Mise à pied disciplinaire : 29 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00953

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Mise à pied disciplinaire : 29 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00953
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2023

N° RG 21/00953

N° Portalis : DBV3-V-B7F-UM4K

AFFAIRE :

S.A. PIERRES ET LUMIERES

C/

[E] [X] [B]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 mars 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE-

BILLANCOURT

Section : C

N° RG : F19/01452

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jacques BELLICHACH

Me Patricia ROTKOPF

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, initialement fixé au 06 avril 2023, prorogé au 25 mai 2023, puis prorogé au 08 juin 2023, puis prorogé au 29 juin 2023, les parties ayant été avisées, dans l’affaire entre :

S.A. PIERRES ET LUMIERES

N° SIRET : 672 022 084

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Me Jacques BELLICHACH, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0334

Représentant : Me Pascal DELIGNIERES de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 1702 substitué à l’audience par Me Grégoy BUCHETON, avocat au barreau de NANTERRE

APPELANTE

****************

Monsieur [E] [X] [B]

né le 15 avril 1969 à [Localité 8] (CAMEROUN)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentant : Me Patricia ROTKOPF, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 427

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET,

Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [E] [X] [B] a été engagé à compter du 1er septembre 2015 par la société d’HLM Pierres et Lumières par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de gardien non logé coefficient GQ, catégorie employé. Il était affecté sur le site de [Localité 10], aux [Adresse 1] et [Adresse 3]. Il a été promu à compter du 1er octobre 2016 gardien superviseur, coefficient GS, catégorie agent de maîtrise. Il exerçait ses tâches de superviseur sur divers sites, dont celui de [Localité 6] 2, tout en effectuant également des tâches de gardien sur le site de [Localité 10]. Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale du personnel des sociétés anonymes d’HLM.

La société Pierres et Lumières a convoqué M. [B], par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juillet 2019 à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement qui s’est déroulé le 12 juillet 2019, puis par lettre adressée dans les mêmes formes le 1er août 2019, elle lui a notifié son licenciement et l’a dispensé de l’exécution du préavis de deux mois, qu’elle lui a rémunéré. Elle lui a versé une indemnité de licenciement de 3 753,96 euros.

Contestant son licenciement, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, par requête reçue au greffe le 15 novembre 2019, afin d’obtenir le paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour préjudice moral et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 17 mars 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a :

– dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

– condamné la société Pierres et Lumières à payer à M. [B] les sommes suivantes :

*9 280 euros au titre de dommages et intérêts,

*1 000 euros au titre de préjudice moral,

*1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société Pierres et Lumières à remettre à M. [B] les bulletins de salaire conformes au jugement ;

– débouté les parties de l’ensemble de leurs autres demandes ;

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire :

– condamné la société Pierres et Lumières aux dépens.

La société Pierres et Lumières a interjeté appel du jugement par déclaration au greffe du 26 mars 2021.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 4 novembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Pierres et Lumières demande à la cour :

Infirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

¿ À titre principal,

Dire et juger le licenciement de M. [B] régulier en la forme et fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Débouter en conséquence Monsieur [E] [B] de l’ensemble de ses demandes ;

¿ Subsidiairement,

Cantonner l’indemnisation susceptible de lui être allouée sur le fondement de l’article L 1235-3 du code du travail à la somme de 7 045,50 euros,

Le débouter du surplus de ses demandes.

¿ En tout état de cause

Condamner M. [B] au paiement d’une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Le condamner aux éventuels dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 30 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, M. [B] demande à la cour de :

¿ Infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Pierres et Lumières à lui payer la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral ;

Et, statuant à nouveau :

¿ Condamner la société Pierres et Lumières à lui payer la somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral ;

Et, y ajoutant :

¿ Condamner la société Pierres et Lumières à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

¿ Condamner la société Pierres et Lumières au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Patricia Rotkopf, avocat au barreau des Hauts de Seine.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 11 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La lettre de licenciement notifiée à M. [B], qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit :

‘Je …vous informe que j’ai décidé, par la présente, de procéder à votre licenciement pour les motifs suivants.

