Nullité d’Assignation : 8 juin 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/06905

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Nullité d’Assignation : 8 juin 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/06905
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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 08 JUIN 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/06905 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OLX3

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 23 JUILLET 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 16/01334

APPELANTE :

Madame [W] [F] [J]

née le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 27] (ITALIE)

de nationalité Italienne

[Adresse 24]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie Pierre VEDEL SALLES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 19/06964 (Fond)

INTIMES :

Madame [M] [N] épouse [U]

née le [Date naissance 14] 1973 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 17]

[Localité 16]

et

Monsieur [L] [N]

né le [Date naissance 10] 1968 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 18]

[Localité 13]

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 19/06964 (Fond)

et

Monsieur [R] [N]

né le [Date naissance 2] 1946 à [Localité 23]

de nationalité Française

[Adresse 19]

[Localité 3]

Représentés par Me Ségolène ZICKLER, avocat au barreau de CARCASSONNE substitué à l’audience par Me Nicolas SAINTE CLUQUE, avocat au barreau de NARBONNE

Maître [P] [A], Notaire

de nationalité Française

[Adresse 25]

[Localité 5]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER

Maître [Z] [C] ès qualités de successeur de Maître [Y] [X], Notaire

de nationalité Française

[Adresse 26]

[Localité 6]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 04 Avril 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

EXPOSE DU LITIGE :

Selon acte authentique des 24 et 26 décembre 1996 établi par Maître [O], Monsieur [R] [N] et Madame [T] [H] épouse [N] ont acquis un immeuble à usage de garage avec cour contigüe cadastré section A n°[Cadastre 9] et n°[Cadastre 7] lieudit “[Adresse 22]” sur la commune de [Localité 21].

Suite au remaniement du cadastre, la parcelle A[Cadastre 7] a été numérotée AA n°[Cadastre 11].

Lors du décès de Madame [T] [H] épouse [N] survenu en 2013, Monsieur [R] [N] a confié à Maître [D] la succession et la régularisation de la donation des biens immobiliers à ses deux enfants [L] et [M] [N].

Le 26 septembre 2013, le service de la publicité foncière de [Localité 20] a adressé à Maître [D] un rejet de publication de l’attestation immobilière après décès de Madame [T] [H] épouse [N], en raison d’une discordance entre les énonciations de l’acte et du titre ; il est en effet apparu que la parcelle A[Cadastre 7] (nouvellement AA n°[Cadastre 11]) avait été intégrée par erreur par acte reçu par Maître [Z] [C] le 16 janvier 2004 dans l’actif de la succession de Monsieur [S] et attribuée à ses héritiers, lesquels l’ont ensuite vendue à Madame [W] [J] suivant acte reçu par Maître [P] [A] le 2 juillet 2012.

Par acte d’huissier du 18 août 2016, les consorts [N] ont assigné Madame [J] devant le tribunal de grande instance de Carcassonne aux fins de voir prononcer la nullité de l’acte de vente établi par Maître [A] le 2 juillet 2012.

Par acte d’huissier du 17 novembre 2017, Madame [J] a appelé en garantie Maître [C] et Maître [A], notaires, en intervention forcée afin de mettre en jeu leur responsabilité professionnelle.

Les deux instances ont été jointes suivant ordonnance du 10 janvier 2018.

Par jugement contradictoire du 23 juillet 2019, le tribunal a :

– Rejeté l’exception d’irrecevabilité tirée de la nullité de l’assignation ;

– Rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir ;

– Constaté que les consorts [N] sont les uniques propriétaires de la parcelle A [Cadastre 7], nouvellement AA n°[Cadastre 11], et prononcé la nullité de l’acte de vente établi par Maître [A] le 2 juillet 2012 entre les consorts [S]-[I] et Madame [J] concernant la parcelle AA n°[Cadastre 11] ;

