Exception d’inexécution : 8 janvier 2024 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02640

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Exception d’inexécution : 8 janvier 2024 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/02640

MINUTE N° 24/8

Copie exécutoire à :

– Me Céline RICHARD

– Me Noémie BRUNNER

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 08 Janvier 2024

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/02640 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H4AX

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 mai 2022 par le tribunal de proximité de Haguenau

APPELANTE :

S.A.S. F&M PLATRERIE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

Représentée par Me Céline RICHARD, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉ :

Monsieur [P] [G]

[Adresse 2]

Représenté par Me Noémie BRUNNER, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 octobre 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseillère

Mme DESHAYES, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Jérôme BIERMANN , greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Monsieur [P] [G] a, selon devis n°D20-195 du 4 février 2020, confié des travaux de plâtrerie, pose de cloisons et isolation de combles à la Sas F&M plâtrerie moyennant paiement d’une somme totale de 21 379,54 euros.

Monsieur [P] [G] a signé un devis n°D20-196 en date du 2 mars 2020, s’y substituant, sous intitulé « prestation de service » portant uniquement sur la main d »uvre et représentant un coût de 12 000 euros.

Un second devis de « prestation de service », portant la même référence et la même date, a été signé le 4 septembre 2020 pour un montant de 16 001,20 euros.

La société F&M plâtrerie a ensuite édité deux factures, à savoir la facture n°F21-255 du 17 mai 2021 portant réclamation d’un solde restant dû de 2 401,20 euros après déduction des acomptes versés sur la somme de 16 001,20 euros et la facture n°F21-257 du 21 mai 2021 sous mention « chantier [Localité 3] suplément de travaux » pour un montant restant intégralement dû de 2 776,75 euros.

Par ordonnance rendue le 29 juin 2021, Monsieur [P] [G] s’est vu délivrer injonction de payer à la Sas F&M plâtrerie les sommes de 2 401,20 euros et 2 776,75 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2021, outre 2,58 euros au titre des frais de procédure, 51,07 euros au titre des frais de requête et 5,45 euros au titre de frais antérieurs.

Monsieur [P] [G] a formé opposition, en soutenant essentiellement avoir annulé le premier devis au profit du second devis du 2 mars 2020 à hauteur de 12 000 euros, ne portant plus que sur la main d »uvre, le matériel étant fourni par ses soins, et en contestant l’application du devis signé le 4 septembre 2020 et la facture au titre de travaux supplémentaires faute d’avoir missionné la société F&M plâtrerie en ce sens. Il critiquait par ailleurs la qualité des travaux exécutés, qui nécessitaient une remise en état représentant un coût de 10 431,60 euros dont il demandait indemnisation à la partie adverse.

Par jugement contradictoire rendu le 19 mai 2022, le tribunal de proximité de Haguenau a déclaré l’opposition recevable et fondée, a mis à néant les dispositions de l’ordonnance d’injonction de payer du 29 juin 2021 et, statuant à nouveau, a débouté la société F&M plâtrerie de l’ensemble de ses demandes et Monsieur [P] [G] de sa demande de dommages et intérêts. Il a par ailleurs condamné la société F&M plâtrerie à payer à Monsieur [P] [G] la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Pour se déterminer ainsi, le premier juge a essentiellement retenu que :

– aucun procès-verbal contradictoire de réception des travaux n’a été signé entre l’entreprise et le maître de l’ouvrage, Monsieur [P] [G] ayant refusé la réunion de réception de chantier proposée par la partie adverse et lui ayant transmis un courrier relatif à des contestations ;

– la société F&M plâtrerie n’a pas donné suite à ces réclamations mais a abandonné le chantier en laissant en outre des défauts qui, au vu des attestations des entreprises intervenues postérieurement, nécessitaient des travaux de reprise pour la somme de 10 431,60 euros ;

– la société F&M plâtrerie ne démontrait pas que les travaux supplémentaires facturés avaient été expressément commandés par Monsieur [P] [G] ou acceptés sans équivoque après leur exécution ;

