Licenciement disciplinaire : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/01495

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Licenciement disciplinaire : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/01495

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

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ARRÊT DU : 25 JANVIER 2023

PRUD’HOMMES

N° RG 22/01495 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MT2N

S.A.R.L. SOLAR CLIM SYSTEM

c/

Monsieur [V] [H]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 mars 2022 (R.G. n°F 20/00300) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Industrie, suivant déclaration d’appel du 25 mars 2022,

APPELANTE :

ED Concept (anciennement SARL Solar Clim System), agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

N° SIRET : 491 636 742

représentée et assistée de Me Alexis GARAT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [V] [H]

né le 23 Décembre 1981 à [Localité 3] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Magali BISIAU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 décembre 2022 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bénédicte Lamarque, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [V] [H], né en 1981, a été engagé en qualité de VRP exclusif par la SARL Solar Clim system, sans contrat de travail écrit, à compter du 10 mars 2013. Il a, par la suite, occupé les fonctions de VRP multicarte.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des VRP.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [H] s’élevait à la somme de 4.244,18 euros.

Par lettre datée du 28 janvier 2019, M. [H] a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable fixé au 8 février 2019. Il ne s’est pas présenté à l’entretien.

M. [H] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 7 mars 2019.

A la date du licenciement, M. [H] avait une ancienneté de cinq ans et 8 mois – déduction faite des arrêts maladie- et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Contestant à titre principal la validité et à titre subsidiaire la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des dommages et intérêts pour non préservation de la santé et la sécurité et pour exécution déloyale ainsi qu’un rappel de salaire, M. [H] a saisi le 26 février 2020 le conseil de prud’hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 9 mars 2022, a :

– condamné la société à payer à M. [H] les sommes suivantes :

* 2.122,09 euros bruts à titre de rappel de salaire des jours de mise à pied à titre conservatoire, outre la somme de 212,21 euros bruts à titre d’indemnité de congés payés afférente,

* 12.732,54 euros bruts à titre d’indemnité de préavis, outre la somme de 1.273,25 euros bruts à titre d’indemnité de congés payés afférente,

* 5.747,33 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

* 21.221 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

* 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non préservation de la santé et de la sécurité du salarié,

*1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 900 euros à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné la remise de l’attestation Pôle Emploi rectifiée, conforme au jugement à intervenir,

– débouté le demandeur et le défendeur du surplus de leurs demandes,

– condamné la société aux dépens d’instance et frais éventuels d’exécution,

– dit que sont de droit exécutoire à titre provisoire les jugements qui ordonnent le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2ème alinéa de l’art R1454-14 du code du travail, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.

Par déclaration du 25 mars 2022, la SARL Solar Clim system a relevé appel de cette décision, notifiée le 10 mars 2022.

Par conclusions du 7 juin 2022, M. [H] a saisi le conseiller de la mise en état d’une demande de radiation du rôle de l’affaire pour défaut d’exécution des condamnations assorties de l’exécution provisoire prononcées par le jugement précité.

Par ordonnance du 5 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a débouté M. [H] de sa demande et l’a condamné aux dépens de l’incident.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 décembre 2022, la SARL ED Concept, venant aux droits de la SARL Solar Clim system demande à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, de débouter M. [H] de l’ensemble de ses prétentions comme étant parfaitement infondées et de le condamner à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 10 novembre 2022, M. [H] demande à la cour de’:

– confirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre du complément de salaire et congés payés pour l’arrêt maladie allant du 8 octobre 2018 au 8 janvier 2019 et de sa demande de salaire et congés payés pour la période allant du 9 au 28 janvier 2019,

Statuer à nouveau sur ces points,

– condamner la société à lui verser les sommes suivantes :

* 2.122,09 euros au titre du rappel de salaire du 9 au 28 janvier 2019, outre la somme de 212,21 euros au titre des congés payés y afférents,

* 7.920,77 euros au titre du complément de salaire pendant l’arrêt maladie allant du 8 octobre 2018 au 8 janvier 2019, outre la somme de 792,08 euros correspondant aux congés payés y afférents,

* 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

– débouter la société de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2022, révoquée le 13 décembre 2022, jour de l’audience, à la demande des parties pour régularisation des écritures portant la nouvelle dénomination de la société. L’ordonnance de clôture a été fixée à nouveau le 13 décembre avant la plaidoirie des parties.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I – Sur la procédure de licenciement

M. [H] soutient que l’employeur a dépassé le délai d’un mois entre le jour de l’entretien préalable et la notification de son licenciement, privant ainsi le licenciement de cause réelle et sérieuse.

La société affirme avoir respecté le délai, 31 jours s’étant écoulés entre l’entretien préalable auquel M. [H] ne s’est pas présenté et la notification de la lettre de licenciement, le 30ème jour étant un dimanche.

Aux termes de l’article L. 1332-2 du code du travail, le délai maximal d’un mois doit être respecté entre le jour de l’entretien préalable et la notification du licenciement disciplinaire. La méconnaissance de ce délai prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

L’article R. 1332-3 du même code précise que “le délai d’un mois prévu à l’article L.1332-2 expire à vingt-quatre heures le jour du mois suivant qui porte le même quantième que le jour fixé pour l’entretien.

A défaut d’un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois suivant à vingt-quatre heures.

Lorsque le dernier jour de ce délai est un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.”

En l’espèce, l’entretien préalable a été fixé à la date du vendredi 8 février 2019. Il n’est pas contesté que M. [H] ne s’est pas présenté ni n’a demandé le report de cet entretien. Le délai d’un mois expirait le vendredi 8 mars 2019 à minuit. La lettre de licenciement datée du 7 mars, a été postée le lundi 11 mars et reçue le mardi 13 mars par M. [H].