Vous avez été engagé en qualité de gardien d’immeuble le 1er septembre 2015. Vous occupez actuellement un poste de gardien superviseur.

En premier lieu, M. [U] [H], responsable de la proximité, s’est rendu le 6 juin dernier sur le site de [Localité 10], dont vous avez la charge et y a trouvé une note affichée dans le hall situé [Adresse 1], rédigée par vos soins sans son accord préalable, et comportant des termes grossiers à l’encontre des locataires. Lors de l’entretien, vous avez reconnu que cette initiative était inappropriée.

En second lieu, le 13 juin dernier, M. [M] [C], président de l’amicale des locataires de la résidence d'[Localité 6] située [Adresse 4], dont vous avez la charge en tant que gardien superviseur et sur laquelle vous êtes locataire, a informé M. [H], que deux locataires de la résidence avait demandé à louer un box. Ceux que vous leur avez attribués (les box n°13 et 14) ne correspondaient pas à leur souhait car ces derniers sont plus éloignés de leur habitation alors qu’un de ces locataires a des problèmes de santé et la seconde locataire a un bébé et doit donc utiliser une poussette.

A plusieurs reprises, ces personnes ont demandé à ce que leur soit attribué le box n°6 qui est également vacant mais vous leur auriez répondu que ce n’était pas possible. M. [C] vous ayant également interrogé sur le sujet, précise que vous lui auriez répondu que vous faîtes ce que vous voulez et que même s’il contactait Pierres et Lumière pour les en informer, ça ne changerait rien et ce n’était pas grave.

Plusieurs témoignages mentionnent que vous vous seriez octroyé, sans contrat de bail, le box n°6, pour y stationner votre véhicule personnel.

M. [H] s’est donc rendu le 25 juin à votre loge située à [Localité 10] pour y prendre la clé du box vacant. Il a contrôlé le box n°6 et y a constaté la présence d’un véhicule BMW immatriculé [Localité 7].

Le 4 juillet, M. [H] est retourné à [Localité 10] récupérer la clé du box vacant. Il a contrôlé le box n°6 et y a constaté la présence d’un véhicule BMW immatriculé [Localité 7].

Lors de l’entretien vous avez reconnu qu’il s’agissait bien de votre véhicule personnel dans le box n°6. Les explications que vous m’avez fournies lors de l’entretien ne sont pas de nature à modifier mon appréciation sur les faits et votre comportement qui est inacceptable, qui ternit l’image de la société et va à l’encontre de vos obligations contractuelles.

Dans ce contexte, j’ai décidé de procéder à votre licenciement.’

Contrairement à ce que soutient M. [B], la lettre de licenciement qui lui fait grief de la présence d’une note affichée dans le hall situé [Adresse 1] le 6 juin 2019, rédigée par ses soins sans l’accord préalable du responsable de proximité et comportant des termes grossiers à l’encontre des locataires énonce un motif précis et matériellement vérifiable conforme aux exigences de l’article L. 1232-6 du code du travail, peu important que les termes utilisés dans cette note n’y soient pas cités, et peu important également que la note litigieuse ne lui ait pas été présentée lors de l’entretien préalable, ainsi qu’il le prétend, ce que l’employeur conteste d’ailleurs. En effet, si l’article L. 1232-3 du code du travail fait obligation à l’employeur d’indiquer au cours de l’entretien préalable au salarié dont il doit recueillir les explications le motif de la sanction envisagée, il ne lui impose pas de communiquer à ce dernier les pièces susceptibles de justifier la sanction.

M. [B] soutient que les griefs qui lui sont faits sont infondés et que la décision de le licencier est injuste et disproportionnée.