– si le caractère non achevé des travaux était établi, Monsieur [P] [G] ne démontrait pas, à l’appui de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts, l’existence de malfaçons directement imputables à la société F&M plâtrerie ni avoir convoqué cette dernière à une réunion de réception pour constater contradictoirement l’étendue et la nature des malfaçons alléguées en la sommant d’y remédier ;

– les seuls éléments produits, s’agissant de photographies prises par ses soins et non datées ni circonstanciées, étaient insuffisants à justifier l’organisation d’une mesure d’expertise, qui ne saurait suppléer la carence des parties dont aucune ne voulait assumer le coût de l’expertise.

Par déclaration enregistrée le 7 juillet 2022, la Sas F&M plâtrerie a formé appel contre l’ensemble des dispositions du jugement la déboutant de ses demandes et la condamnant à paiement des dépens et frais irrépétibles.

Par dernières conclusions notifiées le 31 mars 2023, la Sas F&M plâtrerie demande à la cour d’infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Haguenau le 19 mai 2022 en toutes ses

dispositions, sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [P] [G] de sa demande de condamnation de la société F&M plâtrerie à dommages-intérêts, et, statuant à nouveau, de :

à titre principal :

– confirmer l’ordonnance d’injonction de payer du 29 juin 2021 et condamner Monsieur [P] [G] à lui payer les sommes de 2 401,20 euros TTC au titre du solde restant dû sur la facture n° F21-255 et 2 776,75 euros TTC au titre de la facture n° F21-257, augmentées des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 mai 2021 ;

– condamner Monsieur [P] [G] au paiement d’une somme de 500 euros en réparation du préjudice subi par elle du fait de sa résistance abusive au paiement ;

– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions, en particulier la demande reconventionnelle, de Monsieur [P] [G] ;

à titre subsidiaire :

– avant-dire droit, si la juridiction devait juger de l’existence de malfaçons, ordonner une expertise afin de vérifier si les désordres décrits par Monsieur [P] [G] concernant les travaux de plâtrerie existent, d’en rechercher les causes et en chiffrer les réparations ;

– au fond, réserver le droit de la société F&M plâtrerie de conclure plus amplement après dépôt du rapport d’expertise et condamner Monsieur [P] [G] à supporter les frais d’expertise ;

sur l’appel incident :

– rejeter l’appel incident de Monsieur [P] [G], car non-fondé et le débouter de l’ensemble de ses demandes ;

en tout état de cause :

– condamner Monsieur [P] [G] au paiement, au profit de la société F&M plâtrerie, d’une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens, en ce compris les dépens concernant la procédure d’injonction de payer.

A l’appui de son appel, la société F&M plâtrerie fait essentiellement valoir que :

– à la demande de Monsieur [P] [G], lui-même auto-entrepreneur dans le domaine du bâtiment, elle a accepté d’annuler le devis initial n°D20-195 du 4 février 2020 pour le remplacer par le devis n°D20-196 en date du 2 mars 2020 portant uniquement sur la main d »uvre, les deux devis portant uniquement sur les plafonds de l’étage et non du rez-de-chaussée dont Monsieur [P] [G] a demandé la réalisation ultérieurement, ce qui a abouti à la modification du second devis n°D20-196, accepté par mention expresse et daté du 4 septembre 2020 ;

– elle a réalisé l’intégralité des travaux commandés, la réception des travaux n’ayant pas été formalisée, non par suite de son abandon du chantier mais parce que Monsieur [P] [G] n’a pas répondu à ses relances, la réception n’étant en tout état de cause pas une condition au paiement du solde du prix ;

– s’agissant des travaux supplémentaires, ils ont été exécutés à la demande de Monsieur [P] [G] et facturés conformément aux mentions des devis signés qui précisaient que « tous travaux supplémentaires et surcharges de plâtre suite à malfaçons gros ‘uvre sera facturé au m2 », Monsieur [P] [G] n’en contestant d’ailleurs pas la réalisation ;

