Exception d’inexécution : 22 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/01277

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Exception d’inexécution : 22 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/01277

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 23/01277 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZB6H

N° MINUTE : 11/2023

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 22 décembre 2023

DEMANDERESSE
S.C.I. LELO & LALI, [Adresse 1], représentée par Me Alexandre SILVA, avocat au barreau de PARIS, [Adresse 2], Toque B0732

DÉFENDEURS
Madame [P] [G], demeurant [Adresse 3]
comparante en personne
Monsieur [I] [X], demeurant [Adresse 3], comparant en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Sandra MONTELS,, juge des contentieux de la protection
assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 19 octobre 2023

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée le 22 décembre 2023 par Sandra MONTELS, Juge, assistée de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 22 décembre 2023
PCP JCP ACR référé – N° RG 23/01277 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZB6H

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 30 juin 2019, la société LELO & LALI a consenti un bail d’habitation à Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] sur des locaux situés au [Adresse 3] à [Localité 4], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 650 euros charges comprises.

Par actes de commissaire de justice du 16 février 2022, la bailleresse a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 1950 euros au titre de l’arriéré locatif et un commandement de justifier de l’assurance, chacun visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] le 17 février 2022.

Par assignations du 27 janvier 2023, la société LELO & LALI a ensuite saisi en référé le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins :
-de condamnation in solidum de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] au paiement des 14 mois d’arriérés de loyers à hauteur de 9.100 euros ;
-d’expulsion de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] suivant acquisition de la clause résolutoire ;
-de condamnation in solidum de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] au paiement de la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts ;
-de condamnation in solidum de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] au paiement de la somme de 2400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant notamment le coût des commandements de payer.

Elle soutient que les locataires ne s’acquittent plus des loyers depuis le mois de décembre 2021, qu’aucun paiement n’est intervenu après le commandement de payer, que la créance n’est pas sérieusement contestable, que l’acquisition de la clause résolutoire est définitive, que Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] n’ont par ailleurs pas justifié de la souscription d’une assurance et doivent être expulsés. Elle soutient par ailleurs que les locataires, qui n’ont jamais répondu à ses multiples démarches, l’ont contrainte à une procédure judiciaire ce qui constitue un préjudice moral.

L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 30 janvier 2023, et un diagnostic social et financier a été réalisé. Ses conclusions ont été reçues au greffe avant l’audience, à laquelle il en a été donné lecture.

L’affaire a été renvoyée successivement aux audiences du 09 mai 2023 et du 07 juillet 2023 à la demande de Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G].

À l’audience du 19 octobre 2023, la société LELO & LALI, représentée par son conseil, maintient l’intégralité de ses demandes et précise que la dette locative, actualisée au 19 octobre 2023, s’élève désormais à 16.500 euros. Elle s’oppose à l’octroi de délais de paiement.
Elle soutient que la dette locative correspond à 24 mois d’arriérés, que le logement n’est pas vétuste.

Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] reconnaissent le principe et le montant de la dette. Ils exposent que le logement nécessite des travaux de sorte qu’ils ne règlent plus le loyer. Ils demandent à bénéficier de délais de paiement à hauteur de 50 euros par mois.

La société LELO & LALI a été autorisée à produire en cours de délibéré et avant le 02 novembre 2023 un justificatif de non vétusté du logement.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

La société LELO & LALI le 31 octobre 2023 a produit divers justificatifs.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de constat de la résiliation du bail

La société LELO & LALI justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de deux mois avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

Sur le constat de la résiliation du bail

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

L’une des obligations essentielles du preneur d’un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

En vertu de l’article 6 de la même loi, le bailleur quant à lui est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.
Le bailleur est obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement.

Il est de jurisprudence constante que l’exception d’inexécution fondée sur le manquement du bailleur à réaliser les travaux d’entretien nécessaires est constitutive d’une difficulté sérieuse.

En l’espèce, la société LELO & LALI demande que soit constatée l’acquisition de la clause résolutoire en raison de l’existence d’une dette locative non réglée après la délivrance d’un commandement de payer.

Afin de justifier le non-paiement des loyers, Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] soutiennent que l’état du logement est dégradé : présence de souris, de cafards, de fuites d’eau par temps de pluie, d’odeurs de cuisine provenant d’un restaurant. Ils produisent des photos, non datées, de diverses pièces d’un logement présentant des traces d’humidité ainsi que des sols, murs, plinthes, prises électriques en mauvais état.
Ils produisent par ailleurs un formulaire de signalement de désordres adressé à la direction du logement et de l’habitat de la mairie de [Localité 4] et un courrier de l’inspecteur de salubrité de ce même service du 04 août 2022 les informant qu’à la suite de la visite de salubrité effectuée le 23 juin 2022 il a été prescrit au propriétaire de procéder à des travaux afin de résoudre les désordres constatés : fenêtres des deux pièces qui ne ferment pas et aération permanente inexistante donnant lieu à une humidité de condensation.

La société LELO & LALI soutient quant à elle que divers travaux ont été effectués (remplacement des fenêtres, ballon d’eau chaude notamment), que le locataire s’oppose délibérément à la réalisation des travaux de ventilation et à la détection des punaises de lit faisant ainsi preuve de mauvaise foi.
Elle produit diverses factures et photocopies de chèques ainsi qu’un courrier de la ville de [Localité 4] du 11 janvier 2023 lui demandant d’effectuer des travaux afin de remédier à l’humidité de condensation. Elle fait référence à diverses lettres adressées en recommandé avec avis de réception à Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] mais dont elle ne justifié pas.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que Monsieur [I] [X] et Madame [P] [G] invoquent une exception d’inexécution fondée sur le manquement de la société LELO & LALI à réaliser les travaux d’entretien nécessaires afin de justifier le non-paiement des loyers ce qui constitue une contestation sérieuse de sorte qu’il n’y a pas lieu à référé.

Par ailleurs, il y a lieu de relever que la structuration des écritures de la société LELO & LALI ne permet pas de considérer la demande d’expulsion pour défaut de justification d’assurance comme une prétention au sens de l’article 4 du code procédure civile. En effet, tant le dispositif de ces écritures que la discussion – l’article 446-2 du code de procédure civile structurant les écrits n’étant pas applicable au litige – ne visent l’acquisition de clause résolutoire du contrat de location que pour défaut de paiement de loyers.

La société LELO & LALI sera en conséquence déboutée de l’ensemble de ses demandes

Sur les autres demandes

La société LELO & LALI partie perdante sera condamnée aux dépens.

Elle sera déboutée de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

L’exécution provisoire est de plein droit.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection, statuant en référé après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATONS l’existence d’une difficulté sérieuse portant sur la dette locative,

REJETONS en conséquence l’ensemble des demandes de la société LELO & LALI ;

DEBOUTONS les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNONS la société LELO & LALI aux dépens ;

DEBOUTONS la société LELO & LALI de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELONS que l’exécution provisoire est de plein droit ;

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2023, et signé par la juge et le greffier susnommés.

Le Greffier La Juge

 


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