– Sur le premier grief relatif à une communication insultante à l’égard des locataires de l’immeuble [Adresse 1] à [Localité 10], dont M. [B] était le gardien

A l’appui de ce grief, la société Pierres et Lumières produit la note suivante, dactylographiée à l’exception du ‘ J’ ‘ qui est manuscrit :

‘Chers(es) Locataires

J’attire votre attention sur le fait que nous vivons dans un monde de personnes civilisées et non de bêtes sauvages.

Certains locataires se comportent comme des cochons.

Ils transforment le hall et les dessous d’escaliers en locaux poubelles.

Je leur demande de garder leur merde dans leur intimité et surtout de respecter l’espace dédié à la communauté en cessant cette activité honteuse.

Le Gardien ‘

M. [B] fait valoir :

– qu’il n’est pas prouvé qu’il est le rédacteur de cette note dactylographiée, signée de façon générique ‘Le gardien’ ;

– qu’il n’est pas l’auteur de cet affichage, que le tableau d’affichage comporte d’ailleurs plusieurs mots dont ceux qui avaient été affichés par le précédent gardien et qui n’avaient pas été retirés ;

– que quand bien même il le serait, le contenu de cette note visant à inviter les locataires à respecter la propreté et à ne pas laisser traîner leurs déchets n’est pas scandaleux et que si les termes utilisés sont inappropriés, ils ne justifient pas un licenciement, qui constitue une sanction disproportionnée, qu’un rappel à l’ordre ou un avertissement aurait été plus en adéquation avec le fait reproché ;

– que s’il s’est excusé lors de l’entretien préalable, en indiquant être désolé d’avoir employé des mots grossiers si tel était le cas, il ne savait pas alors lesquels et que ces mots aujourd’hui connus sont à relativiser compte-tenu du contexte ;

– que l’employeur ne justifie pas qu’un locataire se serait plaint d’un tel affichage et que ce mot n’a pas été déchiré, comme cela est parfois le cas lorsqu’une note déplaît aux locataires.

Aucun élément ne vient corroborer les allégations de la société Pierres et Lumières selon lesquelles M. [B] serait l’auteur de l’affichage de la note comportant des termes grossiers à l’encontre des locataires dont elle indique que M. [H] a constaté la présence le 6 juin 2019 dans le hall du sis [Adresse 1] à [Localité 10], à défaut d’élément émanant de M. [H] précisant en quoi l’affichage de cette note pouvait être attribué avec certitude à M. [B] ou d’élément établissant que M. [B] a reconnu en connaissance de cause avoir affiché la note litigieuse.

Le doute devant profiter au salarié, ce grief n’est pas établi.

– Sur le second grief, relatif à l’appropriation par M. [B] de box au détriment des autres locataires de l’immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 6], dont il est le superviseur

M. [B] fait valoir :

– qu’il n’attribue pas les box mais fait une proposition à la chargée de clientèle du service de gestion locative, qui les attribuent en établissant les contrats, et qu’il prend rendez-vous avec les locataires pour établir l’état des lieux ;

– qu’il lui a été demandé de proposer deux box disponibles en vue de leur attribution à des locataires, qu’il a proposé les box n°13 et n° 14, qu’il a contacté les locataires concernés et pris rendez-vous avec eux pour un état des lieux, qu’entre-temps le président de l’amicale des locataires les a incités à refuser les box proposés, qu’il n’a pour sa part jamais été informé des raisons de leur refus et que s’il lui avait été demandé de leur proposer le box n°6, ce qui n’a à aucun moment été le cas, il l’aurait fait ; que s’il garait de temps en temps son véhicule dans ce box vacant, ce qui constitue une pratique très fréquente parmi les gardiens de résidences, il ne s’est en aucun cas attribué ce box et n’a jamais refusé de le proposer à des locataires ;