– que Monsieur [P] [G] a implicitement reconnu devoir le solde de 2 401,20 euros en indiquant dans son acte d’opposition qu’il avait payé 13 400 euros soit 90% de la somme convenue aux deux devis signés ;

– le retard de chantier était la conséquences des décalages sollicités par Monsieur [P] [G] ; ni l’évacuation des déchets ni un éventuel surcoût du matériel ne pouvait être imputé à la société F&M plâtrerie alors que c’est Monsieur [P] [G] qui avait choisi de se procurer le matériel ; Monsieur [P] [G] ne démontrait pas la réalité de l’intervention de sociétés tierces ;

– Monsieur [P] [G] s’est opposé de manière abusive au paiement du solde de la facture n°F21-255 dont il reconnaît pourtant devoir le montant et ce défaut de règlement a causé un important préjudice à la société F&M plâtrerie, petite entreprise familiale ;

– Monsieur [P] [G] n’a produit aucune preuve utile à l’appui de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, les photographies étant à cet égard insuffisantes et les devis étant sans pertinence car émanant de sociétés de travaux de peinture et non de plâtrerie et représentant un coût excessif par rapport au prix des travaux plus importants confiés à la société F&M plâtrerie elle-même et les attestations étant contestées ;

– subsidiairement, si une expertise était ordonnée, il appartiendrait à Monsieur [P] [G] d’en supporter le coût.

Par conclusions notifiées le 6 janvier 2023, Monsieur [P] [G] demande à la cour de :

– sur appel principal : déclarer l’appel mal fondé, le rejeter et confirmer le jugement entrepris dans la limite de l’appel incident,

– sur appel incident : déclarer l’appel incident recevable et bien fondé, infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [P] [G] de sa demande de dommages et intérêts et, statuant à nouveau :

– si la cour devait estimer nécessaire la réalisation d’une expertise avant dire droit, en mettre les frais à la charge de la société F&M plâtrerie,

– en toutes hypothèses, condamner la société F&M plâtrerie à lui à payer une somme de 10 431,60 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris,

– confirmer le jugement pour le surplus,

– en tout état de cause, débouter la société F&M plâtrerie de l’intégralité de ses demandes, la condamner aux dépens de la procédure d’appel et à lui payer une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [P] [G] confirme l’annulation du devis du 4 février 2020 et son remplacement par le devis n°D20/196 du 2 mars 2020 dont il soutient qu’il incluait la réalisation de l’ensemble des plafonds de la maison sans distinguer les étages.

Il soutient essentiellement que la société F&M plâtrerie a usé de duplicité en lui faisant croire que les plafonds avaient été oubliés dans le devis initial et en lui soumettant un nouveau devis qu’il avait signé en toute confiance, le 4 septembre 2020 sans vérifier, avant de se rendre compte que la société avait en réalité augmenté ses tarifs ; qu’il n’a pas reconnu la somme due, la phrase relative au paiement effectué étant tronquée et soulignant l’incohérence de la situation ; qu’il a trop payé par rapport aux prestations effectuées et à leur qualité ; qu’il n’a jamais signé de devis ou missionné la partie adverse pour des travaux supplémentaires ;

qu’il souhaitait préalablement à toute réception de chantier organiser une rencontre pour faire le point sur les retards et malfaçons ; que les factures sont contradictoires entre elles en faisant mention de travaux déduits car non exécutés tout en présentant une facture pour travaux supplémentaires.

Dans le cadre de son appel incident, Monsieur [P] [G] se prévaut d’une pose trop rapide des plaques de placo alors que le couvreur n’avait pas encore isolé la maison, ce qui a généré de l’humidité sur lesdites plaques, d’un retard dans l’exécution des travaux se répercutant sur les autres corps de métier et de malfaçons (faux niveau, absence d’angle droit des murs, mauvaise pause des cornières d’angle, défaut de pose des plâtres projetés permettant la réalisation de la peinture) comme établi par les devis produits émanant d’entreprises du bâtiment et pas seulement de peinture. Il estime suffisamment établir la réalité des malfaçons de la partie adverse et demande à voir mettre les frais d’une éventuelle expertise à la charge de cette dernière.

