Annonce de gains publicitaires : 5 octobre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/03231

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Annonce de gains publicitaires : 5 octobre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/03231
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5 octobre 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
21/03231

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 05/10/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/03231 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TV3V

Jugement (N° 19/03233)

rendu le 20 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes

APPELANT

Monsieur [O] [E]

né le 12 mai 1944 à [Localité 4] ([Localité 4])

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Stéphane Dominguez, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué

INTIMÉE

La société Elite trade AG

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Estelle Ciussi, avocat au barreau de Nice, avocat plaidant

DÉBATS à l’audience publique du 29 juin 2023, tenue par Céline Miller magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 octobre 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 08 juin 2023

****

Soutenant que plusieurs courriers publicitaires qui lui avaient été envoyés par la société Elite trade Ag, société spécialisée dans la vente par correspondance, lui avaient fait croire qu’il était le gagnant par tirage au sort d’un chèque de 9 500 euros, M. [O] [E] a fait assigner cette société en paiement de cette somme.

Par jugement en date du 20 mai 2021, le tribunal judiciaire de Valenciennes a débouté M.'[E] de sa demande de paiement de la somme de 9 500 euros, ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour son préjudice moral et matériel, débouté la société Elite de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, condamné M. [E], outre aux dépens, à verser à cette dernière la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes.

M. [E] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 10 août 2021, demande à la cour, au visa de l’article 1371 du code civil, de l’infirmer en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de condamner la société intimée à lui verser les sommes suivantes :

– 9 500 euros en principal, correspondant au gain annoncé et espéré ;

– 3 000 euros au titre du préjudice matériel et moral qui lui a été occasionné du fait du non versement du gain ;

– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 8 novembre 2021, la société Elite demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts et, statuant à nouveau, de débouter l’appelant de ses demandes, de le condamner à lui verser la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts et, y ajoutant, de le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me [Y], ainsi qu’à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour le détail de l’argumentation des parties, il sera renvoyé à leurs écritures par application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande principale en paiement

M. [E] sollicite l’infirmation de la décision entreprise en ce que celle-ci l’a débouté de ses demandes, affirmant qu’il résulte des pièces qu’il produit et qui lui ont été envoyées par la société Elite trade Ag une absence d’aléa en ce qui concerne le gain de 9 500 euros qui lui était promis à titre nominatif.

La société Elite trade AG conclut à la confirmation de la décision au motif que l’aléa portant sur le gain annoncé dans ses documents publicitaires est parfaitement apparent.

Ceci étant exposé, aux termes de l’article L121-20 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable au présent litige, ‘dès lors qu’elles sont déloyales au sens de l’article L121-1, sont interdites les pratiques commerciales mises en ‘uvre par les professionnels à l’égard des consommateurs, sous la forme d’opérations promotionnelles tendant à l’attribution d’un gain ou d’un avantage de toute nature par la voie d’un tirage au sort, quelles qu’en soient les modalités, ou par l’intervention d’un élément aléatoire.’

L’article L.121-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 applicable au présent litige, précise que ‘les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service. Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L121-2 à L121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L121-6 et L. 121-7.’

Aux termes de l’article 1300 du code civil (anciennement 1371 du même code), les quasi-contrats sont des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit, et parfois un engagement de leur auteur envers autrui.

Il résulte de la combinaison de ces textes que la société de vente par correspondance organisatrice d’un jeu publicitaire qui annonce un gain à une personne dénommée, sans mettre en évidence, à première lecture par un ‘consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé’, l’existence d’un aléa, s’oblige par ce fait purement volontaire, à le délivrer.

L’appréciation de la conscience que pouvait avoir de l’aléa le ‘consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé’ doit se faire au vu de l’ensemble des documents que celui-ci a reçus lors de l’annonce du gain.

C’est par des motifs pertinents et particulièrement détaillés, reprenant l’analyse de chacun des documents envoyés à M. [E] par la société Elite trade AG et que la cour adopte, que le premier juge a pu constater qu’il ressortait des pièces versées que le règlement du jeu était présent au dos de chaque publicité reçue par celui-ci, que ce règlement était écrit en caractères normalement lisibles, malgré une présentation peu aérée et l’absence de tout paragraphe de séparation, qu’il mentionnait l’existence d’un aléa (notamment aux paragraphes 1, 3, 4 et 10), tout comme les modalités de participation et les gains mis en jeu (un premier prix de 9 500 euros et un prix garanti à chaque participant de 2 euros, le chèque certifié conforme), que les astérisques et dièses figurant sur les documents publicitaires faisaient toujours renvoi à la mention de l’existence d’un aléa ou au règlement mentionnant cet aléa, que les courriers envoyés par la société Elite trade AG à M. [E] évoquant un gain étaient rédigés au conditionnel (‘si vous êtes notre grand gagnant confirmé’ ou ‘si vous possédez ce n° nous pourrons déclarer alors’) et mentionnaient la procédure à suivre pour participer au tirage au sort et être éventuellement désigné grand gagnant, qu’enfin, si M. [E] a bien reçu un chèque de deux euros appelé ‘chèque certifié’, aucun courrier produit par ce dernier ne mentionnait que son numéro avait été désigné comme gagnant, du gain principal de 9 500 euros, par suite du tirage au sort de l’huissier de justice.

Il est ainsi démontré que la société Elite trade AG a mis en évidence sur les documents publicitaires envoyés à M. [E] l’existence d’un aléa affectant l’attribution du prix et perceptible à première lecture pour un consommateur normalement informé, raisonnablement attentif et avisé.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle a débouté M. [E] de sa demande principale en paiement.

Sur les demandes de dommages et intérêts

M. [E] étant débouté de sa demande principale en paiement du gain qu’il espérait, il sera logiquement débouté de sa demande complémentaire de dommages et intérêts, la décision entreprise étant également confirmée sur ce point.

Par ailleurs, la société Elite trade AG ne rapporte pas plus la preuve, en appel qu’en première instance, du préjudice justifiant la condamnation reconventionnelle de M. [E] à lui payer la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article 1240 du code civil, de sorte qu’il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande.

Sur les autres demandes

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et frais irrépétibles.

M. [E] qui succombe en son appel, sera tenu des entiers dépens de celui-ci et condamné à payer à la société Elite trade AG la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d’appel. Il sera également débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme la décision entreprise dans toutes ses dispositions ;

Condamne M. [O] [E] aux entiers dépens d’appel, dont distraction au profit de Maître Virginie Levasseur ;

Condamne M. [O] [E] à payer à la société Elite trade AG la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le déboute de sa demande à ce titre.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet

 


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