– qu’il a proposé à M. [J], le box n°13, parce qu’il était commode pour lui, puisqu’il était situé à proximité du box n°12 dont celui-ci était déjà locataire et qu’il a proposé le box n°14 à

Mme [L] sans savoir que l’entrée de son immeuble était située à proximité des box n°4 et 6 ; qu’il n’a pas refusé de lui attribuer un autre box mais lui a simplement indiqué qu’elle devait contacter la gestion locative pour que le contrat soit modifié ;

– qu’il ne disposait pas des clés du box n°4, qui étaient détenues par M. [D], inspecteur technique ;

La société Pierres et Lumières produit :

– une attestation de M. [C], président de l’association des locataires [Localité 6] 2, qui, après avoir indiqué que M. [B] utilise pour son véhicule personnel le box 6 et bloque pour une raison ignorée le box 4, relate que, sachant de source officielle que les box 4, 6, 13 et 14 étaient libres à la location, il s’est informé auprès de M. [B] pour que les box 4 et 6 soient attribués, pour leur facilité d’accès, à deux locataires habitant aux A1, Mme [L], qui a un bébé et une poussette et M. [J], dont la mobilité est réduite, et que M. [B] lui a répondu de manière péremptoire qu’il refusait tout échange de box et qu’il faisait ce qu’il voulait pour la gestion des box, et qui s’insurge contre le fait que ce dernier s’octroie le pouvoir sur la gestion des box ;

– une attestation de Mme [L], dont aucun élément sérieux ne permet de considérer qu’il s’agit d’une attestation de complaisance comme M. [B] l’affirme, dont il résulte qu’elle a fait une demande de box, qu’elle a demandé à M. [C] quels box étaient libres, que celui-ci, qui avait des informations de la société Pierres et Lumières, lui a répondu les box 4, 6, 13 et 14, que dans ces conditions, elle voulait, pour des raisons pratiques, ayant un bébé et une poussette, le box 4 ou le box 6, qu’elle a rappelé M. [B] pour savoir quel box il comptait lui attribuer, qu’il lui a demandé si elle avait un choix, qu’elle lui a répondu le box 4 ou le box 6, qu’il lui a dit que ce ne serait pas possible, que ce serait le box 13 ou 14, qu’elle lui a fait part de ce que ces derniers étaient trop loins pour elle au quotidien et qu’il lui a répondu qu’il dirait à la direction qu’elle avait refusé ;

– un mail de M. [J] à M. [H] du 2 juillet 2019 lui demandant de réétudier l’attribution du box 13, en indiquant que ce box, que M. [B] lui a attribué, se trouve loin de son domicile, et que, pour des raisons de santé, il souhaite pouvoir bénéficier du box 4 ou du box 6 qui sont libres, qui lui permettraient de limiter et de faciliter ses déplacements ;

– un mail de M. [H] du 5 juillet 2019 rapportant :

*que M. [C] l’a informé le 13 juin 2019 qu’il avait prévenu M. [B] que les box 13 et 14 attribués à Mme [L] et à M. [J] ne leur convenaient pas et qu’ils souhaitaient louer les box 4 et 6 et que celui-ci avait refusé de modifier la demande d’attribution des box et qu’il utilisait les box 4 et 6 pour lui-même et d’autres personnes, ce qui pourrait être la raison de son refus ;

*qu’il s’est rendu à deux reprises les 25 juin et 4 juillet à la loge de M. [B] à [Localité 10] pour y prendre les clés des box vacants, qu’à chaque fois il manquait la clé du box 4 et que dans le box 6, se trouvait un véhicule BMW immatriculé [Localité 7] ;

et comportant deux photographies du véhicule vu à l’intérieur du box.