Il insiste sur le fait que sa famille n’a pas pu intégrer son logement à la date convenue, par suite du retard lié à la situation sanitaire mais aussi aux difficultés rencontrées avec la partie adverse.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023 et l’affaire fixée en audience de plaidoirie le 23 octobre 2023, pour être mise en délibéré au 8 janvier 2024.

MOTIFS

Vu les dernières écritures des parties précitées, auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile ;

A titre liminaire, il sera relevé qu’aucune des parties n’a remis en cause, dans son appel, les dispositions du jugement en ce qu’il a déclaré l’opposition de Monsieur [P] [G] recevable et a mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 29 juin 2021.

Sur l’appel principal en paiement des factures

Aux termes des articles 1103 et suivants du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aux termes de l’article 1353 du code civil, il appartient à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver et, réciproquement, à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Sur la facture n°F21-255 du 17 mai 2021

En l’espèce, il est constant et non contesté que Monsieur [P] [G] a signé trois devis, à savoir :

– le devis n°D20-195 du 4 février 2020 que les parties reconnaissent avoir annulé d’un commun accord,

– le devis n°D20-196 du 2 mars 2020 intitulé « prestation de service » ainsi détaillé : « confection des plafonds, confection des cloisons, plâtre sur murs, confection des ébrasements, pose de 2 portes scrigno, isolation des combles »  moyennant paiement d’une somme de 12 000 euros TTC,

– le devis n°D20-196 du 2 mars 2020 intitulé « prestation de service » ainsi détaillé : « plâtre projeté monocouches sur murs, plafond BA13+isolation, cloison Pregy avec 2BA13 sur chaque face », portant mention « bon pour accord » et signature de Monsieur [P] [G] en date du 4 septembre 2020, représentant une somme totale de 16 001,20 euros.

Monsieur [P] [G] ne conteste pas sa signature sur le devis n°D20-196 en date du 4 septembre 2020 présenté comme un devis rectificatif du précédent. Il ne saurait se contenter de prétendre ne pas avoir vérifié ce devis pour contester son engagement contractuel alors qu’il ne démontre ni n’allègue d’aucune man’uvre dolosive de la partie adverse et qu’il n’explicite pas clairement en quoi il aurait été nécessaire de signer un devis en date du 4 septembre 2020 si toutes les prestations et tarifs avaient été clairement convenus entre les parties le 2 mars 2020, si ce n’est justement pour en rectifier le prix en fonction de travaux plus étendus.

Il y a donc lieu de retenir que le contrat liant les parties est bien celui résultant du devis n°D20-196 signé en date du 4 septembre 2020 prévoyant un prix à payer de 16 001,20 euros.

La facture n°F21-255 réclame donc à juste titre paiement de la somme totale de 16 001,20 euros dont à déduire les acomptes versés à hauteur de 13 600 euros.

A cet égard, la phrase issue du courrier d’opposition de Monsieur [P] [G] indiquant « nous vous avons payer 13 400€ sois 90% de la somme du que nous avions convenu aux 2 devis signés alors que cela n’est pas cohérent » est interprétée, à tort, par la Sas F&M plâtrerie comme valant reconnaissance de dette du solde alors qu’elle est équivoque puisqu’elle fait état d’incohérences et que 13 400 euros correspond à 90% de 14 889 euros (étant en outre observé que la société F&M plâtrerie reconnaît paiement d’acomptes à hauteur de 13 600 euros et non 13 400 euros).

Monsieur [P] [G], pour s’opposer au paiement du solde de la facture n°F21-255 se prévaut de l’exception d’inexécution résultant de l’absence d’exécution intégrale et d’une mauvaise exécution des travaux commandés. Il lui appartient de les prouver.

