue par Mme la première vice-présidente du tribunal judiciaire de Versailles en ce qu’elle a :

– condamné M. [D] [W] à payer à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme provisionnelle de 15 000 euros, au titre du contrat « proposition de mission ville de [Adresse 7] » du 27 septembre 2021,

– condamné M. [D] [W] à payer à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

– condamner M. [D] [W] à payer à la sarl Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme de 33 000 euros TTC en vertu de la proposition de mission du 27.09.2021 signée des deux parties et valant contrat ;

– condamner M. [D] [W] à payer à la sarl Neveux Rouyer Paysagistes DPLG la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [D] [W] en tous les dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Maître Thierry Picquet, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.’

Dans ses dernières conclusions déposées le 5 juillet 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [W] demande à la cour de :

‘à titre principal,

– débouter la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG de ses fins demandes et conclusions,

– infirmer l’ordonnance de référé du 28 mars 2023 en toutes ses dispositions,

– dire qu’il n’y avait pas lieu à référé,

– renvoyer la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG à mieux se pourvoir devant un tribunal,

– condamner la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG à payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à M. [W],

à titre subsidiaire et avant dire droit,

– désigner tout professionnel pour se prononcer sur les travaux réalisés par la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG et dire s’ils sont conformes au devis du 27 septembre 2021 et s’ils ont bien été réalisés dans les règles de l’art et si les documents produits relèvent d’une création originale.’

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2023.

Par message RPVA en date du 27 novembre 2023, la cour a invité les parties à formuler leurs observations sur les conséquences juridiques à tirer du fait que l’appelante demande le paiement de la créance qu’elle invoque, et non d’une provision sur celle-ci.

Par message RPVA transmis le 27 novembre 2023, le conseil de M. [W] rappelle qu’il a précisément conclu qu’en l’absence de créance, la cour ne peut que renvoyer la société Neveux Rouyer Paysagistes à mieux se pourvoir devant le juge du fond, la fixation d’une créance échappant à la compétence du juge des référés et par voie de conséquence à celle de la cour (page 5 de ses conclusions).

Par message déposé le 30 novembre 2023, le conseil de la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG fait valoir en substance que la juridiction des référés est parfaitement compétente, sur le fondement des dispositions des articles 834 et 835 alinéa 2 du code de procédure civile et 1103 et 1104 du code civil, dès lors qu’en l’espèce’:

– la créance de la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG existe et est établie tant dans son principe que dans son montant,

– ladite créance est certaine, liquide et exigible,

– il n’existe aucune contestation sérieuse,

– l’obligation contractuelle de M. [W] n’est pas sérieusement contestable et consiste, en l’espèce, à régler à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG, le montant total de ses 4 factures au titre de ses prestations conformes au contrat,

– il y a urgence à ce que M. [W] honore enfin ses engagements contractuels compte tenu de l’ancienneté des 4 factures dont la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG sollicite le règlement et de l’attitude totalement dilatoire et fallacieuse de Monsieur [D] [W] depuis l’origine.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG sollicite l’infirmation de l’ordonnance critiquée et la condamnation de M. [W] à lui payer la somme de 33 000 euros.

Elle relate avoir contracté avec M. [W] une proposition de mission en date du 27 septembre 2021 pour un montant total de 36 000 euros portant sur diverses prestations de sa part au profit de M. [W], précisant que cette convention prévoyait au titre des conditions de règlement de ses honoraires : « 50% à la remise des documents de chaque phase, solde à l’obtention du PC de l’ensemble des 92 logements. Présentation d’une note d’honoraires, règlement sous 60 jours ».