– Ordonné la réintégration de la parcelle AA n°[Cadastre 11], lieu-dit [Adresse 22], commune de [Localité 21], dans le patrimoine des consorts [N] afin qu’il soit procédé à la publication de l’attestation immobilière établie par Maître [D] à la suite du décès de Madame [N] intervenu le [Date décès 12] 2013 et ordonné la publication du jugement à intervenir au Service de la Publicité foncière de [Localité 20] ;

– Condamné Maître [C] à prendre en charge les frais notariés consécutifs à la restitution et mis à la charge de Madame [J] ;

– Rejeté toutes les autres demandes en paiement formées par Madame [J] ;

– Ordonné l’exécution provisoire ;

– Condamné Maître [C] à payer aux consorts [N] d’une part et à Madame [J] d’autre part la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Le 17 octobre 2019, Madame [W] [J] a relevé appel de ce jugement à l’encontre de Madame [M] [N] épouse [U], de Monsieur [R] [N], de Maître [P] [A] et de Maître [Z] [C].

Le 22 octobre 2019, Madame [W] [J] a relevé appel de ce même jugement à l’encontre de Monsieur [L] [N].

La jonction des procédure a été prononcée selon ordonnance du 14 novembre 2019.

Vu les dernières conclusions de Madame [W] [J] remises au greffe le 2 avril 2020 ;

Vu les dernières conclusions de Monsieur [R] [N], Madame [M] [N] épouse [U] et Monsieur [L] [N] remises au greffe le 19 mars 2020 ;

Vu les dernières conclusions de Maître [P] [A] remises au greffe le 31 mars 2020 ;

Vu les dernières conclusions de Maître [Z] [C] remises au greffe le 31 mars 2020 ;

MOTIFS DE L’ARRÊT :

Sur la fin de non recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir:

Aux termes de l’article 1599 du code civil ‘ La vente de la chose d’autrui est nulle: elle peut donner lieu à des dommages-intérêts lorsque l’acheteur a ignoré que la chose fût à autrui ‘.

Il est constant que la nullité de la vente de la chose d’autrui ne peut être demandée que par l’acquéreur et non par le véritable propriétaire qui ne dispose que d’une action en revendication et n’a pas la possibilité d’obtenir l’annulation de l’acte préalablement conclu.

Par conséquent, si les consorts [N], qui s’estiment être les véritables propriétaires de la parcelle litigieuse, justifient bien d’un intérêt à agir en revendication, ils ne peuvent en revanche solliciter la nullité de l’acte de vente établi entre les consorts [S]-[I] et Madame [J], alors même qu’au surplus, les vendeurs n’ont pas été appelés dans la cause.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir et infirmé en ce qu’il a prononcé la nullité de l’acte de vente établi par Maître [A] le 2 juillet 2012 entre les consorts [S]-[I] et Madame [J] concernant la parcelle AA n° [Cadastre 11].

Sur l’action en revendication :

Madame [J] soutient que la parcelle A [Cadastre 7] serait tombée dans le patrimoine des consorts [S]-[I] dans le cadre d’une dévolution successorale dont Maître [C] a dressé une attestation de propriété immobilière le 16 janvier 2004, cette attestation mentionnant que cette parcelle a été acquise par suite du décès de Monsieur [V] [K] survenu à [Localité 21] le [Date décès 15] 1978.

Or, le relevé de propriété de 2002 ne mentionnait ni la parcelle [Cadastre 7], ni la parcelle [Cadastre 8], Maître [C] reconnaissant que dans son attestation immobilière de 2004, il avait intégré par erreur la parcelle [Cadastre 7] à l’actif de la succession de Monsieur [E] [S], après avoir pris attache avec les services de publicité foncière lui ayant indiqué que cette parcelle appartenait à ce dernier.

En effet, il ressort de l’acte de vente entre Monsieur et Madame [B] et Monsieur et Madame [N] en date des 24 et 26 décembre 1996 que la parcelle A [Cadastre 7] a bien été vendue aux époux [N].