En l’absence de respect du délai maximal d’un mois prévu à l’article L. 1332-2 du code du travail, entre la date de l’entretien préalable et la date d’envoi de la lettre de licenciement, le licenciement de M. [H] est dépourvu de cause réelle et sérieuse sans qu’il soit nécessaire d’examiner les griefs reprochés au soutien du licenciement pour faute grave.

II – Sur les demandes financières

M. [H] sollicite la confirmation des sommes qui lui ont été allouées par le conseil des prud’hommes en première instance.

La société soutient ne pas avoir les moyens de verser les condamnations prononcées.

M. [H] a une ancienneté de 5 ans et 8 mois. Son salaire de référence était de

4. 244,18 euros.

Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il convient de confirmer la décision des premiers juges en ce qu’ils ont condamné la société à verser à M. [H]

– 2.122,09 euros au titre de la mise à pied conservatoire qui lui a été notifiée le 28 janvier 2019, conformément aux dispositions contractuelles,

– 212,21 euros au titre des congés payés afférents,

– 12.732,54 euros au titre de l’indemnité de préavis en application de la convention collective,

– 1. 273,25 euros au titre des congés payés y afférents,

– 5.747,33 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise de 58 salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [H], de son âge de 38 ans à la date du licenciement, de son ancienneté de 5 ans et 8 mois au sein de la société, de sa capacité à trouver un nouvel emploi d’un revenu identique 18 mois après son licenciement, tel que cela résulte des pièces et des explications fournies, c’est à juste titre que les premiers juges ont évalué à 21. 221 euros la somme de nature à assurer la réparation du préjudice subi par M. [H] à la suite de son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera confirmé du chef des demandes subséquentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. [H] sollicite la somme de 7.920,77 euros outre la somme de 792,08 euros au titre du maintien du salaire qui aurait dû être le sien pendant l’arrêt maladie du 8 octobre 2018 au 9 janvier 2019, déduction faite des indemnités journalières de la sécurité sociale.

M. [H] justifie de son arrêt maladie et de la prise en charge par l’assurance maladie du 11 octobre 2018 au 9 janvier 2019, déduction faite des 3 jours de carence à hauteur de 3.417,30 euros. En application des dispositions contractuelles renvoyant aux articles 8 et 10-1 de la convention collective, l’employeur devait prendre en charge à partir du 11ème jour d’arrêt maladie 1/60ème du salaire de référence pendant 45 jours puis 1/120ème de ce même salaire de référence pendant 15 jours.

Déduction faite des indemnités journalières, et de la période de carence de 10 jours, la société sera condamnée à verser à M. [H] la somme de 1.660,58 euros au titre du maintien de salaire du 8 octobre 2018 au 9 janvier 2019 et 166,05 euros au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

M. [H] sollicite enfin le versement du salaire sur la période du 9 janvier 2019 et la date de convocation à entretien préalable.

M. [H] ne dit pas s’être présenté sur son lieu de travail à compter de cette date et sa seule interrogation de l’ employeur est inopérante.

Il sera dès lors débouté de cette demande.

Le jugement sera réformé de ce chef.

III – Sur les demandes en dommages et intérêts

M. [H] sollicite la somme de 2.000 euros en réparation du préjudice subi du fait du manquement de la société à son obligation de préservation de la santé et la sécurité et en l’espèce en n’ayant pas organiser de visite médicale au moment de son embauche ni suite à son arrêt de travail et en lui ayant refusé de prendre ses congés payés.

La société ne conclut pas sur ce point.

M. [H] ayant été en arrêt maladie 186 jours, il appartenait à l’employeur en application de l’article R. 4626-34 du code du travail de lui faire bénéficier d’une visite de reprise, au plus tard dans les huit jours de la reprise. L’employeur ayant manqué à son obligation de préservation de la santé et de la sécurité, la décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’elle a retenu la faute de l’employeur mais infirmé sur le montant alloué qui sera fixé à 500 euros en réparation du préjudice subi du fait de l’impossibilité de reprendre le travail après son arrêt maladie.

M. [H] sollicite la somme de 1.500 euros au titre du préjudice financier et moral du fait de l’exécution déloyale du contrat de travail, n’ayant pas pu prendre ses congés et en n’ayant perçu aucun maintien de salaire pendant son arrêt maladie.

Ces préjudices ayant été indemnisés par l’allocation d’un rappel de salaire et des congés payés y afférents, le premier jugement sera infirmé e ce chef.

IV – Sur les autres demandes

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a ordonné la remise d’une attestation Pôle Emploi rectifiée, conformément à la présente décision, comprenant également rectification de la date d’entrée au sein de la SARL Solar Clim System aux droits de laquelle vient la SARL ED Concept.

La SARL ED Concept partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement à M. [H] de la somme complémentaire de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré sauf :

– en ce qu’il a condamné la société au paiement d’une somme de 2 122,09 euros et congés payés afférents au titre du maintien de salaire pendant l’arrêt maladie

– en ce qu’il a condamné la société au paiement d’une somme de 1 500 euros pour exécution déloyale du contrat de travail ,

– en ce qu’il a condamné la société au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’ obligation de sécurité,

Statuant à nouveau sur ces chefs,

Condamne la SARL ED Concept à verser à M. [H] les sommes de :

– 1.660,58 euros au titre du maintien de salaire pendant l’arrêt maladie à partir du 17 octobre 2018 et pour une période de 60 jours,

– 166,05 euros au titre des congé payés y afférents,

– 500 euros au titre du manquement à l’obligation préserver sa santé et sa sécurité,

Déboute M. [H] de ses demandes au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail et du salaire pour la période du 9 au 28 janvier 2019,

Condamne la SARL ED Concept à verser à M. [H] la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles complémentaires en cause d’appel,

Condamne la SARL ED Concept aux dépens.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard

 


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