Elle indique que c’est dans ce cadre que :

– le 29 octobre 2021, M. Rouyer, son co-gérant, a adressé un courriel à M. [W] pour le remercier de son accord sur sa proposition de mission,

– le 18 novembre 2021, la remise d’un premier dossier « 92 logements » est intervenu,

– le 2 décembre 2021, la remise d’un 2ème dossier complété « 92 logements » est intervenu,

– le 9 décembre 2021, l’architecte, M. [Y], a sollicité auprès de M. Rouyer 2 perspectives supplémentaires afin de pouvoir déposer le dossier de permis de construire « 92 logements » en Mairie,

– le 17 décembre 2021, elle a adressé à M. [W] et à l’architecte son dossier complet « 92 logements »,

– par courriel du 21 décembre 2021, elle a adressé la première note d’honoraires datée du 20 décembre 2021, pour « 92 logements »,

– le 3 février 2022, s’est tenue une réunion avec elle, l’architecte et M. [W], lors de laquelle l’esquisse en cours concernant la « [Adresse 6] » lui a été présentée,

– le 7 février 2022, le dossier esquisse complet « [Adresse 6] » a été transmis à M. [W] et à l’architecte,

– par courriel du 28 février 2022, elle a adressé à M. [W] sa deuxième note d’honoraires,

– le 23 août 2022, un arrêté accordant un permis de construire a été pris au profit de M. [W],

– le 30 août 2022, elle a adressé à M. [W] ses deux dernières notes d’honoraires, l’une concernant la « [Adresse 6] », et l’autre concernant les « 92 logements ».

Ainsi, elle soutient que M. [W], qui a bénéficié de l’intégralité des prestations convenues et lui ayant permis d’obtenir le permis de construire ne s’est acquitté que d’une somme de 3 000 euros.

Elle prétend justifier de l’accomplissement de l’intégralité de ces prestations, en insistant sur le fait que M. [W], qui ne produit aucune pièce à l’exception des siennes, en première instance et en appel, ne lui a jamais adressé une quelconque réclamation à l’appui de ses prétentions, alors que le simple fait qu’il ait obtenu le permis de construire suffit à démontrer le bon accomplissement des prestations.

Elle indique au demeurant justifier de toutes ses diligences, soulignant que M. [W] n’a jamais formulé d’observation sur les documents qui lui ont été remis.

Elle considère qu’il ne saurait par ailleurs contester avoir reçu les notes d’honoraires qui ont toutes été adressées à son adresse confirmée par l’huissier instrumentaire.

M. [W] considère au contraire qu’il est fondé à opposer à la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG une exception d’inexécution puisqu’elle n’a pas exécuté sa mission et n’a pas respecté les délais.

Il relate que la proposition de mission incluait notamment les travaux suivants, dont aucun n’a été produit :

– Plan paysager

– Plan masse

– Plan de principe

– Plan de sol

– Plans des plantations

– Plans des éclairages

– Coupes, références

– Perspectives

– Notice

– Estimation sommaire

– Réunions de coordination.

Il souligne qu’aucun document n’émane de la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG, qu’aucune étude n’est communiquée, ni aucun procès-verbal de coordination.

Il soutient que les prestations relevant des phases AVP et esquisse ne sont pas justifiées et que la cour ne sera pas convaincue par la communication de photographies éparses de ‘plantes’.

Il ajoute que les factures n’avaient jamais été éditées avant d’être présentées en appel ; que la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG indique bien dans son mail du 28 février 2022 et dans sa mise en demeure, que ce sont seulement des « provisions » qui sont sollicitées.

A titre « surabondant », il indique ne pas s’opposer à la désignation de tout expert que la cour serait susceptible de désigner et qui permettra ainsi de se prononcer pour dire si les quelques photos produites par la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG correspondent à la réalité des travaux qu’elle devait réaliser selon devis du 27 septembre 2021.

Sur ce,

L’article 835 alinéa 2 du code de procédure prévoit que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Or force est de constater que tant devant le premier juge que dans ses conclusions devant la cour, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG sollicite le paiement de sa créance et non une provision à valoir sur règlement de celle-ci.

Sa demande excède dès lors les pouvoirs du juge des référés tels que définis par l’article précité.

L’ordonnance entreprise sera donc réformée en ce qu’elle a partiellement fait droit à sa demande alors qu’il doit être dit n’y avoir lieu à référé.

Il n’y a pas lieu dès lors d’examiner la demande d’expertise formulée à titre subsidiaire par M. [W].

Sur les demandes accessoires :

Compte tenu de ce qui précède, l’ordonnance doit être infirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG ne saurait prétendre à l’allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande en revanche de débouter les deux parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme l’ordonnance du 28 mars 2023 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu’en appel,

Dit que la société Neveux Rouyer Paysagistes DPLG supportera les dépens de première instance et d’appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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