Il est constant que les parties n’ont signé aucun procès-verbal de réception, la société F&M plâtrerie ayant toutefois, par deux courriels adressés les 25 et 27 mai 2021, proposé à Monsieur [P] [G] de convenir d’un rendez-vous « pour la RC » présentée, sans être contestée, comme la réception de chantier. L’absence de procès-verbal de réception des travaux ne met toutefois pas obstacle au paiement des prestations qui ont été exécutées.

Si Monsieur [P] [G] produit un courriel du 17 mai 2021 dans lequel il enjoignait la société F&M plâtrerie de terminer ses travaux avant le 24 mai, date devant correspondre au démarrage des travaux de peinture, il ne justifie d’aucune réponse aux propositions de rendez-vous adressées par la partie adverse les 25 et 27 mai 2021, avant son courrier du 29 juin 2021 dans lequel il reconnaît que la société F&M plâtrerie est intervenue jusqu’au 22 mai 2021, date à laquelle elle a déclaré avoir fini sa mission et lui a remis la facture n°F21-257.

Il ne justifie pas davantage d’une quelconque mise en demeure adressée à la société F&M plâtrerie de venir terminer ses travaux avant ce courrier du 29 juin 2021, qui se contente de relater sa version des faits et fait suite à la relance en paiement adressée le 14 juin 2021 par la partie adverse.

Les photographies produites sont insuffisantes à caractériser une mauvaise exécution de la prestation de la société F&M plâtrerie alors qu’elles ne permettent ni de vérifier les lieux concernés ni de connaître leur date.

Les attestations, retenues à tort et de manière contradictoire par le premier juge comme établissant des problèmes de finition justifiant le non-paiement du solde de la facture mais n’établissant pas de malfaçons justifiant des dommages et intérêts, sont elles aussi non probantes alors que deux d’entre elles évoquent une entreprise de plâtrerie « Deiber et fils » sans prouver qu’il s’agit de la société F&M plâtrerie ; que plusieurs évoquent un retard de chantier qui n’est corroboré par aucun élément extérieur, le maître d’ouvrage reconnaissant en outre un retard global du chantier du fait de la crise sanitaire ; qu’il y a une contradiction entre le courriel de Monsieur [P] [G] faisant état de l’intervention du peintre à compter du 24 mai 2021 et l’attestation de la société HM couleurs contactée pour un devis début août 2021 ; que la seule attestation du cuisiniste faisant état d’un faux-niveau sur un mur ne caractérise pas des malfaçons généralisées telles que décrites par Monsieur [P] [G] et que la production de devis de rattrapage d’enduits ne permet pas de prouver une mauvaise

exécution des travaux de la société F&M plâtrerie ni l’imputabilité éventuelle à cette dernière, près de trois mois après son intervention.

Monsieur [P] [G] est ainsi défaillant dans la preuve d’inexécutions de son cocontractant justifiant d’admettre une exception d’inexécution.

Il résulte par contre du courriel de la société F&M plâtrerie en date du 28 mai 2021 qu’elle reconnaît ne pas avoir exécuté l’intégralité des travaux de plafonds facturés sur la facture n°F21-255 et qu’elle a opéré réduction des sommes afférentes sur la facture n°F21-257.

Or, s’agissant de travaux initialement convenus et non exécutés, ils auraient dû être déduits sur la facture résultant du devis les prévoyant, à savoir la facture n°F21-255. Il y a donc lieu de réduire le solde dû sur cette facture de la somme de 749,54 euros HT soit 899,45 euros TTC.

Le jugement sera donc infirmé et Monsieur [P] [G] condamné au paiement de la somme de 1 501,75 euros au titre du solde de la facture n°F21-255 avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2021.

Sur la facture n°F21-257 du 21 mai 2021

En matière de contrat d’entreprise, il appartient au maître d »uvre d’établir que les travaux supplémentaires qu’il a réalisés ont été expressément commandés par le maître d’ouvrage non commerçant avant leur réalisation ou acceptés sans équivoque après cette exécution.

