Your cart is currently empty!
Le seul emploi de la mention protégée ‘1855″ dans une marque de vêtements n’est pas suffisant à caractériser une ‘pratique’ commerciale déloyale ou trompeuse (au détriment du Conseil des Grands Crus Classés en 1855), constitutive d’une faute. Il s’agit d’une stratégie commerciale axée sur l’univers du vin et des grands crus classés 1855 et une habile référence à l’année 1855 en tant qu’elle a également vu l’avénement de la machine à coudre Singer.
Une pratique commerciale trompeuse sanctionne des comportements ayant pour finalité la même tromperie du consommateur moyen, en sorte qu’elle suppose que soit mis en évidence des manoeuvres destinées à tromper le public pertinent sur les mêmes éléments caractérisant la déceptivité de la marque.
Le fait que les pratiques commerciales déloyales constituent une infraction pénale n’interdit pas de sanctionner ces pratiques sous le prisme de la responsabilité civile de l’article 1240 du code civil dès lors qu’elles constituent un fait juridique caractérisant une faute civile et qu’est établie l’existence d’un dommage en lien de causalité avec cette faute.
Selon les dispositions de l’article L 121-1 du code de la consommation dans sa version applicable au pésent litige, ‘Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.
Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7.’
Selon les dispositions de l’article L 121-2 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, ‘une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes :
1° Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent ;
2° Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service avec la circonstance qu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;
b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l’usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;
c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;
d) Le service après-vente, la nécessité d’un service, d’une pièce détachée, d’un remplacement ou d’une réparation ;
e) La portée des engagements de l’annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ;
f) L’identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;
g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ;
3° Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en ‘uvre n’est pas clairement identifiable.’
En l’espèce les éléments invoqués au titre de la déceptivité de la marque 1855 (risque de confusion sur l’origine de la marque et la qualité des produits par confusion sur l’ancienneté de la marque et sur le lien économique avec les châteaux bénéficiant du classement de 1855), sont invoqués par le conseil au titre des pratiques commerciales trompeuses, à savoir, une présentation de la marque litigieuse de nature à induire en erreur le consommateur sur la provenance et la qualité des chemises vendues sous la marque (2°) et un risque de confusion avec la marque 1855 (1°).
Cependant, alors que la nullité pour déceptivité de la marque sanctionne la confusion que crée la marque sur un public de consommateurs moyens du fait de son seul contenu, la pratique commerciale trompeuse sanctionne des comportements ayant pour finalité la même tromperie du consommateur moyen, en sorte qu’elle suppose, ainsi que le relevaient justement les premiers juges, que soit mis en évidence des manoeuvres destinées à tromper le public pertinent sur les mêmes éléments caractérisant la déceptivité de la marque.
Ainsi, le juge de la déceptivité n’apprécie t-il que le ‘contenu’ de la marque là où le juge de la pratique commerciale trompeuse ou déloyale apprécie un ‘comportement’.
En outre, la pratique commerciale trompeuse ou déloyale nécessite que dans les deux cas la dite pratique soit de nature à altérer ou créer un risque d’altérer de manière substantielle le comportement économique du public pertinent le conduisant à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.
Quant au dommage en résultant, dans le cas de pratiques commerciales déloyales ou trompeuses engageant la responsabilité civile du contrevenant, il ne peut s’agir que d’une modification substantielle du comportement commercial du consommateur de la marque subissant les dites pratiques, à son détriment ou au profit de la marque concurrente.
Le seul emploi de la mention protégée ‘1855″ dans la marque litigieuse n’est pas suffisant à caractériser une ‘pratique’ commerciale déloyale ou trompeuse, constitutive d’une faute mais il s’y ajoute ici une stratégie commerciale axée sur l’univers du vin et des grands crus classés 1855 et une habile référence à l’année 1855 en tant qu’elle a également vu l’avénement de la machine à coudre Singer.
Or, même à retenir que le risque de confusion créé par la marque sur un public pertinent, pour retenir le caractère déceptif de la marque litigieuse, résulte d’une pratique commerciale déloyale ou trompeuse, force est de constater que le dossier ne contient aucun élément de nature à établir que cette confusion à pu altérer d’une quelconque manière ou créer un risque d’altération, a fortiori de manière substantielle, le comportement commercial de ce consommateur au profit de la marque litigieuse ou au détriment de la marque 1855, alors que les deux marques ne recouvrent pas les mêmes produits ou services, le Conseil se contentant de rappeler la confusion entretenue par la marque litigieuse avec l’univers du vin et des châteaux ainsi que l’ancienneté de la marque et d’affirmer ‘qu’il existe un risque pour le consommateur de voir son comportement altéré’, ce qui est bien insuffisant pour caractériser une pratique commerciale déloyale ou trompeuse altérant ou risquant d’altérer de manière substantielle le comportement du consommateur de la marque ‘1855″, de nature à engager la responsabilité civile de la société Al Concept.