M. [B] produit :

– le mail qui lui a été adressée par la chargée de clientèle le 13 juin 2019 à 11h39, qui l’informe qu’elle a reçu deux demandes de location de box transmises par M. [C], que les box disponibles sont les 4, 6, 13 et 14 et lui demande lequel attribuer à chacun et sa réponse du 13 juin 2019 à 11h58 : ‘Tu peux attribuer les box 13 et 14 indifféremment’;

– le mail qu’il a adressé à la chargée de clientèle le 28 juin 2019 pour lui demander les numéros de téléphone des locataires [L] et [J] ;

-le mail qu’il a adressé à celle-ci le 1er juillet 2019 : ‘Tu m’as transmis deux contrats de box pour 2 locataires ([J] et [L]) du [Adresse 4]. Je les ai appelés pour prendre rdv. Les 2 locataires estiment que les box qui leur sont attribués sont très éloignés de leur domicile. Donc impossible à louer. En conclusion, ils ont refusé le rdv et m’ont dit qu’ils n’en voulaient pas. Je te renvoie lesdits contrats dès que possible.’

Il n’est pas établi que M. [B] a fait un usage personnel du box 4 non loué ou ait personnellement autorisé un tiers à l’utiliser.

Il est établi en revanche que M. [B] utilisait à titre personnel le box 6 non loué.

S’il est toléré des membres du personnel qu’ils utilisent pour un usage personnel les box non loués, il n’en demeure pas moins qu’ils ne peuvent, pour préserver cet avantage, faire obstacle de quelque manière que ce soit à leur location.

L’absence de transmission par M. [B] à son employeur des souhaits de Mme [L] et de M. [J] de louer les box 4 ou 6 caractérise une réticence fautive.

Toutefois, la société Pierres et Lumières n’explique pas pourquoi, alors qu’elle aurait été avisée dès le 13 juin 2019 par M. [C] qu’il avait prévenu M. [B] que les box 13 et 14 attribués à Mme [L] et à M. [J] ne leur convenaient pas et qu’ils souhaitaient louer les box 4 et 6 mais que celui-ci refusait de modifier la demande d’attribution des box et que la raison de son refus pourrait être qu’il utilise les box 4 et 6 pour lui-même et d’autres personnes, elle n’est nullement intervenue pour donner des instructions à M. [B] pour qu’il soit fait droit aux demandes des locataires et a choisi d’effectuer des vérifications concernant l’occupation du box 6 à l’insu du salarié plutôt que d’effectuer loyalement cette vérification en sa présence et de recueillir ses explications, avant d’engager la procédure de licenciement.

Compte-tenu de l’absence de tout aucun antécédent disciplinaire de M. [B], dont la synthèse de l’entretien professionnel pour 2017 montre qu’il exerçait ses fonctions avec professionnalisme et à la satisfaction de son employeur, la faute ci-dessus établie commise par le salarié, si elle pouvait justifier un avertissement, voire une mise à pied disciplinaire, ne constitue pas un motif sérieux de licenciement.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit le licenciement de M. [B] dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, M. [B], qui comptait trois années complètes d’ancienneté à la date de son licenciement, peut prétendre à une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre le montant minimal de trois mois de salaire brut et le montant maximal de quatre mois de salaire brut.

Il résulte des bulletins de paie de M. [B] qu’il percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut de 2 320,65 euros, une prime d’ancienneté d’un montant mensuel brut de 27,85 euros et une gratification de fin d’année égale à un mois de salaire.

En raison de l’âge du salarié au moment de son licenciement, 50 ans, de son aptitude à retrouver un emploi et de l’absence de justificatif produit sur sa situation depuis son licenciement, c’est par une juste appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont alloué à M. [B], en réparation du préjudice matériel et moral qu’il a subi du fait de la perte injustifiée de son emploi, la somme de 9 280 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral

A l’appui de sa demande en paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts distincts, M. [B] soutient que son licenciement a été prononcé de manière brutale et vexatoire, ce qui lui a causé un préjudice moral. Il fait valoir :