Suite à un remaniement du cadastre en 1999, cette parcelle a été renumérotée AA [Cadastre 11].

Postérieurement à l’acte de vente de Madame [J] de 2012, Maître [C], par acte rectificatif du 18 octobre 2013, a indiqué que c’est à tort et par erreur que, dans les attestations immobilières du 16 janvier 2004 et 20 juillet 2007, a été mentionnée la parcelle AA [Cadastre 11], le notaire précisant qu’il s’agit de la nouvelle désignation de la parcelle anciennement cadastrée à la section A numéro [Cadastre 7].

Par conséquent, il ressort d’une part des pièces versées aux débats que les consorts [N] peuvent se prévaloir de l’antériorité de leur acte d’acquisition (1996) sur celui de Madame [J] (2012), d’autre part que les attestations immobilières dont se prévaut cette dernière pour revendiquer la propriété de la parcelle litigieuse sont affectées par une erreur qui est reconnue par le notaire et que ce dernier a par la suite rectifié en excluant la parcelle AA [Cadastre 11], anciennement [Cadastre 7], du patrimoine des consorts [S].

Les consorts [N] sont donc bien les propriétaires de la parcelle AA [Cadastre 11] et sont bien fondés à solliciter sa réintégration dans leur patrimoine.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a ordonné la réintégration de la parcelle AA n°[Cadastre 11], lieu-dit [Adresse 22], commune de [Localité 21], dans le patrimoine des consorts [N] afin qu’il soit procédé à la publication de l’attestation immobilière établie par Maître [D] à la suite du décès de Madame [N] intervenu le [Date décès 12] 2013 et ordonné la publication du jugement à intervenir au Service de la Publicité foncière de [Localité 20].

Sur la responsabilité des notaires :

S’agissant d’une part de Maître [C], ce dernier a bien commis une erreur dans l’établissement de l’attestation de propriété immobilière du 16 janvier 2004, ce qui justifie sa condamnation à prendre en charge les frais notariés nécessaires au titre de la reprise des actes et des titres.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

S’agissant d’autre part de Maître [A], cette dernière, après vérification auprès des services de publicité foncière corroborant les énonciations des actes précédents et les déclarations des vendeurs concernant l’origine de propriété de la parcelle litigieuse, n’avait aucune raison de remettre en cause ces différents éléments.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a écarté toute demande à l’encontre de Maître [A].

Enfin, les notaires ne peuvent être tenus en paiement au titre de la restitution de la parcelle AA [Cadastre 11] à ses véritables propriétaires ni aux dommages et intérêts résultant de cette restitution qui ne constituent pas des préjudices indemnisables.

En l’espèce, il appartiendra à Madame [J] d’agir en nullité de la vente contre ses vendeurs afin d’obtenir la restitution du prix, étant relevé que ce dernier avait été fixé à la somme modique de 800 euros .

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de restitution du prix et de dommages et intérêts présentées par Madame [J] à l’encontre des notaires.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a prononcé la nullité de l’acte de vente établi par Maître [A] le 2 juillet 2012 entre les consorts [S]-[I] et Madame [W] [F] [J] concernant la parcelle AA n° [Cadastre 11] ;

Statuant à nouveau,

Dit que la nullité de la vente de la chose d’autrui ne peut être demandée que par l’acquéreur et non par le véritable propriétaire qui ne dispose que d’une action en revendication et n’a pas la possibilité d’obtenir l’annulation de l’acte préalablement conclu ;

Condamne Madame [W] [F] [J] à payer Messieurs [R] et [L] [N] et Madame [M] [N] épouse [U] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en appel ;

Condamne Maître [Z] [C] à payer aux consorts [N] d’une part et à Madame [W] [F] [J] d’autre part une somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en appel ;

Condamne in solidum Madame [W] [F] [J] et Maître [Z] [C] aux entiers dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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