S’agissant de travaux représentant un montant supérieur à 1 500 euros, la preuve de la commande doit, conformément aux dispositions de l’article 1359 du code civil, être rapportée par écrit, en l’absence d’un commencement de preuve par écrit émanant du maître de l’ouvrage (Civ. 3ème, 17 nov. 2021).

La société F&M plâtrerie ne justifie d’aucune demande émanant de Monsieur [P] [G] afin de lui confier des travaux supplémentaires.

Elle se contente de se prévaloir de la mention type figurant sur ses devis ainsi rédigée « tous travaux suplémentaires et surcharge de plâtre suite malfaçons des gros ‘uvres sera factur au M2 ».

Or, elle ne démontre pas l’existence de malfaçons du gros ‘uvre justifiant de travaux supplémentaires alors qu’il s’agissait d’un chantier de construction et non de rénovation et, au surplus, les travaux supplémentaires facturés correspondent à des prestations distinctes des précédentes et sans lien avec des surcharges de

plâtre puisqu’il s’agit notamment de la confection de gaines techniques ou de caissons pour collecteur ou tableau électrique.

La société F&M plâtrerie ne démontre pas davantage une acceptation sans équivoque de ces travaux.

La demande en paiement de cette facture sera donc rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Selon l’article 1236-1 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Il est rappelé que la résistance à une action en justice n’est constitutive d’une faute qu’en cas d’abus caractérisé ou intention de nuire.

La Sas F&M plâtrerie ne démontre aucun abus ou intention de nuire de la part de Monsieur [P] [G] ni n’établit la réalité d’un préjudice distinct de celui réparé par l’allocation du solde de la facture assorti des intérêts moratoires.

Le rejet de cette demande sera donc confirmé.

Sur l’appel incident en dommages et intérêts

Comme relevé supra, Monsieur [P] [G] ne démontre pas la réalité de malfaçons imputables à la Sas F&M plâtrerie. Il ne produit aucun constat établi par commissaire de justice ni expertise amiable corroborant ses dires quant aux malfaçons alléguées.

La réalisation d’une expertise judiciaire ne saurait suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.

Elle est en outre sans intérêt au vu de l’ancienneté du litige et de ce que les lieux ont été modifiés depuis lors, Monsieur [P] [G] résidant sur place depuis plusieurs années. Aucune des parties n’accepte par ailleurs d’en supporter les frais.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [P] [G] de sa demande d’expertise et de dommages et intérêts.

Sur les frais et dépens

La demande de la Sas F&M plâtrerie étant partiellement accueillie à hauteur de cour, il y a lieu d’infirmer la condamnation de cette dernière aux dépens de première instance et au paiement de frais irrépétibles.

Au vu de l’issue du litige et en équité, Monsieur [P] [G] sera condamné aux dépens tant de première instance que d’appel et au paiement d’une indemnité de procédure de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, sa demande sur ce fondement étant pour sa part rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire :

INFIRME le jugement rendu le 19 mai 2022 par le tribunal de proximité de Haguenau en ce qu’il a débouté la Sas F&M plâtrerie de sa demande en paiement au titre de la facture n°F21-255 et en ce qu’il l’a condamnée aux dépens et au paiement d’une somme de 900 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

CONDAMNE Monsieur [P] [G] à payer à la Sas F&M plâtrerie la somme de 1 501,75 euros au titre du solde de la facture n°F21-255, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2021 ;

CONDAMNE Monsieur [P] [G] aux dépens de première instance, en ce compris les frais de la procédure d’injonction de payer ;

DEBOUTE Monsieur [P] [G] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance ;

CONFIRME le jugement du 19 mai 2022 pour le surplus ;

Y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur [P] [G] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [P] [G] à payer à la Sas F&M plâtrerie la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [P] [G] aux dépens de la procédure d’appel. 

Le Greffier La Présidente

 


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