– que son licenciement est intervenu sans aucun avertissement, sanction disciplinaire ou mise en demeure préalable sur la base de faits non fondés, imprécis et mensongers; que cette mesure prise hâtivement et principalement sur la base de rumeurs et de racontars, viole l’obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail ;

– que ce licenciement a remis en cause de manière publique son professionnalisme et son intégrité sans aucun fondement, ce qui l’a fortement affecté ;

– que la société Pierres et Lumières l’a dispensé d’exécuter son préavis, allant jusqu’à lui refuser l’accès à son bureau et à son ordinateur, alors que l’exécution du préavis, qui n’était que de deux mois, lui aurait permis de finir son travail dans des conditions plus dignes et sereines ;

– qu’il s’est retrouvé sans emploi à compter du mois de septembre et en grave découvert bancaire ; – qu’il a été contraint de déménager, quittant son domicile du [Adresse 4] à [Localité 6] pour s’installer à [Localité 9], en raison du mal-être qui a suivi son licenciement, pour ne plus avoir à faire face aux personnes qui ne faisaient pas preuve de bienveillance envers lui.

La perte de son emploi, son découvert bancaire au demeurant non justifié, et son déménagement dont il ne précise pas la date et dont la cause alléguée n’est pas établie, ne caractérisent pas l’existence d’un préjudice moral de M. [B] distinct de celui ci-dessus réparé par l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Si tout licenciement pour motif disciplinaire est de nature à jeter le discrédit sur le comportement professionnel d’un salarié, il n’est pas établi en l’espèce que les motifs du licenciement de M. [B] ont été rendus publics.

Si le licenciement de M. [B] était injustifié comme constituant une sanction disproportionnée, il n’était pas fondé comme il le prétend sur des faits imprécis et mensongers et n’a pas été décidé uniquement sur la base de rumeurs et de racontars.

Le fait que son licenciement ait été prononcé sans qu’il ait fait l’objet d’une sanction disciplinaire antérieure ou d’une mise en demeure préalable et le fait qu’il a été dispensé de préavis, ne caractérisent pas des circonstances brutales et vexatoires de licenciement. Si M. [B] allègue que la société Pierres et Lumières lui a refusé l’accès à son bureau et à son ordinateur, il n’en justifie pas.

En l’absence de faute de M. [B] ayant causé au salarié un préjudice moral distinct de celui résultant de la perte injustifiée de son emploi, ci-dessus réparé par l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Sur la remise des documents sociaux

En l’absence de dispositions du jugement de nature à modifier les informations figurant sur les documents sociaux délivrés au salarié, il convient d’infirmer la décision du conseil de prud’hommes en ce qu’elle a condamné la société Pierres et Lumières à remettre à M. [B] les bulletins de salaire conformes au jugement.

Sur le remboursement des indemnités de chômage à Pôle emploi

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société Pierres et Lumières à Pôle emploi, partie au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’il a versées le cas échéant à M. [B] à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de trois mois d’indemnités.

Sur les dépens et l’indemnité de procédure

La société Pierres et Lumières, qui succombe partiellement, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Il convient de la condamner, en application de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à M. [B] la somme de 1 000 euros pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en sus de la somme de 2 000 euros qu’elle a été condamnée à payer à celui-ci par le conseil de prud’hommes pour les frais irrépétibles exposés en première instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt en date du 17 mars 2021 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Déboute M. [E] [B] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

Dit n’y avoir lieu de condamner la société Pierres et Lumières à remettre à M. [E] [B] des bulletins de salaire conformes au jugement ;

Ordonne le remboursement par la société Pierres et Lumières à Pôle emploi, partie au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’il a versées le cas échéant à M. [E] [B] à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de trois mois d’indemnités ;

Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Déboute la société Pierres et Lumières de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;

Condamne la société Pierres et Lumières à payer à M. [E] [B] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;

Condamne la société Pierres et Lumières aux dépens d’appel et autorise Maître Patricia Rotkopf, avocat au barreau des Hauts de Seine, à recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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